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Décisions

Cass. soc., 13 juin 2007, n° 05-45.694

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme COLLOMP

Avocats :

Me Foussard, SCP Waquet, Farge et Hazan

Caen, du 14 octobre 2005

14 octobre 2005

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme Esnoult et sept autres éducateurs de l'association APAEI ont saisi la juridiction prud'homale, le 10 décembre 1999 pour la première et le 6 décembre 1999 pour les autres, de demandes de paiement de rappels de salaires pour les heures de permanence nocturne effectuées depuis 1994 qui leur ont été payées selon le régime d'équivalence de l'article 11 de l'annexe 3, concernant le personnel éducatif, pédagogique et social, de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966, auxquelles ils ajoutaient diverses autres demandes ; que par jugement du 20 février 2001, le conseil de prud'hommes a fait droit à leurs demandes ; que la cour d'appel a infirmé cette décision en faisant application de l'article 29 de la loi nº 2000-37 du 19 janvier 2000 validant les versements effectués à ce titre ;

Sur les cinq moyens du pourvoi de l'employeur :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi des salariés :

Vu l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales tel qu'interprété par l'arrêt Arnolin et autres c. France du 9 janvier 2007 de la Cour européenne des droits de l'homme, et les articles 29 de la loi nº 2000-37 du 19 janvier 2000 et 2 du code civil, ensemble les articles L. 212-2 et L. 212-4 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige ;

Attendu que la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que l'adoption de l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000, qui réglait définitivement, de manière rétroactive, le fond des litiges pendants devant les juridictions internes, n'était pas justifiée par d'impérieux motifs d'intérêt général ; que partant, il y avait eu violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu que pour débouter les salariés de leurs demandes tendant à voir les heures de permanence nocturne rémunérées sur la base d'un travail effectif, l'arrêt attaqué énonce que l'article 29 de la loi du 19 janvier 2000 reposant sur d'impérieux motifs d'intérêt général, l'application de ce texte aux instances en cours ne viole pas le droit au procès équitable tel que garanti par l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les salariés avaient saisi le conseil de prud'hommes de leurs demandes les 6 et 10 décembre 1999, soit avant la date d'entrée en vigueur de l'article 29 de la loi nº 2000-37 du 19 janvier 2000 , ce dont il résultait que cet article ne pouvait être appliqué aux litiges sans méconnaître l'exigence d'un procès équitable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu que la Cour est en mesure, en statuant sans renvoi conformément à l'article 627 du nouveau code de procédure civile, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS :

Casse et annule, mais seulement dans les limites du pourvoi en ce qu'il a débouté Mmes Conflant, Esnoult, Chauffray et Spillebout de leurs demandes de paiement de compléments de salaires pour leurs heures de permanence nocturne, l'arrêt de la cour d'appel de Caen du 14 octobre 2005 ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi de ce chef ;

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Vire du 20 février 2001 en ce qu'il a condamné l'APEI du bocage virois à payer à ces quatre salariées des rappels de salaires pour temps en chambre de veille ;

Condamne l'association APAEI aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile , condamne l'APAEI à payer aux salariés la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille sept.