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Décisions

Cass. soc., 12 janvier 2010, n° 08-43.670

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mazars

Avocats :

Me Haas, SCP Boré et Salve de Bruneton

Douai, du 30 mai 2008

30 mai 2008

Vu la connexité, joint les pourvois n° 08-43.670 et 08-43.671 ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 mai 2008), que Mme X... et Mme Y..., engagées à compter respectivement du 20 juillet 1992 et du 28 septembre 1992 par la société Sealink Stena Line aux droits de laquelle se trouve la société P et O Ferries Ltd, ont fait assigner la société devant le tribunal d'instance pour obtenir sa condamnation à leur payer des sommes, notamment à titre d'indemnités de nourriture ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir dit que Mme X... et Mme Y... avaient droit aux indemnités de nourriture à compter du mois de janvier 1999 jusqu'au mois d'octobre 2003 pour les jours non embarqués, sous déduction des journées pour lesquelles les primes de nourriture ont déjà été versées par l'employeur alors, selon le moyen :

1°/ que la nourriture ou l'indemnité équivalente à laquelle le marin a droit, en vertu de l'article 72 du code du travail maritime, pendant la durée de son inscription au rôle d'équipage, est liée à l'exercice effectif des fonctions et à la limitation de la faculté de se nourrir à sa guise qui en découle ; qu'il en résulte que, pour l'application de ce texte, la durée de son inscription au rôle d'équipage s'entend de la période d'embarquement, à l'exclusion de toute période de repos durant laquelle le marin ne figure plus sur le rôle d'équipage ; qu'en considérant, dès lors, que la prime de nourriture avait un caractère salarial et qu'en conséquence, elle était due aussi bien pendant les périodes d'embarquement que pendant les périodes de congés repos, la cour d'appel a violé les articles 4 et 72 du code du travail maritime ;

2°/ alors, en deuxième lieu, que la prescription est interrompue par la reconnaissance que le débiteur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait ; qu'en considérant que la lettre de l'employeur du 1er décembre 2004, dont elle constatait qu'elle avait pour objet d'octroyer aux marins un rappel d'indemnité de nourriture au titre de la période postérieure au 1er novembre 2003, avait eu pour effet d'interrompre la prescription que l'employeur opposait aux demandes formulées par le salarié au titre des années 1999 et 2000, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations d'où il résultait qu'aucune reconnaissance, même partielle, du droit au paiement d'une indemnité de nourriture n'avait été faite au titre de la période pour laquelle la prescription était invoquée, a violé l'article 2248 du code civil ;

3°/ alors, en troisième lieu, que, dans ses conclusions d'appel, l'employeur faisait valoir que sa lettre du 1er décembre 2004 avait eu pour seul objet de créer, uniquement à compter du mois de novembre 2003, un régime dérogatoire au profit de son personnel navigant et qu'elle ne valait en aucune façon reconnaissance de dette au titre de la période antérieure et, notamment, au titre de la période pour laquelle la prescription était opposée ; qu'en ne répondant pas à ce moyen déterminant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ alors, en quatrième lieu et subsidiairement, qu'en considérant dans les motifs de sa décision, que le délai de prescription quinquennale ne rendait la demande irrecevable que pour la période antérieure à décembre 1999 avant, dans le dispositif de sa décision, de juger que la salariée avait droit aux indemnités de nourriture à compter du mois de janvier 1999, la cour d'appel a entaché son arrêt d'une contradiction et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, qu'ayant rappelé qu'aux termes de l'article 72 du code du travail maritime, les marins ont droit à la nourriture ou à une allocation équivalente pendant toute la durée de leur inscription au rôle d'équipage, la cour d'appel, qui a justement retenu que le droit ouvert aux marins à titre d'indemnité de nourriture n'est subordonné qu'à leur inscription au rôle d'équipage, sans que le texte distingue entre les périodes d'embarquement et les périodes de congés repos, et qui a constaté que le rôle d'équipage est défini comme l'acte authentique de constitution de l'armement administratif d'un bâtiment et ne prend fin qu'avec le désarmement et l'expiration des contrats de travail des marins et qu'il ne se confond pas avec le rôle "bord", lequel se réduit à une liste d'équipage, a décidé à bon droit que les marins avaient droit à l'indemnité de nourriture même en dehors des périodes d'embarquement ;

Attendu, ensuite, qu'ayant relevé que par lettre du 1er décembre 2004 aux salariées intitulée "explications de fiches de paie" la société avait procédé sans réserve, à la suite d'un courrier de la caisse d'allocations familiales sur le sens de l'article 72 du code du travail maritime, à un rappel de paiement au titre de l'indemnité de nourriture aussi bien pour des périodes d'embarquement que pour des périodes de repos sur une certaine période de temps, la cour d'appel, qui a ainsi répondu aux conclusions prétendument délaissées, a estimé qu'il s'agissait là d'une reconnaissance partielle du droit des salariées et décidé à bon droit que la prescription était interrompue ;

Attendu, enfin, que, si la cour d'appel ne pouvait simultanément dire dans ses motifs que la demande était irrecevable pour la période antérieure à décembre 1999 et décider dans le dispositif que les salariées avaient droit aux indemnités de nourriture à compter du mois de janvier 1999, la contradiction entre les motifs et le dispositif procède d'une erreur purement matérielle qui peut, selon l'article 462 du code de procédure civile, être réparée par la Cour de cassation ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé en ses trois premières branches et qu'il est irrecevable en sa quatrième branche ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

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