CA Toulouse, 1re ch. 1 sect., 4 décembre 2024, n° 22/02670
TOULOUSE
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Tavernier (Sté)
Défendeur :
Axa France IARD (SA), SMA (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Rouger
Conseillers :
M. Robert, M. Leclercq
Avocats :
Me Clamens, Me Robert, Me Leridon, Me Cantaloube-Ferrieu
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Par acte du 22 novembre 2001, la Sarl Charline a vendu en l'état futur d'achèvement à M. [H] [S] une maison individuelle formant le lot n°1 d'un ensemble résidentiel regroupant 20 maisons d'habitation dénommé [Adresse 13], sis, [Adresse 11] à [Localité 12] (31).
La gestion locative de ce bien a été confiée à la société Avantim devenue Square Habitat.
Les travaux de gros-oeuvre et charpente ont été confiés à la société Soteba, assurée auprès de la compagnie Allianz.
Le procès-verbal de réception a été dressé le 23 avril 2002.
Courant 2008, M. [H] [S] a constaté l'apparition de fissurations sur les murs de sa maison. Il a alors, par l'intermédiaire de la société Avantim, déclaré ce sinistre auprès de Sagebat, assureur dommages-ouvrages ([I]) de cette opération immobilière, aux droits de laquelle vient la Sma Sa.
Le rapport d'expertise [I] du 20 octobre 2008 a attribué ces désordres à une dessication des sols, et estimé, sur la base d'un devis de la société Serm, les travaux réparatoires à la somme de 16.781,91 euros toutes taxes comprises, consistant en l'abattage des bouleaux plantés en limite de propriété, en la réalisation d'un drainage en façade Sud et au brochage des fissures, outre une application d'une peinture de type l3.
Suivant courrier du 23 mars 2010, l'assureur [I], a confirmé l'acquisition de sa garantie auprès du syndic de gestion Avantim, l'informant du détail des travaux à réaliser et du choix de la société Etude Réalisation Mètres (Serm).
Les travaux de reprise alors préconisés par l'expert [I] ont été exécutés par la société Serm entre 2011 et 2013, laquelle société les aurait sous-traités auprès de M. [F] [J], assuré auprès de Axa, pour la réalisation du drain, et de M. [N] [L], assuré auprès de Groupama, pour le brochage des enduits et la mise en peinture.
Par courrier du 28 octobre 2010, la compagnie Allianz, assureur de la société Soteba, a honoré le recours de l'assureur [I] à son encontre, à hauteur de la somme de 71.123,38 euros, dont 20.625,79 euros toutes taxes comprises concernant la villa de M. [H] [S].
Ces travaux de reprise se sont révélés non satisfaisants, M. [H] [S] faisant constater par huissier le 20 octobre 2015 la réapparition de multiples fissures.
Par courrier du 18 avril 2016, et par l'intermédiaire de son conseil, M. [H] [S] a procédé à une nouvelle déclaration de sinistre auprès de l'assureur dommages-ouvrage, rappelant à ce dernier son obligation de réparations pérennes. L'assureur [I] a dénié sa garantie, considérant le délai de garantie décennal expiré.
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En l'absence de toute solution amiable, M. [H] [S] a alors obtenu la désignation de Mme [Z], en qualité d'expert judiciaire, par ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Toulouse du 05 août 2016, au contradictoire de la société Serm et de la Sma Sa.
Par ordonnances des 16 février 2017 et 1er juin 2017, ces opérations d'expertise ont été respectivement rendues communes à M. [J], son assureur Axa, M. [L] et son assureur Groupama, puis à la compagnie Allianz, assureur de la société Soteba, et les missions de l'expert complétées.
Mme [Z] a déposé son rapport le 17 décembre 2018.
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Par acte d'huissier du 2 septembre 2019, M. [H] [S] a régulièrement fait assigner devant le tribunal judiciaire de Toulouse la Sma Sa, en indemnisation de ses préjudices.
Selon acte du 10 mars 2020, la Sa Sma a régularisé l'appel en cause aux fins de garantie de l'entreprise M. [F] [J] ainsi que des compagnies d'assurances Axa France Iard et Allianz Iard.
La jonction de ces procédures a été ordonnée le 27 août 2020.
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Par jugement du 15 juin 2022, le tribunal judiciaire de Toulouse, a :
- déclaré la Sma Sa, en sa qualité d'assureur dommage-ouvrage ayant préfinancé les travaux de reprise suite au sinistre survenu en 2012, responsable des désordres subis par M. [H] [S] ensuite de la réalisation de ces travaux de reprise non pérennes, sur le fondement de l'article 1147 ancien du code civil,
- dit que le préjudice matériel de M. [H] [S] occasionné par ces désordres s'élève à la somme de 150.000 euros toutes taxes comprises,
- condamné la Sma Sa à payer à M. [H] [S] au titre de la réparation de ces désordres la somme de 150.000 euros toutes taxes comprises,
- débouté M. [H] [S] de sa demande d'indemnisation au titre de son préjudice moral,
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la compagnie Allianz à l'encontre de la Sma Sa,
- déclaré recevable en son recours à l'encontre de la compagnie Allianz, la Sma Sa , -condamné la compagnie Allianz, en sa qualité d'assureur de la société Soteba à relever et garantir la Sma Sa de l'ensemble des condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière,
- débouté la Sma Sa de ses recours formés à l'encontre de l'entreprise M. [F] [J] et de la compagnie Axa, son assureur,
- condamné la compagnie Allianz aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire,
- condamné la compagnie Allianz à payer à M. [H] [S] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les autres parties conserveront à leur charge les frais et dépens engagés dans le cadre de la présente procédure,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.
Au vu du rapport d'expertise judiciaire concluant à l'apparition d'une nouvelle fissure caractéristique d'un affaissement causé par la qualité du sol sujet au phénomène de gonflement/retrait et à l'insuffisance des travaux réalisés en 2012, la Sma Sa, assureur [I] ne contestant pas devoir sa garantie, le premier juge l'a condamnée au paiement des travaux de reprise chiffrés par l'expert.
Il a retenu que le paiement par Allianz, assureur de la société Soteba, du 28 octobre 2010, entre les mains de Sma Sa valait reconnaissance de la responsabilité décennale de son assuré et avait interrompu le délai de garantie décennale, un nouveau délai de même durée ayant commencé à courir, au cours duquel l'assignation avait été délivrée, estimant le recours en garantie formé par la Sma Sa à l'encontre de Allianz recevable. Retenant que les fondations d'origine réalisées par la société Soteba étaient inadaptées et que les désordres constatés par l'expert judiciaire n'auraient pas eu lieu si ces fondations avaient fait l'objet d'une reprise par micro-pieux, il a estimé que la société Soteba, constructeur, engageait sa responsabilité décennale et que son assureur Allianz devait sa garantie. Il a estimé qu'il n'y avait pas de lien de causalité entre les erreurs susceptibles d'être reprochées à l'entreprise [J], assurée auprès d'Axa jusqu'au 1er avril 2014, ayant réalisé de manière défectueuse le drain à l'arrière de la maison sinistrée, et la réapparition d'une fissure en façade Sud de la maison, déboutant la Sma Sa de son recours à l'encontre de ladite entreprise et de Axa.
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Par déclaration du 15 juillet 2022, Sa Allianz Iard a relevé appel de ce jugement, en ce qu'il a :
- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la compagnie Allianz à l'encontre de la Sma Sa,
- déclaré recevable en son recours à l'encontre de la compagnie Allianz, la Sma Sa,
- condamné la compagnie Allianz, en sa qualité d'assureur de la société Soteba à relever et garantir la Sma Sa de l'ensemble des condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière,
- condamné la compagnie Allianz aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire,
- condamné la compagnie Allianz à payer à M. [H] [S] la somme de 4.000euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
intimant la Sa Axa France Iard, la Sa Sma, et M.[H] [S].
Par acte d'huissier délivré le 5 janvier 2023, la Sa Sma a appelé en cause en appel provoqué M.[F] [J].
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 7 avril 2023, la Sa Allianz Iard, appelante, demande à la cour, au visa de l'article 1792-4-1 et des articles 1792 et suivants du code civil, de l'article 114-1 du code des assurances, de :
Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et, en tout cas, mal fondées,
infirmer le jugement en ce qu'il :
rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la compagnie Allianz à l'encontre de la Sma Sa,
déclare recevable en son recours à l'encontre de la compagnie Allianz, la Sma Sa,
condamne la compagnie Allianz, en sa qualité d'assureur de la société Soteba à relever et garantir la Sma Sa de l'ensemble des condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière,
condamne la compagnie Allianz aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de l'expertise judiciaire,
condamne la compagnie Allianz à payer à M. [H] [S] la somme de 4.000euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
- déclarer irrecevable le recours en garantie dirigé à l'encontre de la compagnie Allianz en ce qu'il a été formé au-delà du délai décennal et alors que l'assureur n'était plus exposé au recours de son assuré,
En conséquence,
- débouter l'ensemble des demandes formées à l'encontre de la compagnie Allianz, -condamner la compagnie Sma Sa à verser à la compagnie Allianz la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction à la Selas Clamens Conseil, avocats qui est en droit de les recouvrer, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
En toute hypothèse,
demeurant l'absence de lien direct et certain entre l'intervention de la société Soteba et les désordres,
- débouter l'ensemble des demandes formées à l'encontre de la compagnie Allianz,
- déclarer la compagnie Allianz fondée à contester la prise en charge du préjudice moral allégué par M. [S],
- déclarer la compagnie Allianz fondée à opposer la franchise contractuelle aux tiers s'agissant de la garantie facultative des dommages immatériels,
- condamner tout succombant à verser à la compagnie Allianz la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction à la Selas Clamens Conseil, avocats qui est en droit de les recouvrer, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 mars 2023, la Sa Sma sa, intimée, demande à la cour, au visa des articles 331 et suivants du code de procédure civile, des articles 1240, 1241, 1792 et suivants et 2240 du code civil et de l'article L. 124-3 du code des assurances, de :
Sur l'appel de la compagnie Allianz
À titre principal,
- débouter la compagnie Allianz de son appel,
- confirmer purement et simplement le jugement,
- condamner la compagnie Allianz à régler à la Sma Sa la somme de 3.000 euros au titre de ses frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance d'appel,
À titre subsidiaire,
- condamner M. [F] [J] à relever indemne et garantir la Sma Sa de l'intégralité des condamnations prononcées au profit de M. [S],
- condamner M. [F] [J] à verser à la Sma Sa la somme de 3.000euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris les dépens de première instance et de l'instance de référé,
Sur l'appel incident de M. [S]
- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [S] de sa demande au titre de son prétendu préjudice moral,
- condamner la compagnie Allianz et M. [J] à relever et garantir la Sma Sa de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre,
Sur les demandes de la compagnie Axa France Iard,
- débouter la compagnie Axa France Iard de sa demande de condamnation de la Sma Sa sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 11 janvier 2023, la Sa Axa France Iard, intimée, demande à la cour, au visa des articles 331 et suivants du code de procédure civile, de l'article 1240 du code civil, les articles L.112-6, L.124-5 du code des assurances, de :
À titre principal :
- confirmer purement et simplement le jugement critiqué notamment en ce qu'il a débouté la Sma Sa de ses recours formés à l'encontre de M. [J] et de la compagnie Axa France Iard,
Partant,
- débouter la Sma Sa de son recours exercé à l'encontre de la compagnie Axa France Iard,
- mettre hors de cause la compagnie Axa France Iard,
- condamner la Sma Sa à verser à Axa une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de l'instance.
À titre subsidiaire :
- limiter la part de responsabilité de M. [J] à 5% du coût des travaux de reprise,
En tout état de cause :
- autoriser la compagnie Axa France Iard à opposer à M. [S], à M. [J], à la compagnie Allianz Iard et à la Sma Sa sa franchise contractuelle d'un montant de 800 euros applicable à ses garanties tant obligatoires que facultatives.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 9 janvier 2023, la M. [H] [S], intimé, appelant incident, demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1147 anciens du code civil, de :
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 15 juin 2022 en ce qu'il a reconnu la société Sma Sa entièrement responsable du préjudice de M. [S],
- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 15 juin 2022 en ce qu'il a condamné la Sma Sa à indemniser M. [S] à hauteur de 150.000 euros.
Pour le surplus statuant de nouveau,
- condamner la Sma Sa à la somme de 292,28 euros au titre des frais de constats d'huissier,
- condamner la Sma Sa à la somme de 5.000 euros au titre de son préjudice moral,
En toute hypothèse,
- condamner la Sma Sa au versement d'une somme de 7.500 euros au profit de M. [S] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la Sma Sa aux entiers dépens de la présente procédure, ce y compris les dépens de référé, de 1er instance et les frais et honoraires de l'expert judiciaire.
M. [F] [J], appelé en cause par voie d'appel provoqué par acte d'huissier du 5 janvier 2023 à la diligence de la Sa Sma Sa, acte délivré en l'étude d'huissier, n'a pas constitué avocat.
En application des dispositions de l'article 474 du code de procédure civile le présent arrêt sera rendu par défaut.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 mars 2024 et l'affaire a été examinée à l'audience du 19 mars 2024 à 14h.
SUR CE, LA COUR :
1°/ Sur l'étendue de la saisine de la cour
Au regard de la déclaration d'appel principal de la Sa Allianz Iard et du seul appel incident de M.[H] [S] portant sur le rejet par le premier juge de sa demande d'indemnisation d'un préjudice moral et des frais d'indemnisation de constats d'huissier, la cour n'est pas saisie des dispositions du jugement de première instance par lesquelles le premier juge a déclaré la Sma Sa, en sa qualité d'assureur dommage-ouvrage ayant préfinancé les travaux de reprise suite au sinistre traité en 2012, responsable des désordres subis par M.[H] [S] ensuite de la réalisation de ces travaux de reprise non pérennes, sur le fondement de l'article 1147 du code civil, dit que le préjudice matériel de M.[H] [S] occasionné par ces désordres s'élève à la somme de 150.000 € Ttc, et condamné la Sma Sa à payer à M.[H] [S] au titre de la réparation de ces désordres la somme de 150.000 € Ttc.
Au regard du dispositif des dernières conclusions de la Sma Sa la cour n'est pas davantage saisie d'un appel incident sur la disposition du jugement entrepris par laquelle le premier juge a débouté la Sma Sa de son recours à l'encontre de la société Axa France Iard, en tant qu'assureur de M. [F] [J]. Les prétentions de Axa France Iard tendant à la confirmation de ce débouté non frappé d'appel et à sa mise hors de cause se trouvent dès lors sans objet.
2°/ Sur la recevabilité de l'appel en garantie diligenté par la Sma Sa à l'encontre de la société Allianz Iard en sa qualité d'assureur de la société Soteba
Selon les dispositions de l'article 1792-4-1 du code civil, toute personne physique ou morale dont la responsabilité peut être engagée en vertu des articles 1792 à 1792-4 du présent code est déchargée des responsabilités et garanties pesant sur elle, en application des articles 1792 à 1792-2, après dix ans à compter de la réception des travaux ou, en application de l'article 1792-3, à l'expiration du délai visé à cet article. Ce délai de dix ans est un délai d'épreuve, de forclusion.
Selon celles de l'article L 242-1 du code des assurances, l'assurance dommages-ouvrage garantit, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, sur le fondement de l'article 1792 du code civil.
Il résulte des articles L 242-1 et L 121-12 dudit code que l'assurance dommages et une assurance de chose bénéficiant au maître de l'ouvrage et aux propriétaires successifs ou à ceux qui sont subrogés dans leurs droits et que l'assureur qui a pris en charge la réparation de dommages ayant affecté l'ouvrage de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1 du code civil se trouve subrogé dans les droits et actions du propriétaire à l'encontre des constructeurs.
Le recours subrogatoire de l'assureur dommages-ouvrage contre le constructeur responsable et son assureur se prescrit selon le même délai que celui applicable à l'action en responsabilité du maître de l'ouvrage contre le constructeur.
En l'espèce, la réception des travaux de la [Adresse 13] à [Localité 12] dans laquelle M.[H] [S] a acquis, en l'état futur d'achèvement, une maison individuelle formant le lot n°1, est intervenue le 23/04/2002.
Suite à la déclaration de sinistre réalisée courant 2008 auprès de l'assureur dommages-ouvrage Sagebat, devenu aujourd'hui Sma Sa, par le gestionnaire de l'ensemble résidentiel, l'assureur [I], sous le n° de sinistre SG9/94D0800021/A1474, a mandaté un expert. Dans son rapport définitif du 20/10/2008, ledit expert (Saitec), concernant la villa 1, celle de M.[S], a indiqué, s'agissant des fissures extérieures et intérieures, difficultés à fermer des menuiseries et d'une infiltration dans le hall d'entrée ayant fait l'objet de la déclaration de sinistre, que les investigations réalisées par Alios Pyrénées démontraient que les fissures sont consécutives à la dessication des sols, surtout en façade sud ; à une absence de drainage ayant permis aux eaux de pluie d'humidifier les fondations en façade sud; que de plus la haie de bouleaux plantée par la ville n'avait fait qu'aggraver le phénomène ; que les désordres concernant la porte-fenêtre du séjour et le volet bois de la chambre en surplomb étaient consécutifs à ce tassement, que la fissure en façade nord en surplomb de la porte d'entrée était traversante et provenait des variations dimensionnelles des matériaux entre linteau et maçonnerie ; qu'aucun défaut d'étanchéité sur le réseau eaux pluviales n'avait été révélé par l'inspection vidéo.
Il a chiffré les remèdes et coûts des travaux de reprises préconisés, consistant, pour la villa n°1, à la réalisation d'un drainage raccordé au pluvial, au brochage des fissures et à l'application d'une peinture type I3 en façades sud et nord, à la peinture du plafond de l'entrée et d'un pan de mur côté Wc, au réajustement du volet de l'étage en façade sud et de la porte-fenêtre, le tout pour un coût incluant la facture Alios Pyrénées et les investigations de la Serm, de 20.626 € Ttc.Il a préconisé l'abattage des bouleaux par la Mairie.
Au total, sur trois villas sinistrées n°s 1, 11 et 20, les travaux de reprise, frais d'investigations inclus, ont été chiffrés à 83.024 €. Seule la villa n°20, affectée d'un basculement du perron et de fissures importantes liées à une implantation en partie sur une zone de déblais et en partie sur une zone de remblais, était concernée par la préconisation d'une confortation par reprise en sous-'uvre par micro-pieux.
Sur la base de ce rapport, l'assureur [I], Sagebat, a proposé le règlement d'une somme totale de 74.480,18 € Ttc, dont 20.625,79 € Ttc pour la villa de M. [S].
Le 26 octobre 2010, au titre du sinistre ci-dessus enregistré sous le n° 94D0800021, était tiré sur le compte de Allianz Iard, assureur décennal de la Soteba, entreprise de gros-'uvre/charpente, un chèque de 71.123,38 € à l'ordre de Sagebat, assureur [I], dont il n'est pas contesté qu'il correspondait à l'ensemble des sinistres objets du rapport d'expertise du 20/10/2008. Allianz Iard, assureur décennal, a ainsi admis nécessairement et sans ambiguïté être tenu de garantir les dommages causés par les désordres constatés lors de l'expertise de 2008 dans le délai de garantie décennale. Or, à aucun moment dans l'expertise réalisée à l'époque à la demande de l'assureur [I] telle que produite au débat il n'apparaît que la cause des fissurations sur l'immeuble de M.[S] proviendrait d'une insuffisance de conception et/ou de réalisation des fondations au regard de la nature des sols. La seule cause commune aux fissurations mise en exergue ressort à la dessication des sols, aggravée en façade sud par l'absence de drainage et la haie de bouleaux plantée par la ville.
Le rapport d'expertise judicaire suite aux opérations réalisées entre août 2016 et décembre 2018 établit formellement que les fissures constatées lors du sinistre de 2008, reprises par l'entreprise Serm, ont été traitées et ne se sont pas réouvertes et qu'une seule fissure nouvelle est apparue sur un pan de mur en avancée de la cuisine dont l'expert estime qu'elle est caractéristique d'un affaissement dû à la qualité du sol analysé en 2008, lequel, sous l'effet d'apport hydrique, perdrait ses qualités de portance. Cette fissure, distincte dans sa matérialisation des précédentes, reprises et indemnisées entre 2010 et 2012, dont elle ne constitue pas une aggravation, est apparue, au plus tôt, courant 2015, M.[S] ayant fait réaliser un constat d'huissier le 20 octobre 2015 suivi d'une déclaration de sinistre le 18 avril 2016, soit après l'expiration du délai de garantie décennale des travaux d'origine, expirant en principe le 23 avril 2012, 10 ans après la réception des travaux.
Au vu du rapport des sondages Alios Pyrénées réalisés en 2008 et d'une note technique complémentaire dits annexés en pièce 2-1 au rapport d'expertise judiciaire, annexes qu'aucune des parties à la présente procédure ne produit, l'expert judiciaire a retenu qu'outre des défectuosités sur le réseau d'évacuation des eaux pluviales révélées par un rapport Serm du 20 mars 2017 et une absence de chaînage horizontal à deux niveaux, la cause principale des fissurations ayant affecté et affectant l'immeuble de M.[S] était la sensibilité du sol à la dessication/inhibition identifiée lors du sinistre de 2008, que le bureau Alios avait à l'époque préconisé la reprise en sous-'uvre de toute la villa dans sa note technique complémentaire, que ces préconisations n'avaient pas été suivies, pour en déduire que les travaux réalisés en 2012 étaient insuffisants, qu'une reprise en sous-'uvre complète aurait dû être faite et que c'était cette insuffisance de travaux qui était la cause principale du sinistre en 2016 outre l'absence de chaînage horizontal de la maçonnerie réalisée par l'entreprise Soteba, et la mauvaise exécution des travaux de reprise prescrits en 2008 (mauvaise étanchéité des regards d'eaux pluviales et drain inefficace).
A supposer que le délai de garantie décennale puisse être considéré comme pouvant être interrompu par une reconnaissance de garantie comme soutenu par la Sa Sma au visa de l'article 2240 du code civil, lequel ne concerne pourtant que le délai de prescription et non un délai de forclusion, il ne peut se déduire du règlement opéré par Allianz en octobre 2010 au vu des conclusions de l'expert mandaté par l'assureur dommages-ouvrage ayant décrit et chiffré les travaux de reprise de l'immeuble de M.[S] tels que précisés ci-dessus, que l'assureur décennal Allianz aurait sans ambiguïté reconnu que la responsabilité décennale de son assurée la Soteba était engagée à l'égard du maître d'ouvrage et de son subrogé, l'assureur [I], au titre d'une insuffisance de conception et/ou de réalisation des fondations.
En conséquence, le délai de garantie décennale devant expirer le 23 avril 2012 n'a pas pu être interrompu par le paiement effectué par la société Allianz Iard le 26 octobre 2010 contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, et l'action en garantie engagée par la Sma Sa au fond par assignation du 10 mars 2020 après assignation en référé du 4 avril 2017, époque où le délai décennal, non interrompu, était d'ores et déjà expiré, se trouve irrecevable pour cause de forclusion, le jugement entrepris devant être infirmé sur ce point.
3°/ Sur la demande d'indemnisation de M.[S] au titre de son préjudice moral et des frais de constats d'huissier à l'encontre de l'assureur dommages-ouvrage
Les frais inhérents à la nécessité de recourir à une procédure judiciaire ressortent des frais irrépétibles indemnisables sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. M.[S] n'établit nullement qu'au-delà de ces frais, la procédure l'ait affecté de manière à générer en sus un préjudice moral spécifique. Le jugement entrepris sera confirmé en ce que le premier juge l'a débouté de sa demande d'indemnisation à ce titre.
Quant aux frais de constats d'huissier exposés par une partie pour préserver ses droits ils relèvent aussi des frais irrépétibles indemnisables au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sans justifier une condamnation spécifique à des dommages et intérêts.
4°/ Sur l'appel en garantie formé par la Sma Sa à l'encontre de M. [F] [J]
Se prévalant d'une erreur d'exécution par M.[F] [J] en qualité de sous-traitant de la société Serm de la réalisation du drain en façade arrière de l'immeuble de M.[S], l'assureur dommages-ouvrage sollicite que M.[F] [J] soit condamné à le relever et garantir des condamnations prononcées au profit de M.[S].
La responsabilité contractuelle de la société Sma Sa a été retenue par le premier juge à l'égard de M.[S] en raison de l'insuffisance des travaux de reprise préconisés et financés après l'expertise de 2008. La Sma Sa n'ayant contesté ni sa responsabilité ni le préjudice matériel de M.[S] constitué par le coût des travaux de reprise préconisés par l'expert judiciaire à hauteur de 150.000 €, elle a été condamnée au paiement de cette somme à l'égard de M.[S], disposition ne faisant pas l'objet de l'appel.
Exerçant une action récursoire à l'encontre de M.[F] [J] en qualité de sous-traitant de la société Serm, intervenu lors de la réalisation des travaux de reprises exécutés entre 2010 et 2012, il lui appartient de justifier d'une faute imputable à M.[J] en lien de causalité direct avec la somme de 150.000 € qu'elle a été condamnée à payer à M.[S].
Cette somme de 150.000 € correspond pour l'essentiel au coût des travaux de fractionnement des murs, fondations et dallage de l'immeuble de M.[S], à la reprise en sous-'uvre par micropieux, au traitement des fissures (ouverture, mise en place d'épingles, matage), à la réalisation des chaînages hauts manquants, à la réalisation d'une tranchée anti-racines et aux travaux d'embellissements.
Il ressort du rapport d'expertise judiciaire que M.[J] a réalisé pour le compte de la Serm lors des travaux de reprise de 2010-2012 un drainage superficiel dont l'expert indique qu'il a dû être réalisé a priori pour reprendre des eaux de ruissellement de surface du terrain, étant implanté entre 0 et -10 centimètres sous le niveau du terrain, non fermé. L'expert précise que selon lui ce drain ne sert à rien car il ne récolte pas l'eau. Nonobstant cette affirmation, aucun élément du rapport d'expertise ne permet d'établir que la réalisation de ce drain superficiel par M.[J], même ne servant à rien, est en relation de causalité directe avec les travaux de reprise mis à la charge de la Sma Sa justifiés par des tassements différentiels des fondations de la partie RO (niveau rez-de-chaussée), étant relevé que la collecte efficace des eaux de ruissellement en provenance du versant, à défaut d'abattage de la haie de tuyas existante, implique la réalisation d'une tranchée anti-racine descendue à trois mètres de profondeur, prestation qui n'a ni été envisagée en 2008 par l'expert de l'assureur [I], ni confiée à la Serm à l'époque de la réalisation des travaux de reprise entre 2010 et 2012 et encore moins à M.[J].
En conséquence, aucune faute ne peut être reprochée à M.[J] qui soit en relation de causalité directe avec la condamnation prononcée à l'encontre de la Sma Sa au profit de M.[S].
Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en ce que le premier juge a débouté la Sma Sa de son recours contre M. [F] [J], entrepreneur individuel.
5°/ Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
L'action en garantie contre la société Allianz Iard étant jugée irrecevable, le jugement entrepris doit être infirmé en ses dispositions relatives aux dépens de première instance et à l'application de l'article 700 du code de procédure civile, la société Allianz Iard ne succombant pas.
Principale partie succombante, la Sma Sa supportera les dépens de première instance, en ceux compris les frais de référé et d'expertise judiciaire, et ceux d'appel. Elle se trouve redevable envers la société Allianz Iard au titre de la procédure de première instance et de celle d'appel, et envers M.[S], qui succombe en appel, au titre de la seule procédure de première instance, d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt, sans pouvoir elle-même prétendre à l'application de ce texte à son profit.
La société Axa France Iard a été intimée par la société Allianz Iard, appelante principale. La Sma Sa n'a formé en appel aucun appel incident et aucune demande à l'encontre de la société Axa France Iard. Elle ne succombe donc pas à son égard et en conséquence, la demande d'indemnité formée par la société Axa France Iard en appel, uniquement à l'encontre de la Sma Sa, doit être rejetée.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Statuant dans les limites de sa saisine, limitée aux dispositions du jugement entrepris concernant les recours exercés par la Sma Sa à l'encontre de la société Allianz Iard et de M. [F] [J], au débouté de la demande d'indemnisation de préjudice moral de M. [H] [S] et aux dispositions subséquentes relatives aux dépens et à l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile mise à la charge de la société Allianz Iard,
Infirme le jugement entrepris en ses dispositions concernant la société Allianz Iard,
Le confirme en ses dispositions par lesquelles le premier juge a débouté M.[H] [S] de sa demande d'indemnisation d'un préjudice moral et débouté la Sma Sa de son recours à l'encontre de M.[F] [J],
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Déclare la Sma Sa irrecevable en son recours à l'encontre de la société Allianz Iard,
Condamne la Sma Sa aux dépens de première instance, en ceux compris les frais de référé et d'expertise judiciaire, et aux dépens d'appel, avec pour ceux d'appel, autorisation de recouvrement direct au profit de la Selas Clamens Conseil conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
Condamne la Sma Sa à payer, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, d'une part, à M.[H] [S], au titre de la procédure de première instance, une indemnité de 4.000 €, frais de constats d'huissier inclus, d'autre part, à la société Allianz Iard, au titre de la procédure de première instance et de celle d'appel, une indemnité de 2.000 €,
Déboute la Sma Sa et la Sa Axa France Iard de leurs demandes respectives d'indemnité sur ce même fondement.