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Décisions

Cass. 3e civ., 5 décembre 2024, n° 23-16.270

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Teiller

Rapporteur :

M. Pety

Avocat général :

M. Burgaud

Avocats :

SCP Alain Bénabent, Me Haas

Versailles, du 30 mars 2023

30 mars 2023

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 30 mars 2023), M. [M] et Mme [Z] (les acquéreurs) ont acquis de M. [K] et de Mme [F] (les vendeurs), par acte authentique du 15 septembre 2017, une maison d'habitation au prix de 390 000 euros.

2. Ayant subi, en juin 2018, un important dégât des eaux, et se prévalant du dol des vendeurs, ils ont assigné ceux-ci en annulation de la vente.

Examen des moyens

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

3. Les vendeurs font grief à l'arrêt de les condamner à verser 20 000 euros aux acquéreurs au titre du préjudice résultant de l'augmentation du prix du marché, alors « que le préjudice doit être certain ; que l'augmentation des prix du marché immobilier ne peut constituer en elle-même un préjudice si elle ne se traduit pas effectivement par l'impossibilité concrète de réaliser une acquisition similaire au jour où le juge statue ; qu'en retenant que l'enchérissement du marché a causé un préjudice à Mme [Z] et M. [M] en lien direct avec l'annulation, sans relever l'existence d'un autre achat analogue réalisé à des conditions défavorables ou la perte de chance due à l'échec d'un tel projet, la cour d'appel a indemnisé un préjudice hypothétique et violé l'article 1240 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Ayant relevé que les acquéreurs devaient racheter une maison d'habitation après annulation de la vente du 15 septembre 2017, la cour d'appel, qui a constaté que ces derniers justifiaient d'une hausse du marché immobilier de 21,50 %, a caractérisé l'existence d'un préjudice direct et certain dont elle a souverainement évalué le montant.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Les vendeurs font grief à l'arrêt de rejeter leur demande en paiement d'une indemnité d'occupation, alors « que la restitution due par l'acheteur à la suite de l'annulation d'une vente inclut les fruits et la valeur de la jouissance que la chose a procurée ; que cette restitution due au vendeur n'est pas subordonnée à l'absence de faute de sa part ; qu'en rejetant la demande de paiement d'une indemnité d'occupation des exposants au motif que cette occupation serait la conséquence de leur propre faute, la cour d'appel a violé l'article 1352-3 du code civil par refus d'application. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1352-3, alinéa 1er, et 1352-7 du code civil :

7. Il résulte de la combinaison de ces textes que si la mauvaise foi du vendeur ne peut le priver de sa créance de restitution ensuite de l'annulation de la vente, incluant la valeur de la jouissance que la chose a procurée à l'acquéreur, ce dernier, s'il est de bonne foi, ne doit cette valeur qu'à compter du jour de la demande.

8. Pour rejeter la demande d'indemnité d'occupation formée à l'encontre des acquéreurs, l'arrêt énonce que l'occupation du bien par ces derniers est la conséquence de la propre faute des vendeurs, en l'occurrence leur réticence dolosive.

9. En statuant ainsi, alors que la restitution due aux vendeurs ensuite de l'annulation de la vente immobilière n'est pas subordonnée à l'absence de faute de leur part, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne mentionne pas, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande d'indemnité d'occupation de M. [K] et de Mme [F], l'arrêt rendu le 30 mars 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.