Cass. 3e civ., 14 novembre 2024, n° 23-12.650
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme TEILLER
Rapporteur :
Mme Gallet
Avocats :
SARL Cabinet Rousseau et Tapie, SCP Françoise Fabiani - François Pinatel
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 22 novembre 2022), M. et Mme [O] et [E] [L] et Mme [W] [L] (les bailleurs) ont donné à bail commercial par acte du 24 mai 2004 à la société FL Café (la locataire) un immeuble comportant un rez-de-chaussée à usage commercial et un premier étage à usage d'habitation.
2. En 2017, la locataire a assigné les bailleurs en paiement de travaux de reprise de l'appartement pour le rendre habitable et de mise en conformité du local commercial et en paiement de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance.
Examen des moyens
Sur le second moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. La locataire fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement de travaux de rénovation du local à usage d'habitation et en paiement de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance, alors « que le bailleur, tenu de délivrer un logement décent, doit y faire, pendant toute la durée du bail, toutes les réparations et les travaux d'entretien nécessaires pour assurer la décence du logement, de sorte que les demandes du locataire fondées sur cette obligation du bailleur ne sauraient commencer à se prescrire à compter de la date de signature du contrat de bail ; qu'en déboutant la société FL Café de ses demandes au motif que l'état du logement situé au premier étage était connu du locataire dès la date de prise d'effet du bail, le 24 mai 2004, la cour d'appel a violé les articles 1719, 1720 et 2224 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1709 et 1719 du code civil :
5. Aux termes du premier de ces textes, le louage des choses est un contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer.
6. Selon le second, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent.
7. Pour rejeter les demandes de la locataire, l'arrêt retient que l'état du logement situé au premier étage était connu du preneur dès sa prise à bail le 24 mai 2004, qu'il n'a sollicité qu'en 2015 une expertise judiciaire pour constater la non conformité de l'appartement aux normes de décence et que sa demande est hors délai.
8. En statuant ainsi, alors que la connaissance de l'état des lieux par le locataire n'exonère pas le bailleur de son obligation de délivrer au preneur, tout au long de l'exécution du bail, un logement en bon état de réparations et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société FL Café en paiement des sommes de 49 720,67 euros au titre des travaux de mise en conformité du logement et de 14 200 euros en réparation de son trouble de jouissance, l'arrêt rendu le 22 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes.