Cass. 3e civ., 10 mars 2015, n° 14-10.001
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Terrier
Avocats :
Me Haas, Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Jean-Philippe Caston
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 novembre 2013), qu'à l'occasion de l'agrandissement de l'espace des blocs opératoires d'une clinique, la société Sorevie Gam-Clinique Axium (la société Sorevie Gam) a confié le lot climatisation à un groupement d'entreprises composé de la société Faure Ingénierie et de la société Dalkia France (société Dalkia), la société Faure Ingénierie étant désignée comme mandataire du groupement ; que la société G2E est intervenue en qualité de bureau d'études techniques ; que la société Sorevie Gam a conclu avec la société Dalkia un contrat de maintenance des installations de chauffage et de climatisation ; que la réception est intervenue avec réserves ; que se plaignant de désordres, la société Sorevie a assigné, après expertise, notamment la société Dalkia, la société Faure Ingénierie, depuis en liquidation judiciaire, et la société G2E, en indemnisation ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Sorevie Gam fait grief à l'arrêt de mettre hors de cause la société G2E, alors, selon le moyen :
1°/ que l'étude de la société G2E précise que « l'installation actuelle comprend 2 groupes de production d'eau glacée, de type air/ eau, de puissance unitaire 110 kW », que « l'un de ces groupes n'est plus fonctionnel », que « l'installation future prévoira donc le remplacement de ce groupe », que « la production d'eau glacée actuelle est assurée par un groupe air/ eau de marque Mc Quay de puissance unitaire 110 kW et que « dans le cadre de la restructuration, un nouveau groupe de production d'eau glacée, de type air/ eau sera mis en place. Ce groupe devra reprendre la puissance de l'ancien groupe (110 kW), à laquelle s'ajoutera la puissance supplémentaire des nouvelles salles (soit environ 290 kW). La puissance totale du nouveau groupe devra donc être de 400 kW » ; que la cour d'appel, pour mettre hors de cause la société G2E, a retenu, en citant partiellement l'étude de la société G2E, que l'analyse de l'expert relative au maintien par la société G2E du groupe Mc Quay en parallèle du nouveau groupe sans s'interroger sur les conséquences de son non-fonctionnement survenu à une date indéterminée, ne peut être entérinée, la société G2E étant fondée à soutenir que le nouveau groupe était destiné à se substituer à l'ancien groupe ; qu'en statuant ainsi, bien qu'il résultait clairement de l'étude de la société G2E que l'installation était prévue pour fonctionner avec deux groupes, à savoir le groupe Mc Quay en fonctionnement (l'autre, dont la puissance devait être reprise, étant à remplacer), et le groupe de remplacement, d'une puissance de 400 kW, et que le cabinet G2E avait déterminé la puissance du nouveau groupe en prenant en considération le fonctionnement du groupe Mc Quay, la cour d'appel a dénaturé l'étude précitée et a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que tenus, à peine de nullité, de motiver leur décision, les juges ne peuvent se fonder sur des motifs dubitatifs, hypothétiques, ou contradictoires ; que la cour d'appel, pour mettre hors de cause la société G2E, s'est fondée sur une simple apparence quant au fonctionnement normal de l'installation, et à la satisfaction des besoins du maître de l'ouvrage, et ce tout en observant que l'expert avait indiqué ne pas avoir les éléments pour définir les besoins réels ; qu'elle n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la société Sorevie a fait valoir que si, au cours de l'expertise, l'expert avait pu constater que le groupe froid avait pu fonctionner suite aux réparations effectuées, il était à l'arrêt depuis novembre 2010, et qu'à ce jour, le groupe froid devait être remplacé ; que la cour d'appel, pour mettre hors de cause la société G2E, a retenu qu'aucun manque de puissance n'a par ailleurs été caractérisé dès lors que le groupe (Wesper) pouvait fonctionner normalement et que les besoins était a priori satisfaits ; qu'en statuant ainsi, sans s'expliquer sur l'arrêt postérieur du groupe, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que tenus de motiver leur décision, les juges ne pouvant se fonder sur des affirmations, doivent examiner, préciser et analyser, au moins succinctement, les éléments de preuve sur lesquels ils se fondent ; que la cour d'appel, pour mettre hors de cause la société G2E, a retenu que l'expert ne s'était pas expliqué sur la possibilité invoquée par la société G2E de réguler la puissance de groupe Wesper de 0 à 100 % (dire du 10 juin 2009) ; qu'en statuant ainsi, en se fondant sur l'absence d'explication de l'expert sur une affirmation de la défenderesse, sans vérifier le bien fondé de cette affirmation, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que la société Sorevie a reproché à la société G2E un défaut de suivi des travaux, auquel elle était contractuellement tenue, et a fait valoir que les errements techniques du groupement d'entreprise Faure Ingénierie/ Dalkia, à savoir la non réalisation d'un bilan thermique pour vérifier l'adéquation du groupe Wesper avec les besoins de la clinique et le défaut de pose des CTA sur une structure surélevée, n'avaient pas été repérés par la société G2E ; que la cour d'appel, pour mettre hors de cause la société G2E, a retenu qu'en effet, aux termes de la proposition d'honoraires de la société G2E, il était prévu un contrôle ponctuel des travaux, avec une visite une fois par semaine, que les procès-verbaux de chantier montrent que la société G2E est mentionnée comme BET clim, et que les plans, schémas de principes et notes de calcul devaient être transmis à la société Qualiconsult pour approbation ; qu'en constatant ainsi les obligations de la société G2E, sans s'expliquer sur leur exécution, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant retenu, par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, sans dénaturation, qu'un nouveau groupe de production d'eau glacée devait se substituer à l'ancien, qu'il ne pouvait être reproché à la société G2E une sur-puissance du groupe, qu'aucun manque de puissance n'avait été caractérisé, que les procès-verbaux de chantier montraient que la société G2E était mentionnée comme BET clim, que les plans, schémas de principe et notes de calcul devaient être transmis à une autre société pour approbation, et que l'inadéquation du nouveau groupe avec les besoins n'était pas établie, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire qu'aucun défaut de conception et de suivi du chantier ne pouvait être reproché à la société G2E ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour rejeter les demandes de la société Sorevie Gam contre la société Dalkia, l'arrêt retient qu'aucune solidarité entre les entreprises n'a été prévue expressément dans les documents contractuels et que la référence au seul groupement dans les documents contractuels ne permet pas de déduire la solidarité de ses membres qui ne peut être présumée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les conventions liant le contractant général au maître d'ouvrage précisaient que le groupement avait en charge l'ensemble des études préalables de conception et d'exécution et la réalisation des travaux, qu'il organisait le chantier dans le cadre des délais prévus, qu'il était responsable de la fourniture des matériaux et de leur mise en oeuvre, qu'il était débiteur d'une garantie de parfait achèvement et qu'il s'engageait à exécuter les travaux pour une somme globale forfaitaire, la cour d'appel, qui a dénaturé ce contrat, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
Met hors de cause la société Airwell France ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société Sorevie Gam-Clinique Axium à l'encontre de la société Dalkia France sur le fondement de la garantie contractuelle de droit commun, l'arrêt rendu le 7 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.