Cass. soc., 11 octobre 2006, n° 04-47.751
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bouret
Attendu que Mme X..., épouse Y..., engagée par la société Avon à compter du 24 octobre 1994, en qualité de promotrice de ventes, a été licenciée le 1er juillet 2002 pour faute grave ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme X..., épouse Y..., fait grief à l'arrêt attaqué (Pau, 30 septembre 2004) d'avoir jugé son licenciement fondé sur une faute grave alors, selon le moyen :
1 / que l'avenant au contrat de travail en date du 2 mai 1997 stipulait expressément "vous pouvez utiliser le véhicule commercial à titre personnel et ce, dans la limite de l'hexagone. Toutefois, nous vous demandons de bien différencier sur votre décompte de frais, vos kilomètres professionnels de vos kilomètres personnels et de préciser le kilométrage réel du compteur, ce qui permettra d'identifier le moment où le véhicule doit être changé" ; qu'en énonçant que la nécessité pour la salariée de différencier les kilomètres professionnels des kilomètres personnels sur les décomptes de frais devait nécessairement s'entendre comme limitant le remboursement du carburant pour le seul usage professionnel, la cour d'appel a dénaturé les stipulations claires et précises de l'avenant du 2 mai 1997 et ainsi violé l'article 1134 du code civil ;
2 / subsidiairement, qu'en se bornant à affirmer que la nécessité pour la salariée de différencier les kilomètres professionnels des kilomètres personnels sur les décomptes de frais devait nécessairement s'entendre comme limitant le remboursement du carburant pour le seul usage professionnel, sans répondre au chef de conclusion déterminant selon lequel l'employeur avait donné son accord à l'utilisation de la carte de carburant pour les déplacements non professionnels, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
3 / et encore, plus subsidiairement, que la fraude est caractérisée par la volonté d'éluder la règle de droit applicable ; qu'en se contentant d'affirmer que l'obligation pour la salariée de différencier sur les décomptes de frais les kilomètres personnels des kilomètres professionnels impliquait l'interdiction de l'utilisation de la carte de carburant lors de déplacements privés et que son utilisation par la salariée était frauduleuse, sans caractériser l'intention de la salariée d'éluder une instruction claire et précise de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 122-6 et L. 122-9 du code du travail ;
4 / qu'en tout état de cause, l'employeur ne saurait trouver un motif de licenciement pour faute grave dans les faits qu'il a tolérés de longue date sans jamais les sanctionner ; qu'en jugeant le licenciement justifié par une faute grave, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les faits reprochés n'avaient pas été jusqu'alors tolérés et acceptés par l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au renard des articles L. 122-6 et L. 122-9 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, interprétant comme il lui appartenait de le faire les termes ambigus de l'avenant au contrat de travail, a estimé que la nécessité pour la salariée de différencier les kilomètres professionnels des kilomètres personnels sur les décomptes de frais devait nécessairement s'entendre comme limitant le remboursement du carburant pour le seul usage professionnel ; que sans avoir à faire des recherches que ses constatations rendaient inutiles, elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt attaqué a débouté Mme X..., épouse Y..., de sa demande de dommages-intérêts au titre de la réparation du préjudice résultant des circonstances de son licenciement ;
Qu'en statuant ainsi, sans donner aucun motif à sa décision, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme X..., épouse Y..., de sa demande en réparation du préjudice distinct résultant des circonstances du licenciement, l'arrêt rendu le 30 septembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, mais uniquement pour qu'elle se prononce sur la demande au titre du préjudice distinct résultant des circonstances du licenciement.