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Décisions

CA Paris, Pôle 4 ch. 6, 15 novembre 2024, n° 23/18105

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Abeille Iard & Santé (SA)

Défendeur :

Hôtel des Ducs de Bourgogne (ASL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Delacourt

Conseillers :

Mme Tardy, Mme Szlamovicz

Avocats :

Me Ahmed-Ammar, Me Morelon, Me Vainqueur

Paris, pôle 4 ch. 6, du 18 juill. 2023, …

18 juillet 2023

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

L'association libre syndicale l'hôtel des ducs de Bourgogne (l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne) regroupe les copropriétaires de l'immeuble du même nom situé au [Adresse 4]) composé de vingt-trois logements et qui a fait l'objet d'une réhabilitation complète en 2011.

L'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne a conclu avec la société Fiscalis EM coordination le 1er février 2011, un contrat d'assistant technique au maître d'ouvrage.

Sont notamment intervenus dans les travaux de construction :

- Mme [L] en qualité d'architecte chargée d'une mission de maîtrise d''uvre, assurée auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF) ;

- la société Union travaux Aquitaine (UTA) en qualité d'entreprise générale, assurée auprès de la société Axa assurances IARD mutuelle ;

- la société Entreprise Laurent Conchon chargée du lot plâtrerie-isolation, assurée auprès de la société Aviva assurances, nouvellement dénommée la société Abeille IARD et santé,

- la société Gallois en qualité de sous-traitant de la société UTA pour la réalisation des lots électricité, plomberie, sanitaires, chauffage et ventilation ;

- la société BET JM Grimoin en charge de la définition énergétique du projet ;

- la société Thermi conseil chargée des études techniques en co-traitance avec le BET JM Grimoin ;

- la société Socotec en qualité de contrôleur technique ;

- M. [C] pour l'ordonnancement, le pilotage et la coordination (OPC).

Par acte en date du 4 octobre 2011, M. et Mme [O] ont acquis un appartement en duplex au rez-de-chaussée (lot n°2). Ils ont déploré l'absence de livraison de leur bien outre plusieurs désordres.

L'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne a également déploré des désordres affectant les parties communes de l'immeuble et l'absence de réception des parties communes.

A la demande de M. et Mme [O] et de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne, une expertise judiciaire a été ordonnée par ordonnance du 9 février 2016 rendue par le juge du référé du tribunal de grande instance de Nevers.

L'expert judiciaire, M. [N], a déposé son rapport le 21 octobre 2019.

Par actes délivrés en février et mars 2021, l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne a fait assigner la société Fiscalis EM coordination-Cogem et les intervenants à la construction avec leurs assureurs aux fins d'obtenir, principalement sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil et subsidiairement sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil, leur condamnation à lui payer le coût de réparation des désordres constatés par l'expert judiciaire.

Par ordonnance du 18 juillet 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a statué en ces termes :

Rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en responsabilité civile contractuelle de droit commun soulevée par la société Abeille IARD et santé à l'encontre de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne,

Déclare recevables les demandes formées par l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne à l'égard de la société Abeille IARD et santé en sa qualité d'assureur de la société entreprise Laurent Conchon,

Condamne la société Abeille IARD et santé à payer à l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne une provision ad litem de 3 000 euros,

Déboute l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne du surplus de ses demandes de provision,

Condamne la société Abeille IARD et santé à payer à l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonne la jonction de l'instance enregistrée sous le numéro RG 23/02782,

Réserve les dépens en fin d'instance,

Renvoie l'affaire à la mise en état du 4 septembre 2023 à 13h40 pour clôture, aucune nouvelle conclusion n'étant admise, l'ensemble des parties ayant toutes conclu au fond et la jonction de l'instance RG 23/02782 ordonnée n'ayant aucune incidence sur le cours de l'instruction puisqu'elle concerne les mêmes parties que la présente instance principale.

Par déclaration en date du 9 novembre 2023, la société Abeille IARD et santé a interjeté appel de l'ordonnance, intimant devant la cour l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 10 janvier 2024, la société Abeille IARD et santé demande à la cour de :

Juger la société Abeille IARD et santé (anciennement dénommée Aviva) recevable en son action et la dire bien fondée en ses demandes ;

Réformer l'ordonnance rendue le 18 juillet 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris sous le RG 21/04229 ;

Statuant à nouveau,

Constater l'absence de réception,

En conséquence,

Juger que seules les dispositions de droit commun sont applicables au litige, à l'exclusion des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil,

Constater que le premier acte interruptif de prescription pris par l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne contre Abeille IARD et santé date de l'assignation aux fins de référé provision signifiée le 11 juin 2020, soit plus de cinq ans après la connaissance des faits ;

Constater que les premières demandes aux fins de condamnation de la société Abeille IARD et santé ont été formées plus de cinq ans après la connaissance des faits ;

En conséquence,

Juger l'action de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne irrecevable en raison de la prescription de l'action sur le fondement de la responsabilité civile de droit commun,

Juger que la provision ad litem allouée à l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne suivant ordonnance critiquée est sérieusement contestable en ce qu'elle est dirigée uniquement contre Abeille IARD et santé, au regard des non garanties opposées par Abeille IARD et santé, et de la fin de la procédure au fond ;

En tout état de cause,

Rejeter les demandes reconventionnelles de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne comme étant dilatoires, déloyales et en tout état de cause sérieusement contestables ;

Rejeter toutes les demandes, fins et conclusions formées par l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne en ce qu'elles sont dirigées contre la société Abeille IARD et santé (anciennement dénommée Aviva), ès qualités d'assureur de la Société Conchon et assureur dommage ouvrage (DO), constructeur non réalisateur (CNR), et de responsabilité civile (RC) de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne.

Condamner l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne à payer à la société Abeille IARD et santé (anciennement dénommée Aviva), la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 8 février 2024, l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne demande à la cour de :

Déclarer l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Ce faisant,

Sur l'appel principal :

Confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris en date du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a :

Rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en responsabilité civile contractuelle de droit commun soulevée par la société Abeille IARD et santé à l'encontre de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne,

Déclaré recevables les demandes formées par l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne à l'égard de la société Abeille IARD et santé en sa qualité d'assureur de la société Entreprise Laurent Conchon

Condamné la société Abeille IARD et santé à payer à l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne une provision ad litem de 3 000 euros,

Condamné la société Abeille IARD et santé à payer à l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne une indemnité de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

En conséquence :

Déclarer irrecevable la compagnie Abeille IARD et santé (anciennement Aviva assurances) ès qualités d'assureur de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne, en tant qu'assurance TRC, RC, DO et RCD-CNR, selon police n°76228908, et d'assureur de l'entreprise Laurent Conchon, en sa demande d'infirmation de l'ordonnance du juge de la mise en état du 18 juillet 2023 en ce qu'elle l'a condamnée à payer la somme de 3 000 euros à titre de provision ad litem ;

Débouter la compagnie Abeille IARD et santé de sa fin de non-recevoir tirée de la prescription;

Constater l'absence de prétention de la compagnie Abeille IARD et santé tendant à l'infirmation de l'ordonnance du juge de la mise en état du 18 juillet 2023 en ce qu'elle l'a condamnée à payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et à défaut l'en débouter ;

Sur l'appel incident :

Infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris en date du 18 juillet 2023 en ce qu'elle a :

Débouté l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne du surplus de ses demandes de provision,

En conséquence, statuant à nouveau :

Condamner à titre provisionnel la compagnie Abeille IARD et santé à payer à l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne :

- 39 610,31 euros TTC (soit 33 008,59 euros HT) à titre de provision sur le coût des travaux de réparation des désordres (pièce n°12, page 41) ;

- 10 365,20 euros TTC (soit 8 637,67 euros HT) à titre de provision sur les coûts annexes liés à la conduite des travaux de réparation des désordres (maîtrise d''uvre, pilotage OPC, coordination SPS, syndic, assurance dommage-ouvrage) (pièce n°12, page 41).

En tout état de cause :

Déclarer irrecevable en ses demandes la compagnie Abeille IARD et santé (anciennement Aviva assurances) ès qualités d'assureur de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne, en tant qu'assurance RC, DO et RCD-CNR, selon police n°76228908, pour défaut d'intérêt à agir, à défaut de chefs de l'ordonnance la concernant ;

Condamner la compagnie Abeille IARD et santé (anciennement Aviva assurances) ès qualités d'assureur de l'entreprise Laurent Conchon la somme de 3 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la compagnie Abeille IARD et santé (anciennement Aviva assurances) ès qualités d'assureur RC, DO et RCD-CNR de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne selon police n°76228908 la somme de 4 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la compagnie Abeille IARD et santé (anciennement Aviva assurances) ès qualités d'assureur RC, DO et RCD-CNR, selon police n°76228908 de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne et d'assureur de l'entreprise Laurent Conchon à payer ou conserver à sa charge les entiers dépens de l'appel et de l'incident en première instance ;

Débouter la compagnie Abeille IARD et santé (anciennement Aviva assurances) ès qualités d'assureur RC, DO et RCD-CNR, selon police n°76228908 de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne et d'assureur de l'entreprise Laurent Conchon, de tous moyens et prétentions contraires aux présentes écritures et toutes demandes additionnelles qui pourraient être développées ultérieurement par tout contestant.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 4 juillet 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 12 septembre 2024, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

Sur la recevabilité des demandes de la société Abeille IARD et santé en sa qualité d'assureur RC, DO et CNR de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne

Moyens des parties

L'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne soutient que l'ordonnance du juge de la mise en état du 18 juillet 2023 n'ayant statué que sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne à l'encontre de la société Abeille IARD et santé en qualité d'assureur de la société Entreprise Laurent Conchon, la société Abeille IARD et santé, en sa qualité d'assureur DO, CNR et RC n'a pas intérêt à agir à l'encontre de cette décision.

La société Abeille IARD et santé n'a pas répondu à cette fin de non-recevoir.

Réponse de la cour

Selon l'article 546 du code de procédure civile, le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt, si elle n'y a pas renoncé.

Au cas d'espèce, la société Abeille IARD et santé ne justifie pas en sa qualité d'assureur DO, CNR et RC de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne d'un intérêt à interjeter appel à l'encontre de l'ordonnance du juge de la mise en état du 18 juillet 2023 en ce qu'il rejette la fin de non-recevoir qu'elle a soulevé uniquement en sa qualité d'assureur de la société Entreprise Laurent Conchon.

Le juge de la mise en état a cependant également condamné la société Abeille IARD et santé, sans préciser en quelle qualité, à payer à l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne une provision ad litem de 3 000 euros ainsi qu'une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conséquent la société Abeille IARD et santé, qui a été assignée au fond par l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne en sa qualité d'assureur DO, CNR et RC de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne, a intérêt à interjeter appel de la décision du juge de la mise en état la condamnant à une provision ad litem de 3 000 euros ainsi qu'une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur la recevabilité de l'appel concernant la demande de provision ad litem

Moyens des parties

L'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne soutient que les ordonnances du juge de la mise en état qui statuent sur une demande de provision ad litem sont insusceptibles de faire l'objet d'un appel immédiat.

Elle observe que l'article 795 du code de procédure civile réserve la possibilité d'un appel immédiat à des cas limitativement énumérés et notamment aux ordonnances du juge de la mise en état ayant trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier au cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable mais que l'article 789 du même code distingue cette provision de la provision ad litem.

La société Abeille IARD et santé n'a pas répondu à cette fin de non-recevoir.

Réponse de la cour

Il résulte de l'article 795 du code de procédure civile que les ordonnances du juge de la mise en état ne peuvent être frappées d'appel ou de pourvoi en cassation qu'avec le jugement statuant sur le fond, à l'exception de certaines décisions limitativement énumérées, parmi lesquelles figurent les décisions ayant trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier au cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

Cette compétence du juge de la mise en état est prévue à l'article 789 3° du code de procédure civile, qui dispose que le juge de la mise en état peut accorder une provision au créancier lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

Le même article prévoit également, au 2°, que le juge de la mise en état peut allouer une provision pour le procès. Cependant une telle décision n'est pas visée par l'article 795 du code de procédure civile parmi celles susceptibles d'être frappées d'appel indépendamment du jugement statuant sur le fond.

Au cas d'espèce, la société Abeille IARD et santé sollicite l'infirmation de la décision du juge de la mise en état en ce qu'une provision pour le procès a été allouée à l'ASL Hôtel de Bourgogne.

Cette décision du juge de la mise en état n'étant susceptible d'appel qu'avec le jugement statuant sur le fond, cette demande de la société Abeille IARD et santé sera déclarée irrecevable.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la société Abeille IARD et santé

Moyens des parties

La société Abeille IARD et santé soutient que l'ASL Hôtel de Bourgogne a connaissance des préjudices pour lesquelles elle sollicite réparation depuis a minima le 14 novembre 2014 et qu'elle ne l'a assigné en référé pour obtenir une provision devant le tribunal judiciaire de Paris que le 11 juin 2020.

Elle fait valoir que la demande d'expertise de l'ASL Hôtel de Bourgogne ne constitue pas une réclamation au fond visant la reconnaissance d'un droit et que par conséquent cette demande n'a pu interrompre la prescription à l'égard de la société Abeille IARD et santé.

Elle ajoute qu'en application de l'article 2244 du code civil, seule une citation en justice peut interrompre une prescription et non la communication de conclusions, dont il n'est pas établi qu'elles auraient été communiquées à la société Abeille IARD et santé.

L'ASL Hôtel de Bourgogne fait valoir qu'en application de l'article 2239 du code civil, la prescription est suspendue lorsque le juge fait droit à une demande d'instruction présentée avant tout procès et que le délai de prescription recommence à courir, pour une période qui ne peut être inférieure à six mois à compter du jour où la mesure a été exécutée.

Elle précise que des conclusions contenant une demande incidente peuvent interrompre une prescription et qu'en l'espèce l'ASL Hôtel de Bourgogne s'est associée lors de l'audience du 26 janvier 2016 devant le juge des référés à la demande d'expertise sollicitée par les époux [O] et a également demandé à la juridiction de compléter la mission d'expertise judiciaire pour l'étendre aux parties communes, demande à laquelle il a été fait droit.

Elle en déduit que le délai de prescription a été interrompu le 26 janvier 2016 jusqu'au dépôt du rapport d'expertise le 21 octobre 2019 et que par conséquent l'assignation en référé de la société Abeille IARD et santé par actes des 11, 15,16, 17, 18 et 19 juin 2020 a valablement interrompu à nouveau la prescription qui a recommencé à courir pour une durée de 5 ans à compter de l'ordonnance de référé du 6 janvier 2021.

Réponse de la cour

Selon les articles 2241 et 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription et cette interruption produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance.

Les conclusions constituent une demande en justice, et sont, à ce titre, interruptives de la prescription extinctive du droit invoqué (1ère Civ., 1 octobre 1996, pourvoi n° 94-19.210, Bulletin 1996 I N° 334).

Selon l'article 2239 du code civil la prescription est suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès.

Au cas d'espèce, il résulte de l'ordonnance de référé du 9 février 2016 que l'ASL Hôtel de Bourgogne a formé une demande incidente d'expertise devant le juge des référés à l'audience du 26 janvier 2016 et que la société Abeille IARD et santé a nécessairement eu connaissance de cette demande, dès lors qu'elle a été formée contradictoirement à l'audience du juge des référés devant lequel la procédure est orale.

Cette demande a valablement interrompu le délai de prescription quinquennale qui avait commencé à courir le 26 mars 2014, date à laquelle l'ASL Hôtel de Bourgogne avait connaissance des désordres, ainsi que le juge de la mise en état l'a justement retenu.

Il s'ensuit que le délai de prescription a recommencé à courir pour cinq ans à compter de l'ordonnance du 9 février 2016 et que le juge ayant fait droit à la demande d'expertise, la prescription a été suspendue jusqu'au 21 octobre 2019, date du dépôt du rapport, date à laquelle le délai de prescription de cinq ans a recommencé à courir.

Par conséquent les demandes formées par acte d'huissier du 12 mars 2021 par l'ASL Hôtel de Bourgogne à l'encontre de la société Abeille IARD et santé ne sont pas prescrites.

L'ordonnance du juge de la mise en état sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en responsabilité civile contractuelle de droit commun soulevée par la société Abeille IARD et santé à l'encontre de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne.

Sur la demande de provision de l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne

Moyens des parties

L'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne soutient que le caractère non sérieusement contestable de sa créance résulte des conclusions du rapport d'expertise judiciaire qui établit que la société Entreprise Laurent Cochon, assurée auprès de la société Abeille IARD et santé et chargée des travaux de plâtrerie et de peinture, a manqué à son obligation de résultat.

La société Abeille IARD et santé n'a pas répondu à cette demande.

Réponse de la cour

En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties en constatant que la créance était sérieusement contestable dès lors que la demanderesse ne produit pas plus en appel qu'en première instance d'éléments de nature à établir que la société Entreprise Laurent Cochon aurait souscrit une police d'assurance couvrant sa responsabilité civile contractuelle de droit commun.

Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point.

Sur les frais du procès

L'article 954 du code de procédure civile n'exige pas de reprendre dans le dispositif des conclusions les chefs de jugement critiqués (2e Civ., 3 mars 2022 n°20-20017).

Au cas d'espèce, la société Abeille IARD et santé a formé dans le dispositif de ses conclusions des prétentions en sollicitant le rejet de toutes les demandes formées à son encontre, ce qui inclut la demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement sur la condamnation aux dépens et sur celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En cause d'appel, la société Abeille IARD et santé, partie succombante, sera condamnée aux dépens et à payer à l'ASL Hôtel des ducs de Bourgogne la somme de 3 000 euros, au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevable la société Abeille IARD et santé, en sa qualité d'assureur DO, CNR et RC de l'Association libre syndicale l'hôtel des ducs de Bourgogne à interjeter appel de l'ordonnance du juge de la mise en état du 18 juillet 2023 en ce qu'elle rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en responsabilité civile contractuelle de droit commun soulevée par la société Abeille IARD et santé à l'encontre de l'Association syndicale libre l'Hôtel des ducs de Bourgogne ;

Déclare la société Abeille IARD et santé, en sa qualité d'assureur DO, CNR et RC de l'Association syndicale libre l'Hôtel des ducs de Bourgogne recevable à interjeter appel pour le surplus de l'ordonnance du juge de la mise en état du 18 juillet 2023 ;

Déclare irrecevable l'appel interjeté par la société Abeille IARD et santé en ce qu'il porte sur la condamnation de la société Abeille IARD et santé à payer à l'Association syndicale libre l'Hôtel des ducs de Bourgogne une provision ad litem de 3 000 euros ;

Confirme l'ordonnance en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Condamne aux dépens d'appel la société Abeille IARD et santé ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Abeille IARD et santé et condamne la société Abeille IARD et santé en qualité d'assureur RC, DO et RCD-CNR de l'Association syndicale libre l'Hôtel des ducs de Bourgogne et d'assureur de la société Entreprise Laurent Conchon à payer à l'Association syndicale libre l'Hôtel des ducs de Bourgogne la somme de 3 000 euros.