Cass. soc., 24 septembre 2013, n° 12-15.678
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lacabarats
Avocat :
SCP Tiffreau, Corlay et Marlange
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 janvier 2012), qu'après avoir été nommé, en octobre 2002, membre du directoire de la société Cesar, holding du groupe homonyme, M. X... a été engagé par celle-ci, le 4 novembre suivant, en qualité de directeur administratif et financier ; qu'il a contesté le licenciement dont il a fait l'objet le 22 juillet 2005 ; que les parties ont signé, le 28 juillet 2005, un protocole d'accord aux termes duquel l'employeur versait une indemnité transactionnelle au salarié et lui maintenait, par exception au plan de souscription d'actions du 31 mars 2003 qu'elle avait mis en place, le droit d'exercer les options qui lui avaient été attribuées en mars et juin 2003 ; que M. X... a levé la totalité des options le 10 décembre 2007 ; qu'en avril et juin 2009, alors que le cours de l'action avait chuté et que sa cotation avait été suspendue, il a vendu ses actions ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la communication par la société de divers documents sociaux et comptables et la condamnation de celle-ci à lui payer des dommages et intérêts au titre de la perte de chance de n'avoir pu bénéficier du potentiel de ses stocks options ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter son contredit en retenant que le conseil de prud'hommes n'était matériellement pas compétent pour connaître de ses demandes, de dire le tribunal de commerce compétent, et de renvoyer en conséquence l'affaire devant cette juridiction, alors, selon le moyen :
1°/ que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'elles doivent être exécutées de bonne foi ; que l'intéressé faisait valoir, dans ses conclusions, que la société Cesar n'avait pas agi de bonne foi dans l'exécution de ses obligations résultant de la transaction signée le 28 juillet 2005, en limitant la transmission des informations nécessaires à sa prise de décision de transformer ou non ses stock-options en actions, de sorte que le différend l'opposant à son ancien employeur, au sujet de la mauvaise exécution d'une obligation comprise dans l'accord transactionnel réglant les conséquences de la rupture du contrat de travail, relevait de la compétence du conseil de prud'hommes ; qu'en retenant, pour exclure la compétence de cette juridiction, que les parties s'étaient bornées, dans la transaction, à maintenir au profit de l'ancien salarié, la possibilité d'exercer ses stock-options, nonobstant la rupture du contrat de travail, que les termes de la transaction ne contractualisaient aucune communication d'informations économiques permettant d'apprécier la santé financière et boursière de la société Cesar, et que l'intéressé agissait donc en responsabilité contre la société Cesar en dehors de l'exécution et des obligations de la transaction, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, au-delà des obligations inscrites dans la convention, si la société Cesar n'avait pas méconnu son obligation générale d'exécuter de bonne foi la transaction, en fournissant à son ancien salarié une information erronée et lacunaire sur la situation de l'entreprise, et si le litige concernant la mauvaise exécution de cette convention ne relevait donc pas de la compétence du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble l'article L. 1411-1 du code du travail ;
2°/ que l'attribution par l'employeur à un salarié d'une option donnant droit à une souscription d'actions constitue un accessoire du contrat de travail dont la connaissance relève du conseil de prud'hommes, de sorte que les différends pouvant ensuite s'élever dans les relations entre la société et le salarié devenu actionnaire, relativement aux conditions d'acquisition de ses actions, sont de la compétence du conseil de prud'hommes ; que la cour d'appel constate que le contentieux porte sur la véracité et sur l'exhaustivité des informations financières et boursières connues par l'intéressé au moment où il a pris la décision de procéder à la transformation de ses stocks options en actions, ce dont il résulte que le litige a pour objet les conditions d'acquisition de ses actions par l'ancien salarié, en application de l'accord transactionnel du 28 juillet 2005 et qu'il relève donc de la compétence exclusive du conseil de prud'hommes ; qu'en écartant néanmoins cette compétence, et en renvoyant l'affaire devant la juridiction commerciale, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé ensemble les articles L. 1411-1 du code du travail et L. 721-3 du code de commerce ;
Mais attendu que les différends pouvant s'élever dans les relations entre la société et le salarié devenu actionnaire, indépendamment des conditions d'acquisition de ses actions, sont de la compétence de la juridiction commerciale ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que l'intéressé reprochait à la société de l'avoir trompé par une communication sciemment mensongère et dissimulatrice sur sa situation économique et financière particulièrement dégradée et l'ayant contraint à vendre ses actions en 2009 en réalisant une importante moins-value, que les faits étaient pour partie antérieurs à la cession des actions et postérieurs à la cessation des relations contractuelles et qu'ils étaient sans lien avec la transaction, en a exactement déduit, sans avoir à effectuer une recherche inopérante pour la solution du litige, que l'intéressé agissait contre la société en qualité d'actionnaire et que le litige relevait de la compétence du tribunal de commerce ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.