Décisions
CA Paris, Pôle 1 - ch. 11, 25 novembre 2024, n° 24/05469
PARIS
Ordonnance
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
L. 742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour
des étrangers et du droit d'asile
ORDONNANCE DU 25 NOVEMBRE 2024
(1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 24/05469 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKLM4
Décision déférée : ordonnance rendue le 22 novembre 2024, à 11h43, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris
Nous, Elise Thevenin-Scott, conseillère à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Nolwenn Hutinet, greffière aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANT :
M. [F] [W] [B]
né le 07 octobre 1990 à [Localité 1], de nationalité guinéenne
RETENU au centre de rétention : [Localité 2] 1
assisté de Me Ruben Garcia, avocat au barreau de Paris
INTIMÉ :
LE PRÉFET DE POLICE
représenté par Me Alexandre Marinelli du cabinet Adam Caumeil, avocat au barreau de Paris
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l'heure de l'audience
ORDONNANCE :
- contradictoire
- prononcée en audience publique
- Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l'application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;
Constatant qu'aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'est disponible pour l'audience de ce jour ;
- Vu l'ordonnance du 22 novembre 2024 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris rejetant les moyens soulevées et ordonnant la prolongation du maintien de l'intéressé, dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée maximale de 15 jours, soit jusqu'au 06 décembre 2024 ;
- Vu l'appel motivé interjeté le 23 novembre 2024, à 18h01, par M. [F] [W] [B] ;
- Après avoir entendu les observations :
- de M. [F] [W] [B], assisté de son avocat, qui demande l'infirmation de l'ordonnance ;
- du conseil du préfet de police tendant à la confirmation de l'ordonnance ;
SUR QUOI,
Monsieur [F] [W] [B] a été placé en déclaration d'appel par arrêté préfectoral en date du 07 septembre 2024, sur la base d'un arrêté préfectoral portant OQTF en date du 24 novembre 2023.
Cette mesure a été prolongée pour la quatrième fois par le magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté de Paris par ordonnance du 22 novembre 2024, laquelle a rejeté le moyen tiré de l'irrecevabilité de la requête de la préfecture faute de production d'un registre actualisé, et sur le fond autorisé la prolongation au regard d'une menace à l'ordre public établie et de la perspective de délivrance de documents de voyage à bref délai.
Monsieur [F] [W] [B] a interjeté appel de cette décision et demande à la cour de :
- Déclarer la requête de l'administration irrecevable dès lors qu'elle n'est pas accompagnée d'un registre actualisé en ce sens que :
o les documents produits par le centre de rétention administrative de Vincennes sont constitués de plusieurs éléments et ne constituent donc pas un registre unique
o les documents produits sont différents à chaque stade de la procédure
o la copie actualisée d'un registre ne saurait être le fruit d'un assemblage de pièces différentes dans leur présentation
- Infirmer la décision au regard de diligences insuffisantes de l'administration, la saisine effective des autorités consulaires n'étant pas établie, seule celle de l'UCI l'étant, à la date du 06 juin 2024, et sans aucun retour de cette unité malgré les multiples relances
Réponse de la cour
Sur la recevabilité de la requête du préfet, le registre actualisé et sa composition
Il résulte de la lecture combinée des articles L.743-9, L.744-2 et R.743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le juge s'assure, lors de l'examen de chaque demande de prolongation d'une mesure de rétention, que, depuis la précédente présentation, la personne retenue a été placée en mesure de faire valoir ses droits, notamment d'après les mentions du registre prévu par l'article L.744-2, qui doit être émargé par l'intéressé.
Selon le troisième de ces textes, toute requête en prolongation de la rétention administrative d'un étranger doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée d'une copie de ce registre.
Il s'en déduit que le registre doit être actualisé et émargé et que la non-production d'une copie actualisée, permettant un contrôle de l'effectivité de l'exercice des droits reconnus à l'étranger au cours de la mesure de rétention, constitue une fin de non-recevoir pouvant être accueillie sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief (Civ.1ère - 4 septembre 2024, n°23-12.550).
Un registre actualisé doit s'entendre comme étant un document retraçant l'intégralité de l'historique de la mesure, depuis l'entrée au centre de rétention, communiqué à chaque nouvelle saisine du juge et permettant, au surplus, à toute personne pouvant y avoir accès de visualiser immédiatement les différents événements. Toutefois, aucun texte n'interdit que ce registre soit tenu informatiquement et que les extractions, à chaque stade de la procédure, donnent lieu à une nouvelle édition, complétée des éléments intervenus antérieurement, tout comme rien n'interdit que le registre soit composé de plusieurs pages, dès lors que le juge dispose, lors de sa saisine, de l'ensemble des informations lui permettant de procéder à son contrôle.
S'agissant des informations devant être contenues dans le registre, il n'existe aucune liste ni dans la partie législative ni dans la partie réglementaire du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En revanche, il peut être rappelé, à titre d'information, que l'annexe de l'arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention prévu à l'article L. 553-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative » (LOGICRA) prévoit, notamment :
ANNEXE
DONNÉES À CARACTÈRE PERSONNEL ET INFORMATIONS ENREGISTRÉES DANS LES TRAITEMENTS
I. - Concernant l'étranger faisant l'objet de la mesure de placement en rétention administrative :
(')
II. - Concernant la procédure administrative de placement en rétention administrative :
(')
III. - Concernant les procédures juridictionnelles mises en 'uvre au cours de la rétention :
1° Contentieux administratif : type de recours, juridiction saisie, date et heure de l'audience, décision, appel ;
2° Contentieux judiciaire : présentation devant le juge des libertés et de la détention (JLD) et saisine du JLD par le retenu, date de présentation, décision, appel, date d'audience de la cour d'appel, résultat, motif d'annulation ;
3° Demande d'asile : date et heure du dépôt de la demande, modalité d'instruction, décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et date de celle-ci, recours auprès de la Cour nationale du droit d'asile.
IV. - Concernant la fin de la rétention et l'éloignement :
1° Demande de laissez-passer consulaire, consulat saisi, date de la demande d'identification ou de présentation consulaire, type de présentation, motif de non-présentation, date de l'entretien, moyen de transport utilisé, résultat de l'entretien, délivrance du laissez-passer consulaire, date de délivrance, date et fin de validité du laissez-passer consulaire ;
2° Réservation du moyen de transport national et international : date prévisionnelle de départ, moyen de transport utilisé, pays de destination, demande de routing, escorte ;
3° Fin de la rétention : date et motif de la fin de rétention.
Enfin, il ne peut être suppléé à l'absence de ces pièces justificatives utiles par leur seule communication à l'audience, sauf s'il est justifié de l'impossibilité de les joindre à la requête (1re Civ., 26 octobre 2022, pourvoi n° 21-19.352).
En ce domaine, il appartient au juge de vérifier, in concreto et dans chaque espèce, qu'il dispose des informations utiles au contrôle qu'il doit exercer sans imposer, pour autant, un formalisme excessif à l'administration.
En l'espèce, Monsieur [F] [W] [B] a été placé en rétention administrative le 07 septembre 2024, il est produit par l'administration un premier document comportant les informations relatives à la notification de ses droits lors de l'arrivée au centre de rétention administrative ainsi que l'heure et le jour d'arrivée, son identité et les mentions relatives à l'OQTF, document émargé par le retenu et le chef de poste, le 07 septembre 2024 à 10h50.
Le 20 novembre 2024, la préfecture de police a saisi le juge aux fins de quatrième prolongation de la mesure de rétention administrative de Monsieur [F] [W] [B], en joignant, préalablement, à sa requête un document sans titre comportant :
- la mention de l'identité du retenu,
- les événements propres à la première, deuxième et troisième prolongations de rétention,
Ce document a été émargé le 20 novembre 2024 par un gardien de la paix, et Monsieur [F] [W] [B].
Dans ces conditions il doit être considéré que la copie du registre est suffisamment actualisée en ce sens qu'elle permet au juge d'exercer le contrôle lui appartenant, au stade de la quatrième prolongation, quand bien même le registre serait constitué de deux pages distinctes, dès lors que la première page figure en procédure et qu'elle est relative à des points de contrôle devant être réalisés au seul stade de la première prolongation.
Dans ces conditions, la requête de l'administration doit être déclarée recevable. La décision sera confirmée sur ce point.
Sur le fond et les diligences de l'administration
S'il appartient au magistrat du siège, en application de l'article L. 741-3 du même code, de rechercher concrètement les diligences accomplies par l'administration pour permettre que l'étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, ce qui requiert dès le placement en rétention, une saisine effective des services compétents pour rendre possible le retour, en revanche, l'administration française ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires (1re Civ., 9 juin 2010, pourvoi n° 09-12.165) et le juge ne saurait imposer à l'administration la réalisation d'acte sans véritable effectivité.
En application de l'article L.742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur depuis le 28 janvier 2024 :
« A titre exceptionnel, le magistrat du siège peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours. »
Les critères énoncés ci-dessus n'étant pas cumulatifs, il suffit à l'administration d'établir l'un d'eux pour justifier d'une prolongation de la rétention.
Pour l'application du dernier alinéa de l'article précité à la requête en quatrième prolongation, créé par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024, il appartient à l'administration de caractériser l'urgence absolue ou la menace pour l'ordre public établie dans les 15 jours qui précèdent la saisine du juge.
S'agissant de la menace à l'ordre public, critère pouvant être mobilisé par l'administration à l'occasion des troisième et quatrième prolongations de la mesure de rétention elle impose, compte tenu du caractère dérogatoire et exceptionnel de ces ultimes prolongations, une vigilance particulière sur les conditions retenues pour qualifier ladite menace qui doit se fonder sur des éléments positifs, objectifs et démontrés par l'administration. Elle a pour objectif manifeste de prévenir, pour l'avenir, les agissements dangereux commis par des personnes en situation irrégulière sur le territoire national.
La menace pour l'ordre public doit faire l'objet d'une appréciation in concreto, au regard d'un faisceau d'indices permettant, ou non, d'établir la réalité des faits, la gravité, la récurrence ou la réitération, et l'actualité de la menace selon le comportement de l'intéressé.
La commission d'une infraction pénale n'est pas de nature, à elle seule, à établir que le comportement de l'intéressé présenterait une menace pour l'ordre public (CE, 16 mars 2005, n° 269313, Mme X., A ; CE, 12 février 2014, ministre de l'intérieur, n° 365644, A).
L'appréciation de cette menace doit prendre en considération les risques objectifs que l'étranger en situation irrégulière fait peser sur l'ordre public (CE, Réf. N°389959, 7 mai 2015, ministre de l'intérieur, B).
En l'espèce, Monsieur [F] [W] [B] a été placé en rétention administrative le 07 septembre 2024. Aucune pièce du dossier ne pemret de s'assurer que les autorités consulaires guinéennes ont été saisies, seuls figurent des échanges entre l'UCI, servcie du ministère d le'intérieur et la préfecture, ledit service n'ayant jamais répondu aux multiples relances de la préfectures de sorte qu'il n'est établi auucne diligences utiles dans ce dossier a minima depuis la dernière prolongation de mesure. Il n'existe donc aucune perspective sérieuse d'éloignement permettant, au visa de l'article L.741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un maintien en rétention, indépendammment des conditions spécifiques de l'article L.742-5 du même code.
Dès lors il convient d'infirmer l'ordonnance du premier juge.
PAR CES MOTIFS
INFIRMONS l'ordonannce,
STATUANT À NOUVEAU,
REJETONS la requête du préfet de police,
DISONS n'y avoir lieu à prolongation de la rétention administrative de M.[F] [W] [B],
RAPPELONS à l'intéressé qu'il a l'obligation de quitter le territoire français,
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 25 novembre 2024 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
Pour information : L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L'intéressé L'avocat de l'intéressé
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
L. 742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour
des étrangers et du droit d'asile
ORDONNANCE DU 25 NOVEMBRE 2024
(1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 24/05469 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CKLM4
Décision déférée : ordonnance rendue le 22 novembre 2024, à 11h43, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris
Nous, Elise Thevenin-Scott, conseillère à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Nolwenn Hutinet, greffière aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANT :
M. [F] [W] [B]
né le 07 octobre 1990 à [Localité 1], de nationalité guinéenne
RETENU au centre de rétention : [Localité 2] 1
assisté de Me Ruben Garcia, avocat au barreau de Paris
INTIMÉ :
LE PRÉFET DE POLICE
représenté par Me Alexandre Marinelli du cabinet Adam Caumeil, avocat au barreau de Paris
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l'heure de l'audience
ORDONNANCE :
- contradictoire
- prononcée en audience publique
- Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l'application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;
Constatant qu'aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'est disponible pour l'audience de ce jour ;
- Vu l'ordonnance du 22 novembre 2024 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris rejetant les moyens soulevées et ordonnant la prolongation du maintien de l'intéressé, dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée maximale de 15 jours, soit jusqu'au 06 décembre 2024 ;
- Vu l'appel motivé interjeté le 23 novembre 2024, à 18h01, par M. [F] [W] [B] ;
- Après avoir entendu les observations :
- de M. [F] [W] [B], assisté de son avocat, qui demande l'infirmation de l'ordonnance ;
- du conseil du préfet de police tendant à la confirmation de l'ordonnance ;
SUR QUOI,
Monsieur [F] [W] [B] a été placé en déclaration d'appel par arrêté préfectoral en date du 07 septembre 2024, sur la base d'un arrêté préfectoral portant OQTF en date du 24 novembre 2023.
Cette mesure a été prolongée pour la quatrième fois par le magistrat du siège en charge du contrôle des mesures restrictives et privatives de liberté de Paris par ordonnance du 22 novembre 2024, laquelle a rejeté le moyen tiré de l'irrecevabilité de la requête de la préfecture faute de production d'un registre actualisé, et sur le fond autorisé la prolongation au regard d'une menace à l'ordre public établie et de la perspective de délivrance de documents de voyage à bref délai.
Monsieur [F] [W] [B] a interjeté appel de cette décision et demande à la cour de :
- Déclarer la requête de l'administration irrecevable dès lors qu'elle n'est pas accompagnée d'un registre actualisé en ce sens que :
o les documents produits par le centre de rétention administrative de Vincennes sont constitués de plusieurs éléments et ne constituent donc pas un registre unique
o les documents produits sont différents à chaque stade de la procédure
o la copie actualisée d'un registre ne saurait être le fruit d'un assemblage de pièces différentes dans leur présentation
- Infirmer la décision au regard de diligences insuffisantes de l'administration, la saisine effective des autorités consulaires n'étant pas établie, seule celle de l'UCI l'étant, à la date du 06 juin 2024, et sans aucun retour de cette unité malgré les multiples relances
Réponse de la cour
Sur la recevabilité de la requête du préfet, le registre actualisé et sa composition
Il résulte de la lecture combinée des articles L.743-9, L.744-2 et R.743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le juge s'assure, lors de l'examen de chaque demande de prolongation d'une mesure de rétention, que, depuis la précédente présentation, la personne retenue a été placée en mesure de faire valoir ses droits, notamment d'après les mentions du registre prévu par l'article L.744-2, qui doit être émargé par l'intéressé.
Selon le troisième de ces textes, toute requête en prolongation de la rétention administrative d'un étranger doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée d'une copie de ce registre.
Il s'en déduit que le registre doit être actualisé et émargé et que la non-production d'une copie actualisée, permettant un contrôle de l'effectivité de l'exercice des droits reconnus à l'étranger au cours de la mesure de rétention, constitue une fin de non-recevoir pouvant être accueillie sans que celui qui l'invoque ait à justifier d'un grief (Civ.1ère - 4 septembre 2024, n°23-12.550).
Un registre actualisé doit s'entendre comme étant un document retraçant l'intégralité de l'historique de la mesure, depuis l'entrée au centre de rétention, communiqué à chaque nouvelle saisine du juge et permettant, au surplus, à toute personne pouvant y avoir accès de visualiser immédiatement les différents événements. Toutefois, aucun texte n'interdit que ce registre soit tenu informatiquement et que les extractions, à chaque stade de la procédure, donnent lieu à une nouvelle édition, complétée des éléments intervenus antérieurement, tout comme rien n'interdit que le registre soit composé de plusieurs pages, dès lors que le juge dispose, lors de sa saisine, de l'ensemble des informations lui permettant de procéder à son contrôle.
S'agissant des informations devant être contenues dans le registre, il n'existe aucune liste ni dans la partie législative ni dans la partie réglementaire du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En revanche, il peut être rappelé, à titre d'information, que l'annexe de l'arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention prévu à l'article L. 553-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative » (LOGICRA) prévoit, notamment :
ANNEXE
DONNÉES À CARACTÈRE PERSONNEL ET INFORMATIONS ENREGISTRÉES DANS LES TRAITEMENTS
I. - Concernant l'étranger faisant l'objet de la mesure de placement en rétention administrative :
(')
II. - Concernant la procédure administrative de placement en rétention administrative :
(')
III. - Concernant les procédures juridictionnelles mises en 'uvre au cours de la rétention :
1° Contentieux administratif : type de recours, juridiction saisie, date et heure de l'audience, décision, appel ;
2° Contentieux judiciaire : présentation devant le juge des libertés et de la détention (JLD) et saisine du JLD par le retenu, date de présentation, décision, appel, date d'audience de la cour d'appel, résultat, motif d'annulation ;
3° Demande d'asile : date et heure du dépôt de la demande, modalité d'instruction, décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et date de celle-ci, recours auprès de la Cour nationale du droit d'asile.
IV. - Concernant la fin de la rétention et l'éloignement :
1° Demande de laissez-passer consulaire, consulat saisi, date de la demande d'identification ou de présentation consulaire, type de présentation, motif de non-présentation, date de l'entretien, moyen de transport utilisé, résultat de l'entretien, délivrance du laissez-passer consulaire, date de délivrance, date et fin de validité du laissez-passer consulaire ;
2° Réservation du moyen de transport national et international : date prévisionnelle de départ, moyen de transport utilisé, pays de destination, demande de routing, escorte ;
3° Fin de la rétention : date et motif de la fin de rétention.
Enfin, il ne peut être suppléé à l'absence de ces pièces justificatives utiles par leur seule communication à l'audience, sauf s'il est justifié de l'impossibilité de les joindre à la requête (1re Civ., 26 octobre 2022, pourvoi n° 21-19.352).
En ce domaine, il appartient au juge de vérifier, in concreto et dans chaque espèce, qu'il dispose des informations utiles au contrôle qu'il doit exercer sans imposer, pour autant, un formalisme excessif à l'administration.
En l'espèce, Monsieur [F] [W] [B] a été placé en rétention administrative le 07 septembre 2024, il est produit par l'administration un premier document comportant les informations relatives à la notification de ses droits lors de l'arrivée au centre de rétention administrative ainsi que l'heure et le jour d'arrivée, son identité et les mentions relatives à l'OQTF, document émargé par le retenu et le chef de poste, le 07 septembre 2024 à 10h50.
Le 20 novembre 2024, la préfecture de police a saisi le juge aux fins de quatrième prolongation de la mesure de rétention administrative de Monsieur [F] [W] [B], en joignant, préalablement, à sa requête un document sans titre comportant :
- la mention de l'identité du retenu,
- les événements propres à la première, deuxième et troisième prolongations de rétention,
Ce document a été émargé le 20 novembre 2024 par un gardien de la paix, et Monsieur [F] [W] [B].
Dans ces conditions il doit être considéré que la copie du registre est suffisamment actualisée en ce sens qu'elle permet au juge d'exercer le contrôle lui appartenant, au stade de la quatrième prolongation, quand bien même le registre serait constitué de deux pages distinctes, dès lors que la première page figure en procédure et qu'elle est relative à des points de contrôle devant être réalisés au seul stade de la première prolongation.
Dans ces conditions, la requête de l'administration doit être déclarée recevable. La décision sera confirmée sur ce point.
Sur le fond et les diligences de l'administration
S'il appartient au magistrat du siège, en application de l'article L. 741-3 du même code, de rechercher concrètement les diligences accomplies par l'administration pour permettre que l'étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ, ce qui requiert dès le placement en rétention, une saisine effective des services compétents pour rendre possible le retour, en revanche, l'administration française ne dispose d'aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires (1re Civ., 9 juin 2010, pourvoi n° 09-12.165) et le juge ne saurait imposer à l'administration la réalisation d'acte sans véritable effectivité.
En application de l'article L.742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction en vigueur depuis le 28 janvier 2024 :
« A titre exceptionnel, le magistrat du siège peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours. »
Les critères énoncés ci-dessus n'étant pas cumulatifs, il suffit à l'administration d'établir l'un d'eux pour justifier d'une prolongation de la rétention.
Pour l'application du dernier alinéa de l'article précité à la requête en quatrième prolongation, créé par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024, il appartient à l'administration de caractériser l'urgence absolue ou la menace pour l'ordre public établie dans les 15 jours qui précèdent la saisine du juge.
S'agissant de la menace à l'ordre public, critère pouvant être mobilisé par l'administration à l'occasion des troisième et quatrième prolongations de la mesure de rétention elle impose, compte tenu du caractère dérogatoire et exceptionnel de ces ultimes prolongations, une vigilance particulière sur les conditions retenues pour qualifier ladite menace qui doit se fonder sur des éléments positifs, objectifs et démontrés par l'administration. Elle a pour objectif manifeste de prévenir, pour l'avenir, les agissements dangereux commis par des personnes en situation irrégulière sur le territoire national.
La menace pour l'ordre public doit faire l'objet d'une appréciation in concreto, au regard d'un faisceau d'indices permettant, ou non, d'établir la réalité des faits, la gravité, la récurrence ou la réitération, et l'actualité de la menace selon le comportement de l'intéressé.
La commission d'une infraction pénale n'est pas de nature, à elle seule, à établir que le comportement de l'intéressé présenterait une menace pour l'ordre public (CE, 16 mars 2005, n° 269313, Mme X., A ; CE, 12 février 2014, ministre de l'intérieur, n° 365644, A).
L'appréciation de cette menace doit prendre en considération les risques objectifs que l'étranger en situation irrégulière fait peser sur l'ordre public (CE, Réf. N°389959, 7 mai 2015, ministre de l'intérieur, B).
En l'espèce, Monsieur [F] [W] [B] a été placé en rétention administrative le 07 septembre 2024. Aucune pièce du dossier ne pemret de s'assurer que les autorités consulaires guinéennes ont été saisies, seuls figurent des échanges entre l'UCI, servcie du ministère d le'intérieur et la préfecture, ledit service n'ayant jamais répondu aux multiples relances de la préfectures de sorte qu'il n'est établi auucne diligences utiles dans ce dossier a minima depuis la dernière prolongation de mesure. Il n'existe donc aucune perspective sérieuse d'éloignement permettant, au visa de l'article L.741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile un maintien en rétention, indépendammment des conditions spécifiques de l'article L.742-5 du même code.
Dès lors il convient d'infirmer l'ordonnance du premier juge.
PAR CES MOTIFS
INFIRMONS l'ordonannce,
STATUANT À NOUVEAU,
REJETONS la requête du préfet de police,
DISONS n'y avoir lieu à prolongation de la rétention administrative de M.[F] [W] [B],
RAPPELONS à l'intéressé qu'il a l'obligation de quitter le territoire français,
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 25 novembre 2024 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
Pour information : L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L'intéressé L'avocat de l'intéressé