CA Versailles, ch. civ. 1-4 construction, 2 décembre 2024, n° 24/00681
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Axa France IARD (SA)
Défendeur :
Eiffage Construction Residentiel (SAS), Socotec Construction (SAS), Syndicat Des Coproprietaires De L'ensemble Immobilier 'Le Lombard' (Sté), Issy Viaduc (SCI), SMABTP (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Trouiller
Vice-président :
M. Trarieux
Conseiller :
Mme Moulin-Zys
Avocats :
Me Debray, Me Teriitehau, Me Ferchaux-Lallement, Me Pedroletti, Me Chateauneuf, Me Dumeau, SCP Naba et Associés, SELARL Cabinet Draghi-Alonso, SELARL BDL Avocats, SELASU Anne-Laure Dumeau, SELEURL Minault Teriitehau, SELARL BJA
FAITS ET PROCÉDURE
La société SCI Issy-Viaduc a fait édifier, de 1992 à 1994, un ensemble immobilier à usage de bureaux et activités industrielles et commerciales situé au [Adresse 3] (92).
Pour les besoins de l'opération, une police dommages-ouvrage a été souscrite auprès de la société Axa courtage, aujourd'hui dénommée Axa France Iard.
Sont notamment intervenues à l'opération :
- la société [J] Promotion, maître d''uvre d'exécution, devenue BNP Paribas Immobilier et aujourd'hui dénommée BNP Paribas real estate,
- la société Socotec, en qualité de bureau de contrôle, assurée auprès de la SMABTP,
- la société SAEP, en qualité d'entreprise générale, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, assurée auprès de la société SMABTP, qui a sous-traité :
- le lot ferraillage radier à la société Stafe,
- le lot parois moulées à la société Spie fondations, assurée auprès de la société Axa courtage,
- le lot coulage béton du radier à la société Parsol, aujourd'hui représentée par son liquidateur Me [F].
La déclaration réglementaire d'ouverture de chantier est intervenue le 30 juin 1992 et la réception des parties communes le 14 juin 1994, avec réserves sans lien avec le présent litige.
Un procès-verbal de constatation d'achèvement de l'immeuble et état des lieux avec prise de possession a ensuite été établi le 15 juin 1994.
Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 17] (ci-après « le syndicat des copropriétaires) a par la suite dénoncé à partir de 1996 des infiltrations d'eau et des fissures survenues dans le parking en sous-sol et a régularisé plusieurs déclarations de sinistre auprès de la société Axa courtage, ce qui a conduit à des expertises amiables en 1996, 1997, 1998, 2001 et 2002 et des reprises ponctuelles qui n'ont pas donné satisfaction.
Le syndicat des copropriétaires a alors, suivant assignation du 29 août 2002, sollicité en référé l'organisation d'une mesure d'expertise.
Par ordonnance de référé du 22 octobre 2002, le président du tribunal de grande instance de Nanterre a désigné M. [T] [S] en qualité d'expert.
Par exploits des 12, 14 et 18 août, 29 octobre, 18 novembre 2008, le syndicat des copropriétaires a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Nanterre la société SCI Issy-Viaduc, la société Axa courtage DO, la société [J] Promotion, la société Axa Courtage assureur de la société [J] Promotion, la société SAEP et son assureur la société SMABTP, Socotec et son assureur la société SMABTP, la société Spie fondations et son assureur la société Axa Courtage, la société Stafe et la société Parsol représentée par son mandataire liquidateur Me [F] en réparation des désordres.
Par ordonnance du 11 juin 2009, le juge de la mise en état a sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise et ordonné le retrait du rôle de l'affaire.
L'expert a déposé son rapport au greffe le 26 juin 2016.
Le syndicat des copropriétaires a sollicité le rétablissement de l'affaire par conclusions signifiées le 14 novembre 2016 et déposées au greffe le 15 novembre 2016. L'affaire a été rétablie sous le n° RG 17/1884.
Le syndicat des copropriétaires par des conclusions signifiées les 5 juin et 8 novembre 2019, a saisi le juge de la mise en état d'une nouvelle demande d'expertise sur les travaux réparatoires à réaliser.
Par ordonnance du 19 décembre 2019, le juge de la mise en état a rejeté cette demande, considérant que l'organisation d'une nouvelle expertise trois ans après le dépôt du rapport n'était pas opportune et que l'appréciation des éléments techniques relevait du juge du fond.
Par jugement contradictoire du 29 septembre 2022, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
- déclaré irrecevables les demandes formées par la société Eiffage construction résidentiel à l'encontre de la société Parasol,
- déclaré irrecevables les demandes formées à l'encontre de la société Stafe,
- condamné in solidum la société SCI Issy-Viaduc, la société Eiffage construction résidentiel, la société Spie Batignolles fondations, la société Axa France Iard en qualité d'assureur dommages-ouvrages, d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, et la société SMABTP en qualité d'assureur décennal de la société SAEP, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, au paiement de la somme de l 518 768,80 euros HT au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 17], représenté par son syndic la société Yxime, à titre de dommages et intérêts venant en réparation du préjudice matériel subi, avec indexation sur l'évolution de l'indice BT01 entre le 26 juin 2016, date du dépôt du rapport, et le jour du jugement,
- fixé le partage de responsabilité au titre des désordres indemnisés à : 1,5 % s'agissant de la responsabilité de la société Spie Batignolles fondations, 98,5 % s'agissant de la responsabilité de la société Stafe,
- condamné in solidum la société Spie Batignolles fondations et la société Axa France Iard, en ses qualités d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, à garantir la société Eiffage construction résidentiel des condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et dépens,
- condamné in solidum la société Spie Batignolles fondations et la société Axa France Iard, en ses qualités d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, à garantir la société SMABTP en qualité d'assureur de la société Eiffage construction résidentiel à hauteur de 1,5 % des condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et dépens ;
- condamné in solidum la société Spie Batignolles fondations et son assureur Axa France Iard à garantir la société SCI Issy-Viaduc de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre en principal, frais et dépens ;
- condamné in solidum la société SCI Issy-Viaduc, la société Eiffage construction résidentiel, la société Spie Batignolles fondations, la société Axa France Iard en qualité d'assureur dommages-ouvrages, d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, et la société SMABTP en qualité d'assureur décennal de la société SAEP, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, au paiement de la somme de 15 000 euros au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 17], représenté par son syndic la société Yxime, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société SCI Issy-Viaduc, la société Eiffage construction résidentiel, la société Spie Batignolles fondations, la société Axa France Iard en qualité d'assureur dommages-ouvrages, d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, et la société SMABTP en qualité d'assureur décennal de la société SAEP, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, au paiement de la somme de 3 000 euros à la société Socotec construction sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Eiffage construction résidentiel au paiement de la somme de 3 000 euros à la société BNP paribas real estate sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société SCI Issy-Viaduc, la société Eiffage construction résidentiel, la société Spie Batignolles fondations, la société Axa France Iard en qualité d'assureur dommages-ouvrages, d'assureur de la société Spie Batignolles fondations et de la société Stafe, et la société SMABTP en qualité d'assureur décennal de la société SAEP, aux droits de laquelle vient la société Eiffage construction résidentiel, aux entiers dépens, en ce compris les dépens de l'instance de référé et le coût de l'expertise judiciaire,
- dit que le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile est accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes ou contraires,
- ordonné l'exécution provisoire.
Le tribunal a déclaré irrecevables les demandes à l'encontre des sociétés défaillantes (les sociétés Parasol et Stafe) pour non-signification des conclusions.
Le tribunal a retenu que les créances devaient être déclarées au liquidateur de la société Stafe avant toute action.
Concernant les désordres des parkings, le tribunal a retenu la garantie décennale de l'article 1792 du code civil, engageant la responsabilité de la société SCI Issy-Viaduc et de la société Eiffage construction résidentiel (ci-après « Eiffage ») pour les infiltrations compromettant la destination de l'ouvrage.
Le tribunal a retenu la responsabilité de la société SPIE batignolles fondations et de la société Stafe, en tant que sous-traitants, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, en raison de défauts d'exécution respectifs sur les parois moulées et les armatures du radier.
Il les a condamnées in solidum, avec leurs assureurs, à indemniser le syndicat des copropriétaires pour les préjudices subis, à hauteur de 1 518 768,80 euros HT, correspondant aux travaux nécessaires pour réparer les désordres. Il a rejeté les arguments concernant une simple étanchéité relative et retenu que seule une réparation complète pouvait stabiliser la situation. Enfin, les appels en garantie ont été partiellement retenus, répartissant les responsabilités entre les différents acteurs impliqués.
Par déclaration du 20 décembre 2022, la société Axa France Iard (ci-après Axa) a interjeté appel du jugement à l'encontre du syndicat des copropriétaires et des sociétés SMABTP, Socotec et Spie Batignoles, sollicitant à titre principal son annulation et à défaut son infirmation.
Par conclusions remises le 7 juin 2023, la société SMABTP, ès qualités d'assureur de la société Eiffage, a soulevé, au visa des articles 409 et 410 du code de procédure civile, l'irrecevabilité de l'appel interjeté par la société Axa à l'encontre du jugement pour y avoir acquiescé sans réserve faute d'avoir sollicité l'arrêt de son exécution provisoire et contesté la saisie-attribution diligentée en exécution de ce jugement. Elle soulève subsidiairement sa tardiveté, le jugement ayant été signifié le 8 novembre 2022.
Par ordonnance du 16 janvier 2024, le conseiller de la mise en état s'est déclaré compétent pour statuer et a :
- dit irrecevable l'appel interjeté par la société Axa,
- condamné la société Axa à payer aux sociétés SMABTP, Issy-Viaduc, Socotec construction et au syndicat des copropriétaires la somme de 1 500 euros chacun, au titre des frais irrépétibles,
- condamné la société Axa aux dépens de l'incident et avec possibilité de recouvrement desdits dépens sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
Le conseiller de la mise en état a retenu, au visa des articles 408, 409 et 410 que l'acquiescement, exprès ou implicite, devait être certain et résulter d'actes ou de faits démontrant avec évidence et sans équivoque l'intention de la partie à laquelle on l'oppose et qu'en l'espèce la société Axa n'avait élevé, dans les délais requis, aucune contestation de la saisie-attribution dénoncée à sa personne en exécution de ce jugement.
Il a estimé que la société Axa avait exécuté sans réserve la saisie-attribution destinée à l'exécution du paiement d'une créance fixée par un jugement, que ce fait valait acquiescement entraînant l'irrecevabilité de son appel et que la circonstance que la société Axa France Iard ait formé appel avant, n'était pas de nature à écarter la validité de cet acquiescement.
Enfin, du fait de l'irrecevabilité, il a écarté le moyen tiré de l'indivisibilité.
Par requête en déféré du 29 janvier 2024, la société Axa France Iard demande à la cour :
- d'infirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,
- de juger qu'elle n'a pas acquiescé au jugement,
- de la déclarer en conséquence recevable en son appel,
- de condamner le syndicat des copropriétaires et les sociétés SMABTP, Eiffage, Issy-Viaduc et Socotec à lui verser une somme de 1 000 euros chacune et aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Debray conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 6 septembre 2024, la société Axa France Iard réitère ses demandes.
Elle fait valoir, au visa des articles 410, que l'acquiescement doit être certain et résulter d'actes ou de faits démontrant avec évidence et sans équivoque l'intention d'acquiescer, que la seule exécution d'un jugement ne peut valoir acquiescement ni présomption d'acquiescement et que le fait de ne pas avoir demandé l'arrêt de l'exécution provisoire ne saurait permettre de déduire un acquiescement au jugement.
Elle souligne que le jugement entrepris comporte l'exécution provisoire, que les causes du jugement n'ont été réglées en avril 2023 que sur saisie-attribution pratiquée par la société Eiffage et que ses conclusions remises les 8 et 17 mars 2023 établissent qu'elle n'acquiesce pas d'évidence au jugement.
Elle ajoute que la société Eiffage détenait un titre exécutoire, que le juge de l'exécution ne peut qu'accorder un délai de grâce et que si elle n'avait pas exécuté le jugement, la radiation de l'appel aurait pu être réclamée.
Selon elle, la volonté non équivoque d'acquiescer n'est pas démontrée.
Elle rappelle que dès lors que la société Axa figurait en qualité de partie dans le jugement, seul l'appel lui était ouvert et non la tierce opposition.
Aux termes de ses conclusions n°1 remises au greffe le 21 août 2024, la société Issy-Viaduc demande à la cour de :
- confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,
- en tout état de cause, condamner la société Axa à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens du présent déféré, dont distraction directement au profit de Me Philippe Chateauneuf, avocat, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que l'acquiescement à la saisie-attribution pratiquée en exécution du jugement emporte l'acquiescement non équivoque du bien-fondé de ce jugement et que la société Axa a renoncé à toute contestation de la validité des effets de la saisie-attribution à concurrence de la somme réglée.
Elle ajoute que cet acquiescement est intervenu en parfaite connaissance de l'erreur matérielle dont elle a sollicité la rectification, que la société Axa a acquiescé après ses déclarations d'appel et que le jugement a été exécuté sans réserve.
Elle ajoute subsidiairement que la voie de l'appel était fermée à la société Axa puisqu'elle soutient qu'elle était étrangère au litige tranché et que dans ces conditions, elle aurait dû recourir à la tierce opposition.
Aux termes de ses conclusions n°1 remises au greffe le 13 septembre 2024, la société SMABTP demande à la cour de :
- confirmer l'ordonnance,
- déclarer l'appel interjeté par la société Axa irrecevable pour avoir acquiescé au jugement sans réserve,
- en tout état de cause, condamner la société Axa à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir qu'en l'espèce la société Axa a acquiescé sans réserve, sans équivoque et de manière certaine au jugement entrepris, que l'objet principal de l'appel est l'annulation du jugement ce qui démontre qu'elle s'oppose à toute condamnation faute d'avoir été régulièrement attraite à l'instance, qu'elle n'a pas entendu faire arrêter l'exécution provisoire alors qu'elle invoque une violation du principe du contradictoire et qu'elle n'a pas contesté la saisie-attribution.
Elle affirme que la société Axa a donc implicitement et sans réserve acquiescé de manière certaine au jugement sans en contester la validité. Selon elle, les moyens soulevés et les montants en jeu justifiaient qu'elle saisisse le Premier président au visa de l'article 524 dans sa rédaction antérieure et au moins qu'elle conteste la saisie-attribution.
Elle soutient qu'en acquiesçant sans réserve à la saisie-attribution destinée à l'exécution du jugement dont appel, la société Axa a acquiescé de façon certaine audit jugement, en l'absence de saisine du Premier président.
Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 13 septembre 2024, la société Socotec construction demande à la cour de :
- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,
- déclarer la société Axa irrecevable en son appel,
- condamner Axa à lui verser à la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Katell Ferchaux-Lallement, avocate conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elle précise qu'aucune demande de condamnation n'a été formulée à son encontre, en tant que contrôleur technique et que l'appel ne vise que la condamnation aux frais irrépétibles à son bénéfice.
Elle fait valoir que l'acquiescement au jugement implique la renonciation aux voies de recours, que le fait de n'avoir soulevé aucune contestation après la notification de la saisie-attribution à personne, prouvait que la société Axa en avait bien eu connaissance et qu'elle aurait dû saisir le Premier président pour contester l'exécution provisoire du jugement et contester la saisie-attribution. Selon elle, ces faits établissent la volonté certaine d'acquiescer.
Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 17 septembre 2024, le syndicat des copropriétaires demande à la cour de :
- confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,
- débouter la société Axa de son déféré et de toutes ses demandes,
- condamner la société Axa à lui verser à la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Mélina Pédroletti, avocate conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Il fait valoir qu'alors que de nombreuses voies de contestations du jugement lui étaient ouvertes, la société Axa a exécuté le jugement sans aucune réserve.
Il estime que la requête en rectification d'erreur matérielle déposée par la société Axa ne concernait pas les condamnations prononcées au profit du syndicat.
Il s'étonne de l'absence de tout recours après plus de quinze années de procédure et estime que le comportement de la société Axa vaut acquiescement implicite et sans réserve, ce qui rend irrecevable son appel.
Il ajoute que si la société Axa s'estime étrangère au litige, seule une tierce opposition pouvait être intentée en cas de grief, ce qui rend son appel nécessairement irrecevable.
Aux termes de ses conclusions remises au greffe le 19 septembre 2024, la société Eiffage demande à la cour de :
- confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions,
- déclarer irrecevable l'appel de la société Axa,
- débouter la société Axa de toutes ses demandes,
- la condamner à lui verser à la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Elle fait valoir que lorsque l'acquiescement est tacite, il doit être certain, donc résulter d'actes ou de faits démontrant avec évidence et sans équivoque l'intention d'acquiescer et qu'en l'espèce, la société Axa a réglé les causes du jugement sans jamais contester la saisie-attribution, sans émettre de réserve, sans saisir le juge de l'exécution ni le Premier président.
Elle soutient que cet acquiescement emporte soumission au jugement et renonciation aux voies de recours et que l'appel est donc irrecevable.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'affaire a été fixée à l'audience de plaidoirie du 23 septembre et elle a été mise en délibéré au 2 décembre 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La cour relève que la compétence du conseiller de la mise en état n'est plus remise en cause à hauteur d'appel. L'ordonnance est définitive sur ce point.
De la même façon, il apparaît que la société Axa n'invoque plus l'indivisibilité du litige.
Sur l'existence d'un acquiescement au jugement
Aux termes de l'article 409 du code de procédure civile, l'acquiescement au jugement emporte soumission aux chefs de celui-ci et renonciation aux voies de recours sauf si, postérieurement, une autre partie forme régulièrement un recours.
L'article 410 précise que l'acquiescement peut être exprès ou implicite.
Il est désormais admis que si l'acquiescement peut être explicite ou tacite, il doit toujours être certain, c'est-à-dire résulter d'actes démontrant avec évidence et sans équivoque l'intention de la partie à laquelle on l'oppose d'accepter l'entière décision intervenue. Il doit résulter d'actes incompatibles avec la volonté d'interjeter appel.
Il est rappelé que seule l'exécution sans réserve d'un jugement non exécutoire vaut acquiescement, fût-ce après en avoir relevé appel.
Ainsi, la présomption d'acquiescement de l'article 410 alinéa 2 ne s'applique pas lorsque le jugement est exécutoire, ce qui est le cas en l'espèce.
Néanmoins, la preuve de l'acquiescement peut résulter des circonstances de la cause.
En l'espèce, il ressort du dossier que le jugement du 29 septembre 2022 comporte l'exécution provisoire, qu'il a été signifié à la société Axa par actes des 8 et 10 novembre 2022 et qu'elle en a interjeté appel le 22 décembre 2022.
La cour note que la société Axa n'a pas exécuté spontanément le jugement et qu'il a été procédé par voie d'exécution forcée au vu d'un titre exécutoire.
Si, postérieurement à cet appel, la société Axa a réglé, en avril 2023, les sommes dues en exécution d'une saisie-attribution diligentée par la société Eiffage, il apparaît qu'en mars 2023 elle avait déposé ses conclusions à l'appui de son appel. Elle n'a donc pas entendu renoncer à son appel.
Les intimés lui reprochent d'avoir exécuté sans réserve la saisie-attribution, de ne pas avoir exercé de recours devant le juge de l'exécution et de ne pas avoir sollicité du Premier président la suspension ou l'arrêt de l'exécution provisoire.
Il doit être rappelé que l'article 524 impose à l'appelant l'exécution du jugement au risque d'une radiation de son appel. Les actes d'exécution forcée non contestés ne sont donc pas incompatibles avec la volonté d'interjeter appel.
Dans ces conditions, le fait de ne pas avoir exercé de recours devant le juge de l'exécution et de ne pas avoir sollicité du Premier président l'arrêt de l'exécution provisoire, alors que la société Axa poursuivait son appel, ne sauraient constituer des faits démontrant avec évidence et sans équivoque l'intention d'acquiescer de façon certaine au jugement. Le fait qu'il ait été interjeté, au principal, un appel tendant à l'annulation du jugement, ne contribue pas plus à rapporter la preuve d'un acquiescement certain.
Au final, la preuve d'un acquiescement certain au jugement n'est pas rapportée. L'ordonnance est par conséquent infirmée sur ce point et la fin de non-recevoir est rejetée.
Sur la recevabilité de l'appel
Il doit être rappelé que dès lors que la société Axa figurait en qualité de partie dans le jugement, seul l'appel lui était ouvert et non la tierce opposition. Les moyens en ce sens sont par conséquent inopérants.
Partant, l'appel de la société Axa est déclaré recevable.
Sur les dépens et autres frais de procédure
La solution adoptée conduit à infirmer l'ordonnance sur ces points.
Les sociétés Eiffage, Issy-Viaduc, SMABTP, Socotec et le syndicat des copropriétaires, qui succombent, doivent être condamnées aux dépens de l'incident.
Ils sont également condamnés aux dépens du déféré, conformément à l'article 696 du code de procédure civile. Les dépens pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l'article 699 du même code.
Selon l'article 700 1° de ce code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
Les parties intimées sont par conséquent condamnées à payer à la société Axa France Iard une somme de 1 000 euros chacune.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, dans les limites du déféré,
Fait droit à la requête du conseil de la société Axa France Iard ;
Infirme l'ordonnance ;
Statuant de nouveau,
Rejette la fin de non-recevoir tirée de l'acquiescement ;
Déclare l'appel de la société Axa France Iard recevable ;
Condamne la société Eiffage construction résidentiel, la société Issy-Viaduc, la société SMABTP, la société Socotec construction et le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 17] représenté par son syndic la SASU ESSET aux entiers dépens de l'incident, dont distraction au profit de Me Christophe Debray conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la société Eiffage construction résidentiel, la société Issy-Viaduc, la société SMABTP, la société Socotec construction et le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 17] représenté par son syndic la SASU ESSET à payer à la société Axa France Iard une somme de 1 000 euros chacun application de l'article 700 du code de procédure civile.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.