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Décisions

CA Versailles, ch. civ. 1-4 construction, 2 décembre 2024, n° 24/00684

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Axa France IARD (SA)

Défendeur :

Eiffage Construction Residentiel (SAS), Socotec Construction (SAS), Syndicat Des Coproprietaires De L'ensemble Immobilier 'Le Lombard' (Sté), Issy Viaduc (SCI), SMABTP (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Trouiller

Vice-président :

M. Trarieux

Conseiller :

Mme Moulin-Zys

Avocats :

Me Debray, Me Teriitehau, Me Ferchaux-Lallement, Me Pedroletti, Me Chateauneuf, Me Dumeau, Me Gache Genet, Me Aberlen-Grazi, Me Draghi Alonso, Me Follot, Me Jami, Me Da Costa

Versailles, du 16 janv. 2024, n° 23/0173…

16 janvier 2024

FAITS ET PROCÉDURE

La société SCI Issy-Viaduc a fait édifier, de 1992 à 1994, un ensemble immobilier à usage de bureaux et activités industrielles et commerciales situé au [Adresse 3] à [Localité 15] (92).

Pour les besoins de l'opération, une police dommages-ouvrage a été souscrite auprès de la société Axa courtage, aujourd'hui dénommée Axa France Iard.

Sont notamment intervenues à l'opération :

- la société Meunier Promotion, maître d''uvre d'exécution, devenue BNP Paribas Immobilier et aujourd'hui dénommée BNP Paribas real estate,

- la société Socotec, en qualité de bureau de contrôle, assurée auprès de la SMABTP,

- la société SAEP, en qualité d'entreprise générale, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, assurée auprès de la société SMABTP, qui a sous-traité :

- le lot ferraillage radier à la société Stafe,

- le lot parois moulées à la société Spie fondations, assurée auprès de la société Axa courtage,

- le lot coulage béton du radier à la société Parsol, aujourd'hui représentée par son liquidateur Me [C].

La déclaration réglementaire d'ouverture de chantier est intervenue le 30 juin 1992 et la réception des parties communes le 14 juin 1994, avec réserves sans lien avec le présent litige.

Un procès-verbal de constatation d'achèvement de l'immeuble et état des lieux avec prise de possession a ensuite été établi le 15 juin 1994.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [16] (ci-après « le syndicat des copropriétaires) a par la suite dénoncé à partir de 1996 des infiltrations d'eau et des fissures survenues dans le parking en sous-sol et a régularisé plusieurs déclarations de sinistre auprès de la société Axa courtage, ce qui a conduit à des expertises amiables en 1996, 1997, 1998, 2001 et 2002 et des reprises ponctuelles qui n'ont pas donné satisfaction.

Le syndicat des copropriétaires a alors, suivant assignation du 29 août 2002, sollicité en référé l'organisation d'une mesure d'expertise.

Par ordonnance de référé du 22 octobre 2002, le président du tribunal de grande instance de Nanterre a désigné M. [K] [T] en qualité d'expert.

Par exploits des 12, 14 et 18 août, 29 octobre, 18 novembre 2008, le syndicat des copropriétaires a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Nanterre la société SCI Issy-Viaduc, la société Axa courtage DO, la société Meunier Promotion, la société Axa Courtage assureur de la société Meunier Promotion, la société SAEP et son assureur la société SMABTP, Socotec et son assureur la société SMABTP, la société Spie fondations et son assureur la société Axa Courtage, la société Stafe et la société Parsol représentée par son mandataire liquidateur Me [C] en réparation des désordres.

Par ordonnance du 11 juin 2009, le juge de la mise en état a sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise et ordonné le retrait du rôle de l'affaire.

L'expert a déposé son rapport au greffe le 26 juin 2016.

Le syndicat des copropriétaires a sollicité le rétablissement de l'affaire par conclusions signifiées le 14 novembre 2016 et déposées au greffe le 15 novembre 2016. L'affaire a été rétablie sous le n° RG 17/1884.

Le syndicat des copropriétaires par des conclusions signifiées les 5 juin et 8 novembre 2019, a saisi le juge de la mise en état d'une nouvelle demande d'expertise sur les travaux réparatoires à réaliser.

Par ordonnance du 19 décembre 2019, le juge de la mise en état a rejeté cette demande, considérant que l'organisation d'une nouvelle expertise trois ans après le dépôt du rapport n'était pas opportune et que l'appréciation des éléments techniques relevait du juge du fond.

Par jugement contradictoire du 29 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

- déclaré irrecevables les demandes formées par la société Eiffage construction résidentiel à l'encontre de la société Parasol,

- déclaré irrecevables les demandes formées à l'encontre de la société Stafe,

- condamné in solidum la société SCI Issy-Viaduc, la société Eiffage construction résidentiel, la société Spie Batignolles fondations, la société Axa France Iard en qualité d'assureur dommages-ouvrages, d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, et la société SMABTP en qualité d'assureur décennal de la société SAEP, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, au paiement de la somme de l 518 768,80 euros HT au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [16], représenté par son syndic la société Yxime, à titre de dommages et intérêts venant en réparation du préjudice matériel subi, avec indexation sur l'évolution de l'indice BT01 entre le 26 juin 2016, date du dépôt du rapport, et le jour du jugement,

- fixé le partage de responsabilité au titre des désordres indemnisés à : 1,5 % s'agissant de la responsabilité de la société Spie Batignolles fondations, 98,5 % s'agissant de la responsabilité de la société Stafe,

- condamné in solidum la société Spie Batignolles fondations et la société Axa France Iard, en ses qualités d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, à garantir la société Eiffage construction résidentiel des condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et dépens,

- condamné in solidum la société Spie Batignolles fondations et la société Axa France Iard, en ses qualités d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, à garantir la société SMABTP en qualité d'assureur de la société Eiffage construction résidentiel à hauteur de 1,5 % des condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et dépens ;

- condamné in solidum la société Spie Batignolles fondations et son assureur Axa France Iard à garantir la société SCI Issy-Viaduc de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et dépens ;

- condamné in solidum la société SCI Issy-Viaduc, la société Eiffage construction résidentiel, la société Spie Batignolles fondations, la société Axa France Iard en qualité d'assureur dommages-ouvrages, d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, et la société SMABTP en qualité d'assureur décennal de la société SAEP, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, au paiement de la somme de 15 000 euros au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [16], représenté par son syndic la société Yxime, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la société SCI Issy-Viaduc, la société Eiffage construction résidentiel, la société Spie Batignolles fondations, la société Axa France Iard en qualité d'assureur dommages-ouvrages, d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, et la société SMABTP en qualité d'assureur décennal de la société SAEP, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, au paiement de la somme de 3 000 euros à la société Socotec construction sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Eiffage construction résidentiel au paiement de la somme de 3 000 euros à la société BNP paribas real estate sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la société SCI Issy-Viaduc, la société Eiffage construction résidentiel, la société Spie Batignolles fondations, la société Axa France Iard en qualité d'assureur dommages-ouvrages, d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, et la société SMABTP en qualité d'assureur décennal de la société SAEP, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, aux entiers dépens, en ce compris les dépens de l'instance de référé et le coût de l'expertise judiciaire,

- dit que le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile est accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ou contraires,

- ordonné l'exécution provisoire.

Le tribunal a déclaré irrecevables les demandes à l'encontre des sociétés défaillantes (les sociétés Parasol et Stafe) pour non-signification des conclusions.

Le tribunal a retenu que les créances devaient être déclarées au liquidateur de la société Stafe avant toute action.

Concernant les désordres des parkings, le tribunal a retenu la garantie décennale de l'article 1792 du code civil, engageant la responsabilité de la société SCI Issy-Viaduc et de la société Eiffage construction résidentiel (ci-après « Eiffage ») pour les infiltrations compromettant la destination de l'ouvrage.

Le tribunal a retenu la responsabilité de la société SPIE batignolles fondations et de la société Stafe, en tant que sous-traitants, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, en raison de défauts d'exécution respectifs sur les parois moulées et les armatures du radier.

Il les a condamnées in solidum, avec leurs assureurs, à indemniser le syndicat des copropriétaires pour les préjudices subis, à hauteur de 1 518 768,80 euros HT, correspondant aux travaux nécessaires pour réparer les désordres. Il a rejeté les arguments concernant une simple étanchéité relative et retenu que seule une réparation complète pouvait stabiliser la situation. Enfin, les appels en garantie ont été partiellement retenus, répartissant les responsabilités entre les différents acteurs impliqués.

Le 17 mars 2023, la société Axa a formé une déclaration d'appel aux fins, à titre principal, d'annulation du jugement à l'égard de la SCI Issy-Viaduc et de la société Eiffage, « conséquence du lien d'indivisibilité résultant de la procédure d'appel afin d'annulation à titre principal, initialement régularisée contre ce même jugement (sous le n°RG 22/7657) et dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile ».

Cet appel fait suite à un premier appel interjeté le 20 décembre 2022 à l'encontre du syndicat des copropriétaires et des sociétés SMABTP, Socotec et Eiffage.

Les deux procédures n'ont pas été jointes malgré la demande de la société Axa.

Par conclusions remises le 13 juillet 2023, la société Eiffage a soulevé l'irrecevabilité de l'appel interjeté le 17 mars 2023 par la société Axa comme étant tardif.

Le syndicat des copropriétaires et les sociétés Issy-Viaduc et SMABTP se sont associés à cette fin de non-recevoir.

Par ordonnance du 16 janvier 2024, le conseiller de la mise en état s'est déclaré compétent et a :

- dit irrecevable l'appel interjeté par la société Axa France Iard,

- condamné la société Axa à payer aux sociétés Eiffage, SMABTP, Issy-Viaduc et au syndicat des copropriétaires la somme de 1 500 euros chacun au titre des frais irrépétibles,

- condamné la société Axa aux dépens de l'instance avec possibilité de recouvrement desdits dépens sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

Le juge de la mise en état a retenu que si la société Axa avait interjeté appel à l'égard d'autres parties au jugement dans une instance séparée, il n'en demeurait pas moins qu'elle était devenue, après l'expiration du délai de l'article 528 du code de procédure civile, irrecevable à interjeter appel à l'encontre des parties en présence.

Il a considéré que le prétendu lien d'invisibilité n'était pas démontré et qu'il n'était pas de nature à faire revivre un délai expiré.

Par requête en déféré du 29 janvier 2024, la société Axa France Iard demande à la cour :

- d'infirmer l'ordonnance,

- de la déclarer recevable en son appel régularisé le 20 décembre 2022 et réitéré le 17 mars 2023 contre les sociétés Eiffage et Issy-Viaduc dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile,

- de déclarer les sociétés Eiffage et Issy-Viaduc, ainsi que tout contestant, irrecevables en tout cas mal fondés dans leur incident au regard de l'unicité de l'instance,

- de rejeter l'ensemble des demandes des contestants et de renvoyer l'instance d'appel afin d'annulation devant la juridiction du fond,

- de condamner les sociétés Eiffage et Issy-Viaduc à lui verser une somme de 1 000 euros chacune et aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 20 septembre 2024, la société Axa France Iard réitère ses demandes.

Elle fait valoir que les deux procédures d'appel soulèvent à titre principal et exclusivement pour la seconde concernant les sociétés Eiffage et Issy-Viaduc, l'annulation du jugement, que la cause d'annulation résulte dans l'assignation du syndicat des copropriétaires à l'encontre d'une société n'ayant plus d'existence légale et que des condamnations ont été prononcées à l'encontre d'une personne morale jamais assignée.

Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 20 septembre 2024, la société Eiffage construction résidentiel demande à la cour de confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions, et de :

- déclarer irrecevable l'appel interjeté par la société Axa à l'encontre du jugement,

- débouter la société Axa de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société Axa au paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

La société Eiffage fait valoir que le jugement a été signifié par acte du 8 novembre 2022, que le délai d'appel expirait le 8 décembre 2022 et que l'appel interjeté le 17 mars 2023 est tardif.

Selon elle, le prétendu lien d'invisibilité, qui n'est pas démontré, ne fait pas revivre un délai expiré.

Aux termes de ses conclusions n°1 remises au greffe le 21 août 2024, la société Issy-Viaduc demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance,

- condamner la société Axa à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens du présent déféré, dont distraction directement au profit de Me Philippe Chateauneuf, Avocat, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

La société Issy-Viaduc fait valoir que l'indivisibilité alléguée n'est pas démontrée.

Elle rappelle avoir signifié le jugement à la société Axa le 10 novembre 2022, que le délai d'appel à son égard expirait le 10 décembre 2022 et que la déclaration d'appel effectuée le 17 mars 2023 est par conséquent tardive.

Elle souligne que la société Axa s'estimant étrangère au litige, elle ne pouvait par conséquent interjeter appel du jugement et que seule la voie de la tierce opposition lui était ouverte.

Aux termes de ses conclusions n°2 remises au greffe le 20 septembre 2024, la société SMABTP demande à la cour de confirmer l'ordonnance et de :

- déclarer irrecevable comme tardif l'appel de la société Axa à l'égard de la société Eiffage construction résidentiel ;

- à titre subsidiaire en cas d'indivisibilité, déclarer irrecevable comme tardif l'appel de la société Axa à l'égard de la société Eiffage construction résidentiel ;

- dire que l'irrecevabilité de l'appel du 17 mars 2023 entraîne l'irrecevabilité de l'appel provoqué à son égard,

- condamner la société Axa à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que l'appel régularisé le 17 mars 2023 est largement forclos, que la jurisprudence invoquée a été rendu dans une procédure de saisie-immobilière, qu'elle ne concerne qu'un litige indivisible et que tel n'est pas le cas en l'espèce.

Subsidiairement, elle souligne que le premier appel était déjà tardif à l'égard de la société Eiffage, que si l'indivisibilité d'un litige permet à l'appelant d'appeler les parties omises dans sa déclaration d'appel, encore faut-il que le premier appel ait été interjeté avant l'expiration du délai d'appel.

Elle relève qu'au 20 décembre 2022, la société Axa n'était pas recevable à interjeter appel contre Eiffage depuis le 9 décembre et que le premier appel intervenu hors délai ne peut sauver le second.

Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 13 septembre 2024, la société Socotec construction demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

- déclarer la société Axa irrecevable en son appel,

- condamner Axa à lui verser à la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Katell Ferchaux-Lallement, avocate conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle précise qu'aucune demande de condamnation n'a été formulée à son encontre, en tant que contrôleur technique et que l'appel ne vise que la condamnation aux frais irrépétibles à son bénéfice.

Elle fait valoir que la seconde déclaration d'appel est tardive et que la parade de l'indivisibilité est inopérante dès lors que le premier appel est également tardif.

Elle ajoute que si la cour retenait le raisonnement de l'appelant, elle pourrait également invoquer la tardiveté de l'appel régularisé le 20 décembre à son encontre.

Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 17 septembre 2024, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,

- déclarer irrecevable comme tardif l'appel de la société Axa,

- condamner la société Axa à lui verser à la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Mélina Pédroletti, avocate conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il fait valoir que l'appel du 17 mars 2023 est à l'évidence tardif et que le litige n'est pas indivisible.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

L'affaire a été fixée à l'audience de plaidoirie du 23 septembre et elle a été mise en délibéré au 2 décembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La cour relève que la compétence du conseiller de la mise en état n'est plus remise en cause à hauteur d'appel. L'ordonnance est définitive sur ce point.

Les parties ne contestent pas la recevabilité de la requête en déféré, introduite dans les 15 jours de l'ordonnance conformément à l'article 916 du code de procédure civile, recevable.

Sur l'existence d'une indivisibilité

À l'appui de son appel, la société Axa rappelle, au visa des articles 552 et 553 du code de procédure civile que l'indivisibilité résultant d'un appel voie d'annulation écarte les effets de la forclusion du délai d'appel pouvant être invoqué par les sociétés Eiffage et Issy-Viaduc et qu'en présence d'un litige indivis à l'égard de plusieurs parties, la déclaration d'appel pour appeler une partie omise dans la première déclaration ne crée pas une nouvelle instance.

Elle n'invoque plus l'indivisibilité du litige mais l'indivisibilité de l'appel-annulation. Selon elle, lorsque l'appel tend à l'annulation, il y a nécessairement indivisibilité dans les droits des parties affectées par la chose jugée et instance unique.

Elle estime que cet incident tend à mettre en échec l'appel voie d'annulation, que c'est l'annulation de la chose jugée entre les parties qui crée le lien d'indivisibilité et que le conseiller de la mise en état a fait abstraction de l'unicité de l'instance et de l'article 552.

Elle affirme que la première déclaration d'appel a été régularisée dans le délai requis à l'encontre du syndicat des copropriétaires et que le premier juge a dissocié à tort les instances.

Elle ajoute que l'indivisibilité permet à l'appelant d'appeler les parties omises à l'instance sans encourir d'irrecevabilité puisque l'appel complémentaire n'a pas pour effet de faire naître une seconde instance distincte.

Elle précise que les parties adverses font une confusion, que ce n'est pas la situation des parties qui est indivisible mais l'instance d'appel afin d'annulation qui rend la procédure indivisible et que l'indivisibilité prévaut sur la notion de forclusion.

De son côté, la société Eiffage fait valoir que la jurisprudence invoquée vient juste confirmer que l'appel complémentaire formé pour régulariser la procédure n'entraîne pas la création d'une nouvelle instance mais qu'elle n'indique pas qu'en cas d'indivisibilité, les effets de la forclusion du délai d'appel seraient écartés. Selon elle, cette jurisprudence n'est pas transposable et concerne la procédure commerciale.

Elle souligne que le prétendu lien d'invisibilité ne fait pas revivre un délai expiré, que dès son premier appel, la société Axa était irrecevable à contester le jugement vis-à-vis d'elle puisque le jugement était définitif depuis le 9 décembre 2022 et que le second appel interjeté ne peut couvrir cette irrecevabilité qui demeure en tout état de cause.

Elle soutient enfin que l'indivisibilité n'est pas démontrée, que ni l'objet du litige ni l'objet de l'appel ne sont indivisibles, que l'indivisibilité se caractérise par l'impossibilité d'exécuter séparément les dispositions du jugement concernant chacune des parties, que les condamnations du jugement ont été prononcées in solidum et non solidairement, qu'elles peuvent s'exécuter séparément, que la cour peut ne prononcer qu'une nullité partielle.

La société Issy-Viaduc fait valoir que l'indivisibilité alléguée n'est pas démontrée et qu'il n'y a pas d'indivisibilité en matière d'obligation in solidum.

Elle ajoute qu'en cas d'annulation en l'occurrence partielle du jugement à l'égard de la société Axa, les condamnations prononcées à son encontre tomberont, laissant subsister la condamnation in solidum des autres codébiteurs sans préjudicier au syndicat des copropriétaires et qu'ainsi, la demande d'annulation ne crée aucune indivisibilité au regard de ses conséquences.

La société SMABTP relève également que la société Axa prétend que l'appel-annulation est indivisible mais n'en justifie absolument pas puisque l'objet du litige n'est pas indivisible.

Elle ajoute que l'appelant fait une confusion entre l'effet dévolutif de l'appel-annulation et le caractère indivisible de l'appel, que l'appel-annulation a entraîné la dévolution pour le tout et que l'appelant est par conséquent dispensé de mentionner un à un les chefs de jugement qu'il critique.

Selon elle, il ne s'agit pas d'une indivisibilité mais d'une entière dévolution et la dévolution de l'entier litige ne confère pas à l'appelant la faculté d'appeler à l'instance les parties de première instance qu'il aurait oublié d'intimer. Dans ces conditions, le second appel doit être examiné indépendamment du premier et considéré comme tardif.

Subsidiairement, elle souligne que le premier appel était déjà tardif à l'égard de la société Eiffage, que si l'indivisibilité d'un litige permet à l'appelant d'appeler les parties omises dans sa déclaration d'appel, encore faut-il que le premier appel ait été interjeté avant l'expiration du délai d'appel.

La société Socotec fait également valoir que la seconde déclaration d'appel est tardive et que la parade de l'indivisibilité est inopérante dès lors que le premier appel est également tardif.

Enfin, le syndicat des copropriétaires relève qu'après avoir invoqué une indivisibilité du litige, la société Axa invoque désormais une unicité de l'instance d'appel voie d'annulation.

Il souligne que l'arrêt produit concernait un litige indivisible, ce qui n'est pas le cas de l'espèce puisque les condamnations prononcées pourront être exécutées sans risque de contrariété, qu'il n'y a pas d'indivisibilité en matière d'obligation in solidum et que l'indivisibilité alléguée n'est pas démontrée.

Réponse de la cour

En application de l'article 552 alinéa 2 du code de procédure civile, en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance.

S'il est exact que la seconde déclaration d'appel, formée par l'appelant pour appeler à la cause les parties omises dans la première déclaration d'appel, régularise l'appel sans créer une nouvelle instance, encore faut-il que le premier appel ait été interjeté avant l'expiration du délai d'appel. Rien n'autorise l'appelant à déroger aux règles de la forclusion.

En l'espèce, les parties conviennent que le litige n'est pas indivisible puisque les condamnations prononcées in solidum peuvent être exécutées sans risque de contrariété.

La cour note que pour revendiquer une indivisibilité de la procédure d'appel, l'appelante invoque une jurisprudence qui concerne une saisie-immobilière qui créé un lien d'indivisibilité entre toutes les parties, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Dans ces conditions, l'appelante ne peut pas plus invoquer l'article 553 qui ne concerne que les litiges indivisibles.

En outre, contrairement à ce qui est soutenu, l'appel-annulation ne génère pas à lui seul une indivisibilité mais a pour conséquence que la dévolution de l'appel s'opère pour le tout, sans que l'appelant ne soit contraint de préciser les chefs de jugement critiqués. Ainsi, la dévolution de l'entier litige ne confère pas à l'appelante la faculté d'appeler à l'instance les parties de première instance qu'elle aurait oublié d'intimer.

En toute hypothèse, le prétendu lien d'invisibilité, comme la notion d'unicité de l'instance ne sont pas de nature à faire revivre un délai expiré.

La société Axa ne peut donc invoquer une indivisibilité de procédure et ne rapporte pas la preuve d'une indivisibilité du litige. Ces moyens sont inopérants.

Sur la recevabilité de l'appel

Il ressort du dossier que le jugement contesté a été signifié à la société Axa par acte du 8 novembre 2022 par la société Eiffage et par acte du 10 novembre 2022 par la société Issy-Viaduc.

Ainsi, le délai d'appel de la société Axa expirait le 8 et le 10 décembre 2022 pour ces deux sociétés.

À la date du premier appel interjeté par la société Axa le 20 décembre 2022, l'appel à leur encontre était déjà tardif. L'appel interjeté le 17 mars 2023 est par conséquent, et a fortiori, irrecevable comme étant tardif.

Partant, l'ordonnance est confirmée en toutes ses dispositions.

Sur les dépens et autres frais de procédure

La société Axa, qui succombe, a été à juste titre condamnée aux dépens de première instance. Elle est également condamnée aux dépens d'appel, conformément à l'article 696 du code de procédure civile. Les dépens pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l'article 699 du même code.

Selon l'article 700 1° de ce code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée.

Le premier juge a fait une application équitable de ces dispositions, les circonstances de l'espèce justifient de condamner la société Axa à payer au syndicat des copropriétaires et aux sociétés Eiffage, SMABTP, Issy-Viaduc et Socotec une indemnité de 1 500 euros chacun au titre des frais exclus des dépens exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance déférée en totalité ;

Y ajoutant,

Condamne la société Axa France Iard aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la société Axa France Iard à payer à la société Eiffage construction résidentiel, à la société Issy-Viaduc, à la société SMABTP, à la société Socotec construction et au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [16] représenté par son syndic la SASU ESSET une indemnité de 1 500 euros chacun par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.