CA Rennes, ch. etrangers/hsc, 13 décembre 2024, n° 24/00652
RENNES
Ordonnance
Autre
COUR D'APPEL DE RENNES
N° 24/328
N° RG 24/00652 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VOPE
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Nous, Eric METIVIER, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Eric LOISELEUR, greffier placé,
Statuant sur l'appel formé le 12 Décembre 2024 à 23H42 par Me Yann-Christophe KERMARREC pourv:
M. [M] [L] [X]
né le 06 Juin 1999 à [Localité 1] (GABON)
de nationalité Gabonaise
ayant pour avocat Me Yann-Christophe KERMARREC, avocat au barreau de RENNES
d'une ordonnance rendue le 12 Décembre 2024 à 17H15 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a rejeté les exceptions de nullité soulevées, le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [M] [L] [X] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-six jours à compter du 12 Décembre 2024 à 24H00;
En présence de Mme [S] [J], membre du Pôle Régional Contentieux de la Préfecture d'Ille et Vilaine, représentant du préfet du FINISTERE, dûment convoqué,
En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur FICHOT, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 13 Décembre 2024 lequel a été mis à disposition des parties.
En présence de [M] [L] [X], assisté de Me Yann-Christophe KERMARREC, avocat,
Après avoir entendu en audience publique le 13 Décembre 2024 à 11H00 l'appelant assisté de son avocat et le représentant du préfet en leurs observations,
Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :
Par arrêté de monsieur le Préfet Finistère du 08 décembre 2024, notifié à monsieur [M] [L] [X] le 08 décembre 2024, le Préfet du Finistère a prononcé à l'égard de monsieur [M] [L] [X] l'obligation de quitter le territoire français ;
Par arrêté de monsieur le Préfet Finistère du 08 décembre 2024 notifié à M. [M] [L] [X] le 08 décembre 2024 monsieur le Préfet du Finistère a prononcé son placement en rétention administrative.
Par requête introduite par M. [M] [L] [X] à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative un recours a été exercé ;
Par requête motivée du représentant de monsieur le Préfet du Finistère du 11 décembre 2024, reçue le 11 décembre 2024 à 15h24 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le Préfet du Finistère a sollicité la prolongation du placement en rétention administrative de monsieur [M] [L] [X] pour une durée de 26 jours.
Par ordonnance du 12 décembre 2024 à 17h15, le magistrat du siège chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de liberté prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) près le Tribunal judiciaire de RENNES a :
Rejeté les exceptions de nullité soulevées ;
Rejeté le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative
Ordonné la prolongation du maintien de M. [M] [L] [X] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de VINGT SIX JOURS à compter du 12 décembre 2024 à 24h00 ;
Dit que le Procureur de la République a la possibilité dans un délai de 24 heures à partir de la notification de la présente ordonnance de s'y opposer et d'en suspendre les effets.
Notifié que la présente décision est susceptible d'être contestée par la voie de l'appel interjeté dans les 24 heures du prononcé de la présente ordonnance, devant le Premier Président de la Cour d'Appel de RENNES, et par requête motivée (courriel : [Courriel 3]) ;
Rappelé à M. [M] [L] [X] que dès le début du maintien en rétention, il peut demander I' assistance d'un interprète, d'un médecin, d'un conseil et peut, s'il le désire, communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix ;
Monsieur [M] [L] [X] a interjeté appel par l'intermédiaire de son avocat maître Yann Kermarrec le 12 décembre 2024 à 23h43.
Monsieur [L] [X] fait grief à l'ordonnance du premier juge (i) d'avoir omis de statuer sur deux exceptions de nullités tirées de la violation de l'article 78-6 du CPP et (ii) et (iii) de l'article 5 II du décret n°2010-569 relatif au fichier des personnes recherchées et de ne pas avoir répondu à ces moyens ;
Aux termes de sa déclaration d'appel monsieur sollicite de monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Rennes de :
' JUGER son appel aussi recevable que bienfondé ;
' CONSTATER l'irrégularité de la procédure ;
En conséquence,
' INFIRMER l'ordonnance querellée et dire n'y avoir lieu à prolongation de la rétention
' ORDONNER la mainlevée du placement en rétention ;
' CONDAMNER Monsieur le Préfet du Finistère es qualité de représentant de l'Etat, à payer à Maître Yann Kermarrec, conseil de l'intéressé qui renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
A l'audience du 13 décembre 2024 monsieur [M] [L] [X] était présent assisté de son avocat.
Monsieur le Procureur Général a requis par écrit, porté préalablement à l'ouverture des débats à la connaissance de monsieur [M] [L] [X] , et de son avocat la confirmation de la décision entreprise nonobstant le menottage qui n'avait pas lieu d'être mais qui n'a causé aucun grief à l'intéressé..
Monsieur le Préfet du Finistère était représenté par madame [S] [J] dument habilitée par pouvoir joint au dossier de la cour.
SUR QUOI,
Sur les erreurs de droit
Il est fait grief à l'ordonnance du 12 décembre 2024 précitée de ne pas avoir statué sur les moyens suivants :
Sur la violation de l'article 78-6 du code de procédure pénale
Le premier juge a considéré que les policiers municipaux, constatant un individu urinant sur un bâtiment de la gare était en droit de le contrôler et d'obtenir de sa part un justificatif d'identité et /ou un document l'autorisant à séjourner sur le territoire national.
L'avocat de monsieur [M] [L] [X] considère qu'en statuant de la sorte, le premier juge a entaché sa décision d'erreur de droit.
L'article 78-6 du code de procédure pénale dispose : « Les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1° bis, 1° ter, 1° quater et 2° de l'article 21 sont habilités à relever l'identité des contrevenants pour dresser les procès-verbaux concernant des contraventions aux arrêtés de police du maire, des contraventions au code de la route que la loi et les règlements les autorisent à verbaliser ou des contraventions qu'ils peuvent constater en vertu d'une disposition législative expresse.
Si le contrevenant refuse ou se trouve dans l'impossibilité de justifier de son identité, l'agent de police judiciaire adjoint mentionné au premier alinéa en rend compte immédiatement à tout officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétent, qui peut alors lui ordonner sans délai de lui présenter sur-le-champ le contrevenant. A défaut de cet ordre, l'agent de police judiciaire adjoint mentionné au premier alinéa ne peut retenir le contrevenant. Lorsque l'officier de police judiciaire décide de procéder à une vérification d'identité, dans les conditions prévues à l'article 78-3, le délai prévu au troisième alinéa de cet article court à compter du relevé d'identité ».
Cependant, aux termes de l'article 78-2 alinéa 1 à 6 du code de procédure pénale : « Les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux articles 20 et 21-1 0 peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l'égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner :
- qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ;
- ou qu'elle se prépare à commettre un crime ou un délit ;
- ou qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête en cas de crime ou de délit ;
- ou qu'elle a violé les obligations ou interdictions auxquelles elle est soumise dans le cadre d'un contrôle judiciaire, d'une mesure d'assignation à résidence avec surveillance électronique, d'une peine ou d'une mesure suivie par le juge de l'application des peines ;
- ou qu'elle fait l'objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire. »
L'article L. 311-1 du CESEDA dispose :« Sous réserve des dispositions de l'article L. 121-1 ou des stipulations d'un accord international, tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France doit, après l'expiration d'un délai de trois mois depuis son entrée en France, être muni d'une carte de séjour. »
En l'espèce, les policiers municipaux de la ville de [Localité 2] constataient le 7 décembre 2024 la présence d'un individu en train d'uriner sur le bâtiment de la gare SNCF et décidait de le contrôler au vu de la constatation de l'infraction de déversement de liquide insalubre hors des emplacements autorisés (NATINF 26513); Alors qu'il était demandé à l'individu de justifier de son identité, celui-ci présentait un passeport gabonais en cours de validité mais était dans l'incapacité de justifier d'un document l'autorisant à séjourner sur le territoire national français.
Les policiers contactaient alors un officier de police judiciaire pour qu'il puisse procéder aux vérifications sur la situation administrative de Monsieur [L] [X] [M] qui révélaient que ce dernier était dépourvu de titre de séjour et que plusieurs arrêtés préfectoraux portant obligation de quitter le territoire lui avaient été notifiés en 2021 et 2022 et 2023 et qu'il n'avait pas respecté l'arrêté préfectoral portant assignation à résidence qui lui avait été faite le 08 décembre 2022, une fiche de recherche était active le concernant ;
Les policiers était fondaient à procéder non au contrôle comme il est indiqué par la défense de l'intéressé mais à demander à celui-ci de justifier de son identité et ce au vu de la commission d 'une infraction et à poursuivre leurs investigations puisque la personne présentait un passeport étranger et était dans l'incapacité de justifier d'un titre lui permettant de séjourner sur le territoire national français ;
Le premier juge a ainsi statué sur le moyen soulevé et l'a - à bon droit- rejeté.
Sa décision sera dès lors confirmée sur ce point.
Sur la violation de l'article 803 du CPP
L'article 803 du CPP dispose : « Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s'il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite. Dans ces deux hypothèses, toutes mesures utiles doivent être prises, dans les conditions compatibles avec les exigences de sécurité, pour éviter qu'une personne menottée ou entravée soit photographiée ou fasse l'objet d'un enregistrement audiovisuel. »
Comme l'a souligné le premier juge, le défenseur des droits a rappelé que l'utilisation de menottes ne doit pas être systématique et son usage doit être apprécié notamment au regard des critères suivants :
Les conditions de l'interpellation (fuite ou violences),
La nature des faits reprochés,
L'âge de la personne,
Son état apparent de santé,
La personnalité de l'intéressé, notamment si cette personne est connue
La découverte d'objets dangereux sur la personne,
L'existence de signes manifestes de consommation d'alcool ou de stupéfiants.
Or, en l'espèce, si monsieur [M] [L] [X] a indiqué lors de son interpellation être en situation irrégulière et avoir consommé plusieurs canettes de bière mais selon le rapport des policiers municipaux une fois menotté et installé dans leur véhicule en dotation.
Ces deux éléments ont amené les policiers à considérer qu'il était susceptible de vouloir prendre la fuite ou avoir un comportement violent pouvant présenter un danger pour lui ou pour autrui. Les policiers ont d'ailleurs acté que le transport s'était déroulé sans encombre et que l'intéressé n'a présenté aucune blessure liée à l'intervention ou au transport ;
Cependant cette mesure n'était pas nécessaire comme l'a précisé pertinemment le Parquet Général.
Elle ne fait néanmoins aucun grief à l'intéressé qui n'a pas été blessé à cette occasion et ne peut dès lors justifier la nullité de la procédure subséquente
Ainsi, alors que l'intéressé ne rapporte pas la preuve d'une atteinte à ses droits qui entacherait d'irrégularité la procédure par un recours injustifié au menottage, qu'il n'est pas démontré en l'espèce l'existence d'un grief, le moyen a été à bon droit, rejeté et sera confirmé.
Sur la violation de l'article R. 511-1 du Code de la sécurité intérieure
Aux termes de l'article R.511-1 du CSI : « Les agents de police municipale mentionnés au 2° de l'article 21 du code de procédure pénale peuvent constater par procès-verbal, en application des dispositions de l'article L. 511-1 du présent code, lorsqu'elles sont commises sur le territoire communal et qu'elles ne nécessitent pas de leur part d'actes d'enquête, les contraventions prévues par le code pénal et énumérées par l'article R. 15-33-29-3 du code de procédure pénale. Ils peuvent également constater par procès-verbal, dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article L. 511-1 du présent code, les contraventions mentionnées à l'article R. 610-5 du code pénal, relatives aux arrêtés de police municipale pris par le maire ou par le préfet de département en application des 1° à 3° de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, ainsi que les contraventions au code de la route mentionnées à l'article R. 130-2 de ce code et les contraventions relatives à l'interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif prévues par les articles R. 3512-1 et R.3512-2 du code de la santé publique.»
En procédant comme rappelé ci-dessus et en informant sur le champ l'officier de police judiciaire compétent, les policiers municipaux de la ville de [Localité 2] ont strictement procédé conformément aux textes applicables.
Le moyen sera dès lors rejeté
Sur la violation de l'article 5 II du décret n°2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées
Cet article dispose : « II. ' Sont destinataires des données à caractère personnel et informations enregistrées, dans le cadre de leurs attributions légales :
1° Les autorités judiciaires ;
2° Les organismes de coopération internationale en matière de police judiciaire et les services de police étrangers, dans les conditions prévues à l'article L. 235-1 du code de la sécurité intérieure ;
3° Les agents de police municipale, à l'initiative des agents des services de la police nationale ou des militaires des unités de la gendarmerie nationale aux fins et dans les limites fixées à l'article 12 des annexes IV-I et IV-II du code général des collectivités territoriales, dans le cadre des recherches des personnes disparues.
Afin de parer à un danger pour la population, les services de la police nationale et les unités de la gendarmerie nationale peuvent, à titre exceptionnel, transmettre oralement aux agents de police municipale certaines informations relatives à une personne inscrite dans le présent fichier ;
4° Les agents du service gestionnaire du fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes aux fins de consultation des seules fiches concernant le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes ;
5° Les agents du service gestionnaire du fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes aux fins de consultation des seules fiches concernant le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes ;
6° Les agents des services spécialisés de renseignement du ministère de la défense, individuellement désignés et spécialement habilités par les directeurs de ces services, aux seules fins de prévention des actes de terrorisme et dans la limite du besoin d'en connaître. »
Les vérifications au fichier des personnes recherchées ont été effectuées par l'officier de police judiciaire et le résultat des recherches a été transmis aux policiers municipaux avec les instructions requises par l'OPJ.
Il s'ensuit qu'en procédant de la sorte aucune irrégularité faisant grief ne pouvait être relevée et que l'ordonnance du premier juge, rejetant tous les moyens soulevés en défense, ne peut qu'être confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision réputée contradictoire, Nous Eric Métivier, conseiller délégué par ordonnance de monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Rennes
Déclarons l'appel recevable,
Rejetons les moyens présentés et développés dans l'intérêt de monsieur [M] [L] [X]
Confirmons l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes en charge du contrôle des mesures privatives ou restrictives de liberté du 12 décembre 2024,
Rejetons la demande de Me Yann-Christophe Kermarrec en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Laissons les dépens à la charge du Trésor Public,
Fait à Rennes le 13 décembre 2024 à 14h00
LE GREFFIER PAR DELEGATION, LE CONSEILLER
Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [M] [L] [X], à son avocat et au préfet
Le Greffier,
Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.
Le Greffier
N° 24/328
N° RG 24/00652 - N° Portalis DBVL-V-B7I-VOPE
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
O R D O N N A N C E
articles L 741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
Nous, Eric METIVIER, conseiller à la cour d'appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assisté de Eric LOISELEUR, greffier placé,
Statuant sur l'appel formé le 12 Décembre 2024 à 23H42 par Me Yann-Christophe KERMARREC pourv:
M. [M] [L] [X]
né le 06 Juin 1999 à [Localité 1] (GABON)
de nationalité Gabonaise
ayant pour avocat Me Yann-Christophe KERMARREC, avocat au barreau de RENNES
d'une ordonnance rendue le 12 Décembre 2024 à 17H15 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a rejeté les exceptions de nullité soulevées, le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [M] [L] [X] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-six jours à compter du 12 Décembre 2024 à 24H00;
En présence de Mme [S] [J], membre du Pôle Régional Contentieux de la Préfecture d'Ille et Vilaine, représentant du préfet du FINISTERE, dûment convoqué,
En l'absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur FICHOT, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 13 Décembre 2024 lequel a été mis à disposition des parties.
En présence de [M] [L] [X], assisté de Me Yann-Christophe KERMARREC, avocat,
Après avoir entendu en audience publique le 13 Décembre 2024 à 11H00 l'appelant assisté de son avocat et le représentant du préfet en leurs observations,
Avons mis l'affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :
Par arrêté de monsieur le Préfet Finistère du 08 décembre 2024, notifié à monsieur [M] [L] [X] le 08 décembre 2024, le Préfet du Finistère a prononcé à l'égard de monsieur [M] [L] [X] l'obligation de quitter le territoire français ;
Par arrêté de monsieur le Préfet Finistère du 08 décembre 2024 notifié à M. [M] [L] [X] le 08 décembre 2024 monsieur le Préfet du Finistère a prononcé son placement en rétention administrative.
Par requête introduite par M. [M] [L] [X] à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative un recours a été exercé ;
Par requête motivée du représentant de monsieur le Préfet du Finistère du 11 décembre 2024, reçue le 11 décembre 2024 à 15h24 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le Préfet du Finistère a sollicité la prolongation du placement en rétention administrative de monsieur [M] [L] [X] pour une durée de 26 jours.
Par ordonnance du 12 décembre 2024 à 17h15, le magistrat du siège chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de liberté prévues par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) près le Tribunal judiciaire de RENNES a :
Rejeté les exceptions de nullité soulevées ;
Rejeté le recours formé à l'encontre de l'arrêté de placement en rétention administrative
Ordonné la prolongation du maintien de M. [M] [L] [X] dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de VINGT SIX JOURS à compter du 12 décembre 2024 à 24h00 ;
Dit que le Procureur de la République a la possibilité dans un délai de 24 heures à partir de la notification de la présente ordonnance de s'y opposer et d'en suspendre les effets.
Notifié que la présente décision est susceptible d'être contestée par la voie de l'appel interjeté dans les 24 heures du prononcé de la présente ordonnance, devant le Premier Président de la Cour d'Appel de RENNES, et par requête motivée (courriel : [Courriel 3]) ;
Rappelé à M. [M] [L] [X] que dès le début du maintien en rétention, il peut demander I' assistance d'un interprète, d'un médecin, d'un conseil et peut, s'il le désire, communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix ;
Monsieur [M] [L] [X] a interjeté appel par l'intermédiaire de son avocat maître Yann Kermarrec le 12 décembre 2024 à 23h43.
Monsieur [L] [X] fait grief à l'ordonnance du premier juge (i) d'avoir omis de statuer sur deux exceptions de nullités tirées de la violation de l'article 78-6 du CPP et (ii) et (iii) de l'article 5 II du décret n°2010-569 relatif au fichier des personnes recherchées et de ne pas avoir répondu à ces moyens ;
Aux termes de sa déclaration d'appel monsieur sollicite de monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Rennes de :
' JUGER son appel aussi recevable que bienfondé ;
' CONSTATER l'irrégularité de la procédure ;
En conséquence,
' INFIRMER l'ordonnance querellée et dire n'y avoir lieu à prolongation de la rétention
' ORDONNER la mainlevée du placement en rétention ;
' CONDAMNER Monsieur le Préfet du Finistère es qualité de représentant de l'Etat, à payer à Maître Yann Kermarrec, conseil de l'intéressé qui renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
A l'audience du 13 décembre 2024 monsieur [M] [L] [X] était présent assisté de son avocat.
Monsieur le Procureur Général a requis par écrit, porté préalablement à l'ouverture des débats à la connaissance de monsieur [M] [L] [X] , et de son avocat la confirmation de la décision entreprise nonobstant le menottage qui n'avait pas lieu d'être mais qui n'a causé aucun grief à l'intéressé..
Monsieur le Préfet du Finistère était représenté par madame [S] [J] dument habilitée par pouvoir joint au dossier de la cour.
SUR QUOI,
Sur les erreurs de droit
Il est fait grief à l'ordonnance du 12 décembre 2024 précitée de ne pas avoir statué sur les moyens suivants :
Sur la violation de l'article 78-6 du code de procédure pénale
Le premier juge a considéré que les policiers municipaux, constatant un individu urinant sur un bâtiment de la gare était en droit de le contrôler et d'obtenir de sa part un justificatif d'identité et /ou un document l'autorisant à séjourner sur le territoire national.
L'avocat de monsieur [M] [L] [X] considère qu'en statuant de la sorte, le premier juge a entaché sa décision d'erreur de droit.
L'article 78-6 du code de procédure pénale dispose : « Les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1° bis, 1° ter, 1° quater et 2° de l'article 21 sont habilités à relever l'identité des contrevenants pour dresser les procès-verbaux concernant des contraventions aux arrêtés de police du maire, des contraventions au code de la route que la loi et les règlements les autorisent à verbaliser ou des contraventions qu'ils peuvent constater en vertu d'une disposition législative expresse.
Si le contrevenant refuse ou se trouve dans l'impossibilité de justifier de son identité, l'agent de police judiciaire adjoint mentionné au premier alinéa en rend compte immédiatement à tout officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale territorialement compétent, qui peut alors lui ordonner sans délai de lui présenter sur-le-champ le contrevenant. A défaut de cet ordre, l'agent de police judiciaire adjoint mentionné au premier alinéa ne peut retenir le contrevenant. Lorsque l'officier de police judiciaire décide de procéder à une vérification d'identité, dans les conditions prévues à l'article 78-3, le délai prévu au troisième alinéa de cet article court à compter du relevé d'identité ».
Cependant, aux termes de l'article 78-2 alinéa 1 à 6 du code de procédure pénale : « Les officiers de police judiciaire et, sur l'ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux articles 20 et 21-1 0 peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l'égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner :
- qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ;
- ou qu'elle se prépare à commettre un crime ou un délit ;
- ou qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête en cas de crime ou de délit ;
- ou qu'elle a violé les obligations ou interdictions auxquelles elle est soumise dans le cadre d'un contrôle judiciaire, d'une mesure d'assignation à résidence avec surveillance électronique, d'une peine ou d'une mesure suivie par le juge de l'application des peines ;
- ou qu'elle fait l'objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire. »
L'article L. 311-1 du CESEDA dispose :« Sous réserve des dispositions de l'article L. 121-1 ou des stipulations d'un accord international, tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France doit, après l'expiration d'un délai de trois mois depuis son entrée en France, être muni d'une carte de séjour. »
En l'espèce, les policiers municipaux de la ville de [Localité 2] constataient le 7 décembre 2024 la présence d'un individu en train d'uriner sur le bâtiment de la gare SNCF et décidait de le contrôler au vu de la constatation de l'infraction de déversement de liquide insalubre hors des emplacements autorisés (NATINF 26513); Alors qu'il était demandé à l'individu de justifier de son identité, celui-ci présentait un passeport gabonais en cours de validité mais était dans l'incapacité de justifier d'un document l'autorisant à séjourner sur le territoire national français.
Les policiers contactaient alors un officier de police judiciaire pour qu'il puisse procéder aux vérifications sur la situation administrative de Monsieur [L] [X] [M] qui révélaient que ce dernier était dépourvu de titre de séjour et que plusieurs arrêtés préfectoraux portant obligation de quitter le territoire lui avaient été notifiés en 2021 et 2022 et 2023 et qu'il n'avait pas respecté l'arrêté préfectoral portant assignation à résidence qui lui avait été faite le 08 décembre 2022, une fiche de recherche était active le concernant ;
Les policiers était fondaient à procéder non au contrôle comme il est indiqué par la défense de l'intéressé mais à demander à celui-ci de justifier de son identité et ce au vu de la commission d 'une infraction et à poursuivre leurs investigations puisque la personne présentait un passeport étranger et était dans l'incapacité de justifier d'un titre lui permettant de séjourner sur le territoire national français ;
Le premier juge a ainsi statué sur le moyen soulevé et l'a - à bon droit- rejeté.
Sa décision sera dès lors confirmée sur ce point.
Sur la violation de l'article 803 du CPP
L'article 803 du CPP dispose : « Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s'il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite. Dans ces deux hypothèses, toutes mesures utiles doivent être prises, dans les conditions compatibles avec les exigences de sécurité, pour éviter qu'une personne menottée ou entravée soit photographiée ou fasse l'objet d'un enregistrement audiovisuel. »
Comme l'a souligné le premier juge, le défenseur des droits a rappelé que l'utilisation de menottes ne doit pas être systématique et son usage doit être apprécié notamment au regard des critères suivants :
Les conditions de l'interpellation (fuite ou violences),
La nature des faits reprochés,
L'âge de la personne,
Son état apparent de santé,
La personnalité de l'intéressé, notamment si cette personne est connue
La découverte d'objets dangereux sur la personne,
L'existence de signes manifestes de consommation d'alcool ou de stupéfiants.
Or, en l'espèce, si monsieur [M] [L] [X] a indiqué lors de son interpellation être en situation irrégulière et avoir consommé plusieurs canettes de bière mais selon le rapport des policiers municipaux une fois menotté et installé dans leur véhicule en dotation.
Ces deux éléments ont amené les policiers à considérer qu'il était susceptible de vouloir prendre la fuite ou avoir un comportement violent pouvant présenter un danger pour lui ou pour autrui. Les policiers ont d'ailleurs acté que le transport s'était déroulé sans encombre et que l'intéressé n'a présenté aucune blessure liée à l'intervention ou au transport ;
Cependant cette mesure n'était pas nécessaire comme l'a précisé pertinemment le Parquet Général.
Elle ne fait néanmoins aucun grief à l'intéressé qui n'a pas été blessé à cette occasion et ne peut dès lors justifier la nullité de la procédure subséquente
Ainsi, alors que l'intéressé ne rapporte pas la preuve d'une atteinte à ses droits qui entacherait d'irrégularité la procédure par un recours injustifié au menottage, qu'il n'est pas démontré en l'espèce l'existence d'un grief, le moyen a été à bon droit, rejeté et sera confirmé.
Sur la violation de l'article R. 511-1 du Code de la sécurité intérieure
Aux termes de l'article R.511-1 du CSI : « Les agents de police municipale mentionnés au 2° de l'article 21 du code de procédure pénale peuvent constater par procès-verbal, en application des dispositions de l'article L. 511-1 du présent code, lorsqu'elles sont commises sur le territoire communal et qu'elles ne nécessitent pas de leur part d'actes d'enquête, les contraventions prévues par le code pénal et énumérées par l'article R. 15-33-29-3 du code de procédure pénale. Ils peuvent également constater par procès-verbal, dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article L. 511-1 du présent code, les contraventions mentionnées à l'article R. 610-5 du code pénal, relatives aux arrêtés de police municipale pris par le maire ou par le préfet de département en application des 1° à 3° de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, ainsi que les contraventions au code de la route mentionnées à l'article R. 130-2 de ce code et les contraventions relatives à l'interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif prévues par les articles R. 3512-1 et R.3512-2 du code de la santé publique.»
En procédant comme rappelé ci-dessus et en informant sur le champ l'officier de police judiciaire compétent, les policiers municipaux de la ville de [Localité 2] ont strictement procédé conformément aux textes applicables.
Le moyen sera dès lors rejeté
Sur la violation de l'article 5 II du décret n°2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées
Cet article dispose : « II. ' Sont destinataires des données à caractère personnel et informations enregistrées, dans le cadre de leurs attributions légales :
1° Les autorités judiciaires ;
2° Les organismes de coopération internationale en matière de police judiciaire et les services de police étrangers, dans les conditions prévues à l'article L. 235-1 du code de la sécurité intérieure ;
3° Les agents de police municipale, à l'initiative des agents des services de la police nationale ou des militaires des unités de la gendarmerie nationale aux fins et dans les limites fixées à l'article 12 des annexes IV-I et IV-II du code général des collectivités territoriales, dans le cadre des recherches des personnes disparues.
Afin de parer à un danger pour la population, les services de la police nationale et les unités de la gendarmerie nationale peuvent, à titre exceptionnel, transmettre oralement aux agents de police municipale certaines informations relatives à une personne inscrite dans le présent fichier ;
4° Les agents du service gestionnaire du fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes aux fins de consultation des seules fiches concernant le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes ;
5° Les agents du service gestionnaire du fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes aux fins de consultation des seules fiches concernant le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes ;
6° Les agents des services spécialisés de renseignement du ministère de la défense, individuellement désignés et spécialement habilités par les directeurs de ces services, aux seules fins de prévention des actes de terrorisme et dans la limite du besoin d'en connaître. »
Les vérifications au fichier des personnes recherchées ont été effectuées par l'officier de police judiciaire et le résultat des recherches a été transmis aux policiers municipaux avec les instructions requises par l'OPJ.
Il s'ensuit qu'en procédant de la sorte aucune irrégularité faisant grief ne pouvait être relevée et que l'ordonnance du premier juge, rejetant tous les moyens soulevés en défense, ne peut qu'être confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par décision réputée contradictoire, Nous Eric Métivier, conseiller délégué par ordonnance de monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Rennes
Déclarons l'appel recevable,
Rejetons les moyens présentés et développés dans l'intérêt de monsieur [M] [L] [X]
Confirmons l'ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes en charge du contrôle des mesures privatives ou restrictives de liberté du 12 décembre 2024,
Rejetons la demande de Me Yann-Christophe Kermarrec en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Laissons les dépens à la charge du Trésor Public,
Fait à Rennes le 13 décembre 2024 à 14h00
LE GREFFIER PAR DELEGATION, LE CONSEILLER
Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [M] [L] [X], à son avocat et au préfet
Le Greffier,
Cette ordonnance est susceptible d'un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.
Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.
Le Greffier