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Décisions

CA Paris, Pôle 6 - ch. 12, 22 novembre 2024, n° 19/08674

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 19/08674

22 novembre 2024

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 22 Novembre 2024

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/08674 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAOQB

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Juillet 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY RG n° 18/00687

APPELANTES

Madame [G] [Z]

Clinique [5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Nicolas CHOLEY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0056 substitué par Me Laureen LELLOUCHE, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

CPAM 93 - SEINE SAINT DENIS ([Localité 6])

[Adresse 2]

SERVICE CONTENTIEUX

[Localité 4]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901 substituée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 Septembre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Carine TASMADJIAN, présidente de chambre,

Monsieur Christophe LATIL, conseiller

Monsieur Olivier FOURMY, président honoraire

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Agnès IKLOUFI, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Carine TASMADJIAN, présidente de chambre et Madame Agnès IKLOUFI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par Mme le docteur [G] [Z] de deux jugements prononcés les 29 juillet 2019 et 27 novembre 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Bobigny dans un litige l'opposant à la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans ses jugements au contenu desquels la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que l'activité professionnelle de chirurgienne-orthopédiste et traumatologue de Mme [G] [Z] (la professionnelle de santé) a fait l'objet d'un contrôle par le service médical de la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis (la caisse) sur la période du 1er octobre 2015 au 1er octobre 2016.

Le contrôle a été annoncé à Mme [Z] par courrier du 09 mai 2017, à l'issue duquel il lui a été adressé, par courrier du 03 octobre 2017, un récapitulatif des anomalies constatées et des griefs retenus.

A la demande de la professionnelle de santé, un entretien contradictoire avec le service du contrôle médical a été organisé le 30 novembre 2017, dont le compte rendu lui a été adressé le 11 décembre 2017.

Après avoir informé Mme [Z] par courrier du 27 mars 2018 des suites envisagées à ce contrôle, la caisse lui a notifié :

- dans un premier temps, un indu d'un montant de 10 331,28 euros le 19 juin 2018,

- dans un second temps l'engagement d'une procédure d'avertissement le 18 octobre 2018.

Après une tentative d'entretien contradictoire, la caisse lui a notifié un avertissement, le 10 décembre 2018.

La commission de recours amiable ayant implicitement rejeté le recours formé par Mme [Z] à l'encontre de l'indu, elle a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny par requête du 21 septembre 2018.

Par décision du 03 octobre 2018, la commission de recours amiable a finalement rejeté ce recours.

En application de la réforme des contentieux sociaux issue de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle, l'affaire a été transférée le 1er janvier 2019 au pôle social du tribunal de grande instance de Bobigny.

Par jugement prononcé le 29 juillet 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de Bobigny a :

- reçu la professionnelle de santé en son recours,

- dit que la note produite par le conseil de la professionnelle de santé ne sera pas écartée,

- rejeté le moyen relatif à la violation du principe du contradictoire garanti par l'article D. 315-2 du code de la sécurité sociale par absence de communication de l'ensemble des éléments nécessaires à l'entretien contradictoire et de l'absence d'information des patients du cadre juridique des auditions et examens,

- rejeté le moyen pris en la nullité du contrôle tirée de ce que les agents de la caisse et du service du contrôle médical ne justifient pas avoir été agréés et assermentés,

- rejeté le moyen pris de la violation de l'article R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale par l'incompétence de l'auteur de la notification de l'indu,

- rejeté le moyen pris de l'irrégularité de la procédure spécifique de notification d'indu par violation de l'article R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale, insuffisance de motivation de la notification,

- dit n'y avoir lieu à annulation de la procédure de contrôle et de la notification d'indu,

- débouté Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes,

- confirmé l'indu de 10 292,83 euros notifié au La professionnelle de santé par la caisse le 19 juin 2018,

- condamné Mme [Z] à payer à la caisse la somme de 10 292,83 euros,

- débouté la caisse de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de toute autre demande plus ample ou contraire.

Pour statuer en ce sens, le tribunal a relevé que le service médical n'avait procédé à aucune audition, ni examen de patients et qu'en conséquence Mme [Z] avait disposé de l'ensemble des éléments nécessaires à la préparation de l'entretien.

Il a ensuite constaté que la caisse fournissait les attestations établissant que les docteurs [F] et [S] faisaient partie des effectifs depuis respectivement les 1er mars 1999 et 05 janvier 2004, et avaient la qualité de médecin-conseil au service du contrôle médical, fonction qui n'est pas soumise aux dispositions de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale relatif à la procédure d'agrément et d'assermentation des agents de la caisse.

Il a enfin relevé que la notification d'indu du 19 juin 2018 en indiquant précisément la cause, la nature et le montant des sommes réclamées pour chaque anomalie constatée était suffisamment motivée.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 1er août 2019 à Mme [Z] qui en a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 29 août 2019. Formé moins d'un mois après le jugement, l'appel est recevable.

L'affaire a alors été fixée à l'audience du 09 septembre 2022, puis renvoyée aux audiences des 12 janvier 2023, 29 juin 2023, 08 février 2024 et 06 juin 2024.

Saisi le 09 février 2019 par Mme [Z] en contestation de l'avertissement qui lui a été adressé, le pôle social du tribunal de grande instance de Bobigny a par jugement prononcé le 27 novembre 2019 :

- déclaré recevable l'action de la professionnelle de santé,

- rejeté ses moyens tirés de la nullité de la procédure de contrôle et d'indu,

- rejeté ses moyens tirés de la nullité de la procédure d'avertissement,

- dit bien fondée la décision d'avertissement notifiée à la professionnelle de santé par la caisse le 10 décembre 2018,

- rejeté toutes conclusions plus amples ou contraires,

- condamné la professionnelle de santé à payer à la caisse la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la professionnelle de santé partie perdante, aux entiers dépens.

Pour juger ainsi, le tribunal a estimé que la professionnelle de santé n'ayant pas fait l'objet d'une pénalité financière, le courrier du 18 octobre 2018 ne portant que sur une procédure d'avertissement, la saisine de la commission des pénalités financières prévue à l'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale ne s'imposait donc pas pour valider la procédure de sanction.

Sur le fond, il a retenu que l'avertissement était tout à fait proportionné aux griefs retenus à l'encontre de la professionnelle de santé, le jugement du 29 juillet 2019 ayant conclu à la violation des articles 1-6 et 1-12 de la CCAM respectivement pour 9 912,92 euros et 379,91 euros sur la période du 1er octobre 2015 au 1er octobre 2016.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 13 décembre 2019 à la professionnelle de santé qui en a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 03 janvier 2020.

L'affaire a alors été fixée à l'audience du 12 janvier 2023, puis renvoyée aux audiences des 12 janvier 2023, 29 juin 2023, 08 février 2024, 06 juin 2024 et enfin celle du 26 septembre 2024 pour être plaidée et lors de laquelle les parties ont développé oralement leurs conclusions écrites déposées au dossier.

Les dossiers des appels formés les 29 août 2019 (RG n°19/08674) et 03 janvier 2020 (RG n°20/00423) ont fait l'objet d'une jonction à l'audience du 08 février 2024.

Mme [Z], au visa de ses conclusions, demande à la cour de :

- juger que la notification d'indu litigieuse a été établie à l'issue d'une procédure irrégulière,

- juger que la décision portant avertissement a été établie à l'issue d'une procédure irrégulière,

- juger que la procédure de pénalité financière est irrégulière,

- juger que la notification d'indu litigieuse et la décision portant avertissement ne sont pas fondées,

En conséquence,

- réformer les jugements n°18/00687 du 29 juillet 2019 et n°19/00879 du 27 novembre 2019 du pôle social du tribunal de grande instance de Bobigny,

- annuler la notification d'indu datée du 19 juin 2018 par laquelle la caisse lui réclame la somme de 10 331,28 euros et la décision portant avertissement prononcée par la caisse à son encontre,

- condamner la caisse à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Mme [Z] considère que la caisse et le service médical ont méconnu les droits de la défense par la mauvaise application des dispositions des articles L. 315-1 IV, D. 315-1 et D. 315-2 du code de la sécurité sociale, l'entretien contradictoire ne pouvant avoir régulièrement avoir lieu qu'avec la transmission préalable de toutes les pièces du dossier.

Elle affirme que le principe du contradictoire n'a pas été respecté, certains éléments, tels que la liste et l'identité des patients, les procès-verbaux d'auditions et les convocations des patients, ne lui ayant jamais été communiqués préalablement à l'entretien contradictoire qui a eu lieu le 30 novembre 2017. Elle relève que le délai de trois mois pour notifier les suites envisagées au contrôle ayant été dépassé, la caisse était réputé n'avoir pas donné suite au contrôle d'activité.

Elle souligne que les patients n'ont pas été informés du cadre juridique de leur audition et que l'absence de production des procès-verbaux et des convocations des patients l'avait privée de la possibilité de vérifier de la réalité et la régularité de cette information.

Elle estime que la caisse n'apporte pas la preuve de ce que les Dr [K] [S] et [Y] [F] étaient agréées et assermentées conformément aux dispositions de l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale.

Elle fait valoir que la caisse n'apporte pas la preuve du respect des prescriptions des délibérations de la CNIL n°88-31 du 22 mars 1988 et n°89-117 du 24 octobre 1989, en ne justifiant pas de l'habilitation des agents qui ont réalisé le contrôle pour accéder et utiliser dans le système SIAM, ni que lors de l'envoi de requête SIAM, le comité médical paritaire local avait été informé de la motivation, de la mise en route et des résultats de cette requête.

Sur le fond, à titre subsidiaire, Mme [Z] estime que la caisse n'apporte aucun élément de preuve de nature à démontrer que les actes facturés n'étaient pas justifiés au regard de l'état de santé de ses patients, absolument aucun élément n'étant produit dans ce sens. Elle soutient qu'elle facture ses actes conformément à la nomenclature et que c'est à tort que le service de contrôle et la caisse n'ont pas pris en compte ses observations fournies durant l'entretien contradictoire qui démontrent le bien fondé des cotations utilisées.

Au sujet de l'avertissement qui lui a été adressé, elle relève que la caisse n'a pas notifié à la commission des pénalités financières la procédure d'avertissement envisagée, ainsi que cela est prévu à l'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale.

Sur le fond, elle estime que la décision portant avertissement a été insuffisamment motivée ne faisant état d'aucune considération de droit ou de fait, les griefs qui lui ont été reprochés ne lui ayant jamais été véritablement communiqués au cours de la procédure de pénalité, sans précision des dispositions législatives ou réglementaires qu'elle aurait méconnues.

La caisse, au visa de ses conclusions, demande à la cour de :

- confirmer les jugements des 29 juillet 2019 et 27 novembre 2019,

En conséquence,

- débouter la professionnelle de santé de toutes ses demandes,

- condamner la professionnelle de santé à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

En ce qui concerne l'appel formé à l'encontre du jugement du 27 novembre 2019, la caisse entend opposer à l'appelante l'autorité de la chose jugée, qu'elle distingue de la force de chose jugée en ce qu'une décision de justice non assortie de l'exécution provisoire et frappée d'appel ne dispose pas de la force de chose jugée mais est néanmoins revêtue de l'autorité de chose jugée tant qu'elle na pas été invalidée par la juridiction de niveau supérieur.

Ainsi, elle soutient que dans la mesure où le jugement du 29 juillet 2019 a validé la procédure ayant abouti à la notification de l'indu le 19 juin 2018 mais également de l'avertissement, la régularité de cette procédure ne peut plus faire l'objet d'une contestation dans le cadre de la contestation de cet avertissement notifié le 10 décembre 2018.

La caisse soutient que la procédure de contrôle d'activité l'ayant conduite à notifier un indu, ainsi qu'un avertissement à la professionnelle de santé a été régulièrement conduite en ce que :

- la liste des assurés susceptibles d'être convoqués et examinés était jointe au courrier d'information du contrôle d'activité du 09 mai 2017, le service médical n'ayant en outre finalement procédé à aucune audition ni examen de patient,

- les médecins qui sont intervenus dans le dossier sont bien agréés et assermentés,

- la nullité du contrôle n'est pas encourue dans la mesure où le professionnel de santé ne pouvait ignorer que les informations qu'elle a elle-même fourni pour servir de base au contrôle faisaient l'objet d'un traitement automatisé et que la caisse n'est soumise à aucune obligation de saisir spécialement la CNIL dans ce cadre,

- la notification de l'indu du 19 juin 2018 est parfaitement motivée et conforme à l'article R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale portant les précisions concernant la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, un tableau étant joint comportant tous les éléments permettant de présenter utilement des observations ou contester la notification.

A propos du bien-fondé de la créance, la caisse détaille 111 anomalies relevées et détaillées qui justifient selon elle la délivrance de l'indu contesté.

En application de l'article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées à l'audience pour l'exposé complet des moyens développés et soutenus à l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l'autorité de la chose jugée

Avant la jonction des deux dossiers ordonnée le 08 février 2024, la caisse avait, dans ses conclusions relatives au recours formé à l'encontre de l'avertissement adressé à Mme [Z], repris son moyen, présenté devant le tribunal, basé sur l'autorité de la chose jugée du jugement prononcé le 29 juillet 2019 relativement à la question de la régularité de la procédure de contrôle ayant abouti à la fois à la notification d'un indu et d'un avertissement.

Or la jonction des deux dossiers, concernant les appels interjetés à l'encontre des deux jugements prononcés le 29 juillet et 27 novembre 2019, rend ce moyen inutile, un seul et même arrêt devant désormais intervenir pour statuer en une seule fois sur la régularité de la procédure de contrôle de l'activité de la professionnelle de santé sur la période du

1er octobre 2015 au 1er octobre 2016.

Ce moyen sera dès lors écarté.

Sur la régularité de la procédure de contrôle

Les dispositions de l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 28 janvier 2016 au 27 juillet 2019 prévoient que :

'I.-Le contrôle médical porte sur tous les éléments d'ordre médical qui commandent l'attribution et le service de l'ensemble des prestations de l'assurance maladie, maternité et invalidité ainsi que des prestations prises en charge en application des articles L. 251-2 et L. 254-1 du code de l'action sociale et des familles.

II.-Le service du contrôle médical constate les abus en matière de soins, de prescription d'arrêt de travail et d'application de la tarification des actes et autres prestations.

Lorsque l'activité de prescription d'arrêt de travail apparaît anormalement élevée au regard de la pratique constatée chez les professionnels de santé appartenant à la même profession, des contrôles systématiques de ces prescriptions sont mis en oeuvre dans des conditions définies par la convention mentionnée à l'article L. 227-1.(...)

III. (...)

III. bis .

IV.-Il procède également à l'analyse, sur le plan médical, de l'activité des professionnels de santé dispensant des soins aux bénéficiaires de l'assurance maladie, de l'aide médicale de l'Etat ou de la prise en charge des soins urgents mentionnée à l'article L. 254-1 du code de l'action sociale et des familles, notamment au regard des règles définies par les conventions qui régissent leurs relations avec les organismes d'assurance maladie ou, en ce qui concerne les médecins, du règlement mentionné à l'article L. 162-14-2. La procédure d'analyse de l'activité se déroule dans le respect des droits de la défense selon des conditions définies par décret.(...)'.

L'article R. 315-1-1 du même code dispose pour sa part que :

'Lorsque le service du contrôle médical procède à l'analyse de l'activité d'un professionnel de santé en application du IV de l'article L. 315-1, il peut se faire communiquer, dans le cadre de cette mission, l'ensemble des documents, actes, prescriptions et éléments relatifs à cette activité.

Dans le respect des règles de la déontologie médicale, il peut consulter les dossiers médicaux des patients ayant fait l'objet de soins dispensés par le professionnel concerné au cours de la période couverte par l'analyse. Il peut, en tant que de besoin, entendre et examiner ces patients. Il en informe au préalable le professionnel, sauf lorsque l'analyse a pour but de démontrer l'existence d'une fraude telle que définie à l'article R. 147-11, d'une fraude en bande organisée telle que définie à l'article R. 147-12 ou de faits relatifs à un trafic de médicaments. (...)'.

L'article R. 315-1-2 du même code précise qu':

'A l'issue de cette analyse, le service du contrôle médical informe le professionnel concerné de ses conclusions. Lorsque le service du contrôle médical constate le non-respect de règles législatives, réglementaires ou conventionnelles régissant la couverture des prestations à la charge des organismes de sécurité sociale, il en avise la caisse. La caisse notifie au professionnel les griefs retenus à son encontre, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Dans le délai d'un mois qui suit la notification des griefs, l'intéressé peut demander à être entendu par le service du contrôle médical.'

Enfin, l'article D. 315-2 du code de la sécurité sociale ajoute que :

'Préalablement à l'entretien prévu à l'article R. 315-1-2, le service du contrôle médical communique au professionnel de santé contrôlé l'ensemble des éléments nécessaires à la préparation de cet entretien, comportant notamment la liste des faits reprochés au professionnel et l'identité des patients concernés. Cet entretien fait l'objet d'un compte-rendu qui est adressé, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au professionnel de santé dans un délai de quinze jours. A compter de sa réception, le professionnel de santé dispose d'un délai de quinze jours pour renvoyer ce compte-rendu signé, accompagné d'éventuelles réserves. A défaut, il est réputé approuvé.'.

Enfin, l'article D. 315-2 du même code indique que :

'A l'expiration des délais prévus au second alinéa de l'article D. 315-2 ou, à défaut, à l'expiration du délai d'un mois mentionné à l'article R. 315-1-2, la caisse informe dans un délai de trois mois le professionnel de santé des suites qu'elle envisage de donner aux griefs initialement notifiés. A défaut, la caisse est réputée avoir renoncé à poursuivre le professionnel de santé contrôlé.'.

Il résulte des pièces versées aux débats que la caisse a d'abord adressé à la professionnelle de santé un courrier le 09 mai 2017 pour l'informer qu'elle allait faire l'objet d'un contrôle sur les actes et cotations réalisés entre le 1er octobre 2015 et le 1er octobre 2016.

Ce courrier était accompagné de la liste des assurés susceptibles d'être convoqués et examiné dans le cadre de ce contrôle.

A l'issue des opérations de contrôle, la caisse a, par courrier du 03 octobre 2017, informé Mme [Z] que diverses anomalies dans sa facturation avaient été relevées, l'informant qu'elle pouvait demander à être entendue par le service du contrôle médical avec l'assistance d'un membre de sa profession et/ou par un avocat pour s'expliquer sur les griefs dans le délai d'un mois.

Par courrier du 20 octobre 2017, la caisse a notifié les griefs retenus détaillés :

- non respect des règles de facturation de la CCAM (articles L. 162-2-1 du code de la sécurité sociale, article R. 4127-8 et R. 4127-29 du code de la santé publique, dispositions générales de la CCAM Livre I et III),

- facturation d'un acte non réalisé (article R. 4127 29 du code de la santé publique)

- acte effectué par un remplaçant (article R. 4127-65 du code de la santé publique),

lequel courrier ouvrait le délai pour solliciter un entretien.

Pour chacun de ces griefs, la caisse a précisé les dispositions du code de la sécurité sociale, celles du code de la santé publique, celles de la CCAM applicables ainsi que le fondement sur lequel l'anomalie était relevée.

Par courrier du 06 novembre 2017, la professionnelle de santé a été avisée de l'organisation de l'entretien dans le cadre des articles L. 315-1-IV et R. 345-1 et suivants du code de la sécurité sociale.

L'entretien a eu lieu le 30 novembre 2017 plus d'un mois après la notification des griefs, ainsi que cela est établi par l'attestation signée le jour même par Mme [Z] et le docteur [M] [D], médecin chirurgien orthopédique, qui l'assistait.

Au cours de cet entretien tous les griefs relevés par la caisse ont pu être discutés par l'intéressée. Le compte-rendu de cet entretien lui a été notifié le 11 décembre 2017, ainsi qu'elle l'indique elle-même dans le courrier qu'elle a adressé au médecin-conseil le

19 janvier 2018 pour réitérer ses réserves quant aux griefs qui lui ont été opposés.

Il en ressort que la professionnelle de santé a bien disposé de l'ensemble de tous les documents nécessaires et disponibles pour pouvoir s'expliquer utilement sur l'indu, alors que la cour relève que, s'agissant des pièces médicales, aucun procès-verbal n'a été établi par la caisse ou le médecin-conseil puisque le contrôle s'est fondé exclusivement sur les éléments que Mme [Z] avait elle-même transmis au titre de l'exercice de sa profession conformément à la demande du médecin-conseil.

En effet, aucun élément de la procédure ne permet de dire que des patients auraient été examinés par le service médical qui a uniquement procédé à une analyse sur pièces, confrontant les facturations émises par la professionnelle de santé avec les informations qu'elle a renseignées dans les dossiers médicaux de ses patients. D'ailleurs, les griefs retenus par la caisse à l'encontre de la professionnelle de santé correspondent à une mauvaise application des règles de facturation avec non-respect des règles d'association d'actes et surcotations et la facturation d'actes qu'elle n'a pas personnellement effectués.

La caisse ne disposant donc ni de procès-verbaux d'auditions des patients, ni de rapports d'examen des patients, il ne peut lui être reproché de ne pas les avoir communiqués.

Les constats réalisés par le médecin contrôleur ont été formalisés dans un tableau récapitulatif qui a été communiqué à Mme [Z] préalablement à l'entretien.

En tout état de cause, les dispositions rappelées ci-avant, et notamment l'article D. 315-2 ne prévoient pas la communication de tout le dossier de contrôle mais seulement des pièces détenues par la caisse et sur lesquelles elle a fondé ses griefs et l'ensemble des éléments nécessaires à la préparation de l'entretien.

Enfin, et contrairement à ce qui est soutenu par l'appelante, les documents qui lui ont été communiqués comportaient la liste des patients concernés, la liste précise des griefs avec les dispositions normatives dont la caisse lui reprochait la violation, la nature et l'importance du préjudice.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la caisse a bien informé, la professionnelle de santé des résultats de l'analyse de son activité avant un potentiel entretien à sa demande et que cette information était de nature à lui permettre de connaître les griefs reprochés et les bases du calcul de l'indu en résultant.

La procédure ci-dessus rappelée a ainsi été respectée et les informations qui ont été données dans un délai utile à la professionnelle de santé étaient manifestement suffisantes pour lui permettre de préparer l'entretien, ce qu'elle a d'ailleurs fait ayant pu s'expliquer sur chacun des griefs.

La professionnelle de santé a donc pu user de l'ensemble des droits attachés à la procédure, que ce soit avant, pendant et après le contrôle, dont les résultats lui ont été notifiés par courrier recommandé du 27 mars 2018, dont elle a signé l'avis de réception le

28 mars 2018, moins de trois mois après la notification du compte-rendu de l'entretien du 30 novembre 2017, dans le respect du délai prévu à l'article D. 315-3 du code de la sécurité sociale.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur l'agrément et l'assermentation

Les dispositions prévues à l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale disposent que :

'Les directeurs des organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale ou du service des allocations et prestations mentionnées au présent code confient à des agents chargés du contrôle , assermentés et agréés dans des conditions définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale ou par arrêté du ministre chargé de l'agriculture, le soin de procéder à toutes vérifications ou enquêtes administratives concernant l'attribution des prestations, le contrôle du respect des conditions de résidence et la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. Des praticiens-conseils et auditeurs comptables peuvent, à ce titre, être assermentés et agréés dans des conditions définies par le même arrêté. Ces agents ont qualité pour dresser des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire. (...)'.

L'arrêté du 30 juillet 2004 modifié fixe les conditions d'agrément des agents des organismes de sécurité sociale chargés du contrôle de l'application des législations de sécurité sociale, visés aux articles L. 216-6 et L. 243-9 du code de la sécurité sociale.

Il résulte de la seule lecture des dispositions de l'article L. 114-10, qui ne concernent que l'attribution des prestations ou la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, qu'elles ne sont pas applicables aux faits de l'espèce, s'agissant d'une procédure dans le cadre de laquelle aucun procès-verbal n'a été établi et qui est fondée exclusivement sur l'examen des facturations des actes médicaux, à partir de la base de données de la caisse et des pièces que la professionnelle de santé lui avait communiquées au titre de l'exercice de sa profession.

Ces dispositions ne sont pas applicables aux contrôles de l'observation des règles de tarification et de facturation des actes, prestations, produits, fournitures et frais par les professionnels de santé, les établissements de santé et les prestataires et fournisseurs, qui obéissent exclusivement aux dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale et aux dispositions réglementaires prises pour leur application (2e Civ., 9 septembre 2021, nº 20-17.030, F-D).

Au demeurant, la Cour de cassation a été amenée à préciser que l'obligation d'agrément et d'assermentation prescrite par l'article L. 114-10 ne s'applique aux agents qui procèdent, sur le fondement de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, au contrôle de l'application des règles de tarification ou de facturation par un professionnel de santé que lorsqu'ils mettent en oeuvre des prérogatives de puissance publique. Tel est le cas notamment lorsqu'ils procèdent à une audition (Cass., 2e Civ., 16 mars 2023, pourvois n° 21-11.470 et 21-14.971).

Au cas présent, la cour relève que le contrôle n'a pas été effectué par un agent de la caisse mais par un médecin-conseil pour lequel le texte ne prévoit qu'une possibilité d'assermentation et d'agrément. Comme il l'a été mentionné auparavant, le médecin-conseil n'a usé d'aucun moyen traduisant la mise en oeuvre d'une prérogative de puissance publique, telle que des auditions ou une enquête auprès des patients concernés par le contrôle, s'agissant d'un contrôle sur pièces ayant consisté à confronter une facturation avec les mentions des dossiers médicaux des patients de la professionnelle de santé. A l'évidence ce moyen ne caractérise pas, en tant que tel, la mise en oeuvre d'une prérogative de puissance publique.

En l'absence d'assermentation ou d'agrément nécessaire spécifique, la procédure de contrôle engagée par la caisse n'est, en conséquence, entachée d'aucune irrégularité.

Les jugement seront confirmés de ce chef.

Sur la violation de la loi n°78-17 du 06 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés

Aux termes de l'article 10, alinéa 1er, de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-801 du 6 août 2004, applicable au litige, aucune décision de justice impliquant une appréciation sur le comportement d'une personne ne peut avoir pour fondement un traitement automatisé de données à caractère personnel destiné à évaluer certains aspects de sa personnalité.

En l'espèce, le traitement des données n'étant pas destiné à établir le profil du professionnel de santé destinataire de la décision, ni à évaluer certains aspects de sa personnalité, la caisse peut produire ces données pour rapporter la preuve du non-respect des règles de tarification et de facturation fixées par l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale.

Par délibération n° 88-31 du 22 mars 1988, portant avis sur le projet de décision présenté par le directeur de la caisse nationale d'assurance maladie concernant la mise à disposition des caisses primaires d'assurance maladie d'un système d'analyse des fichiers, dénommé SIAM, la CNIL a émis un avis favorable, sous réserve de la constitution d'un groupe de concertation, les caisses devant présenter :

- une demande d'avis allégée de référence comportant un engagement de conformité et un projet d'acte réglementaire conforme à l'acte réglementaire national et précisant que les thèmes de recherche entrepris par les caisses seront tenus à disposition du public par affichage dans les locaux des caisses ;

- une demande d'avis allégée, préalablement à chaque mise en oeuvre de traitement nécessaire pour réaliser un ou plusieurs thèmes de recherche comportant un projet d'acte réglementaire précisant l'objet de la recherche ou des recherches entreprises ainsi qu'une annexe mentionnant les critères utilisés, la durée de la recherche, le nombre et la qualité des personnes habilitées à procéder au traitement des données, les conditions d'exercice du droit d'accès.

Par délibération n° 89-117 du 24 octobre 1989 portant avis de la création d'un répertoire national de thèmes de recherche utilisables dans le cadre du SIAM, la CNIL a émis un avis favorable.

Par délibération n° 96-002 du 16 janvier 1996 portant avis sur un projet de règlement d'acte réglementaire modificatif présenté par la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés relatif au SIAM, la CNIL a émis un avis favorable à l'ajout de quatre thèmes du répertoire national.

Dans cette même délibération la CNIL a considéré qu'il n'y avait plus lieu d'exiger des caisses primaires ou des services médicaux, lorsqu'ils mettent en oeuvre un thème du répertoire national, de saisir la CNIL de la demande d'avis allégée prévues par les délibérations précédentes, après vérification sur place de ce traitement par les membres de la commission. La référence à l'information d'un comité médical paritaire local a disparu.

La professionnelle de santé affirme que les autres formalités imposées par la CNIL n'ont pas été abrogées sans préciser de quelle formalité il s'agit.

L'article R. 161-32 du code de la sécurité sociale dispose que :

'Les organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire d'assurance maladie sont tenus de prendre toutes les dispositions nécessaires aux fins de préserver, notamment dans le cadre du traitement mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 161-29, la confidentialité des données transmises et traitées aux termes de cet article, et en particulier pour limiter aux seuls personnels habilités l'accès direct aux données médicales relatives aux assurés ou à leurs ayants droit.

A cette fin, les directeurs des organismes mentionnés à l'alinéa précédent veillent au respect des dispositions de l'acte autorisant le traitement automatisé, ainsi que des règles limitant l'accès direct aux données médicales des personnels placés sous leur autorité. Les praticiens-conseils veillent au respect des mêmes règles par les personnels placés sous leur autorité.'.

Cette habilitation prévue par la délibération de 1989 procède des modalités d'organisations mises en oeuvre par les organismes de sécurité sociale pour préserver un accès sélectif au SIAM. Ainsi, l'agent qui procède dans le cadre de ses fonctions à la mise en oeuvre de ce système est présumé disposer de cette habilitation.

Le moyen de l'annulation du contrôle tiré de l'irrégularité du recours SIAM n'est donc pas fondé.

Sur la régularité de la notification d'indu

L'article R. 133-9-1du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du

02 mars 2019 au 08 juillet 2019 dispose que :

'I.-La notification de payer prévue à l'article L. 133-4 est envoyée par le directeur de l'organisme d'assurance maladie au professionnel, à l'établissement ou au distributeur par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Cette lettre précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement. Elle mentionne l'existence d'un délai de deux mois à partir de sa réception imparti au débiteur pour s'acquitter des sommes réclamées ainsi que les voies et délais de recours. Dans le même délai, l'intéressé peut présenter des observations écrites à l'organisme d'assurance maladie.

A défaut de paiement à l'expiration du délai de forclusion prévu à l'article R. 142-1 ou après notification de la décision de la commission instituée à ce même article, le directeur de l'organisme de sécurité sociale compétent lui adresse la mise en demeure prévue à l'article L. 133-4 par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception.

Cette mise en demeure comporte la cause, la nature et le montant des sommes demeurant réclamées, la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement, le motif qui, le cas échéant, a conduit à rejeter totalement ou partiellement les observations présentées ainsi que l'existence du nouveau délai d'un mois imparti, à compter de sa réception, pour s'acquitter des sommes réclamées. Elle mentionne, en outre, l'existence et le montant de la majoration de 10 % appliquée en l'absence de paiement dans ce délai, ainsi que les voies et délais de recours.

II.(...)

III.-Les dispositions des articles R. 133-3, R. 133-5 à R. 133-7 sont applicables à la contrainte instituée par l'article L. 133-4.'.

Le courrier du 19 juin 2018 a notifié à la professionnelle de santé un indu d'un montant total de 10 331,28 euros auquel la caisse a annexé un tableau synoptique complet et détaillé des anomalies.

Il comporte toutes les informations nécessaires à l'identification de chaque acte contrôlé : le numéro de sécurité sociale, les noms et prénoms des bénéficiaires des soins, la date des soins, le nombre de prestations facturées pour chaque patient, le code acte facturé en application de la CCAM, le libellé précis de l'acte effectué, les codes association et complémentaires appliqués et ceux qui auraient dû l'être selon le service médical, le montant remboursé, le prix unitaire de l'acte, le taux de remboursement, la date de mandatement, le numéro de la facture, les griefs précis retenus pour chaque patient (sur cotation, facturation non conforme, absence de descriptif...), les textes du code de la sécurité sociale, de la santé publique et ceux de la CCAM concernés par les griefs, le montant de l'acte indu, le préjudice estimé par le service médical après modification et majoration et enfin le montant total de l'indu.

Complétée par ce tableau exhaustif, la lettre de notification de l'indu répond aux exigences de l'article R. 133-9-1 précité et la procédure suivie est régulière.

Sur le caractère fondé ou non de l'indu

Au-delà du caractère exhaustif et probant du tableau annexé au courrier de notification de l'indu, tel que cela a été constaté ci-dessus, il ressort du compte-rendu de l'entretien du

30 novembre 2017 que Mme [Z] a été en mesure de s'expliquer sur les anomalies relevées par la caisse, notamment les non-respects de règles de facturation de la classification commune des actes médicaux (CCAM).

Contrairement à ce qui a été plaidé, chacun des griefs a été exposé à la professionnelle de santé et il a été noté que lors de l'entretien que :

'Les griefs ont tous été repris par type d'anomalies en accord avec le docteur [*]. (...)

Le service du contrôle médical a ensuite repris les anomalies une par une et pris bonne note des commentaires et remarques du docteur [*] qui :

- A reconnu sa méconnaissance de la CCAM en ce qui concernait les incompatibilités : elle a dit ne plus facturer ensemble des actes incompatibles depuis qu'elle avait reçu le descriptif des faits. Tous les dossiers concernés par le non respect de la facturation des actes incompatibles ont donc été maintenus.

- Concernant le non respect de l'acte global, elle a avoué sa méconnaissance de l'article I-6 des dispositions générales de la CCAM.(...)

' Ainsi, la facturation non justifiée de l'acte QCJA00I a été admise par le docteur: tous les dossiers en anomalie ont été maintenus

' La facturation non justifiée de l'acte QZMA004 a également été admise, les dossiers en anomalie ont été maintenus et le docteur s'est engagée à produire des comptes rendus de meilleure qualité.

' Concernant les facturations non justifiées de l'acte PCPA003, le docteur a émis une réserve, considérant que cet acte ne faisait pas partie de l'ostéosynthèse d'une fracture. Le Service du contrôle médical a considéré que cet acte était compris dans l'acte global et a maintenu toutes les anomalies.

' Concernant les facturations non justifiées des actes MJPA009, AHPA028, A.HPA022,AHPA024, le docteur [*] a également émis une réserve. En effet, elle réalise ces actes afin de vérifier l'intégrité des nerfs et des tendons, considérant qu'il s'agit d'une exploration chirurgicale qui est importante dans les lésions de la main et qu'il n'existe pas d'acte codant l'exploration chirurgicale dans la CCAM. Le Service du contrôle médical a expliqué que seule la lésion principale était notable et a maintenu les anomalies, 3 cas ont été retirés (93-61, 93-67,93-76).

Concernant les actes facturés non exécutés personnellement, le docteur [*] a fourni tous les contrats de remplacement. Toutes les anomalies ont été retirées, cas 93-1, 93-3, 93-4, 93-9, 93-11, 93-13, 93-15, 93-20, 93-22, 93-27, 93-29, 93-31, 93-33, 93-39, 93-40, 93-45, 93-46, 93-47, 93-48, 93-55, 93-58, 93-64, 93-66, 93-72 93-79, 93-88, 93-95.

Le Service du contrôle médical a pu se rendre compte qu'il existe effectivement une méconnaissance de la CCAM de la part du docteur [*] et que sa bonne foi ne peut être mise en cause.

Un rappel de la réglementation concernant la CCAM et particulièrement l'acte global a été fait au docteur [*] qui s'engage à les respecter.'.

Au vu de ces éléments et en se contentant de plaider qu'il n'était pas démontré en quoi certaines cotations n'étaient pas conformes à la CCAM et qu'elle facturait les actes conformément à la nomenclature, Mme [Z] n'apporte aucune critique utile aux griefs retenus par la caisse, autres que celles déjà prises en compte et ayant conduit au retrait de plusieurs dossiers à l'issue de cet entretien.

Il est dès lors établi qu'elle a méconnu les règles de tarification et de facturation, méconnaissances desquelles il est résulté un indu de 10 292,83 euros au vu des 'images décomptes' produites par la caisse.

Le jugement du 29 juillet 2019 sera confirmé de ce chef.

Sur la régularité de la procédure d'avertissement

L'article L. 114-7-1 du code de la sécurité sociale dispose que :

'I.-Peuvent faire l'objet d'une pénalité prononcée par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie, de la caisse mentionnée à l'article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles :

1° Les bénéficiaires des régimes obligatoires des assurances maladie, maternité, invalidité, décès, accidents du travail et maladies professionnelles, de la protection complémentaire en matière de santé mentionnée à l'article L. 861-1, de l'aide au paiement d'une assurance complémentaire de santé mentionnée à l'article L. 863-1 ou de l'aide médicale de l'Etat mentionnée au premier alinéa de l'article L. 251-1 du code de l'action sociale et des familles ;

2° Les employeurs ;

3° Les professionnels et établissements de santé, ou toute autre personne physique ou morale autorisée à dispenser des soins, à réaliser une prestation de service ou des analyses de biologie médicale ou à délivrer des produits ou dispositifs médicaux aux bénéficiaires mentionnés au 1°;

4° Tout individu impliqué dans le fonctionnement d'une fraude en bande organisée.

II.-La pénalité mentionnée au I est due pour :

1° Toute inobservation des règles du présent code, du code de la santé publique, du code rural et de la pêche maritime ou du code de l'action sociale et des familles ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d'une prestation en nature ou en espèces par l'organisme local d'assurance maladie, sauf en cas de bonne foi de la personne concernée ;

1° bis L'inobservation des règles mentionnées au 1° du présent II lorsque celle-ci a pour effet de faire obstacle aux contrôles ou à la bonne gestion de l'organisme ;

2° L'absence de déclaration, par les bénéficiaires mentionnés au 1° du I, d'un changement dans leur situation justifiant l'ouverture de leurs droits et le service des prestations, sauf en cas de bonne foi de la personne concernée ;

3° Les agissements visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir par toute fausse déclaration, man'uvre ou inobservation des règles du présent code la protection complémentaire en matière de santé ou le bénéfice du droit à la déduction mentionnés à l'article L. 863-2 ;

4° Les agissements visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir par toute fausse déclaration, man'uvre ou inobservation des règles du code de l'action sociale et des familles l'admission à l'aide médicale de l'Etat mentionnée au premier alinéa de l'article L. 251-1 du même code ;

5° Le refus d'accès à une information, l'absence de réponse ou la réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d'information, d'accès à une information ou à une convocation émanant de l'organisme local d'assurance maladie ou du service du contrôle médical, de la caisse mentionnée à l'article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles dans le cadre d'un contrôle, d'une enquête ou d'une mise sous accord préalable prévus aux articles L. 114-9 à L. 114-21, L. 162-1-15, L. 162-1-17, L. 162-1-20 et L. 315-1 ;

6° Une récidive après deux périodes de mise sous accord préalable en application de l'article L. 162-1-15 ou lorsque le médecin n'atteint pas l'objectif de réduction des prescriptions ou réalisations prévu au II du même article ;

7° Les abus constatés dans les conditions prévues au II de l'article L. 315-1 ;

8° (Abrogé) ;

9° Toute fausse déclaration portée sur la déclaration d'accident du travail ou tout non-respect par les employeurs des obligations relatives à ladite déclaration ou à la remise de la feuille d'accident à la victime ;

10° Le fait d'organiser ou de participer au fonctionnement d'une fraude en bande organisée.

III.-Le montant de la pénalité mentionnée au I est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés, soit proportionnellement aux sommes concernées dans la limite de 70 % de celles-ci, soit, à défaut de sommes déterminées ou clairement déterminables, réserve faite de l'application de l'article L. 162-1-14-2, forfaitairement dans la limite de quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale. Il est tenu compte des prestations servies au titre de la protection complémentaire en matière de santé et de l'aide médicale de l'Etat pour la fixation de la pénalité.

En cas de man'uvre frauduleuse ou de fausse déclaration, le montant de la pénalité ne peut être inférieur au montant des sommes concernées, majoré d'une pénalité dont le montant est fixé dans la limite de quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale.

Le montant de la pénalité est doublé en cas de récidive dans un délai fixé par voie réglementaire.

IV.-Le directeur de l'organisme local d'assurance maladie, de la caisse mentionnée à l'article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles notifie les faits reprochés à la personne physique ou morale en cause afin qu'elle puisse présenter ses observations dans un délai fixé par voie réglementaire. A l'expiration de ce délai, le directeur :

1° Décide de ne pas poursuivre la procédure ;

2° Notifie à l'intéressé un avertissement ;

3° Ou saisit la commission mentionnée au V. A réception de l'avis de la commission, le directeur :

a) Soit décide de ne pas poursuivre la procédure ;

b) Soit notifie à l'intéressé un avertissement ;

c) Soit notifie à l'intéressé la pénalité qu'il décide de lui infliger, en indiquant le délai dans lequel il doit s'en acquitter ou les modalités selon lesquelles elle sera récupérée sur les prestations à venir. La pénalité est motivée et peut être contestée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale.

En l'absence de paiement de la pénalité dans le délai prévu, le directeur envoie une mise en demeure à l'intéressé de payer dans un délai fixé par voie réglementaire. Lorsque la mise en demeure est restée sans effet, le directeur peut délivrer une contrainte qui, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, comporte tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire. Une majoration de 10 % est applicable aux pénalités qui n'ont pas été réglées aux dates d'exigibilité mentionnées dans la mise en demeure.

La pénalité peut être recouvrée par retenues sur les prestations à venir. Il est fait application pour les assurés sociaux de l'article L. 133-4-1.

Les faits pouvant donner lieu au prononcé d'une pénalité se prescrivent selon les règles définies à l'article 2224 du code civil. L'action en recouvrement de la pénalité se prescrit par deux ans à compter de la date d'envoi de la notification de la pénalité par le directeur de l'organisme concerné.

Le directeur ne peut concurremment recourir au dispositif de pénalité prévu par le présent article et aux procédures conventionnelles visant à sanctionner les mêmes faits.

V.-La pénalité ne peut être prononcée qu'après avis d'une commission composée et constituée au sein du conseil ou du conseil d'administration de l'organisme local d'assurance maladie, de la caisse mentionnée à l'article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles. Lorsqu'est en cause une des personnes mentionnées au 3° du I, des représentants de la même profession ou des établissements concernés participent à cette commission.

La commission mentionnée au premier alinéa du présent V apprécie la responsabilité de la personne physique ou morale dans la réalisation des faits reprochés. Si elle l'estime établie, elle propose le prononcé d'une pénalité dont elle évalue le montant.

L'avis de la commission est adressé simultanément au directeur de l'organisme et à l'intéressé.

VI.-Lorsque plusieurs organismes locaux d'assurance maladie, plusieurs caisses mentionnées aux articles L. 215-1 ou L. 215-3 ou l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles sont concernés par les mêmes faits mettant en cause une des personnes mentionnées au 3° ou au 4° du I, ils peuvent mandater le directeur de l'un d'entre eux pour instruire la procédure ainsi que pour prononcer et recouvrer la pénalité en leur nom.

La constitution et la gestion de la commission mentionnée au V peuvent être déléguées à un autre organisme local d'assurance maladie, une autre caisse mentionnée aux articles L. 215-1 ou L. 215-3 ou à l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles par une convention qui doit être approuvée par les conseils d'administration des organismes concernés.

VII.-En cas de fraude établie dans des cas définis par voie réglementaire :

1° Le directeur de l'organisme local d'assurance maladie, des caisses mentionnées aux articles L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l'organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles peut prononcer une pénalité sans solliciter l'avis de la commission mentionnée au V ;

2° Les plafonds prévus au premier alinéa du III sont portés respectivement à 200 % et quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale. Dans le cas particulier de fraude commise en bande organisée, le plafond est porté à 300 % des sommes indûment présentées au remboursement dans la limite de huit fois le plafond mensuel de la sécurité sociale ;

3° La pénalité prononcée ne peut être inférieure au dixième du plafond mensuel de la sécurité sociale s'agissant des personnes mentionnées au 1° du I, à la moitié du plafond s'agissant des personnes physiques mentionnées au 3° du même I et au montant de ce plafond pour les personnes mentionnées au 2° du même I et les personnes morales mentionnées au 3° du même I ;

4° Le délai mentionné au dernier alinéa du III est majoré par voie réglementaire.

VII bis.-Les pénalités prononcées en application du présent article sont notifiées après avis conforme du directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie ou de son représentant désigné à cet effet. Son avis est réputé conforme dans un délai précisé par voie réglementaire.

VIII.-Les modalités d'application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d'Etat.'.

L'article R. 147-2 du même code précise que :

'I.-Lorsqu'il a connaissance de faits susceptibles de faire l'objet de la pénalité financière mentionnée à l'article L. 114-17-1, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles adresse à la personne physique ou morale en cause la notification prévue à cet article par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Lorsque ces faits ont donné lieu à l'engagement de la procédure mentionnée à l'article L. 315-1, la notification ne peut intervenir qu'à l'issue de cette procédure. Cette notification précise les faits reprochés et le montant de la pénalité encourue et indique à la personne en cause qu'elle dispose d'un délai d'un mois à compter de sa réception pour demander à être entendue, si elle le souhaite, ou pour présenter des observations écrites.

Lorsque la procédure de sanction est engagée à l'encontre d'un établissement de santé ou d'un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie en informe simultanément le directeur général de l'agence régionale de santé.

A l'issue du délai d'un mois à compter de la notification ou après audition de la personne en cause, si celle-ci intervient postérieurement à l'expiration de ce délai, le directeur l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles peut :

1° Soit décider d'abandonner la procédure. Dans ce cas, il en informe ladite personne dans les meilleurs délais ;

2° Soit, dans un délai de quinze jours, prononcer un avertissement, sauf si les faits relèvent des cas prévus aux 3° et 4° du II de l'article L. 114-17-1. L'avertissement précise les voies et délais de recours. Il en informe simultanément la commission prévue à l'article L. 114-17-1 ; (...)'.

Contrairement à ce que soutient la caisse, l'information de la commission des pénalités est également prévue dans l'hypothèse où même seul un avertissement est envisagé, sans pénalité financière, mais il n'est pas prévu que la commission doive émettre un avis pour que l'avertissement puisse être délivré alors que cela est nécessaire lorsqu'une pénalité financière est envisagée.

La communication préalable de l'avertissement envisagé à la commission des pénalités n'est donc pas prévue à peine de nullité, ainsi que l'a justement souligné la caisse.

Annoncée et prononcée à l'issue d'une procédure de contrôle dont la régularité a été vérifiée ci-dessus, la sanction est intervenue dans le respect du principe du contradictoire à l'égard de la professionnelle de santé qui ne peut donc en obtenir la nullité de ce chef.

Alors, ainsi que le tribunal l'a fait, il convient ici de contrôler la proportionnalité et l'adéquation de la sanction à la faute reprochée.

En l'espèce, il a été exposé ci-dessus qu'un indu a été justement relevé consécutivement aux erreurs commises par la professionnelle de santé qui a reconnu, lors de l'entretien du 30 novembre 2017, leur commission par méconnaissance de la CCAM.

Cette méconnaissance des règles applicables à sa profession habituelle, ayant entraîné des erreurs de facturation et de cotation des actes chirurgicaux, caractérise à elle seule une inobservation fautive dont la sanction est prévue par l'article L. 114-7-1 sus-visé.

En limitant la sanction au prononcé d'un simple avertissement sans pénalité financière, la caisse a fait preuve de modération dans son pouvoir de sanction et reste à la hauteur des erreurs commises susceptibles d'entraîner un préjudice financier à l'équilibre du système de sécurité sociale.

Le jugement du 27 novembre 2019 sera donc confirmé.

Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Partie succombante à l'instance, la professionnelle de santé sera tenue aux dépens et sera condamnée à payer à la caisse la somme de 3 500 euros qu'il est équitable de fixer en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle sera pour sa part déboutée de la demande qu'elle a formée sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME en toutes leurs dispositions les jugements (RG n° 18/00687 et RG

n°19/00879) prononcés les 29 juillet 2019 et 27 novembre 2019 par le pôle social du

tribunal de grande instance de Bobigny ;

CONDAMNE Mme le docteur [G] [Z] à verser à la somme de 3 500

euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme le docteur [G] [Z] aux entiers dépens.

Le greffier La présidente