CA Rouen, ch. civ. et com., 5 décembre 2024, n° 24/01588
ROUEN
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Manche Industrie Marine (SAS)
Défendeur :
Hitsaus HH Oy (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Vannier
Conseillers :
M. Urbano, Mme Menard-Gogibu
Avocats :
Me Poirot-Bourdain, SCP Garraud - Ogel - Haussetete, Me Lemarie
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
La société [Localité 3] Hitsaus HH OY, dont le siège est situé en Finlande, exerce dans le domaine de l'industrie maritime et a pour activité la réparation navale, l'ingénierie et le conseil technique, la construction navale de petite taille, la sous-traitance de construction navale, l'approvisionnement des navires et la livraison de pièces de rechange.
La société [Localité 3] Hitsaus HH OY a conclu avec la SAS Manche Industrie Marine, ayant son siège social à [Localité 2] et pour activité la réparation et la maintenance navale, un contrat intitulé de « sous-traitance » le 6 février 2022.
La société [Localité 3] Hitsaus HH OY a émis diverses factures correspondant à des travaux de tôlerie, de soudage et d'aménagement exécutés dans le cadre de ce contrat.
Un certain nombre de ces factures n'ayant pas été réglées dans les délais impartis, la société [Localité 3] Hitsaus HH OY a réclamé leur paiement auprès de la société Manche Industrie Marine par courrier recommandé avec avis de réception du 5 octobre 2023 mentionnant ses factures n°694, 708 et 717 pour un montant total de 518 135 euros, outre le règlement des pénalités de retard et ce en vain.
Par courrier recommandé avec avis de réception du 18 octobre 2023, la société [Localité 3] Hitsaus HH OY a mis en demeure la société Manche Industrie Marine de procéder au règlement de ces factures pour un montant total de 518 135 euros, outre le règlement des intérêts au taux légal.
A la suite de ce courrier, la société Manche Industrie Marine a réglé une partie de la facture n°694 à hauteur de 170 000 euros sur un total de 197 925 euros.
La facture n°694 est demeurée impayée à hauteur de 27 925 euros, et les factures n°708 et 717 sont restées en souffrance.
La facture n°727, établie le 30 septembre 2023 pour un montant de 201 145 euros et dont le paiement était exigé au plus tard le 30 octobre 2023, n'a pas été réglée dans le délai imparti.
La société [Localité 3] Hitsaus HH OY a établi une nouvelle facture n°736 pour un montant de 156 380 euros payable au plus tard le 30 novembre 2023.
La société [Localité 3] Hitsaus HH OY a adressé à la société Manche Industrie Marine un nouveau courrier recommandé avec avis de réception le 31 octobre 2023, a fait état du montant de sa créance fixée à la somme de 805 625 euros et lui a demandé de lui régler une partie de sa dette avant le 23 novembre 2023 à hauteur de 448 215 euros.
Le 15 novembre 2023, la société Manche Industrie Marine a réglé le solde de la facture n°694 ainsi qu'une partie de la facture n°708 (32 075 euros sur un total de
211 995 euros) par virement bancaire de 50 000 euros.
La société Manche Industrie Marine a effectué un nouveau virement bancaire de
50 000 euros en règlement d'une partie de la facture n°708.
La société Manche Industrie Marine a finalement réglé les factures n°694 et n°708, mais la société [Localité 3] Hitsaus HH OY indique que demeurent impayées les factures suivantes :
' Facture n°717 du 31 août 2023 d'un montant de restant dû de 138 135 euros
' Facture n°727 du 30 septembre 2023 d'un montant de 201 145 euros
' Facture n°736 du 31 octobre 2023 d'un montant de 156 380 euros.
' Facture n°743 du 30 décembre 2023 d'un montant de 64 330 euros.
' Facture n°754 du 31 janvier 2024 d'un montant de 74 200 euros.
Le 14 décembre 2023, la société [Localité 3] Hitsaus HH OY a fait délivrer à la société Manche Industrie Marine une assignation devant le président du tribunal de commerce de Dieppe statuant en référé afin d'obtenir sa condamnation provisionnelle au paiement de la somme de 695 660 euros, sous astreinte d'un montant 500 euros par jour de retard.
La société Manche Industrie Marine a soulevé une exception d'incompétence.
Par ordonnance de référé du 19 avril 2024, le président du tribunal de commerce de Dieppe :
- s'est déclaré compétent pour connaître de la demande opposant les parties,
- a mis en demeure le défendeur de conclure pour le 1er juin 2024 et de transmettre ses conclusions au demandeur au secrétariat de la juridiction pour cette date, à défaut d'appel,
- a dit que la présente ordonnance sera notifiée conformément à l'article 84 du code de procédure civile,
- a rappelé l'affaire à l'audience du 12 juillet 2024,
- a laissé les dépens liquidés à la somme de 94,61 euros à la charge de la société Manche Industrie Marine.
La société Manche Industrie Marine a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration du 30 avril 2024.
EXPOSE DES PRETENTIONS
Vu les conclusions du 16 septembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de la société Manche Industrie Marine qui demande à la cour de :
- requalifier le « contrat de sous-traitance » en contrat de prêt illicite de main d''uvre,
- infirmer l'ordonnance de référé du tribunal de commerce de Dieppe du 19 avril 2024, en ce que le président du tribunal de commerce s'est déclaré compétent pour connaître de la demande opposant les parties et a laissé les dépens liquidés à la somme de 94,61 euros à la charge de la société Manche Industrie Marine,
Et statuant à nouveau,
- juger que les juridictions françaises sont incompétentes pour trancher le litige qui oppose les parties,
- rejeter la demande d'évocation,
A titre subsidiaire, en cas d'évocation,
- annuler le « contrat de sous-traitance » préalablement requalifié en contrat de prêt illicite de main d''uvre,
- en conséquence débouter la société [Localité 3] Hitsaus HH OY de toute ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société [Localité 3] Hitsaus HH OY à payer la société Manche Industrie Marine la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens.
Vu les conclusions du 26 juillet 2024, auxquelles il est renvoyé pour exposé des prétentions et moyens de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY qui demande à la cour de :
A titre principal,
- juger que la société Manche Industrie Marine ne saurait invoquer le contrat de sous-traitance à l'encontre de la société [Localité 3] en raison de ses manquements à l'article 3 de la Loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance
A titre subsidiaire,
- juger que la société [Localité 3] Hitsaus HH OY a renoncé expressément à la clause de compétence stipulée dans son seul intérêt,
A titre infiniment subsidiaire,
- juger qu'une clause attributive de compétence territoriale est inopposable à la partie qui saisit le juge des référés,
En toute hypothèse,
- confirmer l'ordonnance de référé du tribunal de commerce de Dieppe du 19 avril 2024, par laquelle le président du tribunal de commerce s'est déclaré compétent pour connaître de la demande opposant les parties,
- débouter la société Manche Industrie Marine de son exception d'incompétence,
Par évocation, en vertu des dispositions de l'article 88 du code de procédure civile,
- condamner la société Manche Industrie Marine à verser à titre de provision à la société [Localité 3] Hitsaus HH OY la somme de 689 275 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure,
- juger que cette condamnation sera assortie d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l'ordonnance de référé à intervenir,
- condamner la société Manche Industrie Marine à verser à la société [Localité 3] Hitsaus HH OY une somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Manche Industrie Marine aux entiers dépens.
MOTIFS DE LA DECISION
Exposé des moyens :
La SAS Manche Industrie Marine soutient que :
- le contrat de construction d'un navire ne constitue pas un contrat d'entreprise mais un contrat de vente à livrer, il s'ensuit que le prestataire qui agit à la demande de l'entreprise chargée de la construction du navire n'est pas un sous-traitant étant précisé qu'il s'agissait en l'espèce de la construction d'un chalutier ;
- la tâche confiée à la société [Localité 3] Hitsaus HH OY n'est pas précise ni déterminée, relève de l'activité normale de la SAS Manche Industrie Marine, a été effectuée par des salariés de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY qui ont été exclusivement dirigés par la SAS Manche Industrie Marine, a été effectuée avec des matériaux et des matériels fournis exclusivement par la SAS Manche Industrie Marine et la facturation de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY ne porte que sur des heures de travail de ses salariés ; il s'agit d'un prêt de main d''uvre à but lucratif et non d'un contrat de sous-traitance ;
- dès lors que la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance est inapplicable, la clause attributive de compétence est bien opposable à la société [Localité 3] Hitsaus HH OY ;
- le contrat prévoit la compétence des tribunaux du lieu du demandeur, en l'espèce la société [Localité 3] Hitsaus HH OY ;
- selon l'article 25 du Règlement Bruxelles I bis, la compétence qui ressort d'une clause attributive de juridiction est exclusive et les parties ne peuvent y renoncer ;
- la société [Localité 3] Hitsaus HH OY ne justifie pas que la clause attributive de compétence a été stipulée dans son seul intérêt et qu'elle pourrait dès lors y renoncer ;
- une clause attributive de compétence peut être opposée au demandeur s'agissant d'un référé-provision ;
- la demande d'évocation formée par la société [Localité 3] Hitsaus HH OY n'est pas justifiée ;
- si la cour devait évoquer, elle tirerait les conséquences de la requalification de contrat de sous-traitance en prêt prohibé de main d''uvre en annulant le contrat étant observé que la société [Localité 3] Hitsaus HH OY s'est présentée à la SAS Manche Industrie Marine comme une entreprise de travail temporaire.
La société [Localité 3] Hitsaus HH OY soutient que :
- le contrat la liant à la SAS Manche Industrie Marine est une sous-traitance, le maître de l'ouvrage n'a jamais accepté la société [Localité 3] Hitsaus HH OY et la SAS Manche Industrie Marine ne peut invoquer ce contrat à l'encontre de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY en application de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1975 ;
- la SAS Manche Industrie Marine n'a jamais contesté la qualification du contrat avant la procédure d'appel ;
- la clause attributive de juridiction ne peut dès lors être invoquée par la SAS Manche Industrie Marine ;
- la clause attributive contractuelle est uniquement stipulée en faveur de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY qui y a renoncé en saisissant les juridictions françaises ; elle déclare y renoncer expressément ;
- la clause attributive de compétence territoriale est inopposable à la partie qui saisit le juge des référés ;
- le défaut de paiement de la SAS Manche Industrie Marine la met dans une situation critique ;
- la situation de la SAS Manche Industrie Marine, qui a fait l'objet de plusieurs mesures d'exécution infructueuses, est obérée ;
- il appartient à la cour d'évoquer afin de mettre un terme aux recours dilatoires de la SAS Manche Industrie Marine ;
- le contrat conclu entre les parties est un contrat-cadre ; la SAS Manche Industrie Marine ne disposait pas des salariés nécessaires pour mener à bien les travaux de soudure, de chaudronnerie et de tôlerie considérés, les salariés étaient encadrés par un chef d'équipe dépendant de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY, cette dernière a fourni les équipements de sécurité, le petit outillage, les consommables pour la soudure, les postes à souder et onduleurs, et en matière de construction navale, il est usuel que la facturation intègre une partie horaire ;
- les prétendues fautes de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY seraient également imputables à la SAS Manche Industrie Marine en sa qualité de donneur d'ordre ;
- à supposer qu'une annulation soit prononcée, la cour devra déterminer le coût effectif de l'intervention de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY.
Réponse de la cour :
Sur la compétence :
L'article 25 du Règlement n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 prévoit que : « 1. Si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d'une juridiction ou de juridictions d'un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l'occasion d'un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes, sauf si la validité de la convention attributive de juridiction est entachée de nullité quant au fond selon le droit de cet État membre. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. La convention attributive de juridiction est conclue :
a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite;
b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles; ou
c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties ont connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée.
2. Toute transmission par voie électronique qui permet de consigner durablement la convention est considérée comme revêtant une forme écrite.
3. Les juridictions d'un État membre auxquelles l'acte constitutif d'un trust attribue compétence sont exclusivement compétentes pour connaître d'une action contre un fondateur, un trustee ou un bénéficiaire d'un trust, s'il s'agit des relations entre ces personnes ou de leurs droits ou obligations dans le cadre du trust.
4. Les conventions attributives de juridiction ainsi que les stipulations similaires d'actes constitutifs de trust sont sans effet si elles sont contraires aux dispositions des articles 15, 19 ou 23 ou si les juridictions à la compétence desquelles elles dérogent sont exclusivement compétentes en vertu de l'article 24.
5. Une convention attributive de juridiction faisant partie d'un contrat est considérée comme un accord distinct des autres clauses du contrat.
La validité de la convention attributive de juridiction ne peut être contestée au seul motif que le contrat n'est pas valable. »
Par contrat du 6 février 2022 intitulé « contrat annuel de sous-traitance » expressément soumis à la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, la SAS Manche Industrie Marine a chargé la société [Localité 3] Hitsaus HH OY de diverses tâches consistant en « travaux de tôlerie, soudage, aménagements et autres travaux liés ».
Il a été stipulé à l'article 13 qu'en cas de litige, celui-ci « serait alors soumis à la juridiction du lieu où se trouve le demandeur ».
Il résulte de la simple lecture de cette stipulation que cette clause attributive de compétence, écrite, parfaitement claire et précise, a été stipulée au profit de la partie qui assumerait le rôle de demandeur lors de l'éventuelle instance en justice qui serait diligentée à la suite du litige ayant pris naissance entre elles.
Par acte d'huissier du 14 décembre 2023, la société [Localité 3] Hitsaus HH OY a fait délivrer à la société Manche Industrie Marine une assignation devant le président du tribunal de commerce de Dieppe statuant en référé afin d'obtenir sa condamnation provisionnelle au paiement de la somme de 695 660 euros et a assumé la position procédurale de demandeur à l'instance à cette occasion.
En faisant assigner la SAS Manche Industrie Marine devant le tribunal du siège social de cette dernière au lieu de la faire assigner devant la juridiction finlandaise ainsi qu'il lui était loisible de le faire, la société [Localité 3] Hitsaus HH OY a évidemment renoncé à se prévaloir de la clause stipulée uniquement en sa faveur, renonciation réitérée formellement dans les écritures de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY.
Une renonciation à invoquer une clause attributive de compétence stipulée exclusivement en faveur d'une partie, même résultant de l'article 25 visé ci-dessus, étant toujours possible, la renonciation de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY doit recevoir effet.
La requalification sollicitée par la SAS Manche Industrie Marine est une question de fond qui ne relève pas des pouvoirs du juge des référés selon les articles 488 alinéa 1 et 79 du code de procédure civile. Au surplus, cette requalification laisserait subsister la clause attributive de compétence par application, a fortiori, du dernier alinéa de l'article 25 visé ci-dessus selon lequel : « La validité de la convention attributive de juridiction ne peut être contestée au seul motif que le contrat n'est pas valable. ». Cette requalification ne présente dès lors aucun intérêt pour déterminer la compétence territoriale des juridictions françaises pour connaître du litige entre les parties.
Du fait de la renonciation de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY, l'examen des autres moyens soulevés de part et d'autre sur la question de la compétence devient sans objet et l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce que le juge des référés s'est déclaré compétent pour connaître de la demande opposant les parties.
Sur l'évocation :
L'article 88 du code de procédure civile dispose que : « Lorsque la cour est juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente, elle peut évoquer le fond si elle estime de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d'instruction. »
Selon l'article 873 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier.
L'article L.8241-1 du code du travail interdit toute opération à but lucratif ayant pour objet exclusif le prêt de main-d'oeuvre.
Pour s'opposer à la demande de condamnation provisionnelle formée contre elle, la SAS Manche Industrie Marine soutient que le contrat la liant à la société [Localité 3] Hitsaus HH OY serait une convention prohibée de prêt de main d'oeuvre.
La sous-traitance se définie comme l'opération par laquelle un entrepreneur confie à un sous-traitant, sous la responsabilité de ce dernier, tout ou partie de l'exécution du contrat d'entreprise conclu avec le maître d'ouvrage.
Certains critères permettent de distinguer la sous-traitance du prêt de main d''uvre illicite :
- L'entreprise sous-traitante s'engage à l'exécution d'une tâche définie par l'entreprise donneuse d'ordre dans la mesure où elle ne peut pas l'accomplir elle-même avec son propre personnel, pour des raisons d'opportunité technique ou de spécificité technique ;
- L'entreprise sous-traitante assume la responsabilité de l'exécution des travaux et encadre le personnel qui y est affecté. Le personnel du sous-traitant ne doit pas être intégré de fait dans l'entreprise utilisatrice en jouissant notamment des mêmes conditions de travail que les salariés de cette dernière.
- L'entreprise sous-traitante perçoit une rémunération forfaitaire pour l'accomplissement de la tâche.
La cour constate qu'alors qu'il est constant que la SAS Manche Industrie Marine devait construire un navire de pêche, elle a chargé la société [Localité 3] Hitsaus HH OY de diverses tâches consistant en « travaux de tôlerie, soudage, aménagements et autres travaux liés ».
Le point de savoir si les travaux ainsi confiés à la société [Localité 3] Hitsaus HH OY constituent une tâche définie que la SAS Manche Industrie Marine ne pouvait accomplir avec son propre personnel constitue une question de fond qui ne relève pas des pouvoirs du juge des référés.
Le point de savoir si les personnels de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY ont été mis à la disposition de la SAS Manche Industrie Marine et ont été dirigés par cette dernière constitue également une question de fond qui ne relève pas des pouvoirs du juge des référés.
Il en est de même des points portant sur :
- la fourniture par la SAS Manche Industrie Marine des matériaux et matériels avec lesquels les travaux ont été effectués par les salariés de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY ;
- le critère de facturation utilisé par la société [Localité 3] Hitsaus HH OY et notamment le fait de savoir si la société [Localité 3] Hitsaus HH OY s'est fondée essentiellement sur les heures de travail effectuées par ses salariés ;
- l'existence d'usages professionnel en la matière.
Dès lors que les contestations soulevées en cause d'appel par la SAS Manche Industrie Marine supposent un examen du contrat du 6 février 2022, de sa requalification et de sa validité éventuelle ainsi qu'un examen des conditions dans lesquelles les travaux confiés à la société [Localité 3] Hitsaus HH OY ont été réalisés, ces contestations sont sérieuses et ne relèvent pas du juge des référés.
L'ordonnance entreprise sera infirmée en ses autres dispositions et la cour dira qu'il ne peut y avoir lieu à référé sur la demande de condamnation provisionnelle formée par la société [Localité 3] Hitsaus HH OY.
Les dépens de première instance et d'appel ainsi que les frais irrépétibles seront mis à la charge de la société [Localité 3] Hitsaus HH OY, partie succombante.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire en dernier ressort par mise à disposition au greffe ;
Confirme l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Dieppe du 19 avril 2024 en ce qu'il s'est déclaré compétent pour connaître de la demande opposant les parties ;
L'infirme pour le surplus,
Evoquant l'affaire :
Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de condamnation provisionnelle formée par la société [Localité 3] Hitsaus HH OY eu égard aux contestations sérieuses soulevées par la SAS Manche Industrie Marine ;
Condamne la société [Localité 3] Hitsaus HH OY aux dépens de première instance et d'appel .
Condamne la société [Localité 3] Hitsaus HH OY à payer à la SAS Manche Industrie Marine la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.