Cass. com., 3 avril 2001, n° 98-12.890
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
M. Delmotte
Avocat général :
M. Lafortune
Avocats :
SCP Vincent et Ohl, SCP Rouvière et Boutet
Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. Gérard X... (le débiteur), exploitant d'un domaine viticole, a été mis en redressement puis liquidation judiciaires ; que la société Vinotechnique de distribution (la société) a déclaré une créance d'un montant total de 1 103 256,60 francs correspondant, selon elle, à des factures de fournisseurs réglées pour le compte du débiteur ; que par ordonnance du 3 juillet 1996, le juge-commissaire a rejeté la créance de la société ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la société reproche à l'arrêt de n'avoir admis sa créance au passif de la liquidation judiciaire du débiteur qu'à concurrence de 149 912 francs, à titre chirographaire, alors, selon le moyen, que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que la société Vinotechnique, exposante, qui invoquait divers paiements faits par elle pour le compte de M. X..., invoquait notamment les réponses faites par les créanciers désintéressés à qui elle demandait soit le remboursement des sommes versées, soit l'établissement d'une facture à son nom, et en particulier la télécopie adressée par les consorts Y... détaillant les versements intervenus, ainsi que la lettre par laquelle M. d'Esteve de A... reconnaissait expressément avoir été payé par la société Vinotechnique pour le compte de M. X... ; que la cour d'appel qui, après avoir pris en considération d'autres justificatifs, ne s'est pas expliquée sur ces éléments :
a) n'a pas satisfait aux exigences des articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;
b) a violé l'article 1353 du Code civil ;
Mais attendu que le juge du fond n'est pas tenu de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'il décide d'écarter ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la créance de la société née de trois lettres de change acceptées d'un montant global de 246 000 francs, l'arrêt retient que la société produit, non pas l'original mais une simple photocopie de ces effets et qu'elle ne justifie pas que cette somme ne lui a pas été réglée, alors surtout que les protêts faute de paiement ont été dressés sur l'initiative d'une banque ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans avoir invité la société à présenter ses observations sur un tel moyen alors qu'il résulte de l'article 67 du décret du 27 décembre 1985 que pouvaient être produits en copie les documents justificatifs de la créance, de sorte que celle-ci ne pouvait être rejetée d'office pour défaut de production de l'original des lettres de change litigieuses qu'après injonction du juge d'avoir à le verser aux débats, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction :
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE mais seulement en ce qu'il a rejeté la créance de la société Vinotechnique de Distribution au titre de trois lettres de change d'un montant global de 246 000 francs, l'arrêt rendu le 25 novembre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.