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Décisions

CA Bordeaux, 1re ch. civ., 18 novembre 2024, n° 22/00651

BORDEAUX

Arrêt

Autre

CA Bordeaux n° 22/00651

18 novembre 2024

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

--------------------------

ARRÊT DU : 18 NOVEMBRE 2024

N° RG 22/00651 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MRC2

[V] [R]

c/

Société LA SOCIETE DE CHASSE LA SAINT-HUBERT DE [Localité 6]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 25 janvier 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BERGERAC (chambre : RG : 20/00844) suivant déclaration d'appel du 08 février 2022

APPELANT :

[V] [R]

né le [Date naissance 1] 1988 à [Localité 3]

demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Gérard DANGLADE, avocat au barreau de BORDEAUX, substituée par Me Nathalie REGIS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SOCIETE DE CHASSE LA SAINT-HUBERT DE [Localité 6] agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis demeurant [Adresse 4]

Représentée par Me Stéphanie BOURDEIX de la SCP CABINET MALEVILLE, avocat au barreau de PERIGUEUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 octobre 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Emmanuel BREARD, conseiller, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Paule POIREL, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

Greffier lors des débats : Evelyne GOMBAUD

Greffier lors du prononcé : Vincent BRUGERE

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

A la suite de la délivrance d'une carte d'adhésion le 22 novembre 2019, M. [V] [R] a été sociétaire de l'association La Saint-Hubert, société communale de chasse de [Localité 6] pour l'année 2019 / 2020.

Par jugement du 20 décembre 2019, le tribunal d'instance de Bergerac a, notamment, constaté que l'association La Saint-Hubert acceptait de remettre leurs cartes d'adhérents à M. [V] [R], à M. [O] [R] et à M. [D] [R] et que ces derniers se désistaient de ces demandes présentées à son égard.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 juin 2020 et 29 juin 2020, M. [V] [R] a présenté (en vain) à l'association La Saint-Hubert une demande de délivrance d'un droit de chasse pour l'année 2020 / 2021 et d'un collier de chasse à l'affût du sanglier.

Par acte d'huissier du 28 septembre 2021, M. [V] [R] a fait assigner l'association La Saint-Hubert devant le tribunal judiciaire de Bergerac aux fins, notamment, de voir dissoudre l'association.

Par jugement contradictoire du 25 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Bergerac a :

- débouté M. [R] de l'ensemble de ses demandes présentées à l'encontre de l'association La Saint-Hubert ;

- condamné M. [R] à payer à l'association La Saint-Hubert la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure, civile ainsi qu'aux entiers dépens (dont distraction au profit de l'avocat constitué) ;

- débouté M. [R] de ses demandes présentées à l'encontre de l'association La Saint-Hubert sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens.

M. [R] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 8 février 2022, en ce qu'il a :

- débouté M. [R] de l'ensemble de ses demandes présentées à l'encontre de l'association La Saint-Hubert ;

- condamné M. [R] à payer à l'association La Saint-Hubert la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure, civile ainsi qu'aux entiers dépens (dont distraction au profit de l'avocat constitué) ;

- débouté M. [R] de ses demandes présentées à l'encontre de l'association La Saint-Hubert sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens.

Par dernières conclusions déposées le 28 août 2023, M. [R] demande à la cour de :

- déclarer M. [R] recevable et bien fondé en ses demandes ;

Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Périgueux du 25 janvier 2022 ;

- prononcer la dissolution judiciaire de l'association La Saint-Hubert, avec toutes conséquences de droit, et notamment la fermeture des locaux et l'interdiction de toute réunion des membres de l'association ;

- condamner l'association La Saint-Hubert à payer à M. [R] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par dernières conclusions déposées le 3 mai 2022, l'association La Saint-Hubert demande à la cour de :

- juger recevable et mal fondé l'appel formé par M. [R].

En conséquence :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Y ajoutant :

- condamner M. [R] à payer à l'association La Saint-Hubert la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [R] aux entiers dépens en ce compris les frais d'exécution.

Le 29 septembre 2023, les parties ont été enjointes de procéder à une médiation. Le 9 janvier 2024, le greffe a été informé de l'échec de la médiation.

L'affaire a été fixée à l'audience rapporteur du 7 octobre 2024.

L'instruction a été clôturée par ordonnance du 23 septembre 2024.

En cours de délibéré la cour a sollicité les observations des parties sur la qualité à agir de M. [V] [R] en dissolution de l'association La Saint Hubert en raison de la mésentente entre ses membres, alors qu'il ne sollicite pas sa réintégration en qualité de membre de l'association, ce par le biais d'une note en délibéré à intervenir au plus tard 30 octobre 2024.

Vu la note en délibéré de M. [V] [R] en date du 28 octobre 2024, faisant valoir que la qualité de membre de l'association ne lui a jamais été contestée mais seulement la délivrance de sa carte et qu'il a toujours fait partie de l'association en vertu de l'article 5 des statuts et qu'en tout état de cause il suffit qu'il ait comme en l'espèce un intérêt direct et personnel à agir pour pouvoir agir en dissolution d'une association.

Vu la note en délibéré de l'association La Saint-Hubert faisant au contraire valoir que

pour être membre de l'association il faut y avoir pris sa carte de chasse et qu'en refusant à M. [R] la délivrance de sa carte de chasse, la société de chasse la Saint Hubert de [Localité 6] peut refuser l'adhésion à un membre qui ne répondrait pas aux critères fixés par les statuts.

MOTIFS DE LA DÉCISION:

M. [R] agit en dissolution de l'association La Saint Hubert, société communale de chasse de [Localité 6], sur le fondement de la mésentente grave entre associés de l'article 1844-7-5° du code civil ce qui suppose qu'il soit membre de l'association.

Or, il résulte de l'article 3 des statuts de l'association que M. [R] a effectivement la qualité de membre et plus précisément de 'Membre actif ou adhérent' dès lors qu'il en avait manifesté la volonté, qu'il était à jour de ses cotisations et qu'il n'avait pas fait l'objet d'une procédure de radiation selon les formes prévues à l'article 5.

C'est également à bon droit qu'il observe que le fait que lui ait été refusée une carte de chasse, ce qui n'affecte conformément à l'article 6 des statuts que son droit de chasse mais non sa qualité de sociétaire, ne lui a pas fait perdre le statut d'associé.

Il a donc qualité à solliciter la dissolution de l'association pour juste motif tenant à la mésentente entre ses membres de sorte qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'irrecevabilité de ses demandes.

Sur le fond :

Il sera relevé que si, à titre liminaire, M. [R] déplore le manquement de l'association à ses obligations pour lui refuser la délivrance d'une carte de chasse ou d'un collier de chasse à l'affût du sanglier, il ne formule pourtant aucune prétention en lien avec ces griefs et que ceux ci ne sauraient justifier en eux-mêmes la réformation du jugement qui l'a débouté de ses demandes en dissolution de l'association La Saint-Hubert pour mésentente entre les associés et violation des règles relatives à la protection du gibier.

En effet, sur le premier fondement, M. [R] ne cite comme éléments attestant la grave mésentente entre les membres de l'association que ses pièces n° 16 et 24. La première est constituée non par une attestation mais par un courrier du 25 octobre 2019 d'un certain [S] [R], donnant sa démission de membre du bureau 'en raison de non concertation de certains membres du bureau qui ne pensent qu'à leur intérêt.....' et la seconde, par un compte rendu d'assemblée générale de la société de chasse La Saint Hubert remontant au 13 août 2004, faisant état essentiellement de difficultés particulières rencontrées avec M. [S] [R], la mise au vote de son exclusion de l'association ayant amené à un vote favorable à celle-ci.

Outre que ces deux seuls éléments concernant la même personne et espacés de 15 ans sont insuffisants à caractériser une mésentente grave entre les associés, ils ne sont a fortiori pas suffisants à caractériser une paralysie du fonctionnement de la société qui en résulterait et qui n'est pas même alléguée par M. [R].

M. [R] demande encore la dissolution de l'association pour violation des règles relatives à la prolifération du gibier. Pour ce faire, il cite en tout et pour tout un événement isolé imputable au comportement d'un chasseur dénoncé par Mme [N] et la lettre collective qu'ont adressé dans la suite de cet événement, ainsi que l'indique lui-même M. [R], le 31 janvier 2021, 45 habitants de la commune de [Localité 6], pour se plaindre de manière générale et aucunement circonstanciée de 'certains comportements de chasseurs exerçant leur activité de manière parfois fort dangereuse pour les riverains dans les différents lieux de la commune de [Localité 6] (battues et casses à proximité immédiate des maisons - sources de dangers et nuisances sonores - stationnement de véhicules à n'importe quels endroits ...;)'

La lettre poursuit toujours sans plus de précisions notamment de dates, de lieux ou de personnes, que 'différents services départementaux ont été alertés ( notamment l'ONCF à pusieurs reprises) sans résultats probants.

Aujourd'hui un certains nombre d'habitants expriment leur lassitude.....'

Ces courriers, outre l'événement isolé décrit par Mme [N] à l'occasion duquel un chevreuil a été abattu dans le jardin d'un riverain, qui témoignent surtout de l'exaspération des habitants quant à l'activité de 'certains chasseurs' et à certaines incivilités, dont il n'est d'ailleurs pas établi qu'elles aient perduré, sont insuffisants à établir que l'association intimée viole de manière caractérisée les règles relatives à la protection du gibier.

Le courrier que M. [R] a lui même adressé le 25 septembre 2022 à l'office français de la biodiversité pour se plaindre qu'il subissait des actions de chasse sur son territoire de la part des chasseurs de [Localité 5] de manière récurrente ou le dépôt de plainte qu'il a déposé, fut-ce en qualité de président de la société de chasse, ne saurait davantage constituer une preuve.

Le jugement qui a débouté M. [R] de ses demandes et l'a condamné au paiement d'une somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles de l'association La Saint-Hubert est en conséquence confirmé et M. [V] [R] condamné aux dépens du présent recours ainsi qu'à payer à l'association La Saint Hubert une somme de 3 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour

Confirme le jugement en toutes ses dispositions

Y ajoutant

Condamne M. [V] [R] à payer à la société de chasse La Saint Hubert de [Localité 6] une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne M. [V] [R] aux dépens du présent recours.

Le présent arrêt a été signé par Paule POIREL, présidente, et par Vincent BRUGERE greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,