Cass. 1re civ., 27 novembre 2024, n° 23-13.492
COUR DE CASSATION
Autre
Cassation
PARTIES
Défendeur :
BNP Paribas Personal Finance, Alliance SAS
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Champalaune
Rapporteur :
Mme Robin-Raschel
Avocats :
SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Célice, Texidor, Périer
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 3 février 2023), le 16 janvier 2018, par contrat conclu hors établissement, M. [M] (l'acquéreur) a commandé auprès de la société IC groupe (le vendeur) la fourniture et la pose d'un ensemble de panneaux photovoltaïques et d'un chauffe-eau, dont le prix a été financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société Cetelem, aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas Personal Finance (la banque).
3. Un jugement du 13 décembre 2018 a prononcé la liquidation judiciaire du vendeur et désigné la société Alliance, représentée par Mme [D], en qualité de liquidateur.
4. Invoquant des irrégularités du bon de commande, l'acquéreur a assigné le vendeur, pris en la personne de son liquidateur, et la banque en annulation du contrat principal et du crédit affecté.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
5. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de prononcer la résolution du contrat principal et du contrat de prêt, de faire droit à la demande en restitution formée par la banque et de rejeter ses demandes en nullité des contrats et en indemnisation, alors « que le contrat conclu hors établissement ayant pour objet à la fois la fourniture de prestations de services et la livraison de biens est assimilé à un contrat de vente pour l'application du titre II du livre II du code de la consommation, ce dont il résulte que le point du départ du délai de rétractation est fixé au jour de la livraison des biens ; qu'en considérant que le contrat liant M. [M] et la société IC groupe devait être assimilé à un contrat de prestations de service pour en déduire que le point de départ du délai de rétractation énoncé dans le contrat, fixé au jour de sa signature, n'était pas erroné, bien qu'elle constatât que le contrat litigieux avait pour objet la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques et d'un chauffe-eau, relevant, dès lors de la qualification de contrat de vente pour lequel le délai de rétractation court du jour de la livraison des biens, la cour d'appel a violé les articles L. 221-1, L. 221-5, L. 221-9 et L. 221-18 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 221-1, II, L. 221-5, L. 221-9 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021, et l'article L. 221-18 du même code :
6. Selon le premier texte, les dispositions relevant du titre II du livre deuxième du code de la consommation, relatif aux règles de formation et d'exécution de certains contrats, dont les contrats conclus hors établissement, s'appliquent aux contrats portant sur la vente d'un ou plusieurs biens, au sens de l'article 528 du code civil, et au contrat en vertu duquel le professionnel fournit ou s'engage à fournir un service au consommateur en contrepartie duquel le consommateur en paie ou s'engage à en payer le prix. Le contrat ayant pour objet à la fois la fourniture de prestation de services et la livraison de biens est assimilé à un contrat de vente.
7. En application du deuxième, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, lorsque le droit de rétractation existe, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
8. Selon le troisième, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement comprenant toutes les informations prévues à l'article L. 221-5 et accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 7° de ce dernier texte.
9. Le dernier texte dispose :
« Le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.
Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour :
1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l'article L. 221-4 ;
2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat. »
10. Pour rejeter la demande d'annulation du contrat principal, l'arrêt retient qu'il s'agit d'un contrat de prestation de services de sorte que le bon de commande, qui mentionne comme point de départ du délai de rétractation le jour de la conclusion du contrat, n'est pas irrégulier.
5. En statuant ainsi, alors que le contrat ayant pour objet la fourniture et la pose de panneaux photovoltaïques et d'un chauffe-eau devait être qualifié de contrat de vente, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le premier moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
11. L'acquéreur fait le même grief à l'arrêt, alors « que, lorsque les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement, la nullité de ce contrat est encourue ; qu'en jugeant que la seule sanction encourue par le contrat en raison des irrégularités qu'elle constatait, portant sur l'absence d'indication sur le bon de commande quant aux conditions de remboursement et de reprise des biens livrés, consisterait en la prolongation du délai de rétractation de douze mois prévue à l'article L. 221-20 du code de la consommation, la cour d'appel a violé les articles L. 221-5 et L. 242-1 du même code. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 221-5, L. 221-9 et L. 242-1 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021 :
12. En application des deux premiers textes, le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement comprenant, de manière lisible et compréhensible, les informations relatives aux conditions, délai et modalités d'exercice du droit de rétractation et devant être accompagné du formulaire type de rétractation dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
13. Il résulte du dernier texte que, lorsque les informations relatives à l'exercice du droit de rétractation mentionnées au premier ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement, la nullité de ce contrat est encourue.
14. Pour rejeter la demande d'annulation du contrat principal, l'arrêt retient que la sanction de l'absence des informations relatives au droit de rétractation n'est pas la nullité du contrat mais la prolongation du délai de rétractation de douze mois conformément à l'article L. 221-20 du code de la consommation.
15. En statuant ainsi, alors que l'acquéreur pouvait également demander l'annulation du contrat, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
16. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt qui prononcent la résolution du contrat principal et rejettent la demande en nullité de ce contrat, entraîne la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt qui prononcent la résolution du contrat de prêt, font droit à la demande en restitution formée par la banque et rejettent les demandes en nullité du contrat de prêt et en indemnisation formées par l'emprunteur contre la banque, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit n'y avoir lieu à annulation du jugement rendu le 20 décembre 2019 par le tribunal d'instance de Nantes, et en ce qu'il déclare la demande subsidiaire en résiliation des contrats de vente et de prêt formée en appel par M. [M] recevable, l'arrêt rendu le 3 février 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;
Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par l'association UFC - Que choisir et la société BNP Paribas Personal Finance et condamne cette dernière à payer à M. [M] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille vingt-quatre.