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Décisions

CA Grenoble, 2e ch., 19 novembre 2024, n° 24/00654

GRENOBLE

Arrêt

Autre

CA Grenoble n° 24/00654

19 novembre 2024

N° RG 24/00654 - N° Portalis DBVM-V-B7I-MEBV

N° Minute :

C1

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la SELARL SELARL ROBICHON & ASSOCIES

Me Myriam DUCKI

SELARL DENIAU AVOCATS [Localité 18]

SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 19 NOVEMBRE 2024

Appel d'une ordonnance (N° R.G. 23/01638) rendue par le juge de la mise en état de [Localité 18] en date du 23 janvier 2024, suivant déclaration d'appel du 7 février 2024

APPELANTES :

S.A. MMA IARD, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège ;

[Adresse 2]

[Localité 13]

Compagnie d'assurance MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège ;

[Adresse 2]

[Localité 13]

S.A.S. ENTREPRISE MIDALI FRERES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 9]

représentées par Me Jean ROBICHON de la SELARL SELARL ROBICHON & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Romain BLANC, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIMÉS :

Mme [X] [K] [R] divorcée [W]

née le [Date naissance 1] 1956 à PORTUGAL

de nationalité Française

[Adresse 19]

[Localité 8]

représentée par Me Myriam DUCKI, avocat au barreau de GRENOBLE

COMMUNE DE [Localité 17], prise en la personne de son maire en exercice, domicilié en cette qualité à la Mairie

[Adresse 21]

[Localité 8]

représentée par Me Michel FESSLER de la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE

S.A.R.L. COMPOSITE SARL D'ARCHITECTURE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 6]

Compagnie d'assurance MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS - MAF prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 16]

représentées par Me Mylène ROBERT de la SELARL DENIAU AVOCATS GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Floriane JUGUE, avocat au barreau de GRENOBLE

S.A.S. GUINTOLI au capital de 20 000 000,00 € immatriculée au RCS de [Localité 22] sous le n° B 447754086 dont le siège est [Adresse 24], prise en son établissement de [Localité 23], prise en la personne de son représentant légal en exercice domiclié en cette qualité audit siège

[Adresse 11]

[Localité 7]

S.A. GENERALI société d'assurances au capital social 94 630 000,00 € inscrite au RCS de [Localité 20] sous le numéro [Localité 20] 552 062 663, (assureur RC de la Commune de [Localité 17]) prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 15]

S.A.R.L. VERDIS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Localité 14]

non représentées

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère,

Mme Ludivine Chetail, conseillère,

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 septembre 2024, Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère, et Mme Ludivine Chetail, conseillère chargée du rapport, assistées de Mme Caroline Bertolo, greffière, ont entendu seules les avocats en leurs conclusions, les parties ne s'y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile.

Il en a été rendu compte à la cour dans son délibéré et l'arrêt a été rendu ce jour.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Courant 2018, la commune de [Localité 17] a engagé un programme de travaux au centre de la commune ayant notamment conduit à la création d'un bâtiment scolaire provisoire, d'une voie d'accès et à la réhabilitation d'un ancien bâtiment.

La maîtrise d'oeuvre de l'ouvrage a été confiée à la SARL Composite SARL d'architecture. Les travaux de gros oeuvre ont été réalisées par la SAS entreprise Midali frères et la SARL Guintoli.

Mme [X] [K] [R] divorcée [W] s'est plaint de ce que l'exécution des travaux réalisés sous la maîtrise d'ouvrage de la commune de [Localité 17], et, notamment, la création d'une voie d'accès qui jouxte sa propriété, aurait généré un décollement de la dalle de sa maison et un déplacement de la cuisine, provoqué des fissures et détérioré le carrelage ainsi que les fenêtres.

Par assignations des 15, 16, 17, 20 et 22 mars 2023, Mme [X] [K] [R] divorcée [W] a saisi le tribunal judiciaire de Grenoble aux fins d'indemnisation de son préjudice.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 septembre 2023, la société Verdis a saisi le juge de la mise en état d'une demande incidente tendant à voir constater que le contentieux relève de la compétence exclusive du tribunal administratif de Grenoble.

Par ordonnance en date du 23 janvier 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Grenoble a :

- déclaré le tribunal judiciaire compétent pour connaître du litige ;

- débouté la société Verdis de son exception d'incompétence au profit du tribunal administratif ;

- déclaré qu'il était incompétent pour trancher la question de la responsabilité des sociétés MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles et Mutuelle des architectes français, appelées en la cause en qualité d'assureurs ;

- renvoyé l'affaire et les parties à la mise en état ;

- condamné les sociétés entreprise Midali frères, MMA IARD, MMA IARD mutuelles assurances, Generali, Composite d'architecture, Mutuelle des architectes français, Verdis, Guintoli et la commune de [Localité 17] à payer à Mme [X] [K] [R] divorcée [W] la somme de 200 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les sociétés entreprise Midali frères, MMA IARD, MMA IARD mutuelles assurances, Composite d'architecture, Mutuelle des architectes français, Verdis et la commune de [Localité 17] de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que les dépens suivront le sort de l'instance au fond.

Par déclaration d'appel en date du 7 février 2024, la SA MMA IARD et la compagnie MMA IARD assurances mutuelles ainsi que la SAS entreprise Midali frères ont interjeté appel de l'ordonnance en toutes ses dispositions.

La SARL Composite SARL d'architecture et la MAF ont interjeté appel incident par conclusions notifiées par voie électronique le 27 mars 2024.

La commune de [Localité 17] a interjeté appel incident par conclusions notifiées par voie électronique le 5 avril 2024.

Par requête en date du 19 mars 2024, Mme [X] [W] a saisi le tribunal administratif de Grenoble aux fins de condamnation de la commune de Barraux à l'indemniser des préjudices résultant des travaux effectués courant juillet 2019.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par conclusions notifiées par voie électronique le 6 mars 2024, la SA MMA IARD, la compagnie MMA IARD assurances mutuelles et la SAS entreprise Midali frères demandent au conseiller de la mise en état de réformer l'ordonnance déférée et statuant de nouveau de :

- juger irrecevable le recours de Mme [W] comme étant présenté devant une juridiction incompétente pour en connaître en ce qui concerne les demandes intentées contre la société Midali frères, seul le tribunal administratif de Grenoble étant compétent en matière de dommage de travaux publics ;

- juger que les conclusions aux fins de condamnation présentées contre les MMA sont également irrecevables dans la mesure où la responsabilité de son assurée n'a pas été établie par le juge administratif, et que par suite le juge judiciaire n'a pas compétence pour statuer sur le principe et l'étendue de la responsabilité invoquée ;

- condamner Mme [W] à verser aux MMA et à la société Midali frères la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 26 mars 2024, Mme [X] [K] [R] divorcée [W] demande à la cour de :

- au principal :

confirmer l'ordonnance déférée ;

juger recevable l'instance introduite par elle ;

déclarer et juger compétent le tribunal judiciaire de Grenoble pour connaître du présent litige ;

se déclarer incompétent pour connaitre des responsabilités des assureurs MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles, Generali IARD SA, MAF ;

débouter la SAS entreprise Midali frères, la compagnie MMA IARD, la compagnie MMA IARD assurances mutuelles, la commune de [Localité 17], Generali IARD SA, la SARL Composite d'architecte, lasociété d'assurance MAF, la SARL Verdis, la SAS Guintoli de l'ensemble de leurs demandes, fins et moyens ;

- y ajoutant condamner la SAS entreprise Midali frères, la compagnie MMA IARD, la compagnie MMA IARD assurances mutuelles, la commune de [Localité 17], Generali IARD SA, la SARL Composite d'architecte, lasociété d'assurance MAF, la SARL Verdis, la SAS Guintoli à lui payer la somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

- subsidiairement, si la décision attaquée devait être infirmée et que la présente juridiction devait se déclarer incompétente au profit d'une juridiction administrative :

ordonner le sursis à statuer de l'action engagée à l'encontre des assureurs MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles, Generali IARD SA, société d'assurance MAF jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur la responsabilité des assurés ;

débouter la SAS entreprise Midali frères, la compagnie MMA IARD, la compagnie MMA IARD assurances mutuelles, la commune de [Localité 17], Generali IARD SA, SARL Composite d'architecture, société d'assurance MAF, la SARL Verdis, la SAS Guintoli de l'ensemble de leurs demandes, fins et moyens formés à l'encontre de Mme [X] [W].

Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 mars 2024, la SARL Composite SARL d'architecture et la Mutuelle des architectes français demandent à la cour de réformer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a déclaré le tribunal judiciaire compétent pour connaître du litige, l'a déboutée de l'exception d'incompétence et d'irrecevabilité soulevée et l'a condamnée à payer à Mme [W] une indemnité de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau de :

- juger que les dommages de travaux publics relèvent de la juridiction administrative ;

- juger irrecevables les demandes de condamnation dirigées contre la MAF en l'absence de toute responsabilité de la société Composite architecture dans les dommages ;

- se déclarer incompétent au profit du tribunal administratif de Grenoble ;

- renvoyer la demanderesse à se mieux pourvoir ;

- débouter Mme [W] de sa demande d'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [W] à payer à la société Composite architecture et à la MAF une indemnité de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 5 avril 2024, la commune de Barraux demande à la cour de réformer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a déclaré le tribunal judiciaire compétent pour connaître du litige, l'a déboutée de l'exception d'incompétence et d'irrecevabilité et l'a condamnée à payer à Mme [W] une indemnité de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et statuant à nouveau de :

- juger que les dommages de travaux publics relèvent de la compétence de la seule juridiction administrative ;

- déclarer le juge judiciaire incompétent au profit du tribunal administratif de Grenoble ;

- renvoyer la demanderesse à se mieux pourvoir ;

- la condamner à payer à la commune de [Localité 17] une indemnité de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La SA Generali, la SARL Verdis et la SAS Guintoli, intimés cité à personne habilitée, n'ont pas constitué avocat ; le présent arrêt est réputé contradictoire.

1. Sur l'exception d'incompétence concernant l'action dirigée contre les locateurs de l'ouvrage

Moyens des parties

La SA MMA IARD, la SA MMA IARD assurances mutuelles et la SAS entreprise Midali frères soutiennent que le fait que l'ensemble des intervenants à l'opération aient été assignés et que Mme [W] demande une condamnation globale en raison des préjudices causés par les travaux dans leur ensemble prouve qu'elle se prévaut en réalité d'un défaut de conception ou d'exécution de l'opération de travaux publics, relevant de la compétence du juge administratif, et non d'une manoeuvre particulière d'un véhicule qui, à l'occaison d'une opération de travaux publics, aurait occasionné un dommage.

La commune de [Localité 17] soutient que la compétence du juge administratif est incontestable dès lors que Mme [W] se prétend victime d'un trouble anormal du voisinage provoqué par l'exécution de travaux publics. Elle rappelle que la seule présence d'un engin de chantier à l'occasion de la réalisation d'un chantier de travaux publics ne peut pas caractériser la compétence du juge judiciaire.

La SARL Composite SARL d'architecture et la Mutuelle des architectes français soutiennent que la cause du dommage allégué réside, non dans l'intervention d'un engin de chantier, mais en raison d'une prétendue mauvaise organisation des travaux publics, dont la connaissance relève de la compétence du juge administratif.

Mme [X] [W] réplique qu'il n'est pas discutable que le préjudice qu'elle invoque trouve sa cause déterminante dans l'intervention des engins de chantier de la société Midali frères et de la société Guintoli. Elle se prévaut d'un lien de causalité direct et certain entre l'action des engins de chantier, qui doivent être qualifiés de véhicules, et les désordres apparus immédiatement sous l'effet des vibrations conséquentes de compacteurs de plusieurs tonnes qui sont intervenus très près de son habitation.

Réponse de la cour

Le contentieux des travaux publics relève de la compétence du juge administratif sur le fondement de l'article de la loi du 28 pluviôse an VIII.

Ont le caractère de travaux publics les travaux immobiliers répondant à une fin d'intérêt général et qui comportent l'intervention d'une personne publique, soit en tant que collectivité réalisant les travaux, soit comme bénéficiaire de ceux-ci (Tribunal des conflits, 8 novembre 2021, n° C4225).

Selon l'article 1er de la loi du 31 décembre 1951, par dérogation à l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790 sur l'organisation judiciaire, les tribunaux de l'ordre judiciaire sont seuls compétents pour statuer sur toute action en responsabilité tendant à la réparation des dommages de toute nature causés par un véhicule quelconque.

L'attribution de compétence donnée aux tribunaux de l'ordre judiciaire par l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957 pour les dommages qui sont le fait d'un véhicule appartenant à une personne publique ou un entrepreneur de travaux publics n'est susceptible de recevoir application que pour autant que le dommage invoqué trouve sa cause déterminante dans l'action d'un véhicule (Tribunal des conflits, 12 février 2001, commune de Courdimanche, n° 03243).

En l'espèce, Mme [W] se plaint d'avoir subi au sein de son habitation des dommages caractérisés par des fissures et un affaissement du sol qu'elle impute à l'intervention des engins de chantier utilisés par la SARL entreprise Midali frères et la SARL Guintoli dans le cadre de travaux réalisés au profit de la commune de [Localité 17]. Elle a néanmoins dirigé son action également contre le maître de l'ouvrage et l'ensemble des locateurs de l'ouvrage et agit sur le fondement des troubles anormaux du voisinage.

Il n'est pas contesté par les parties que les travaux concernés doivent être qualifiés de travaux publics comme répondant à une fin d'intérêt général s'agissant de travaux de création d'une école primaire provisoire et d'une voie d'accès et de réhabilitation d'un ancien bâtiment, et comportant l'intervention d'une personne publique, la commune de [Localité 17].

Selon Mme [W] elle-même, les désordres constatés à son domicile concommitamment aux travaux réalisés par la SARL entreprise Midali frères et la SARL Guintoli sont apparus sous l'effet des vibrations conséquentes des compacteurs intervenus sur le chantier de la commune de [Localité 17].

Cette allégation est corroborée par un rapport d'expertise amiable réalisé le 14 novembre 2019 par la SAS SARETEC qui a conclu que les vibrations générées par les travaux publics sont vraisemblablement la cause déterminante de l'aggravation de l'amplitude de lézardes sur la façade de la maison, de l'apparition de fissures dans le dallage du garage, sur les murs de refends, de l'affaissement du sol de la cuisine, et de la fissure affectant la façade en rez-de-chaussée haut de la maison de Mme [W].

La SAS SARETEC a confirmé ses constatations et son analyse par un rapport d'expertise amiable du 2 septembre 2021.

Cependant, ces éléments ne permettent pas de conclure que les désordres constatés trouvent leur cause déterminante dans l'action des véhicules de la société Midali et de la SARL Guintoli, qui n'ont fait que réaliser les travaux prévus dans le cadre du marché public.

Il apparaît, au contraire, que ce sont les conditions d'exécution des travaux qui seraient susceptibles d'avoir conduit à la réalisation des dommages allégués, le risque de dégâts collatéraux pour les bâtiments du quartier n'ayant, semble-t-il, pas été anticipé par le maître de l'ouvrage, le maître d'oeuvre et les entrepreneurs.

En raison de l'origine du dommage et bien qu'un engin de chantier ayant le caractère de véhicule au sens de la loi du 31 décembre 1957 ait été utilisé dans le cadre de ces travaux, la réparation des dommages consécutifs à leur exécution relève de la compétence de la juridiction administrative.

Il convient donc d'infirmer l'ordonnance déférée et de déclarer le tribunal judiciaire de Grenoble incompétent pour statuer sur l'action en responsabilité dirigée à l'encontre de la commune de Barraux, du maître d'oeuvre, la SARL Composite SARL d'architecture, et des intervenants au marché public, la SAS entreprise Midali frères, la SARL Verdis et la SAS Guintoli.

Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de mise hors de cause de la SAS entreprise Midali frères.

2. Sur les demandes dirigées contre les assureurs des locateurs de l'ouvrage

Moyens des parties

La SA MMA IARD, la SA MMA IARD assurances mutuelles et la SARL entreprise Midali frères font valoir que si l'action directe intentée contre l'assureur d'un locateur d'ouvrage relève en principe de la compétence du juge judiciaire, encore faut-il au préalable que le principe de la responsabilité de l'assuré ait été établi par le juge administratif. S'il était fait droit à la demande d'infirmation, les demandes de condamnations formulées à l'encontre de la SA MMA IARD et de la SA MMA IARD assurances mutuelles devront être déclarées irrecevables.

La SARL Composite SARL d'architecture et la Mutuelle des architectes français répliquent qu'à l'égard de cette dernière, seule la juridiction civile pourrait être compétente, mais que cela suppose que la responsabilité de son assurée ait été préalablement retenue par le juge administratif. A défaut, elles estiment les demandes dirigées contre la MAF irrecevables.

Mme [X] [W] réplique que dans l'hyposthèse où la compétence de la juridiction administrative serait retenue, il conviendra d'ordonner un sursis à statuer.

Réponse de la cour

A défaut de reconnaissance, par les assureurs, de la responsabilité de leurs assurés dans l'exécution d'un marché public, il incombe à la juridiction judiciaire de surseoir à statuer jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur cette responsabilité (1ère Civ., 11 décembre 2019, n° 18-25.441).

En l'espèce, la juridiction judiciaire demeure saisie de l'action de Mme [X] [W] telle que dirigée contre les assureurs des intervenants au marché public au titre de l'action directe prévue par l'article L.124-3 du code des assurances.

Elle ne peut déclarer cette action irrecevable mais doit surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la juridiction administrative.

Il convient donc d'infirmer l'ordonnance déférée en ce sens.

3. Sur les frais du procès

Dès lors que les parties obtiennent chacune gain de cause, l'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi :

Infirme l'ordonnance déférée ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Déclare le tribunal judiciaire de Grenoble matériellement incompétent pour statuer sur l'action en responsabilité dirigée par Mme [X] [K] [R] divorcée [W] à l'encontre de la commune de Barraux, de la SARL Composite SARL d'architecture, de la SAS entreprise Midali frères, de la SARL Verdis et de la SAS Guintoli ;

Renvoie Mme [X] [K] [R] divorcée [W] à mieux se pourvoir ;

Sursoit à statuer sur l'action directe de Mme [X] [K] [H] divorcée [W] à l'encontre de la SA MMA IARD, de la SA MMA IARD assurances mutuelles, de la Mutuelle des architectes français et de la SA Generali ;

Déboute les parties de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que les dépens de la procédure suivront le sort de l'instance principale.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère de la deuxième chambre civile, pour la présidente empêchée, et par Mme Solène Roux, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE