Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 10 janvier 2025, n° 23/11622

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

PODG Developpement (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard

Vice-président :

Mme Salord

Conseiller :

M. Buffet

Avocats :

Me Dixsaut, Me Blondieau

TJ Paris, 3e ch. sect. 2, du 23 juin 202…

23 juin 2023

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente de chambre, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement rendu le 23 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Paris,

Vu l'appel interjeté le 30 juin 2023 par M. [K] [M] et la société P.O.D.G. Développement,

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 1er août 2024 par M. [K] [M] et la société P.O.D.G. Développement,

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 septembre 2024 par M. [B] [H],

Vu l'ordonnance de clôture du 5 septembre 2024.

SUR CE, LA COUR,

M. [M] est notamment titulaire :

- de la marque verbale française « Polyter » n°92444284 déposée le 2 décembre 1992 et enregistrée le 14 mai 1993, régulièrement renouvelée, qui désigne des engrais pour les terres en classe 1 et des graines (semences) en classe 31,

- de la marque française semi-figurative « Polyter » n°194542936 déposée en couleurs le 12 avril 2019 et enregistrée désignant les mêmes produits.

La société P.O.D.G. Développement (ci-après désignée la société PODG), dont M [M] est le président, est titulaire aux termes d'un contrat du 3 janvier 1995 inscrit au registre des marques le 30 janvier 1995 d'une licence d'exploitation de la marque française « Polyter » et exploite le site internet « polyter.com ». Elle commercialise sous cette marque un hydro-rétenteur présenté comme permettant la diffusion progressive d'eau et de fertilisants aux plantes.

Il résulte du procès-verbal de constat d'huissier du 21 mai 2019 que la société Geib France (ci-après désignée Geib), ayant une activité de marchands de biens, assistance et conseil à la maîtrise d'ouvrage, dont M. [B] [H] est le gérant, vendait sur le site internet « laboutiquedupolyter.com » des produits désignés par la marque « Polyter ». Une saisie-contrefaçon a révélé que la société Geib avait acheté à la société suisse Water-Hope, anciennement dénommée Polyter Suisse, suivant facture du 15 avril 2019, 500 kg de Polyter. La société PODG avait conclu un contrat de distribution du produit « Polyter » avec la société Polyter Suisse le 22 octobre 2017 portant sur différents pays en dehors de la France, dont la Suisse, contrat résilié le 27 avril 2018.

Par ordonnance du 9 octobre 2019, le juge des référés près le tribunal de grande instance de Paris a déclaré M. [M] et la société PODG irrecevables en leurs demandes au titre de la contrefaçon, condamné la société Geib à verser à M. [M] une somme de 1000 euros à titre de provision au titre de l'atteinte à son droit à l'image, débouté la société PODG de sa demande d'indemnité provisionnelle au titre d'une atteinte à l'image de son bien et condamné la société Geib aux dépens et à payer à M. [M] la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par arrêt du 27 octobre 2020, la chambre 1 du Pôle 5 de la cour d'appel de Paris a infirmé l'ordonnance du juge des référés en ce qu'elle a déclaré les appelants irrecevables en leurs demandes au titre de la contrefaçon des marques françaises, dit qu'ils sont recevables à agir en contrefaçon, dit que la société Geib a commis une atteinte vraisemblable à leurs droits, condamné la société Geib à leur payer à chacun la somme provisionnelle de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts, interdit à la société Geib de faire usage ou concéder un droit d'usage de la dénomination Polyter sous astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification de l'arrêt, ordonné la fermeture du site internet « la boutique du Polyter » sous la même astreinte, confirmé l'ordonnance en ses autres dispositions et condamné la société Geib aux dépens d'appel et à payer à chacun des appelants la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles.

M. [M] et la société PODG ont fait assigner par actes du 6 août 2019 la société Geib devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon et utilisation illicite d'image.

Par ordonnance du 16 octobre 2020, le juge de la mise en état a ordonné à la société Geib de communiquer à M. [M] et à la société PODG, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, l'inventaire certifié des produits conditionnés ou reconditionnées commercialisés sous le signe Polyter, les factures d'acquisition de ces produits, les factures de vente, les extraits certifiés du grand livre et du livre journal concernant la commercialisation des produits, le résultat net comptable certifié conforme issu de la commercialisation de ces produits et à payer 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 11 mai 2021, le juge de la mise en état a liquidé l'astreinte à la somme de 13 600 euros et rejeté la demande tendant à la fixation d'une nouvelle astreinte.

Par jugement passé en force de chose jugée du 8 février 2022, le tribunal judiciaire de Paris a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- dit qu'en faisant usage sans autorisation du signe « Polyter » la société Geib a commis des actes de contrefaçon de marque,

- condamné la société Geib à payer 20 541,80 euros à la société PODG et 5 000 euros à M. [M] à titre de dommages et intérêts,

- condamné la société Geib à payer 2 000 euros à M. [M] pour l'utilisation illicite de son image,

- rejeté les demandes fondées sur l'atteinte aux biens de la société PODG et sur le dénigrement,

- condamné la société Geib aux dépens et à payer à chacun des appelants la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles.

M. [M] et la société PODG ont fait assigner le 28 juin 2021 M. [H] devant le tribunal judiciaire de Paris sur le fondement de sa responsabilité personnelle en tant que dirigeant de la société Geib.

Par jugement du 23 juin 2023, le tribunal judiciaire de Paris a débouté la société PODG et M. [M] de l'ensemble de leurs demandes et les a condamné in solidum aux dépens et à payer 15 000 euros à M. [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 1er août 2024, M. [M] et la société PODG demandent à la cour de :

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a statué dans les termes suivants :

- rejette l'ensemble des prétentions de la société PODG et de M. [M],

- les condamne in solidum aux dépens ainsi qu'à payer 15 000 euros à M. [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et, statuant de nouveau :

- dire et juger que les actes commis par M. [H] alors qu'il était représentant légal de la société Geib par l'usage de la dénomination Polyter sont constitutifs de contrefaçon au titre des droits issus de la marque semi-figurative déposée et enregistrée sous le numéro 19 4 542 836 puis sous le numéro national 4542936 et de la marque nominative déposée et enregistrée sous le numéro 92 444 284, tels que valablement détenus par M. [K] [M] ainsi que par la société PODG,

- condamner M. [H] à réparer les préjudices subis par M. [M] et à payer la somme de 149 500 euros HT à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices financiers résultant de la contrefaçon et de l'usage frauduleux de la marque Polyter,

- condamner M. [H] à réparer les préjudices subis par la société PODG et à payer la somme de 149 500 euros HT à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices financiers résultant de la contrefaçon et de l'usage frauduleux de la marque Polyter,

- condamner M. [H] à réparer les préjudices subis par la société PODG et à payer la somme de 815 094 euros HT à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices financiers résultant de ses fautes civiles, actes de concurrence déloyale et actes de dénigrement,

- condamner M. [H] à réparer les préjudices subis par M. [M] et à payer la somme de 50 000 euros HT à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices moraux et d'image résultant de la contrefaçon et de l'usage frauduleux de la marque Polyter,

- condamner M [H] à réparer les préjudices subis par la société PODG et à payer la somme de 50 000 euros HT à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices moraux et d'image résultant de la contrefaçon et de l'usage frauduleux de la marque Polyter,

- condamner M. [H] à réparer les préjudices subis par M. [M] et à payer la somme de 30 000 euros titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et d'image résultant de l'utilisation illicite de son image et du dénigrement,

- condamner M. [H] à réparer les préjudices subis par la société PODG et à payer la somme de 30 000 euros titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et d'image résultant de l'utilisation illicite de l'image de ses biens et du dénigrement,

- condamner M. [H] à réparer les préjudices subis par la société PODG et à payer la somme de 50 000 euros titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices liés à la désorganisation résultant de l'utilisation illicite de l'image de ses biens et du dénigrement,

- condamner M. [H] à payer à M. [M] la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [H] à payer à la société PODG la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire irrecevables les fins de non-recevoir soulevées par M. [H],

- dire irrecevables les demandes en déchéance de marque soulevées par M. [H],

- débouter M. [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [H] en tous les dépens de l'instance dont recouvrement au profit de Me Autier conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 2 septembre 2024, M. [H] demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 23 juin 2023 en toutes ses dispositions,

Par conséquent :

- débouter les appelants de l'ensemble de leurs demandes,

- condamner solidairement les appelants à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 5 septembre 2024.

SUR CE,

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.

A titre liminaire, la cour constate que si les appelants demandent de déclarer irrecevables les fins de non-recevoir et les demandes en déchéance de marques soulevées par M. [H], elle n'est saisie d'aucune demande à ces fins aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions.

Sur les demandes au titre de la responsabilité de M. [H]

M. [M] et la société PODG affirment que la responsabilité de M. [H] est engagée sur le fondement des fautes détachables de ses fonctions de gérant qu'il a commises, en raison d'une part d'actes de contrefaçon susceptibles de qualification pénale et d'autres part d'actes commis dans le cadre de ses fonctions ou en dehors, notamment le dénigrement.

M. [H] répond qu'il n'a commis aucune faute détachable de ses fonctions d'une particulière gravité susceptible d'engager sa responsabilité personnelle.

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il résulte de l'article L. 223-22 du code de commerce que la responsabilité personnelle d'un dirigeant à l'égard des tiers ne peut être retenue que s'il a commis une faute séparable de ses fonctions et qu'il en est ainsi lorsque le dirigeant commet intentionnellement une faute d'une particulière gravité, incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales.

En premier lieu, les appelants font valoir que M. [H] a commis une faute détachable de ses fonctions engageant sa responsabilité personnelle en ce qu'il a commis une faute pénale intentionnelle en reconditionnant une tonne de produits « Polyter » et les commercialisant illicitement par le bais de sites internet contrefaisant le signe « Polyter » pendant plusieurs mois malgré une mise en demeure et des actions en justice.

La première mesure d'interdiction d'utiliser le signe « Polyter » a été prononcée à l'encontre de la société Geib par arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 octobre 2020 statuant en référé. Or, les appelants ne démontrent aucun acte de contrefaçon postérieur à cette décision alors que le juge des référés avait déclaré irrecevables les demandes fondées sur la vraisemblance de la contrefaçon par ordonnance du 9 octobre 2019, en l'absence de justification suffisante des droits des appelants sur les marques opposées.

Aucune faute d'une particulière gravité commise par M. [H] n'est caractérisée dans un contexte où, ainsi que l'avait jugé le juge des référés, au vu des pièces produites par les appelants, la titularité des marques « Polyter » pour la France était discutable. De plus, les produits « Polyter » avaient été achetés à un ancien distributeur de la société POBD, ce qui pouvait amener à considérer qu'ils pouvaient être commercialisés en France.

Les appelants indiquent que l'intention de nuire de M. [H] est d'autant plus caractérisée qu'il est ancien contractant de la société PODG.

Ils produisent des factures de la société PODG qui établissent que M. [H] a réalisé pour cette société des prestations en 2016 et 2017 en Côte d'Ivoire, pour « Divine Bliss Inde », pour « SC Agrocentral Roumanie », pour « Melissa Maillait Moncaco », pour une étude de projet de partenariat avec Héléa Group et la gestion des dossiers « Segif, [T], [Z] », sans plus de précision. Il n'est donc pas établi que M. [H] avait travaillé sur la commercialisation du produit « Polyter » et avait connaissance des droits de propriété intellectuelle sur ce signe.

En deuxième lieu, les appelants soutiennent que M. [H] a réalisé des importations illicites et des pratiques anti-concurrentielles en ayant acquis les produits litigieux auprès de la société Water-Hope alors que le contrat de distribution avec cette société avait été résilié le 28 avril 2018 et prévoyait, en tout état de cause, une interdiction de reconditionnement.

Comme l'ont justement apprécié les premiers juges, ces faits se confondent avec les actes de contrefaçon. De plus, aucun élément ne démontre que M. [H] avait connaissance de ce contrat de distribution ou de la résiliation de ce contrat. Sa responsabilité ne peut donc être engagée de ce chef.

En troisième lieu, les appelants affirment que la contrefaçon s'est accompagnée de dénigrements et d'une utilisation illicite de l'image de M. [M] et des biens de la société PODG.

Sur le site « Polyter » de la société Geib, il était indiqué que compte tenu des reportages sur le produit, « le fabricant va être vite débordé et ne va pas pouvoir fournir tout le monde. Il va livrer en priorité ses gros clients personnels et vous passerez'après s'il en reste ! ».

Comme le relève M. [H], le tribunal judiciaire de Paris, dans son jugement du 8 février 2022, a rejeté la demande au titre du dénigrement. Aucun élément produit ne permet de caractériser une faute de M. [H] détachable de ses fonctions au titre du dénigrement.

La société PODG et M. [M] font valoir que M. [H] a adressé un courriel aux autorités autrichiennes dans la phase de renouvellement de l'autorisation de mise sur le marché du produit « Polyter » pour le dénigrer afin de voir retirer l'autorisation, ce qui caractérise son intention de nuire.

M. [H] expose que les appelants visent des faits diffamatoires alors que la procédure n'a pas été engagée dans les conditions de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Il ajoute que les informations portées à la connaissance des autorités autrichiennes sont « correctes » et ne peuvent engager sa responsabilité.

Dans son courriel adressé à l'administration autrichienne le 20 décembre 2019, M. [H] indique qu'il est surpris d'apprendre que le fabricant du « Polyter » annonce que les autorités autrichiennes ont accordé une autorisation d'utilisation du produit pour les cultures alimentaires alors que le produit est interdit en France pour ces cultures et que la composition du produit indiquée dans la fiche de données de sécurité autrichienne ne correspond pas à celle du produit commercialisé ailleurs, si bien qu'il faudrait s'assurer que la composition déclarée pour l'Autriche est exacte. Il ajoute que la fraude est probable car le fabricant du produit contredit les décisions des autorités françaises en indiquant que son produit peut être utilisé en culture biologique. Il conclut qu'il est important de « vérifier l'exactitude des données ».

Constitue une diffamation le fait de jeter un discrédit sur une personne, fût-ce un concurrent, par des propos portant volontairement atteinte à sa dignité et son honneur.

En l'espèce, si le courriel vise le fabriquant du produit, il porte principalement sur la composition du produit « Polyter » et ne constitue pas une diffamation.

La divulgation d'une information de nature à jeter un discrédit sur les produits d'un concurrent constitue un dénigrement, peu important que l'information soit exacte.

En l'espèce, la teneur du courriel se rapporte à un sujet d'intérêt général, à savoir la santé. Les propos reposent sur une base factuelle suffisante dès lors qu'ils renvoient par un lien aux décisions de l'agence nationale de santé sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail. Par ailleurs, les propos sont mesurés. Dès lors, le dénigrement n'est pas caractérisé.

Les appelants affirment encore que M. [H] agissait de concert avec M. [U], représentant de la société Water-Hope, anciennement dénommée Polyter Suisse, concurrente de la société PODG.

La société Water-Hope Belgique a bénéficié d'une dérogation de l'administration belge pour la mise sur le marché d'un produit destiné à augmenter la rétention d'eau du sol et les substrats de culture le 23 août 2019, produit commercialisé sur le site « shop.water.hope.com ». Si cette dérogation a été adressée à M. [H] pour le compte de la société Water-Hope Belgique, les appelants n'apportent aucun autre élément sur sa prétendue implication au sein de cette société.

Par ailleurs, M. [H] ne peut être tenu responsable de courriels datant de 2018 de M. [U] dans lesquels il indique qu'il vend son stock de « Polyter » suite à la fin de sa collaboration avec M. [M], se plaint de ses mensonges concernant notamment une antériorité à un brevet ou de la plainte pénale contre M. [M] déposée par M. [U] auprès des autorités suisses pour escroquerie en octobre 2018 ayant fait l'objet d'une décision de classement le 11 novembre 2020. La responsabilité de M. [H] ne peut pas plus être engagée du fait des courriels de M. [U] en 2020 portant sur des soupçons de fraude concernant la composition du Polyter. Le seul fait que dans un mail du 17 décembre 2019 à l'administration autrichienne, M. [U] fasse allusion à un dossier que « Me [H] » a déposé « en preuve au tribunal de Paris » ne démontre aucune collusion entre ces deux personnes.

Concernant la prétendue faute résultant de l'utilisation illicite des biens de la société PODG suite à la publication sur le site de la société Geib de reportages télévisés comportant des vues intérieures de l'usine, comme le relève l'intimé, cette demande a été définitivement rejetée par le tribunal judiciaire dans sa décision du 18 janvier 2022. Ces reportages reproduisaient aussi l'image de M. [M], sans son autorisation et la société Geib a été condamnée à l'indemniser de ce chef. Cependant, cette reproduction ne constitue pas une faute d'une particulière gravité de M. [H].

En quatrième lieu, les appelants affirment que M. [H] a refusé d'exécuter les décisions de justice. Ils relèvent que M. [H] a déclaré lors de la saisie contrefaçon que les documents comptables, entre les mains de son comptable à Madagascar, seraient communiqués d'ici le mois d'août 2019 et que la société qu'il gère n'a pas exécuté l'ordonnance du juge de la mise en état en refusant de remettre les documents comptables.

L'absence de communication par le gérant d'une société des éléments comptables à un huissier de justice dans le cadre d'une saisie-contrefaçon et à la partie adverse sur injonction du juge de la mise en l'état dirigée contre la société ne constitue pas une faute détachable des fonctions de dirigeant d'entreprise.

En dernier lieu, les appelants affirment que M. [H] a organisé l'insolvabilité de la société Geib afin de leur nuire, pour échapper aux condamnations judiciaires. Ils soutiennent qu'il aurait dû opérer une déclaration de cessation de paiement dans les 45 jours du premier acte d'exécution infructueux, soit le 16 avril 2021.

M. [H] répond que la société Geib, qui a une société mère au Bénin, a fait l'objet d'une mise en sommeil en raison de l'absence de rentrées financières suite à la crise du Covid et qu'il n'a pas procédé à la liquidation de la société car il souhaite conserver cette structure pour des activités futures de conseil en Afrique.

Par jugement du tribunal de commerce de Melun le 1er juillet 2024, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société Geib à la requête du ministère public en raison du fait que les dettes laissaient présumer l'existence d'un état de cessation de paiement. La date de cessation de paiement a été fixée par le tribunal au 2 janvier 2023.

La clôture de la procédure devait intervenir dans un délai de 18 mois et une nouvelle audience a été fixée au 1er décembre 2025.

En vertu de l'article L. 651-2 du code du commerce, « lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ». L'article L. 651-3 du même code, dont les règles sont d'ordre public, réserve l'action en responsabilité du dirigeant pour insuffisance d'actif au liquidateur, au ministère public et à la majorité des créanciers nommés contrôleurs.

Il en découle que les intimés ne peuvent dans le cadre de cette instance invoquer des moyens tendant à retenir la responsabilité de M. [H] qui visent en réalité à établir une faute de gestion du fait de l'absence de déclaration de cessation de paiement et d'une prétendue organisation de l'insolvabilité de la société Geib.

Les appelants font valoir en outre que M. [H] n'a pas informé le liquidateur de leur créance.

L'article L. 622-6 du même code impose au débiteur de remettre aux organes de la procédure collective la liste de ses créanciers et le montant de ses dettes.

L'article L.622-26 du code du commerce prévoit qu'à défaut de déclaration dans les délais prévus, le créancier est forclos mais peut être relevé de cette forclusion si la défaillance est due à une omission du débiteur lors de l'établissement de la liste.

Ainsi, la société PODG, qui peut bénéficier d'un relevé de forclusion pour déclarer sa créance, ne subit aucun préjudice du fait de l'absence d'information par M. [H] de sa créance au liquidateur.

Il résulte des développements précédents qu'aucune faute de nature à engager la responsabilité de M. [H] n'est démontrée.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de M. [M] et de la société PODG.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné les appelants aux dépens et à indemniser les frais irrépétibles engagés par M. [H].

La nature de la décision commande de condamner les appelants aux dépens d'appel et à indemniser les frais irrépétibles qu'a été contraint d'engager M. [H] suite à l'appel interjeté à hauteur de 5 000 euros.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement dans son intégralité,

Y ajoutant,

Condamne in solidum M. [K] [M] et la société P.O.D.G Développement aux dépens d'appel,

Condamne in solidum M. [K] [M] et la société P.O.D.G Développement à payer à M. [B] [H] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.