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Décisions

CA Toulouse, 2e ch., 17 décembre 2024, n° 23/00046

TOULOUSE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

L'oree Verte Immobilier (SARL)

Défendeur :

Septeo (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Salmeron

Conseillers :

Mme Moulayes, M. Norguet

Avocats :

Me Bats, Me Lestrade

T. com. Toulouse, du 5 déc. 2022, n° 202…

5 décembre 2022

Faits et procédure :

La Sarl l'Orée Verte Immobilier a pour activité la transaction immobilière, la gestion locative et celle de syndic de copropriété.

Elle a été en relation commerciale à compter de 2012 avec la société exerçant sous l'enseigne « SPI », ultérieurement rachetée par la Sas Septéo, laquelle a pour spécialité la conception, la programmation et la mise à disposition de progiciels (logiciels métiers standardisés) de gestion locative et de gestion de syndic.

La Sarl l'Orée Verte Immobilier a signé avec cette dernière, le 17 novembre 2017, une proposition commerciale aux fins de mise à disposition d'un progiciel de gestion pour l'activité syndic (logiciel Twin Adis), pour 2 licences (2 postes), pour la somme mensuelle de 334,80 euros TTC moyennant un engagement minimal de 24 mois. Un pack de prestations complémentaires SPI à 562,80 euros TTC ainsi que 2 packs de formations de 6 personnes chacun à 7 320 euros TTC étaient compris dans la proposition.

Plusieurs avenants à ce premier contrat ont été signés entre le 25 mai 2018 et le 15 juin 2018 pour étendre le nombre de licences et d'installations sur postes, outre les formations proposées.

Deux autres propositions commerciales adressées les 21 et du 23 novembre 2018 ont abouti à la signature de deux nouveaux contrats, a effet en janvier et février 2019, portant abonnement aux logiciels « Immo Pad Pro », devant permettre à la Sarl l'Orée Verte Immobilier d'effectuer les états des lieux et visites d'immeuble sur tablettes, au tarif de 19 euros mensuels HT avec une formation à 250 euros HT, et au logiciel « Kolimmo » devant lui permettre de faire des déclaration d'incidents et de les suivre en temps réel, moyennant un loyer mensuel de 99 euros HT avec des prestations complémentaires à 850 euros HT et une formation à 340 euros HT.

Le logiciel Kolimmo a été installé le 27 février 2019 avec une téléformation le 4 mars 2019.

Entre le 15 juin 2018 et le 1er avril 2020, la Sas Septéo a émis plusieurs factures pour un montant cumulé de 16 572,22 euros.

La Sarl l'Orée Verte Immobilier, avançant avoir rencontré beaucoup de difficultés dans l'utilisation des divers logiciels, et après avoir adressé à la Sas Septéo un mail les récapitulant le 2 juillet 2019, a cessé les paiements des échéances mensuelles et refusé d'acquitter les factures présentées.

Par courrier adressé le 10 août 2019, elle a informé la Sas Septéo de ce qu'elle rompait les contrats les liant à ses torts exclusifs et sollicitait le remboursement des factures déjà réglées ainsi que le versement d'une indemnité compensatoire.

Le 12 août 2019, la Sarl l'Orée Verte Immobilier s'est tournée vers un autre prestataire pour la fourniture de ses progiciels.

Par mail du 7 février 2020, la Sarl l'Orée Verte Immobilier a mis en demeure la Sas Septéo de lui verser les sommes demandées.

Par courrier retour du 30 juillet 2020, la Sas Septéo, contestant toute faute et assurant avoir pris en charge toutes les demandes d'assistance, a informé la Sarl l'Orée Verte Immobilier de ce qu'elle résiliait leur contrat aux torts exclusifs de la cliente pour non paiement des factures, à effet au 30 septembre 2020.

Par LRAR du 25 novembre 2020, la Sas Septéo a mis la Sarl l'Orée Verte Immobilier en demeure de régler la somme de 17 867,09 euros restant due au titre des 20 factures présentées outre des pénalités de retard.

Par acte d'huissier du 7 janvier 2021, la Sas Septeo a assigné la Sarl l'Orée Verte Immobilier devant le tribunal de commerce de Toulouse en paiement des sommes dues au titre des 20 factures impayées outre les pénalités de retard, l'indemnité forfaitaire de recouvrement.

Le 5 décembre 2022, le tribunal de commerce a :

condamné la Sarl l'Orée Verte Immobilier à payer la somme de 16 572,22 euros TTC, outre les intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2020,

condamné la Sarl l'Orée Verte Immobilier à payer les pénalités de retard égales à 5 fois le taux d'intérêt légal à compter de la date d'échéance de chaque facture et jusqu'à parfait paiement :

- factures n°18061230 datée du 15 juin 2018 d'un montant de 62,40 euros, N°18961376 datée du 28 juin 2018 d'un montant de 310,8 euros, N°18071333 datée du 03 juillet 2018 d'un montant de 1 377 euros, N°18081219 datée du 10 août 2018 d'un montant de 62,40 euros, N°18090981 datée du 4 septembre 2018 d'un montant de 201,60 euros, N°18111383 datée du 23 novembre 2018 d'un montant de 62,40 euros, N°18120996, datée du 04 décembre 2018, d'un montant de 5 814 euros, N°19031058, datée du 6 mars 2019, d'un montant de 273,6 euros, N°19031474, datée du 27 mars 2019, d'un montant de 210 euros, N°19031475, datée du 27 mars 2019, d'un montant de 571 euros, N°19041348, datée du 03 avril 2019, d'un montant de 1 425,6 euros, N°19041704, datée du 26 avril 2019, d'un montant de 252 euros, N°19051545, datée du 31 mai 2019, d'un montant de 204 euros, N°19061483, datée du 24 juin 2019, d'un montant de 139,20 euros, N°19091086, datée du 03 septembre 2019, d'un montant de 206,11 euros, N°19121129, datée du 03 décembre 2019, d'un montant de 5 814 euros, N°20031132, datée du 02 mars 2020, d'un montant de 278,16 euros, N° 20041352, datée du 01 avril 2020, d'un montant de 1450,39 euros, l'avoir N°18121161, daté du 04 décembre 2018, d'un montant de 1 339,20 euros ainsi que l'avoir N° 18121162, daté du 04 décembre 2018, d'un montant de 803,24 euros devront être déduits des factures,

condamné la Sarl l'Orée Verte Immobilier à payer la somme de 720 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement,

débouté la Sarl l'Orée Verte Immobilier de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions a l'encontre de la Sas Septéo,

condamné la Sarl l'Orée Verte Immobilier à payer à la Sas Septéo la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Maitre Aurélie Lestrade de la Selarl Decker, Avocat sur son affirmation de droit,

dit n'y avoir lieu a écarter l'exécution provisoire.

Par déclaration en date du 4 janvier 2023, la Sarl l'Orée Verte Immobilier a relevé appel du jugement du tribunal de commerce aux fins de le voir réformé en intégralité.

L'ordonnance de clôture a été rendue en date du 26 août 2024. L'affaire a été fixée à l'audience du 25 septembre 2024.

Prétentions et moyens des parties :

Vu les conclusions d'appelant en réponse notifiées le 15 septembre 2023, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la Sarl l'Orée Verte Immobilier sollicite, au visa des articles 1170 et 1219 du code civil :

In limine litis, le rejet de la demande d'irrecevabilité formulée par la Sas Septéo sur le fondement de l'article 564 du code civil et la reconnaissance de ce que la Sarl l'Orée Verte Immobilier est recevable à formuler une demande d'expertise en cause d'appel ainsi qu'une demande de remboursement des sommes versées a la Sas Septeo,

l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a écarté l'exception d'inexécution soulevée par la Sarl l'Orée Verte Immobilier, en ce qu'il a condamné la Sarl l'Orée Verte Immobilier à payer à la Sas Septeo la somme de 16 572,22 euros TTC, en ce qu'il a condamné la Sarl l'Orée Verte Immobilier à payer à la Sas Septeo les pénalités de retard égales à 5 fois le taux d'intérêt légal à compter de la date d'échéance de chaque facture et jusqu'à parfait paiement, en ce qu'il a condamné la Sarl l'Orée Verte Immobilier à payer à la Sas Septeo la somme de 720 euros au titre de indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, en ce qu'il a condamné la La Sarl l'Orée Verte Immobilier à payer à la Sas Septeo la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

et statuant à nouveau, la reconnaissance de ce que les défaillances subies par les logiciels fournis par la Sas Septeo sont graves et justifient l'absence de paiement donc que soit accueillie l'exception d'inexécution de la Sarl l'Orée Verte Immobilier et que la Sas Septeo soit déboutée de toutes ses demandes à l'encontre de la Sarl l'Orée Verte Immobilier,

subsidiairement et avant dire droit, si la Cour s'estimait non suffisamment éclairée par les éléments apportés par la Sarl l'Orée Verte Immobilier pour prouver inexécution par la Sas Septeo de ses obligations, qu'il soit ordonné aux frais avancés de la Sarl l'Orée Verte Immobilier, la désignation d'un expert judiciaire chargé de vérifier si les logiciels de la Sas Septeo installés sont défaillants et si les constatations du rapport de Cyberfablab sont exactes,

que soit réputée non écrite la clause contractuelle exclusive de la responsabilité de la SAS Septeo contenue à l'article 14 de ses conditions générales de vente,

en conséquence, la condamnation de la Sas Septeo à indemniser les préjudices de la Sarl l'Orée Verte Immobilier, ainsi sa condamnation à lui payer la somme totale de 13 179 euros correspondant à la totalité des versements effectués pour des logiciels qui ne fonctionnaient pas, qui sera reconnue recevable en cause d'appel,

la condamnation de la Sas Septeo à lui payer la somme de 50 000 euros titre du préjudice lié a la perte de chiffre d'affaires,

la condamnation de la Sas Septeo à lui payer la somme de 9 120 euros au titre du coût de la facture Commandex de reprise de la comptabilité des copropriétés,

la condamnation de la Sas Septéo à lui payer la somme totale de 630,01 euros au titre des frais de constat d'huissier réalisés par Me [N],

la condamnation de la Sas Septeo à lui payer la somme de 1 944 euros au titre de la facture de Cyberfablab du 23.03.2023,

subsidiairement, si la Cour n'infirmait pas le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la Sarl l'Orée Verte Immobilier de sa demande d'exception d'inexécution et condamnait la Sarl l'Orée Verte Immobilier à payer les factures sollicitées par la Sas Septeo :

- le rejet de la demande en paiement de la somme de 2 500 euros HT formulée par la Sas Septeo, soit 3 000 euros TTC, correspondant à la formation Dovadis,

- le rejet de la demande en paiement de la facture n° 20031132 du 2 mars 2020 d'un montant de 231,80 euros HT soit 278,16 euros TTC, formulée par la Sas Septeo,

- le rejet de la demande en paiement de sa facture n°200041352 du 1er avril 2020 d'un montant de 1 450,39 euros TTC, formulée par la Sas Septeo, pour le logiciel SPI Events,

- le rejet de la demande de paiement de la facture du 31 mai 2019 n° 19051545 d'un montant de 170,00 euros HT, soit 204,00 euros TTC, formulée par la Sas Septéo, pour frais d'annulation/ modification tardive de la prestation,

- le rejet des demandes en paiement de la Sas Septeo des factures suivantes pour ImmAG :

- facture n° 18081219 du 10 août 2018 d'un montant de 62,40 euros TTC,

- facture n°18090981 du 4 septembre 2018 d'un montant de 201,60 euros TTC,

- facture n°19091086 du 3 septembre 2019 d'un montant de 206,11 euros TTC.

En toute hypothèse, la condamnation de la Sas Septéo à lui verser 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

En réponse, vu les conclusions d'intimée 1 notifiées en date du 29 juin 2023, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles la Sas Septeo demande, au visa des articles 103, 1104, 1231-1, 1224 et suivants, 1231-6 du Code civil, l'article L.441-6 du Code de commerce, devenu l'article L441-10 dudit Code, l'article 514 du Code de procédure civile :

la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions,

le rejet de l'intégralité des demandes, fins et conclusions formulées par la Sarl l'Orée Verte Immobilier à l'encontre de la Sas Septéo,

in limine litis qu'il soit reconnu que la demande d'expertise judiciaire avant dire droit ainsi que la demande de remboursement de la somme de 3 000 euros HT au titre de la formation Dovadis et la demande de paiement de la somme de 13 179 euros en remboursement des sommes payées à la Sas Septeo, formulées pour la première fois en cause d'appel par la Sarl l'Orée Verte Immobilier, sont irrecevables,

sur le fond, la Sarl l'Orée Verte Immobilier reconnaissant sa dette envers la Sas Septeo, sa condamnation à payer sans délai à la Sas Septéo :

- la somme de 16 572.22 euros TTC, à parfaire, outre intérêts à taux légal à compter du 25 novembre 2020, date de la mise en demeure, et jusqu'à parfait paiement,

- les pénalités de retard égale à 5 fois le taux d'intérêt légal à compter de la date d'échéance de chaque facture et jusqu'à parfait paiement,

- la somme de 720 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement,

que la demande reconventionnelle de la Sarl l'Orée Verte Immobilier à l'encontre de la Sas Septeo soit rejetée,

la condamnation de la Sarl l'Orée Verte Immobilier à lui payer la somme de 3 600 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Aurélie Lestrade, Avocat sur son affirmation de droit.

MOTIFS

Sur la recevabilité des demandes nouvelles en appel

In limine litis, la Sas Septéo soutient l'irrecevabilité des demandes présentées pour la première fois à hauteur d'appel par la Sarl l'Orée Verte immobilier, et en l'espèce, la demande d'expertise judiciaire aux fins de détermination de l'origine des problèmes informatiques rencontrés ainsi que les demandes de remboursement de la somme de 3 000 euros HT au titre de la formation Dovadis et de la somme de 13 179 euros payée indûment à l'intimée.

La Sarl l'Orée Verte Immobilier réplique en affirmant que ses demandes sont bien recevables en appel pour se rattacher à ses prétentions d'origine par un lien suffisant ou en être l'accessoire ou le complément.

La cour constate que les prétentions de la Sarl l'Orée Verte Immobilier concernent les mêmes parties, se rattachent à ses prétentions d'origine par un lien suffisant et tendent aux mêmes fins, et en l'espèce, caractériser l'inexécution de ses obligations contractuelles par la Sas Septéo aux fins de lui opposer l'exception d'inexécution et obtenir le remboursement de sommes versées dans le cadre de l'exécution dudit contrat.

Les demandes de l'appelante relatives à la demande d'expertise judiciaire aux fins de détermination de l'origine des problèmes informatiques rencontrés ainsi que les demandes de remboursement de la somme de 3 000 euros HT au titre de la formation Dovadis et de la somme de 13 179 euros payée indûment à l'intimée sont donc jugées recevables.

Sur la délivrance conforme et l'exception d'inexécution

La cour prend acte de ce qu'à hauteur d'appel la Sarl l'Orée Verte Immobilier ne sollicite plus la constatation de la résiliation du contrat à son initiative au 12 août 2019.

Le contrat liant les parties en cause est un contrat de vente portant sur la fourniture de progiciels par l'intimée à sa cliente. Dans ce cadre, le vendeur est tenu à une obligation de délivrance. Manque à son obligation de délivrance, le vendeur qui livre une chose non conforme à celle convenue ou à l'usage auquel elle était destinée.

La Sarl l'Orée Verte Immobilier soutient que la Sas Septéo a failli à son obligation de délivrance conforme en fournissant des logiciels dysfonctionnels, affectés de défauts l'empêchant de les utiliser correctement malgré de nombreux appels aux services d'assistance. Elle affirme rapporter la preuve des défauts rencontrés et de ce fait, se dit fondée à opposer à l'intimée l'exception d'inexécution pour refuser les paiements des factures présentées et solliciter le remboursement des sommes antérieurement versées dans le cadre de l'exécution du contrat.

La Sas Septéo affirme avoir rempli ses obligations contractuelles de délivrance conforme, en avançant que les difficultés rencontrées par la Sarl l'Orée Verte Immobilier dans l'utilisation des deux logiciels fournis ne résultent que de leur mauvaise utilisation par la cliente.

Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.

Aux termes de l'article 1219 du code civil, une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

Les parties ne contestant pas la mise à disposition des progiciels par l'intimée, il revient donc à la Sarl l'Orée Verte Immobilier de rapporter la preuve que la délivrance n'a pas été conforme aux propositions commerciales ainsi qu'à ses attentes ou besoins, notamment en rapportant la preuve des dysfonctionnements qu'elle allègue.

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Entre commerçants, la preuve est libre.

La cour rappelle que le juge ne peut refuser d'examiner une expertise amiable non contradictoire dès lors qu'elle a été soumise à la libre des discussions des parties. Il ne peut cependant fonder sa décision sur cette seule expertise.

En l'espèce, la Sarl l'Orée Verte Immobilier fournit pour attester des dysfonctionnements :

en pièces 7 à 9 : des copies de mails adressés aux services d'assistance de la Sas Septéo ainsi que des copies du journal des demandes d'assistances enregistrées dans les progiciels pour les années 2018 et 2019 qui attestent de multiples difficultés liées au fonctionnement des applicatifs tels la disparition des icônes sur le bureau, l'impossibilité de lancer l'applicatif sur certains postes, la non accessibilité des clients à l'extranet, l'impossibilité d'enregistrer des données ou leur perte, l'enregistrement parasite de données non souhaité, l'absence de concordance entre les données suivant les entrées choisies, des problèmes d'affectation bancaire ou de répartition des charges,

en pièce 20 : l'attestation de son prestataire informatique témoignant de la récurrence des problèmes et de leur attribution au fonctionnement propre des logiciels SPI,

en pièces 25 et 26 : 2 constats d'huissier relevant le journal d'accès « assistance » enregistré par le logiciel SPI et matérialisant 37 demandes d'assistance en 2018, dirigées à plus de 80% vers la hotline, et 105 demandes d'assistance en 2019, dirigées à plus de 80% vers la hotline, ainsi que l'absence de toute écriture pour plusieurs copropriétés dans le logiciel Twin Adis,

Enfin, en pièces 27 et 28, l'appelante fournit une analyse informatique réalisée le 9 février 2023 par [M] [E], maître de conférence en informatique et expert près la cour d'appel, requis à titre privé par la Sarl l'Orée Verte Immobilier pour analyser le fonctionnement des logiciels encore présents sur ses postes, dans la version utilisée pour les années concernées. Le technicien conclut à l'existence en 2018 et 2019, pour le logiciel Dovadis, suivant les mentions portées dans le journal d'erreurs de l'applicatif ainsi qu'en réalisant les manipulations permettant de recréer les défauts rencontrés (création et paiement de factures, répartition des charges), de 78 erreurs « critiques » rencontrées par le logiciel et pouvant mener à l'arrêt inopiné de ce dernier ainsi que de 46 erreurs « sévères », en soulignant qu'il ne s'agissait pas de cas isolés mais de phénomènes récurrents. Le technicien indique que ces erreurs ne « peuvent avoir pour unique raison la seule méconnaissance de l'application par les utilisateurs. Les erreurs critiques sont essentiellement dues à la non-maitrise des erreurs lors de la phase de développement de l'application par SPI ».

Il est ainsi produit plusieurs éléments convergents corroborant les conclusions de l'analyse informatique.

Seule l'utilisation au quotidien des logiciels a permis à la Sarl l'Orée Verte Immobilier de constater les dysfonctionnements et leur récurrence de sorte qu'il s'agit bien de défauts qui ne pouvaient être repérés à la livraison des progiciels.

La Sas Septéo se limite à affirmer avoir répondu à toutes les demandes d'assistance sans rapporter plus avant la preuve du caractère efficient de ces interventions or l'examen des mails produits par l'appelante démontre que certaines demandes d'assistance ont été clôturées comme résolues par la Sas Septéo alors que les problèmes persistaient.

De même, la Sas Septéo incrimine la méconnaissance du fonctionnement des logiciels par les agents de la Sarl l'Orée Verte Immobilier sans appuyer ces affirmations, purement déclaratives, par des pièces produites au dossier.

Dans l'ensemble des pièces produites, une fois écartées les demandes d'assistance pouvant effectivement se rattacher à une mauvaise connaissance ou à une mauvaise formation aux logiciels, la cour constate que la Sarl l'Orée Verte Immobilier rapporte la preuve de l'existence de dysfonctionnements récurrents ayant affecté de manière importante les progiciels fournis par la Sas Septéo, et rendant leur utilisation très difficile voire parfois impossible.

La cour, qui n'a pas besoin d'être plus amplement éclairée sur cette question, rejette donc la demande d'expertise judiciaire formulée par l'appelante.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que la Sas Septéo n'a pas satisfait à son obligation de délivrance conforme des progiciels telle que prévue aux contrats.

La récurrence des dysfonctionnements constatés, l'impossibilité pour la cliente de poursuivre normalement ses activités professionnelles ainsi que la nécessité pour elle in fine de changer toute sa solution informatique établissent la gravité des manquements reprochés à l'intimé et justifient, au sens de l'article 1219 du code civil, que l'appelante lui oppose l'exception d'inexécution.

La Sarl l'Orée Verte Immobilier donc est déchargée de son obligation de payer les 20 factures présentées par la Sas Septéo pour un montant de 16 572,22 euros ainsi que les pénalités de retard et l'indemnité forfaitaire de 720 euros.

Le jugement de première instance est infirmé en totalité de ce chef.

En revanche, la Sarl l'Orée Verte Immobilier n'ayant jamais sollicité la résolution mais seulement la résiliation du contrat, prétention dont elle s'est désistée par ailleurs en appel, n'est pas fondée, sur sa seule prétention relative à l'exception d'inexécution, à demander le remboursement des sommes versées en cours d'exécution de celui-ci au titre d'acomptes ou de précédentes factures. Elle sera déboutée de ces chefs.

Sut les demandes indemnitaires de la Sarl l'Orée Verte Immobilier

Reconventionnellement, la Sarl l'Orée Verte Immobilier sollicite l'indemnisation des préjudices qu'elle dit avoir subi du fait des dysfonctionnements imputables aux progiciels.

Aux termes des articles 1231-1 à 1231-4 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure. Les dommages et intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé [..] Le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qui pouvaient être prévus lors de la conclusion du contrat, sauf lorsque l'inexécution est due à une faute lourde ou dolosive. Dans le cas même où l'inexécution du contrat résulte d'une faute lourde ou dolosive, les dommages et intérêts ne comprennent que ce qui est une suite immédiate et directe de l'inexécution.

Les parties restent cependant libres d'aménager à leur guise les conséquences de l'inexécution en prévoyant des clauses pénales, limitatives ou exclusives de réparation.

La Sas Septéo oppose précisément à la Sarl l'Orée Verte Immobilier les clauses limitatives d'indemnisation figurant dans les conditions générales des 3 contrats signés et prévoyant qu'en cas d'engagement de sa responsabilité, seuls les préjudices directs et prévisibles seront indemnisés, et uniquement en cas de dol pour les contrats de 2018, ce dans une limite du montant maximal constitué par l'ensemble des sommes versées par le client dans les 12 mois précédent l'incident.

L'appelante affirme que ces clauses doivent être réputées non écrites comme privant de toute substance l'obligation essentielle du débiteur.

Il est de jurisprudence constante que les clauses contractuelles limitatives de responsabilité ou d'indemnisation sont licites. Les clauses prévues en l'espèce n'interdisent ni l'engagement de la responsabilité de la Sas Septéo, ni l'indemnisation du préjudice subi par la cliente mais limitent celle-ci aux préjudices directs et prévisibles, en cas de caractérisation d'un dol ou d'une faute lourde, ainsi qu'à un plafond maximal constitué de l'ensemble des sommes réglées par le client au cours des 12 derniers mois. Elles seront donc reconnues valides.

Il a été jugé que seule la faute lourde, soit le comportement d'une extrême gravité confinant au dol et dénotant l'inaptitude du débiteur de l'obligation à l'accomplissement de la mission contractuelle qu'il avait acceptée, empêche le contractant auquel elle est imputable de limiter la réparation du préjudice qu'il a causé aux dommages prévus ou prévisibles lors du contrat et de s'en affranchir par une clause de non-responsabilité.

Or, en l'espèce, si la cour a retenu des manquements d'une gravité certaine à l'encontre de la Sas Septéo, ces manquements ne revêtent pas le caractère d'une faute dolosive ainsi exposée de sorte qu'il n'y a pas lieu d'écarter les clauses limitatives d'indemnisation incluses dans les contrats en cause, lesquelles, acceptées par les parties lors de leur signature, s'appliquent à la Sarl l'Orée Verte Immobilier.

L'appelante sollicite l'indemnisation de divers préjudices économiques: un préjudice découlant de l'impossibilité d'exécuter ses missions et de la perte de certains clients, chiffré à 50 000 euros, un préjudice découlant de la perte de chiffre d'affaires, chiffré à 145 620 euros, un préjudice découlant de la perte de chance de développer son activité, chiffré à 50 000 euros, ainsi que le coût de reprise d'une comptabilité erronée, chiffré à 9 120 euros TTC.

Outre que la Sarl l'Orée Verte Immobilier ne produit aucun élément de nature à attester de ces divers préjudices et encore moins des montants demandés, la cour constate qu'il s'agit uniquement de chefs de préjudices contractuellement exclus de toute indemnisation comme entrant dans la liste des préjudices indirects non pris en charge par la Sas Septéo.

De ce fait, ses demandes indemnitaires ne peuvent être accueillies et elle en sera déboutée.

Par ailleurs, la cour relève que la Sarl l'Orée Verte Immobilier sollicite le remboursement des frais de constats d'huissier et d'analyse informatique exposés dans la procédure, or les frais exposés à l'occasion des procédures judiciaires non compris dans les dépens ne constituent pas un préjudice réparable et ne peuvent être remboursés que sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Sa demande ne pourra être accueillie en dehors des dispositions relatives aux frais accessoires.

Sur les frais irrépétibles,

Infirmé intégralement, le jugement de première instance l'est également sur ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.

La Sas Septéo, partie succombante, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Les circonstances de l'espèce justifient que la Sas Septéo soit condamnée à verser à la Sarl l'Orée Verte Immobilier la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, elle-même étant déboutée de sa demande formulée sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Déclare recevables en appel la demande d'expertise judiciaire aux fins de détermination de l'origine des problèmes informatiques rencontrés ainsi que les demandes de remboursement de la somme de 3 000 euros HT au titre de la formation Dovadis et de la somme de 13 179 euros payée indûment à l'intimée formulées par la Sarl l'Orée Verte Immobilier,

Rejette la demande d'expertise judiciaire formulée par la Sarl l'Orée Verte Immobilier ainsi que sa demande de remboursement des sommes versées en exécution des contrats,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et, statuant à nouveau,

Constate le manquement de la Sas Septéo à son obligation de délivrance conforme,

Constate que ce manquement revêt une gravité telle que la Sarl l'Orée Verte Immobilier est fondée à opposer à la Sas Septéo l'exception d'inexécution,

En conséquence, déboute la Sas Septéo de sa demande en paiement de 20 factures à concurrence de la somme de 16 572,22 euros,

Déboute la Sarl l'Orée Verte Immobilier de l'ensemble des demandes indemnitaires formulées à l'encontre de la Sas Septéo,

Y ajoutant,

Condamne la Sas Septéo aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne la Sas Septéo à verser à la Sarl l'Orée Verte Immobilier la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute la Sas Septéo de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

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