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Décisions

CA Rouen, 1re ch. civ., 27 novembre 2024, n° 24/01582

ROUEN

Arrêt

Autre

CA Rouen n° 24/01582

27 novembre 2024

N° RG 24/01582 - N° Portalis DBV2-V-B7I-JUVG

COUR D'APPEL DE ROUEN

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRET DU 27 NOVEMBRE 2024

DÉCISION DÉFÉRÉE :

23/02637

Tribunal judiciaire de Rouen du 11 avril 2024

APPELANTS :

Madame [K] [W]

née le 12 novembre 1996 à [Localité 17]

[Adresse 7]

[Localité 13]

représentée et assistée par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de Dieppe

Monsieur [X] [U]

né le 14 septembre 1995 à [Localité 17]

[Adresse 7]

[Localité 13]

représenté et assisté par Me Pascale RONDEL de la SAS FORTIUM CONSEIL, avocat au barreau de Dieppe

INTIMES :

Monsieur [E] [R]

né le 11 janvier 1973 à [Localité 16]

[Adresse 15]

[Localité 10]

représenté par Me Audrey GOMEZ, avocat au barreau de Rouen et assisté par Me Olivier FOURGEOT, avocat au barreau de Paris

Monsieur [A] [M]

né le 21 novembre 1977 à [Localité 16]

[Adresse 3]

[Localité 11]

représenté et assisté par Me Thomas DUGARD de la SELARL VD & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen

Madame [B] [G] épouse [M]

née le 23 mai 1973 à [Localité 17]

[Adresse 3]

[Localité 11]

représentée et assistée par Me Thomas DUGARD de la SELARL VD & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen

Monsieur [V] [P] exerçant sous l'enseigne AZ ETANCHEITE

[Adresse 4]

[Localité 9]

non constitué bien que régulièrement assigné par acte de commissaire de justice remis le 21 mai 2024 à domicile

Maître [N] [Y]

ès qualités de mandataire judiciaire de la société CDR CONSTRUCTION

[Adresse 2]

[Localité 17]

non constitué bien que régulièrement assigné par acte de commissaire de justice remis le 21 mai 2024 à domicile

SAMCV SMABTP

RCS de Paris 775 684 764

[Adresse 14]

[Localité 8]

représentée par Me Caroline SCOLAN de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de Rouen et assistée de Me Nicolas BARRABE, avocat au barreau de Roen

SAS COMPAGNIE CLEROISE DE MACONNERIE

RCS de Rouen 402 090 997

[Adresse 6]

[Localité 12]

représentée et assistée par Me Jérôme VERMONT de la SELARL VERMONT TRESTARD & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen substitué par Me ALPHONSE

GROUPAMA CENTRE MANCHE

RCS de Chartres 383 853 801

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée et assistée par Me Jérôme VERMONT de la SELARL VERMONT TRESTARD & ASSOCIES, avocat au barreau de Rouen substitué par Me ALPHONSE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 18 septembre 2024 sans opposition des avocats devant Mme Magali DEGUETTE, conseillère, rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

Mme Edwige WITTRANT, présidente de chambre

Mme Magali DEGUETTE, conseillère

Mme Véronique BERTHIAU-JEZEQUEL, présidente de chambre

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Catherine CHEVALIER

DEBATS :

A l'audience publique du 18 septembre 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 novembre 2024

ARRET :

PAR DEFAUT

Prononcé publiquement le 27 novembre 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

signé par Mme WITTRANT, présidente et par Mme CHEVALIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

*

* *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 13 décembre 2012, M. [A] [M] et Mme [B] [G] son épouse ont conclu avec la Sas Cdr Constructions, assurée auprès de la Smabtp, un contrat de construction d'une maison individuelle sur un terrain situé [Adresse 18], [Localité 13].

Le procès-verbal de réception a été signé le 10 juillet 2014 avec réserves.

Le 25 août 2020, M. et Mme [M] ont vendu leur maison à M. [E] [R], qui l'a revendue le 23 mai 2022 à M. [X] [U] et à Mme [K] [W].

Déplorant des problèmes d'étanchéité au niveau de la toiture-terrasse de leur maison, M. [U] et Mme [W] ont déclaré ce sinistre à la Smabtp, assureur dommages-ouvrage, le 7 décembre 2022.

Celle-ci leur a répondu le 14 décembre 2022 que M. et Mme [M], qui avaient fait une déclaration de sinistre en 2015, avaient été indemnisés à hauteur de

44 361,35 euros TTC pour la reprise totale de l'étanchéité des trois modules de la toiture. Elle a refusé sa garantie aux motifs que les désordres dénoncés concernaient un ouvrage repris et engageaient la responsabilité décennale de l'entreprise qui avait réalisé les travaux de reprise.

Par actes de commissaire de justice des 16, 19, et 20 juin 2023, M. [U] et Mme [W] ont fait assigner M. [R], M. et Mme [M], la Sas Cdr Constructions, la Smabtp, la Sas Compagnie Cléroise de Bâtiment, chargée du lot gros oeuvre et aux droits de laquelle vient aujourd'hui la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie, et son assureur la société Groupama Centre Manche devant le tribunal judiciaire de Rouen. Ils ont demandé à titre principal la résolution judiciaire de leur contrat de vente et, à titre subsidiaire, la condamnation solidaire de M. [R] et de M. et Mme [M] à prendre en charge à titre provisionnel la totalité des désordres déclarés et tous les travaux de reprise et d'embellissement ayant fait l'objet de devis, ainsi que la réalisation d'une expertise au contradictoire de toutes les parties mises en cause.

Suivant exploit du 3 janvier 2024, M. et Mme [M] ont appelé en garantie M. [V] [P], exerçant sous l'enseigne Az Etanchéité, intervenu pour des travaux de reprise à la suite de la signature du protocole d'accord en mars 2018.

Par ordonnance du 11 avril 2024, le juge de la mise en état a :

- déclaré irrecevable l'action engagée contre Groupama Centre Manche et la société Cléroise de Maçonnerie en raison de la transaction,

- ordonné la jonction des deux instances 23/2637 et 24/117 sous le numéro 23/2637,

- rejeté la demande d'expertise formulée par Mme [W] et M. [U],

- réservé les dépens qui suivront le sort de ceux de l'instance au fond,

- rejeté le surplus des demandes,

- renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience de mise en état du 11 septembre 2024 à 9 heures, à laquelle les parties sont invitées à déposer leurs conclusions au fond,

- rappelé que les parties peuvent, à tout moment, choisir d'avoir recours à un mode de règlement amiable de leur litige,

- invité les parties à communiquer leur éventuel accord sur l'application de l'article 799 du code de procédure civile (dépôt de dossiers au greffe sans plaidoiries).

Par déclaration du 30 avril 2024, M. [U] et Mme [W] ont formé un appel contre l'ordonnance en toutes ses dispositions à l'encontre de toutes les parties, outre Me [N] [Y], ès qualités de mandataire judiciaire de la Sas Cdr Constructions placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Rouen du 29 février 2024.

Par décision du président de chambre du 13 mai 2024, l'affaire a été fixée à l'audience du 18 septembre 2024 suivant les modalités prévues par les articles 905 et suivants du code de procédure civile dans leur version applicable à ce litige.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 12 juillet 2024 et signifiées à Me [Y] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sas Cdr Constructions placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Rouen du 23 avril 2024 et à M. [P] le 16 juillet 2024, M. [U] et Mme [W] demandent de voir en application des articles 789-5 et 145 du code de procédure civile :

- réformer la décision entreprise,

- constater que leurs conclusions sont dirigées à l'encontre de la Smabtp pour les contrats d'assurances dommages-ouvrage n°9829000/001 333679/590 et Rc et Rcd en qualité d'assureur de la Sas Cdr Constructions n°9809 suivant les attestations d'assurance et que leurs demandes à son encontre sont bien affectées à ces différents contrats et, en conséquence, sont interruptives de toutes prescriptions au titre de la garantie décennale,

- ordonner une expertise judiciaire au contradictoire de toutes les parties mises en cause,

- désigner tel expert qu'il plaira au tribunal de nommer avec mission de :

. convoquer les parties,

. se faire remettre tous documents utiles à l'accomplissement de sa mission, notamment le rapport de M. [T],

. se rendre sur les lieux et visiter la maison d'habitation de M. [X] [U] et Mme [K] [W],

. décrire les désordres dont elle est atteinte,

. examiner les désordres, malfaçons, défauts de conformité avec les règlementations, . dire que l'expert devra se positionner sur les conditions de reprise de la toiture,

. donner tous avis qui s'imposent,

. lister les remèdes à y apporter et les chiffrer,

. être autorisé à entendre tous sachants,

. dire si les désordres et les malfaçons peuvent être repris et, dans l'affirmative, dans quelles conditions,

. chiffrer les travaux de reprise,

. se faire communiquer par le défendeur, et si besoin est par la compagnie d'assurance Smabtp, le rapport d'expertise de M. [T] afin qu'il puisse pointer désordre par désordre, et sur la base également du constat d'huissier, l'ensemble des points de sinistres évoqués dans le rappel des faits et de la procédure,

. comparer les désordres existants avec les désordres antérieurs, relevés dans le rapport d'expertise de M. [T],

. dire si ces désordres ont été réparés,

. dire si ces désordres ont fait l'objet de reprises partielles,

. dire si ces désordres, après réparation, ont été aggravés,

. ou dire si ces désordres n'ont jamais été repris,

. demander aux actuels propriétaires de faire chiffrer par des entreprises la reprise de l'ensemble de ces désordres outre l'ensemble des préjudices soufferts (dégâts des eaux systématiques),

- fixer la consignation à valoir sur la rémunération de l'expert,

- désigner le juge chargé du contrôle des expertises,

- dire que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et que, sauf conciliation des parties, il déposera son rapport au secrétariat greffe de ce tribunal dans les deux mois de sa saisine,

- rejeter la demande des intimés d'avoir à les condamner au paiement des frais de procédure, article 700,

- condamner solidairement M. et Mme [M], M. [R], et/ou tout succombant, à leur régler la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dans tous les cas,

- condamner tout succombant aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Pascale Rondel pour ceux dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu préalablement provision.

Ils exposent déduire des pièces qu'ils ont obtenues qu'a priori, compte tenu des désordres constatés par le commissaire de justice, les réparations soumises à indemnisation dans le cadre du protocole d'accord régularisé n'ont jamais été effectuées ou l'ont été uniquement très partiellement, ce qui leur occasionne une situation complexe au regard des vices et de leur importance ; que, compte tenu des montants des devis de reprise, ils justifient d'un intérêt légitime à la réalisation d'une expertise.

Ils ajoutent que personne ne sait à ce jour si M. [R] ou si M. et Mme [M] ont effectué pour partie ou pas les travaux à la suite des indemnisations perçues, le cas échéant s'ils l'ont été dans de bonnes conditions et conformément aux préconisations de l'expert judiciaire, et si les désordres se sont aggravés mettant ainsi en cause l'application de la garantie décennale qui va expirer prochainement ; qu'une expertise est nécessaire pour faire le point des diligences de l'ensemble des parties sur la réalisation des travaux et afin que les entreprises mises en cause justifient de leur bonne fin et s'ils ont été réalisés dans les règles de l'art ; que cette mesure est également nécessaire pour chiffrer le montant de l'ensemble des préjudices soufferts.

Ils répondent sur le moyen d'irrecevabilité opposé par les sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche que les autres intimés ont soulevé cette question et demandent à ce que ces deux sociétés soient maintenues dans la cause.

Par dernières conclusions notifiées le 11 juillet 2024, la Smabtp sollicite, en vertu des articles 9 et 144 du code de procédure civile, 1104 et 1341 du code civil, de :

- se voir recevoir en son appel incident et y faisant droit,

- voir infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Rouen du 11 avril 2024 en ce qu'elle :

. déclare irrecevable l'action engagée contre Groupama Centre Manche et la société Cléroise de Maçonnerie en raison de la transaction,

. rejette la demande d'expertise formulée par Mme [W] et M. [U] à l'encontre de toutes les parties qu'ils ont mises en cause dont la compagnie Groupama Centre Manche et la société Cléroise de Maçonnerie,

. réserve les dépens et rejette le surplus des demandes,

et statuant à nouveau :

- voir ordonner l'expertise judiciaire demandée par Mme [W] et M. [U] à l'encontre de toutes les parties dans la cause dont la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie, la compagnie Groupama Centre Manche, M. [P] exerçant sous l'enseigne Az Etanchéité, M. [R], M. et Mme [M],

- se voir recevoir en ses protestations et réserves sur la demande d'expertise présentée par M. [U] et Mme [W],

- voir ordonner que la mission d'expertise sera limitée aux seuls désordres énoncés dans les conclusions de M. [U] et de Mme [W] et les pièces auxquelles elles se réfèrent,

- voir préciser la mission de l'expert ainsi qu'il suit :

¿ constater et décrire les désordres,

¿ dire s'ils affectent l'ouvrage ou l'un de ses éléments d'équipement,

¿ dire s'ils compromettent la solidité de l'ouvrage ou s'ils le rendent impropre à sa destination,

¿ dire si les désordres décrits dans l'assignation et les conclusions de M. [U] et Mme [W] existent et s'ils sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ou à porter atteinte à sa solidité,

¿ dire si les désordres dont se plaignent M. [U] et Mme [W] sont imputables aux travaux d'origine et/ou aux travaux de réparation exécutés postérieurement au dépôt du rapport d'expertise de M. [T] du 30 juin 2017,

¿ donner au juge tous éléments pour apprécier l'imputabilité des désordres actuels, en particulier préciser s'ils sont en tout ou partie imputables à la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie,

¿ dire que l'expert décrira et chiffrera les travaux de reprise à l'aide de devis qu'il recueillera des parties,

¿ dire que l'expert déposera une note de synthèse ou un pré-rapport et laissera aux parties un délai raisonnable pour diffuser leurs derniers dires,

- voir rejeter toute demande à son encontre,

- voir condamner Mme [W] et M. [U] ou la Compagnie Groupama Centre Manche et la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie à lui payer la somme de

3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, en plus de tous les dépens de première instance et d'appel que la Selarl Gray Scolan, avocats associés, sera autorisée à recouvrer pour ceux la concernant conformément à l'article 699 du code précité.

En réplique au moyen des sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche sur l'irrecevabilité de sa demande d'infirmation de la disposition de l'ordonnance ayant déclaré irrecevable l'action contre celles-ci en raison de la transaction, elle fait valoir que sa demande, qui n'est pas faite au soutien de celle des appelants, n'est pas nouvelle ; que l'expertise sollicitée permettra seule de savoir si les désordres dénoncés sont les mêmes que ceux ayant fait l'objet des opérations d'expertise de M. [T] et ont abouti à la conclusion du protocole d'accord transactionnel qui a été exécuté ; qu'il est indispensable que les sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche soient parties aux futures opérations d'expertise judiciaire.

Elle soutient qu'en l'absence d'expertise judiciaire, il n'est pas possible d'affirmer que les désordres subis actuellement par les appelants sont identiques à ceux constatés et décrits par M. [T] dans son rapport d'expertise du 30 juin 2017, qu'il est donc nécessaire que cette mesure soit ordonnée ; que les travaux de réparation de ces dommages n'excluent pas une responsabilité totale ou partielle de la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie dans les dommages actuels.

Par dernières conclusions notifiées le 19 juillet 2024 et signifiées à M. [P] le 16 juillet 2024 et à Me [Y] ès qualités de liquidateur judiciaire de la Sas Cdr Constructions le 17 juillet 2024, M. et Mme [M] demandent, en application des articles 905-1, 548, 696 et 700 du code de procédure civile, de :

- se voir déclarer recevables et bien fondés dans l'ensemble de leurs demandes et prétentions,

- voir débouter l'ensemble des autres parties de l'ensemble de leurs demandes et prétentions plus amples et contraires, dont celles formulées à leur encontre,

- voir débouter la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche de toutes leurs demandes et prétentions tendant à ce que soit confirmée l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 11 avril 2024,

- voir infirmer et réformer partiellement cette ordonnance s'agissant des chefs critiqués suivants :

. déclarons irrecevable l'action engagée contre Groupama Centre Manche et la société Cléroise de Maçonnerie en raison de la transaction,

. rejetons la demande d'expertise formulée par Mme [W] et M. [U],

. réservons les dépens qui suivront le sort de ceux de l'instance au fond,

. rejetons le surplus des demandes,

. renvoyons l'examen de l'affaire à l'audience de mise en état du 11 septembre 2024 à 9 heures, à laquelle les parties sont invitées à déposer leurs conclusions au fond,

- voir confirmer celle-ci pour le surplus,

et statuant à nouveau et y ajoutant :

- voir ordonner une expertise judiciaire en désignant pour se faire tel expert qui plaira à la cour d'appel au contradictoire de M. [R], M. et Mme [M], Me [Y] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Cdr Constructions enregistrée sous le numéro Rcs 495 402 661 venant aux droits de la société Cdr Constructions enregistrée précédemment sous le numéro Rcs 388 976 029, radiée le 11 septembre 2019, la Smabtp ès qualités d'assureur dommages-ouvrage selon contrat n°98290000/001 333679/590, la Smabtp ès qualités d'assureur responsabilité civile décennale et responsabilité civile professionnelle de la Sas Cdr Constructions selon police n°9809, la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie venant aux droits de la compagnie Cléroise de Bâtiment, Groupama Centre Manche ès qualités d'assureur responsabilité civile décennale et responsabilité civile professionnelle de la Sas Compagnie Cléroise de Bâtiment, et M. [P] exerçant anciennement sous l'enseigne Az Etanchéité,

- voir ordonner que la mission confiée à l'expert dans le cadre d'une expertise judiciaire soit circonscrite aux seuls désordres énoncés dans l'assignation initiale, les conclusions d'incident des demandeurs et les pièces auxquelles elles se réfèrent, et qu'elle soit déclarée commune et opposable à l'ensemble des parties attraites à la procédure,

- voir compléter la mission d'expertise, ensemble les suggestions faites par la Smabtp, ainsi : décrire l'état du bien immobilier au jour de sa vente par M. et Mme [M] à M. [R] le 25 août 2020,

- voir ordonner le sursis à statuer de la procédure enregistrée sous le numéro 23/02637 pendante devant le tribunal judiciaire de Rouen jusqu'à ce que l'expert judiciaire désigné dépose son rapport d'expertise,

- se voir donner acte de ce que, sans aucune reconnaissance de responsabilité, ils formulent pour le surplus les protestations et réserves d'usage,

- voir condamner Mme [W] et M. [U] ou la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie et la compagnie Groupama Centre Manche à leur verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre les entiers dépens d'incident de première instance et en cause d'appel.

Ils font valoir que, si les sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche contestent la recevabilité des prétentions des appelants, elles ne contestent pas la recevabilité de l'appel principal de ces derniers, de sorte que les appels incidents formalisés sont recevables ; que les appelants, qui souhaitent la réalisation d'une expertise au contradictoire de ces deux sociétés, contestent par là même l'irrecevabilité retenue par le juge de la mise en état. Ils ajoutent qu'eux-mêmes ont présenté à titre personnel la prétention que la mesure d'expertise sollicitée soit déclarée commune et opposable aux sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche ; que cette demande au titre de leur appel incident est donc recevable.

Ils précisent qu'il n'y a pas besoin, au stade de la demande d'une expertise, d'exprimer des demandes de condamnation chiffrées pour considérer que des prétentions seraient émises par une partie à l'encontre d'une autre ; que les sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche ne peuvent pas affirmer qu'aucune prétention ne serait formulée par eux à leur encontre, ni que les désordres dénoncés sont dus à la non-réalisation des travaux par eux ; qu'elles ne démontrent pas que ces désordres sont exclusivement en lien avec les causes des désordres indemnisées et les zones affectées à l'époque ; que l'irrecevabilité retenue par le juge de la mise en état revient à préjuger du fond du dossier, ce qui ne ressort pas de sa compétence, et à les priver eux-mêmes et les propriétaires actuels d'une garantie contre les constructeurs et leurs assureurs.

Ils exposent que l'expertise s'impose aux motifs que les désordres dénoncés par les appelants n'ont pas été constatés contradictoirement, ce qui exclut l'affirmation du juge de la mise en état selon laquelle ces désordres seraient les mêmes que ceux constatés et décrits par M. [T] ; que le protocole régularisé en 2018 ne porte pas sur une zone de la toiture-terrasse laquelle est aujourd'hui affectée par les désordres allégués ; qu'il n'est pas établi que les causes et les origines de ces désordres seraient les mêmes que celles indemnisées à l'époque du protocole d'accord ; qu'enfin, des travaux de reprise ont eu lieu entre temps notamment par le biais de l'entreprise Az Etanchéité. Ils en déduisent en outre que la responsabilité des sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche ne peut être écartée.

Par dernières conclusions notifiées le 14 juin 2024, M. [R] demande de :

- se voir donner acte de ce qu'il formalise sur la demande d'expertise toutes protestations et réserves,

- voir infirmer l'ordonnance dont appel,

- voir débouter pour le surplus les parties de toutes leurs demandes.

Il soutient que c'est à tort que le juge de la mise en état a rejeté la demande d'une mesure d'instruction alors même qu'il convient d'appréhender la réalisation des travaux par M. et Mme [M] au regard des indemnisations, ainsi que leur conformité au regard des conclusions du rapport d'expertise et du respect des règles de l'art, et l'apparition de nouveaux désordres et d'une manière générale toute cause ayant concouru à l'apparition ou l'aggravation des désordres dénoncés par les appelants.

Il ajoute qu'il est indispensable que l'expertise ait lieu pour voir constater qu'il est étranger aux désordres constatés qui sont imputables à ses propres vendeurs qui n'ont pas exécuté les travaux, objet de l'indemnisation par les assureurs.

Par dernières conclusions notifiées le 19 juin 2024, la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie et la Caisse de Réassurance Mutuelle Agricole du Centre Manche (Groupama Centre Manche) sollicitent de voir sur la base des articles 122, 146, 564 et 954 du code de procédure civile, 1103 et 2052 du code civil :

à titre principal,

- confirmer l'ordonnance de mise en état du 11 avril 2024 en ce qu'elle a déclaré l'action engagée contre elles irrecevable en raison de la transaction,

- ordonner leur mise en cause,

- débouter toutes parties de toutes demandes dirigées à leur encontre,

- condamner in solidum Mme [W], M. [U] et, à défaut, toutes parties succombantes à payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et 3 000 euros en appel, en plus des entiers dépens,

à titre subsidiaire,

- déclarer qu'elles s'en rapportent à justice sur la demande d'expertise et formulent protestations et réserves,

- rejeter les chefs de mission sollicités suivants :

. décrire les désordres dont elle est atteinte,

. se faire communiquer par le défendeur, et si besoin par la compagnie d'assurance Smabtp, le rapport d'expertise de M. [T] afin qu'il puisse pointer désordre par désordre, et sur la base également du constat d'huissier, l'ensemble des points de sinistres évoqués dans le rappel des faits et de la procédure,

. demander aux actuels propriétaires de faire chiffrer par des entreprises la reprise de l'ensemble de ces désordres, outre l'ensemble des préjudices soufferts (dégâts des eaux systématiques),

- ordonner les chefs de mission suivants :

. décrire les désordres tels que dénoncés dans l'assignation, les conclusions d'incident et les pièces de Mme [W] et M. [U],

. décrire et chiffrer les travaux de reprise sur la base de devis fournis par les parties,

. dire si les désordres étaient visibles ou connus au moment de la réception de l'ouvrage ainsi qu'au moment des ventes successives du bien immobilier,

- rejeter toutes demandes de condamnation et/ou de garantie formulées à leur encontre notamment au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elles soutiennent qu'aux termes de leurs conclusions, Mme [W] et M. [U] se bornent à solliciter la réformation de l'ordonnance entreprise et la réalisation d'une expertise au contradictoire de toutes les parties mises en cause et ne demandent pas à ce que leur action formée contre elles soit déclarée recevable, de sorte que la cour d'appel, qui n'est pas saisie d'une telle demande, ne peut pas infirmer l'ordonnance qui l'a déclarée irrecevable et en tout état de cause ne pourra que la confirmer sur ce chef.

Elles ajoutent que, de leur côté, M. et Mme [M], qui ne formulent aucune prétention à leur encontre, ne peuvent pas, en application de l'adage selon lequel nul ne plaide par procureur, demander l'infirmation de l'ordonnance ayant déclaré irrecevable l'action engagée contre elles ; que les prétentions de M. et Mme [M] développées en cause d'appel sont irrecevables.

Elles précisent que la demande de la Smabtp, aux fins d'infirmation de la disposition de l'ordonnance déclarant irrecevable l'action engagée contre elles en raison de la transaction, est nouvelle car non soutenue devant le juge de la mise en état et ne peut reprendre les prétentions de Mme [W] et de M. [U] déclarées irrecevables en première instance ; que la Smabtp est irrecevable en ses demandes dirigées contre elles.

Au soutien de l'irrecevabilité de l'action initiée à leur encontre, elles allèguent que l'acquéreur, subrogé dans les droits du vendeur, peut se voir opposer toutes les exceptions opposables à celui-ci ; que la formulation générale de la demande des appelants aux fins d'expertise n'est pas recevable dès lors qu'une telle mesure n'a pas vocation à pallier la carence de la preuve d'une partie et ne peut constituer un audit ; que les désordres dénoncés par les appelants sont les mêmes que ceux ayant fait l'objet des opérations d'expertise de M. [T] et ayant abouti à la conclusion d'un protocole d'accord transactionnel auquel elles étaient parties et qui a été exécuté ; qu'au surplus, ces désordres étaient visibles au moment de la vente et ne nécessitaient pas d'investigations ; que si l'action de Mme [W] et de M. [U] intentée contre leur vendeur et contre M. et Mme [M] est compréhensible car des informations leur ont été dissimulées au jour de la vente, ceci ne la rend pas recevable à leur égard.

Elles ajoutent que M. et Mme [M] ne produisent qu'une facture de travaux d'étanchéité limités à 10 368,56 euros TTC, alors que les travaux prévus au protocole étaient bien plus conséquents, qu'ainsi, ils n'ont pas mis un terme aux désordres pour lesquels ils ont été justement indemnisés ; que la Sas Compagnie Cléroise de Maçonnerie, qui n'a pas réalisé les travaux d'étanchéité, n'est pas concernée par la troisième toiture-terrasse, qu'il n'y a pas d'imputabilité.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens, il est renvoyé aux écritures des parties ci-dessus.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 18 septembre 2024. A cette date, M. [P] et Me [Y] ès qualités de mandataire judiciaire de la Sas Cdr Constructions, à qui la déclaration d'appel avait été signifiée le 21 mai 2024 à domicile, n'avaient pas constitué avocat.

A l'audience des plaidoiries, le conseiller rapporteur a sollicité la production par l'avocate des appelants de la signification de la déclaration d'appel à la Sas Cdr Constructions.

Par courriel du 19 septembre 2024, Me [S] a fait parvenir un exemplaire de la signification le 21 mai 2024 de la déclaration d'appel à Me [Y] ès qualités de mandataire judiciaire de la Sas Cdr Constructions.

MOTIFS

Sur l'irrecevabilité de l'action contre les sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche

1) Sur la recevabilité des prétentions formées contre cette disposition de l'ordonnance

L'article 954 du code de procédure civile dans sa version applicable à ce litige énonce que les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs en vigueur.

En l'espèce, aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions, M. [U] et Mme [W] ont sollicité la réformation de la décision entreprise, mais n'ont pas demandé que leur action engagée contre les sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche soit déclarée recevable.

Il en est de même de la Smabtp.

En revanche, M. et Mme [M], qui ont également sollicité l'infirmation de la disposition de l'ordonnance selon laquelle l'action engagée contre ces deux sociétés était irrecevable, ont demandé de voir débouter ces dernières de leurs prétentions tendant à la confirmation de cette ordonnance.

Il s'en déduit que, s'opposant à cette disposition de l'ordonnance, ils sollicitent par là même la recevabilité de leur action engagée dans leur intérêt personnel, et non pas pour le compte des appelants, à l'encontre de ces deux sociétés afin que l'expertise judiciaire soit ordonnée au contradictoire de celles-ci.

Le recours de M. et Mme [M] est donc recevable.

2) Sur le bien-fondé de cette disposition de l'ordonnance

L'article 122 du code de procédure civile prévoit que constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Selon l'article 2048 du code civil, les transactions se renferment dans leur objet : la renonciation qui y est faite à tous droits, actions et prétentions, ne s'entend que de ce qui est relatif au différend qui y a donné lieu.

L'article 2049 du même code précise que les transactions ne règlent que les différends qui s'y trouvent compris, soit que les parties aient manifesté leur intention par des expressions spéciales ou générales, soit que l'on reconnaisse cette intention par une suite nécessaire de ce qui est exprimé.

L'article 2052 du même code énonce que la transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet.

En l'espèce, à l'issue du rapport du 30 juin 2017 de l'expertise judiciaire réalisée par M. [T], désigné en référé à la demande de M. et Mme [M] au contradictoire de la Sas Cdr Constructions, de la Smabtp, de la Sas Compagnie Cléroise de Bâtiment et de Groupama Centre manche, ces parties se sont rapprochées et ont conclu les 16 et 29 mars 2018 un protocole d'accord transactionnel. Celui-ci prévoit notamment :

'Article 1 : Le montant total des dommages matériels s'élève à la somme de 77 850,35 €, se décomposant comme suit :

- 24 900 € au titre de la reprise des acrotères,

- 7 100 € au titre de la reprise de l'enduit,

- 2 882 € au titre de la reprise du réseau EU,

- 4 020 € au titre de la reprise de la porte du garage,

- 26 448,35 € au titre de la reprise de la terrasse principale, zone salon fuyarde et de conséquences afférentes,

- 12 500 € au titre de la reprise de la terrasse zone garage et des conséquences afférentes.

Le montant total des dommages consécutifs s'élève à la somme totale de 47 757,52 €, se décomposant comme suit :

- 11 000 € au titre des frais de préparation de chantier,

- 2 500 € au titre de la souscription d'une assurance Dommages Ouvrage,

- 9 000 € au titre de la maîtrise d'oeuvre,

- 5 000 €uros au titre du préjudice moral et de jouissance,

- 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- 15 356,67 € au titre des frais d'expertise,

- 900,85 € au titre des dépens.

Il est convenu que :

GROUPAMA CENTRE MANCHE s'engage prendre à sa charge :

' 24 900 € pour reprise des acrotères et de l'enduit de façade

' 2 882 € pour reprise des réseaux EU

' Soit 35,68 % des dommages matériels

' 3 924,80 € au titre des frais de préparation de chantier

' 892 € au titre de l'assurance DO

' 3 211,20 € de MOE

' 1427,20 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

' 5 479,25 € au titre des frais d'expertise

' 321,42 € au titre des dépens de référé et de fond

Soit une somme totale de 43 037,87 € qui sera réglée par chèque CARPA remis au conseil des époux [M] après régularisation du protocole par l'ensemble des parties.

[...]

La société COMPAGNIE CLEROISE DE BATIMENT s'engage à prendre à sa charge la somme de 1 784 € au titre du préjudice moral et de jouissance des époux [M] ; correspondant au prorata du montant total des dommages.

Cette somme sera réglée par chèque CARPA remis au conseil des époux [M] après régularisation du protocole par l'ensemble des parties.

[...]

Il convient de préciser que seules deux terrasses sur trois (celle au-dessus du salon et celle au-dessus du garage, cf. annexe 1) font l'objet d'une prise en charge faute d'infiltrations constatées sur la troisième.

M/Mme [M] conserveront le bénéfice de leur contrat Dommages-Ouvrage et de la garantie décennale s'agissant de la troisième terrasse, et bénéficieront le cas échéant d'une prise en charge en cas d'apparition de désordres de nature décennale dans le délai d'épreuve.

[...]

Article 2 :

En contrepartie, Madame [B] [M] et Monsieur [A] [M], s'estiment parfaitement remplis de leurs droits concernant les désordres évoqués au stade des opérations d'expertise et pour lesquels une indemnisation était sollicitée devant le TGI de ROUEN sous le n° RG 17/0379.

Ils renoncent définitivement et sans réserve à toute instance et action judiciaire engagée ou qu'ils auraient ou engager à l'encontre de la société CDR CONSTRUCTIONS 'MAISONS C.D.R.', de la SMABTP, de la société COMPAGNIE CLEROISE DE BATIMENT et de GROUPAMA CENTRE MANCHE relative aux désordres ayant fait l'objet de l'expertise ordonnée par le Tribunal de Grande Instance par ordonnance du 24 septembre 2015 et indemnisés, et conservent la garantie décennale s'agissant de la troisième terrasse, tel qu'évoqué à l'article 1.

[...]

Article 4 :

Un terme est ainsi mis de façon définitive à tous différends nés ou à naître entre les parties signataires pour les désordres listés ci-dessus qui ont fait l'objet du rapport d'expert judiciaire de M. [T] et de la procédure en cours devant le TGI de ROUEN n° RG 17/03799 ; tous comptes se trouvant définitivement réglés et apurés entre elles.

Par la présente, chacune des parties s'estime parfaitement remplie dans ses droits et obligations et renonce à toute demande, action judiciaire ou recours à l'encontre de la société CDR, de la SMABTP, de la société COMPAGNIE CLEROISE DU BATIMENT et de GROUPAMA CENTRE MANCHE au titre des désordres listés ci-dessus découlant de la construction par CDR de la maison de Monsieur et Madame [M].

[...]

Article 5 :

[...]

Il est expressément convenu entre les parties que le présent protocole d'accord constitue entre elles une transaction au sens des articles 2044 et suivants du Code Civil et revêt donc entre elles l'autorité de la chose jugée en dernier ressort, conformément aux dispositions de l'article 2053 du Code Civil.

Il vaut arrêté de compte entre les parties qui déclarent expressément et irrévocablement renoncer à toute autre prétention.'.

Le 24 janvier 2023, Me [Z], commissaire de justice, a constaté, aux termes de son procès-verbal dressé à la demande de M. [U], à l'intérieur de la maison, des taches noires au niveau du plafond des wc près de la bouche vmc et une grosse tache de moisissures sur la cloison dans le caisson de la vmc.

Il a relevé sur l'extérieur de la maison que :

- au-dessus du Wc, la toiture formait une contre-pente empêchant l'eau de s'évacuer,

- la toiture du salon présentait plusieurs contre-pentes empêchant l'eau de s'évacuer sur la toiture,

- l'évacuation des eaux pluviales était située à l'angle au-dessus des chambres et la façade du mur de la chambre sous ce conduit d'évacuation était recouverte d'humidité.

Le 9 mars 2023, il a relevé sur l'extérieur de la maison :

- un décollement d'enduit de la façade au pignon sud-ouest,

- des fissures sur les enduits de la façade sud, de la façade extérieure sud côté suite parentale, de la façade est, de la façade nord, de la façade ouest, sous l'acrotère en pignon nord-est, et sur l'enduit du mur de clôture,

- une rayure dans l'enduit de façade au-dessus de la bouche de ventilation basse,

- la dégradation de l'enduit à hauteur de l'attache de la gouttière sur la façade est au niveau du garage,

- l'absence de regard pluvial en façade sud,

- que la terrasse au pied de la façade est de la salle de sports était plus basse d'environ 2 à 3 centimètres et, sous le seuil de l'appui extérieur de la porte-fenêtre de la suite parentale, d'environ 6 à 7 centimètres,

- l'absence de margelle autour du bassin de la piscine,

- que le joint d'étanchéité sous le seuil de l'appui extérieur de la porte-fenêtre de la suite parentale était totalement déchiré,

- que le sol du garage était trempé côté nord le long du bâti de la porte sectionnelle,

- l'absence de couvertine sur le mur de clôture,

- la présence de plusieurs flaques d'eau sur le bloc sud-ouest et sur le bloc est de la toiture-terrasse,

- que les agglos étaient visibles à travers l'enduit de façade entre les deux portes-fenêtres de la salle de sport, sur la façade est, sur la façade nord, et sur le mur de clôture.

Or, l'expert judiciaire a notamment constaté les désordres suivants lors de ses réunions d'expertise des 16 décembre 2015, 27 octobre 2016, et 18 janvier 2017 :

- au niveau des enduits sur façades : la présence de traces, de défauts de planéité, et de multiples fissures, l'existence d'un trou dans l'enduit, l'apparition de spectres de parpaings,

- au niveau des seuils : une absence d'alignement ou de débord et des fissures sur les appuis de fenêtres,

- au niveau des acrotères dont la réalisation n'avait pas respecté le Dtu applicable,

- au niveau de l'étanchéité de la toiture-terrasse : choc sur les couvertines, décollement du relevé d'étanchéité sur acrotère,

- une mauvaise évacuation des eaux usées.

A l'exception de l'absence de margelle autour du bassin de la piscine et de couvertine sur le mur de clôture, de la présence d'eau au niveau du sol du garage côté nord le long du bâti de la porte sectionnelle et de taches noires au niveau du plafond des Wc près de la bouche Vmc et d'une grosse tache de moisissures sur la cloison dans le caisson de la Vmc, les désordres constatés par Me [Z] en 2023 sont les mêmes que ceux relevés par l'expert judiciaire lors des trois réunions d'expertise et ayant fait l'objet du protocole d'accord transactionnel des 16 et 29 mars 2018.

Les désordres affectant l'étanchéité de la toiture-terrasse principale au-dessus du salon (bloc central) et de celle de la toiture-terrasse zone garage, visés dans ce protocole, correspondent à ceux observés sur les deux blocs figurant sur les clichés photographiques pris par Me [Z] les 24 janvier et 9 mars 2023 pour matérialiser les désordres allégués par M. [U] et Mme [W].

La réparation des désordres qui font l'objet de la transaction, quelle qu'en soit la cause, a été définitivement fixée à la date de celle-ci. Cette transaction fait donc obstacle à l'introduction d'une action en justice ayant le même objet à l'encontre des sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie, venant aux droits de la Sas Compagnie Cléroise de Bâtiment, et Groupama Centre Manche.

La décision du juge de la mise en état l'ayant déclarée irrecevable eu égard à l'autorité de chose jugée attachée à la transaction précitée sur les désordres qu'elle vise sera confirmée.

Sur la demande d'expertise

Aux termes de l'article 789 du code de procédure civile dans sa version en vigueur au jour de l'assignation, lorsque la demande est présentée postérieurement à sa désignation, le juge de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation du tribunal, pour notamment : 5° ordonner, même d'office, toute mesure d'instruction.

L'article 144 du même code prévoit que les mesures d'instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause, dès lors que le juge ne dispose pas d'éléments suffisants pour statuer.

Aux termes de l'article 146 du même code, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver.

En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.

Comme l'a exactement souligné le juge de la mise en état, la condition du motif légitime, requise par l'article 145 du code de procédure civile qui ne s'applique qu'avant tout procès, n'est pas applicable en l'espèce.

M. [U] et Mme [W] sollicitent à titre principal la résolution judiciaire de leur contrat de vente conclu avec M. [R] sur le fondement de la garantie des vices cachés. A titre subsidiaire, ils demandent la condamnation de M. [R] et de M. et Mme [M] à les indemniser de leur préjudice matériel constitué par les devis de travaux de réfection de l'étanchéité de la toiture-terrasse et de travaux d'embellissement dans les chambres 1 et 2, dans le couloir, et les Wc à la suite d'un dégât des eaux.

L'ensemble des pièces versées aux débats leur permet d'étayer ces prétentions sans qu'il soit besoin de faire réaliser une nouvelle expertise judiciaire.

Par ailleurs, les termes du protocole d'accord transactionnel des 16 et 29 mars 2018 n'autorisent pas les parties à formuler une demande ou un recours au titre des désordres qui en font l'objet tels que listés ci-dessus.

Aucune demande n'est présentée au titre d'autres désordres et/ou vices résultant des constatations de Me [Z].

En conséquence, la demande d'expertise sera rejetée. La décision du juge de la mise en état ayant statué en ce sens sera confirmée.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions de première instance sur les dépens et les frais de procédure seront confirmées.

Parties perdantes au final, M. [U] et Mme [W] seront condamnés in solidum aux dépens d'appel, avec bénéfice de distraction au profit de l'avocat de la Smabtp.

Il n'est pas inéquitable de les condamner également in solidum à payer aux sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche une indemnité de 2 000 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés pour cette procédure.

Les autres demandes présentées à ce titre seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt par défaut, mis à disposition au greffe,

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. [X] [U] et Mme [K] [W] à payer aux sociétés Compagnie Cléroise de Maçonnerie et Groupama Centre Manche, prises ensemble, la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la procédure d'appel,

Déboute les parties du surplus des demandes,

Condamne in solidum M. [X] [U] et Mme [K] [W] aux dépens d'appel, avec bénéfice de distraction au profit de la Selarl Gray Scolan, avocats associés, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente de chambre,