CA Lyon, ch. soc. b, 17 janvier 2025, n° 22/01360
LYON
Arrêt
Autre
AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
N° RG 22/01360 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OEFA
S.A.S.U. ATHENA SERVICES A DOMICILE
C/
[K]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 14 Janvier 2022
RG : 19/01209
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 17 JANVIER 2025
APPELANTE :
Société ATHENA SERVICES A DOMICILE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Céline GARCIA, avocat au barreau de LYON, et ayant pour avocat plaidant Me Isabelle ROSADO, avocat au barreau de CHAMBERY
INTIMÉE :
[X] [K]
née le 10 Février 1968 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Valérie MALLARD de la SELARL MALLARD AVOCATS, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Novembre 2024
Présidée par Catherine CHANEZ, Conseillère magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Mihaela BOGHIU, Greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Béatrice REGNIER, Présidente
- Catherine CHANEZ, Conseillère
- Régis DEVAUX, Conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 17 Janvier 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Béatrice REGNIER, Présidente et par Mihaela BOGHIU, Greffièrer auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
EXPOSE DU LITIGE
Mme [X] [K] a été embauchée par la société Athena Services à domicile (ci-après, la société) à compter du 30 juin 2017, en qualité d'aide à domicile, suivant contrat à durée indéterminée.
La convention collective nationale applicable est celle des entreprises de service à la personne.
Le 9 janvier 2019, Mme [K] a fait l'objet d'un avertissement et d'une mise à pied de 3 jours pour non-respect de la procédure de télépointage, ainsi que pour déclaration d'heures non effectuées en novembre et décembre 2018 en recueillant la signature des clients.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 15 février 2019, la société a convoqué Mme [K] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 5 mars 2019 et lui a notifié sa mise à pied conservatoire.
Par lettre recommandée du 5 mars 2019, Mme [K] a été licenciée pour faute lourde, dans les termes suivants :
« (') Nous sommes donc contraints de vous notifie votre licenciement pour faute lourde, compte tenu des éléments suivants :
En date du 21 janvier 2019, nous sommes informés par voie d'huissier d'une convocation au Tribunal de commerce dans le cadre d'une mesure collective de redressement judiciaire ou liquidation dans lequel apparaît le courrier du 12 décembre 2018 datée par ailleurs de 2019 où vous dénoncez une absence de règlement de salaire de la part de l'entreprise au 5 décembre 2018. Or vous n'étiez pas sans savoir que la procédure d'entreprise prévoit deux périodes de versement au 05 de chaque mois pour les salariés respectant le procédure interne et à défaut au 15 de chaque mois. Nous avons également un courrier de votre part et de la part de Madame [C] adressé directement au procureur de la République « Merci de bien vouloir demander au Tribunal de commerce de saisir d'office afin de prononcer la liquidation judiciaire de la société et de faire appel aux AGS pour nos salaires dus ». Dans ce courrier vous transmettez des informations totalement erronées en faisant état de salaires qui n'étaient pas versées depuis le mois d'octobre. Sauf que vous avez bien été payé sur les dates prévues à la procédure de l'entreprise et que vous n'étiez pas sans le savoir.
Vous n'avez pas respecté la procédure qui est rappelée à chaque réunion d'équipe dont vous participez à chaque fois et que vous ne faites pas signer les bénéficiaires au période concernée.
Malgré notre livret d'accueil remis á l'ensemble de nos équipes où la procédure est bien stipulée en page 11 de ce livret d'accueil ainsi que sur la note de service adressée également à l'ensemble des salariés de l'entreprise ATHENA Services à Domicile en date du 05 novembre 2018 où il était stipulé :
« La situation au sujet de la télégestion devient intenable. Malgré nos divers rappels à l'ordre, les créations, modifications et divers saisie au sujet de la télégestion ne cesse de croître du fait du manquement de certains salariés quant à la gestion quotidienne du télépointage.
Nous avons dos obligations et des comptes à rendre auprès de nos différents financeurs de l'APA et de la PCH à savoir le département et la métropole.
Nous avons une marge de tolérance de 5% de modification que nous dépassons trop largement ce qui impacte le financement.
Cette absence de financement génère une perte pour l'entreprise. Ces pertes ne nous permettent pas notamment des avancées sociales en termes d'amélioration de vos conditions de travail. A savoir, mise en place de formation, amélioration des frais professionnels, instaurations de prime'
L'avancée sociale est donc freinée du fait de ces manquements.
Nous allons donc devoir durcir nos exigences quant à cette télégestion.
A savoir que pour tous salariés dépassant les 5% d'absence de télégestion, les virements des paies se feront au 15 du mois au lieu du 5. En effet, la création de l'ensemble de ces prestations génère une perte de temps importante pouvant de ce fait générer des retards dans la gestion des paies. Cette situation étant du fait du manquement de certains des salariés. Sachez que derrière un ordinateur ne se cache pas un robot mais bien un salarié qui se démène au quotidien afin que vous puissiez avoir vos paies dans les temps.
Cette mesure qui s'inscrit comme une obligation engendrera, tout comme le rendu des relevés d'heures en retard ou non signé un règlement des paies au 15 du mois au lieu du 5. Il n'y aura donc pas de cas par cas. Nous vous demandons donc à chacun de bien vouloir respecter cette obligation.
Si cette situation venait à perdurer chez certain, nous serons amenés à envisager des sanctions plus importantes.
Nous vous remercions pour la prise en compte de cette note de service et de la bonne mise en 'uvre de cette dernière. »
Vous étiez donc informée en toute connaissance de cause de la procédure instaurée par l'entreprise et de n'était par ailleurs pas la première fois que vous étiez soumise à la deuxième période de versement des paies. Notamment le 03 Novembre 2017 où vous n'avez pas remis vos heures dans les temps et où vous avez eu des échanges sms avec Madame [W] vous confirmant votre versement de paie au 15 Novembre au lieu du 05 Novembre 2017 pour non respect de la procédure car vous aviez remis vos relevés d'heures après la date limite fixée.
Ces faits constatés viennent en manquement de vos obligations de votre contrat de travail comme le prévoit l'article 7 ' SECRET PROFESSIONNEL ' LOYAUTE - COMPORTEMENT A L'EGARD DES CLIENTS : « Le salarié s'engage à se consacrer de façon loyale à son activité pour le compte de la société
L'article 8 ' AUTRES OBLIGATIONS PROFESSIONNELLES : Le salarié est tenu d'observer les dispositions réglementant les conditions de travail applicables à l'entreprise. Il reconnaît avoir reçu et pris connaissance, au jour de son embauche, des informations relatives au fonctionnement de l'entreprise (fiche de poste, livret d'accueil, charte qualité intervenant) et s'engage à les respecter.
Cette situation dont vous aviez connaissance n'est donc pas du fait de l'entreprise mais de la procédure de l'entreprise que vous ne respectiez pas. Vous avez clairement exposé votre volonté de nuire à l'entreprise dans votre procédé.
Du fait de votre absence à cet entretien, nous n'avons pas été en mesure de recueillir vos explications.
Vous avez clairement démontré votre volonté de nuire à l'entreprise en faisant de fausses déclarations directement auprès du procureur de la République tout en employant des procédés de pression auprès de vos collègues qui n'ont pas manqué de nous en informer par courrier.
Ces fausses déclarations non seulement ont porté préjudice à l'entreprise mais nous nous réservons le droit de vous poursuivre pénalement. En effet, toute fausse déclaration est passible d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende selon les dispositions de l'article 441-7 du code pénal réprimant l'établissement d'attestations faisant état de faits matériellement inexacts.
La gravité exceptionnelle des faits qui vous sont reprochés rend impossible votre maintien dans l`entreprise, y compris pendant la durée de votre préavis (') »
Par requête reçue le 2 mai 2019, Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et voir condamner son employeur au paiement de diverses sommes à caractère indemnitaire et salarial.
Par jugement du 14 janvier 2022, le conseil de prud'hommes a notamment :
Condamné la société à verser à Mme [K] les sommes suivantes :
1 505,43 euros de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire, outre 150,43 euros de congés payés afférents ;
1 505,43 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 150,43 euros de congés payés afférents ;
1 433,68 euros de congés payés non pris ;
687,11 euros de rappel de salaire du 10 au 18 décembre 2018 et du 27 décembre 2018 ;
794,53 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;
1 505,43 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
1 500 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail (préjudice moral, préjudice matériel et licenciement vexatoire) ;
Ordonné la délivrance et la remise à Mme [K] par la société des documents de fin de contrat et les bulletins de paie modifiés, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement ;
Condamné la société à verser à Mme [K] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Débouté les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires ;
Condamné la société aux dépens.
Par déclaration du 15 février 2022, la société a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées, déposées au greffe le 19 octobre 2022, elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, à titre principal, de débouter Mme [K] de ses demandes et, à titre subsidiaire, de requalifier le licenciement en faute grave, à titre infiniment subsidiaire, de requalifier le licenciement pour cause réelle et sérieuse et de fixer l'indemnité de congés payés restant dus à 707,39 euros et, en tout état de cause, de condamner Mme [K] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile concernant la première instance outre 1 500 euros concernant la présente procédure, et à prendre en charge les dépens d'instance.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées, déposées au greffe le 20 juillet 2022, Mme [K] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a omis de condamner la société à la somme de 68,71 euros au titre des congés payés afférents au rappel de salaire de 687,11 euros, en ce qu'il a limité le quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 1 505,43 euros, alloué une somme globale de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail (préjudice moral, préjudice matériel et licenciement vexatoire), et en ce qu''il l'a déboutée de ses demandes tendant à la condamnation de la société à lui verser la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de l'exécution fautive du contrat de travail, la somme de 2 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice matériel distinct, la somme de 2 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct et la somme de 1 500 euros de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, et, statuant à nouveau, de :
Condamner la société à lui payer les sommes suivantes :
68,71 euros à titre de congés payés afférents au rappel de salaire du 10 au 18 décembre et du 27 décembre 2018 ;
5 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de l'exécution fautive du contrat de travail ;
3 010,86 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
2 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice matériel distinct ;
2 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct ;
1 500 euros de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire ;
3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel ;
Condamner la société aux dépens d'instance et d'appel ;
Débouter la société de toutes ses demandes plus amples ou contraires.
La clôture de la mise en état a été ordonnée le 8 octobre 2024.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques ou qu'elles constituent en réalité des moyens.
1-Sur la demande de rappel de salaire du 10 au 18 décembre 2018 et du 27 décembre 2018
En application de l'article L.3242-1 du code du travail, le paiement de la rémunération est effectué une fois par mois. L'employeur fixe librement la date de versement de la paye, contrairement à ce que soutient Mme [K].
Il ressort des pièces communiquées par l'employeur que plusieurs salariés refusaient de pointer au domicile des clients afin d'enregistrer leurs heures de passage, et donc leurs horaires de travail. Ces mauvaises pratiques générant une perte de temps pour le service chargé de la paye, la société a décidé de continuer à verser le salaire des employés respectueux de la procédure le 5 du mois et d'en différer le paiement au 15 du mois pour les autres. Ce changement a été explicité et annoncé par courriel de Mme [W], du service comptabilité, en date du 5 novembre 2018 et en tout état de cause, Mme [K] ne conteste pas en avoir eu connaissance.
Elle ne conteste pas davantage ne pas avoir travaillé du 10 au 18 décembre 2018, soutenant s'être trouvée dans l'impossibilité de financer l'achat de carburant et donc de se rendre avec son propre véhicule chez les clients en raison du paiement retardé de son salaire et du remboursement de ses frais professionnels.
L'employeur justifie pourtant qu'il versait régulièrement des acomptes à la salariée et celle-ci ne conteste pas ne pas en avoir spécifiquement demandé pour faire face à cette situation incontestablement difficile. Par ailleurs, la société verse aux débats l'attestation de Mme [W] qui indique avoir proposé à la salariée de travailler chez des clients à proximité de son domicile pour lui éviter un déplacement en véhicule, en dépit des changements de planning que cela nécessitait. Même si cette attestation émane d'une salariée de l'employeur, elle est suffisamment précise et circonstanciée, avec l'identité des clients concernés, pour être revêtue d'une force probante suffisante.
La cour en déduit en conséquence que c'est de son propre chef, en refusant d'accepter le changement de planning que lui proposait Mme [W] et en s'abstenant de solliciter un acompte, que Mme [K] a refusé d'exécuter la prestation de travail programmée. Aucune faute ne peut être reprochée à l'employeur qui avait dès lors le droit de procéder à une retenue de salaire.
Quant à la journée du 27 décembre, l'employeur ne justifie pas que les 2 heures de travail programmées au domicile de Mme [L] n'ont pas été effectuées, d'autant que le planning prévu n'a pas été réalisé au vu de la feuille de présence renseignée par Mme [K] alors que seules 2 heures ont été déduites de la paye.
Le jugement sera en conséquence réformé de ce chef et la société sera condamnée à rembourser à Mme [K] la somme de 19,76 euros à titre de rappel de salaire pour la journée du 27 décembre 2018, outre les congés payés afférents.
2-Sur le licenciement
Aux termes de l'article L.1235-1 du code du travail, le juge doit apprécier la régularité de la procédure de licenciement et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur.
En application de l'article L.1232-6 du même code, la lettre de licenciement, éventuellement complétée en application de l'article R.1232-13, fixe les limites du litige. La cause du licenciement doit être objective et reposer sur des faits matériellement vérifiables. Les faits doivent être établis et constituer la véritable cause de licenciement. Ils doivent être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement. Il appartient au juge du fond, qui n'est pas lié par la qualification donnée au licenciement, de vérifier la réalité des faits reprochés au salarié et de les qualifier, puis de dire s'ils constituent une cause réelle et sérieuse au sens de l'article L.1232-1 du code du travail, l'employeur devant fournir au juge les éléments lui permettant de constater le caractère réel et sérieux du licenciement.
La faute lourde est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise.
Il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la faute lourde et de l'intention de nuire qui la caractérise.
Enfin, aucun fait déjà sanctionné ne peut donner lieu à une nouvelle sanction, l'employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire. L'employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié, considérés par lui comme fautifs, choisit de n'en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction.
L'existence de nouveaux griefs autorise cependant l'employeur à tenir compte de griefs antérieurs, qu'ils aient ou non déjà été sanctionnés.
En l'espèce, la lettre de licenciement se fonde sur le courrier adressé le 14 décembre 2018 au procureur de la République pour lui demander de saisir le tribunal de commerce aux fins de liquidation judiciaire de la société sur la base de renseignements tronqués, sur le défaut de respect de l'obligation de télépointage et sur les pressions exercées auprès de ses collègues.
Mme [K] fait valoir que l'employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire lorsqu'il a prononcé son licenciement dans la mesure où il avait connaissance de l'existence de la lettre envoyée au procureur de la République lorsqu'il lui a notifié un avertissement avec mise à pied disciplinaire le 21 janvier 2019.
Celui-ci, sur qui repose la charge de la preuve de la date à laquelle les faits fautifs ont été porté à sa connaissance, reste taisant sur ce point et n'apporte ainsi aucun élément habile à éclairer la cour. Il ne pouvait donc exciper du courrier du 14 décembre pour licencier Mme [K].
Il ne pouvait davantage se fonder sur le défaut de respect par la salariée de son obligation de télépointage dans la mesure où cette faute a déjà été sanctionnée par l'avertissement avec mise à pied du 21 janvier et où il ne rapporte pas la preuve de manquements postérieurs.
Quant aux pressions exercées, la lettre de licenciement n'indique ni l'identité des personnes concernées, ni la date des pressions, ni leur contenu. Ce grief est donc trop imprécis pour motiver un licenciement.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il sera également confirmé sur l'indemnité compensatrice de préavis, sur le rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, sur l'indemnité légale de licenciement, dont la société ne conteste pas les montants.
3-Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, Mme [K] peut prétendre à des dommages et intérêts sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail, lequel dispose que, dans une entreprise employant au moins 11 salariés, ce qui n'est pas contesté, « « Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux, soit, pour un salarié dont l'ancienneté au jour de la rupture était de un an, une indemnité compris entre un et deux mois de salaire brut.
Pour déterminer le montant de l'indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant, des indemnités de licenciement versées à l'occasion de la rupture, à l'exception de l'indemnité de licenciement mentionnée à l'article L.1234-9. »
En l'espèce, en considération de la situation particulière de Mme [K], notamment de son âge (51 ans) et de son ancienneté (1 an et 9 mois) au terme du préavis, des circonstances de la rupture, de sa capacité à retrouver un emploi compte tenu de sa formation, le jugement sera confirmé sur le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
4-Sur l'indemnité de congés payés
L'article L.3141-28 du code du travail dispose en ses deux premiers alinéas :
« Lorsque le contrat de travail est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit, pour la fraction de congé dont il n'a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé déterminée d'après les articles L.3141-24 à L.3141-27.
L'indemnité est due que cette rupture résulte du fait du salarié ou du fait de l'employeur. »
Cet article est d'ordre public, si bien que l'employeur est redevable de l'indemnité de congés payés nonobstant les dispositions contraires de la convention collective.
Il ressort de ses propres indications sur l'attestation destinée au Pôle emploi que Mme [K] avait acquis 24 jours de congés, si bien qu'il devra lui verser une indemnité de 1 395,72 euros.
Le jugement sera réformé en ce sens.
5-Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
En application de l'article L 1222-1 du code du travail, le contrat de travail s'exécute de bonne foi. Cette obligation est réciproque.
Mme [K] soutient que l'employeur a failli à plusieurs reprises à son obligation de loyauté, en virant pendant son salaire de novembre avec retard, en retenant injustement son salaire du 10 au 18 décembre 2018 et du 27 décembre 2018, en lui refusant le paiement de ses congés acquis et en faisant des déclarations contradictoires au Pôle emploi, en la licenciant de façon abusive et en la menaçant, par le biais de la lettre de licenciement.
Sur le premier point, le contrat de travail ne prévoyait pas une date de versement du salaire et, si l'employeur a l'obligation de respecter la périodicité mensuelle de paiement des salaires, il n'est pas tenu de respecter une date précise. En l'occurrence, le décalage apporté au virement du salaire de Mme [K] du mois de novembre 2018 s'explique par son non-respect des consignes données quant à l'utilisation du télépointage.
Sur l'indemnité de congés payés, l'employeur a simplement fait application des dispositions de la convention collective qui prévoyaient de ne pas verser d'indemnité de congés payés aux salariés licenciés pour faute grave ou lourde. Il ne peut donc être jugé qu'il a commis une faute contractuelle, même s'il a reporté les congés restant à prendre sur l'attestation destinée au Pôle emploi.
Mme [K] ne peut prétendre à être indemnisée sur le fondement de l'article L.1222-1 du code du travail pour avoir été licenciée, alors qu'elle le sera déjà sur le fondement de l'article L.1235-3 du même code.
Par ailleurs, dans le courrier signé par Mme [C] et Mme [K], également salariée de la société Athena Services à domicile, à destination du procureur de la République et daté du 14 décembre 2018, celles-ci se sont contentées d'indiquer : « Merci de bien vouloir demander au tribunal de commerce de se saisir d'office afin de prononcer la liquidation judiciaire de la société et de faire appel aux AGS pour nos salaries dus » et de joindre la lettre signée de 7 salariées et envoyée en courrier recommandé avec avis de réception à l'employeur, le 12 décembre précédent, dans lequel il était indiqué que le salaire d'octobre avait été viré avec retard et que le salaire de novembre ne l'avait pas encore été.
Ce faisant, Mme [C] et Mme [K] se sont abstenues d'exposer au procureur de la République l'intégralité de la situation, si bien qu'il a pu penser que la société se trouvait en état de cessation des paiements.
Mme [K] ne peut donc à présent utilement soutenir que l'employeur s'est comporté de façon déloyale en lui rappelant les termes de l'article 441-7 du code pénal, au demeurant inapplicables à la présente situation, et en lui indiquant qu'il se réservait le droit de déposer plainte à son encontre.
Enfin, concernant les retenues opérées sur le salaire de décembre 2018, la cour a considéré que seule la retenue portant sur la journée du 27 décembre 2018 n'aurait pas dû être effectuée.
S'agissant d'une somme minime, la cour considère que Mme [K] n'a pas subi un préjudice que ne réparerait le paiement du rappel de salaire correspondant par l'employeur.
La salariée sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts, en infirmation du jugement.
6-Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice matériel distinct
Mme [K] ne peut solliciter des dommages et intérêts pour réparer les conséquences financières de son licenciement alors qu'elle a déjà été indemnisée de ce préjudice sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail.
Le jugement sera donc infirmé de ce chef et elle sera déboutée de sa demande.
7-Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct
Mme [K] ne peut solliciter des dommages et intérêts pour réparer le préjudice moral subi du fait de son licenciement alors qu'elle a déjà été indemnisée de ce préjudice sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail.
Le jugement sera donc infirmé de ce chef et elle sera déboutée de sa demande.
8-Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire
Aux termes de l'article L. 2281-1 du code du travail, « les salariés bénéficient d'un droit à l'expression directe et collective sur le contenu, les conditions d'exercice et l'organisation de leur travail. (...) ».
Selon l'article L. 2281-2 du même code, « l'expression directe et collective des salariés a pour objet de définir les actions à mettre en 'uvre pour améliorer leurs conditions de travail, l'organisation de l'activité et la qualité de la production dans l'unité de travail à laquelle ils appartiennent et dans l'entreprise. »
Enfin l'article L. 2281-3 du même code dispose que « les opinions que les salariés, quelle que soit leur place dans la hiérarchie professionnelle, émettent dans l'exercice du droit d'expression ne peuvent motiver une sanction ou un licenciement. »
Il résulte par ailleurs de l'article L. 1121-1 du code du travail et de l'article 10, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que « sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression. »
Use ainsi de sa liberté d'expression le salarié qui dénonce de bonne foi des pratiques frauduleuses ou des infractions pénales.
Toutefois, contrairement à ce que soutient Mme [K], adresser au procureur de la République, avec Mme [C], un courrier au procureur de la République pour lui demander de faire placer son employeur en liquidation judiciaire constitue un abus dans l'exercice de sa liberté d'expression dans la mesure où les deux salariées ont donné à penser au ministère public que la société n'était plus en état de payer les salaires, alors qu'elles savaient que cela ne correspondait pas à la situation réelle.
De même, Mme [K] soutient que la procédure de licenciement n'a pas été respectée sans développer le moindre moyen de droit ou de fait à l'appui de cette affirmation.
Elle sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, en infirmation du jugement .
9-Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge de la société.
L'équité commande de condamner la société à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel, la somme allouée en première instance étant confirmée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement entrepris, sauf sur l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité légale de licenciement, les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Athena Services à domicile à verser à Mme [X] [K] la somme de 19,76 euros à titre de rappel de salaire pour la journée du 27 décembre 2018, outre 1,98 euros de congés payés afférents ;
Condamne la société Athena Services à domicile à verser à Mme [X] [K] la somme de 1 395,72 euros à titre d'indemnité de congés payés ;
Déboute Mme [X] [K] de sa demande de rappel de salaire pour la période du 10 au 18 décembre 2018, de ses demandes de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, pour préjudice matériel distinct, pour préjudice moral distinct et pour licenciement vexatoire ;
Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de Mme [X] [K] ;
Condamne la société Athena Services à domicile à verser à Mme [X] [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel .
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
RAPPORTEUR
N° RG 22/01360 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OEFA
S.A.S.U. ATHENA SERVICES A DOMICILE
C/
[K]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON
du 14 Janvier 2022
RG : 19/01209
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE B
ARRÊT DU 17 JANVIER 2025
APPELANTE :
Société ATHENA SERVICES A DOMICILE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Céline GARCIA, avocat au barreau de LYON, et ayant pour avocat plaidant Me Isabelle ROSADO, avocat au barreau de CHAMBERY
INTIMÉE :
[X] [K]
née le 10 Février 1968 à [Localité 5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Valérie MALLARD de la SELARL MALLARD AVOCATS, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Novembre 2024
Présidée par Catherine CHANEZ, Conseillère magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Mihaela BOGHIU, Greffière.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Béatrice REGNIER, Présidente
- Catherine CHANEZ, Conseillère
- Régis DEVAUX, Conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 17 Janvier 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Béatrice REGNIER, Présidente et par Mihaela BOGHIU, Greffièrer auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
Mme [X] [K] a été embauchée par la société Athena Services à domicile (ci-après, la société) à compter du 30 juin 2017, en qualité d'aide à domicile, suivant contrat à durée indéterminée.
La convention collective nationale applicable est celle des entreprises de service à la personne.
Le 9 janvier 2019, Mme [K] a fait l'objet d'un avertissement et d'une mise à pied de 3 jours pour non-respect de la procédure de télépointage, ainsi que pour déclaration d'heures non effectuées en novembre et décembre 2018 en recueillant la signature des clients.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 15 février 2019, la société a convoqué Mme [K] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 5 mars 2019 et lui a notifié sa mise à pied conservatoire.
Par lettre recommandée du 5 mars 2019, Mme [K] a été licenciée pour faute lourde, dans les termes suivants :
« (') Nous sommes donc contraints de vous notifie votre licenciement pour faute lourde, compte tenu des éléments suivants :
En date du 21 janvier 2019, nous sommes informés par voie d'huissier d'une convocation au Tribunal de commerce dans le cadre d'une mesure collective de redressement judiciaire ou liquidation dans lequel apparaît le courrier du 12 décembre 2018 datée par ailleurs de 2019 où vous dénoncez une absence de règlement de salaire de la part de l'entreprise au 5 décembre 2018. Or vous n'étiez pas sans savoir que la procédure d'entreprise prévoit deux périodes de versement au 05 de chaque mois pour les salariés respectant le procédure interne et à défaut au 15 de chaque mois. Nous avons également un courrier de votre part et de la part de Madame [C] adressé directement au procureur de la République « Merci de bien vouloir demander au Tribunal de commerce de saisir d'office afin de prononcer la liquidation judiciaire de la société et de faire appel aux AGS pour nos salaires dus ». Dans ce courrier vous transmettez des informations totalement erronées en faisant état de salaires qui n'étaient pas versées depuis le mois d'octobre. Sauf que vous avez bien été payé sur les dates prévues à la procédure de l'entreprise et que vous n'étiez pas sans le savoir.
Vous n'avez pas respecté la procédure qui est rappelée à chaque réunion d'équipe dont vous participez à chaque fois et que vous ne faites pas signer les bénéficiaires au période concernée.
Malgré notre livret d'accueil remis á l'ensemble de nos équipes où la procédure est bien stipulée en page 11 de ce livret d'accueil ainsi que sur la note de service adressée également à l'ensemble des salariés de l'entreprise ATHENA Services à Domicile en date du 05 novembre 2018 où il était stipulé :
« La situation au sujet de la télégestion devient intenable. Malgré nos divers rappels à l'ordre, les créations, modifications et divers saisie au sujet de la télégestion ne cesse de croître du fait du manquement de certains salariés quant à la gestion quotidienne du télépointage.
Nous avons dos obligations et des comptes à rendre auprès de nos différents financeurs de l'APA et de la PCH à savoir le département et la métropole.
Nous avons une marge de tolérance de 5% de modification que nous dépassons trop largement ce qui impacte le financement.
Cette absence de financement génère une perte pour l'entreprise. Ces pertes ne nous permettent pas notamment des avancées sociales en termes d'amélioration de vos conditions de travail. A savoir, mise en place de formation, amélioration des frais professionnels, instaurations de prime'
L'avancée sociale est donc freinée du fait de ces manquements.
Nous allons donc devoir durcir nos exigences quant à cette télégestion.
A savoir que pour tous salariés dépassant les 5% d'absence de télégestion, les virements des paies se feront au 15 du mois au lieu du 5. En effet, la création de l'ensemble de ces prestations génère une perte de temps importante pouvant de ce fait générer des retards dans la gestion des paies. Cette situation étant du fait du manquement de certains des salariés. Sachez que derrière un ordinateur ne se cache pas un robot mais bien un salarié qui se démène au quotidien afin que vous puissiez avoir vos paies dans les temps.
Cette mesure qui s'inscrit comme une obligation engendrera, tout comme le rendu des relevés d'heures en retard ou non signé un règlement des paies au 15 du mois au lieu du 5. Il n'y aura donc pas de cas par cas. Nous vous demandons donc à chacun de bien vouloir respecter cette obligation.
Si cette situation venait à perdurer chez certain, nous serons amenés à envisager des sanctions plus importantes.
Nous vous remercions pour la prise en compte de cette note de service et de la bonne mise en 'uvre de cette dernière. »
Vous étiez donc informée en toute connaissance de cause de la procédure instaurée par l'entreprise et de n'était par ailleurs pas la première fois que vous étiez soumise à la deuxième période de versement des paies. Notamment le 03 Novembre 2017 où vous n'avez pas remis vos heures dans les temps et où vous avez eu des échanges sms avec Madame [W] vous confirmant votre versement de paie au 15 Novembre au lieu du 05 Novembre 2017 pour non respect de la procédure car vous aviez remis vos relevés d'heures après la date limite fixée.
Ces faits constatés viennent en manquement de vos obligations de votre contrat de travail comme le prévoit l'article 7 ' SECRET PROFESSIONNEL ' LOYAUTE - COMPORTEMENT A L'EGARD DES CLIENTS : « Le salarié s'engage à se consacrer de façon loyale à son activité pour le compte de la société
L'article 8 ' AUTRES OBLIGATIONS PROFESSIONNELLES : Le salarié est tenu d'observer les dispositions réglementant les conditions de travail applicables à l'entreprise. Il reconnaît avoir reçu et pris connaissance, au jour de son embauche, des informations relatives au fonctionnement de l'entreprise (fiche de poste, livret d'accueil, charte qualité intervenant) et s'engage à les respecter.
Cette situation dont vous aviez connaissance n'est donc pas du fait de l'entreprise mais de la procédure de l'entreprise que vous ne respectiez pas. Vous avez clairement exposé votre volonté de nuire à l'entreprise dans votre procédé.
Du fait de votre absence à cet entretien, nous n'avons pas été en mesure de recueillir vos explications.
Vous avez clairement démontré votre volonté de nuire à l'entreprise en faisant de fausses déclarations directement auprès du procureur de la République tout en employant des procédés de pression auprès de vos collègues qui n'ont pas manqué de nous en informer par courrier.
Ces fausses déclarations non seulement ont porté préjudice à l'entreprise mais nous nous réservons le droit de vous poursuivre pénalement. En effet, toute fausse déclaration est passible d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende selon les dispositions de l'article 441-7 du code pénal réprimant l'établissement d'attestations faisant état de faits matériellement inexacts.
La gravité exceptionnelle des faits qui vous sont reprochés rend impossible votre maintien dans l`entreprise, y compris pendant la durée de votre préavis (') »
Par requête reçue le 2 mai 2019, Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement et voir condamner son employeur au paiement de diverses sommes à caractère indemnitaire et salarial.
Par jugement du 14 janvier 2022, le conseil de prud'hommes a notamment :
Condamné la société à verser à Mme [K] les sommes suivantes :
1 505,43 euros de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire, outre 150,43 euros de congés payés afférents ;
1 505,43 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 150,43 euros de congés payés afférents ;
1 433,68 euros de congés payés non pris ;
687,11 euros de rappel de salaire du 10 au 18 décembre 2018 et du 27 décembre 2018 ;
794,53 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;
1 505,43 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
1 500 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail (préjudice moral, préjudice matériel et licenciement vexatoire) ;
Ordonné la délivrance et la remise à Mme [K] par la société des documents de fin de contrat et les bulletins de paie modifiés, sous astreinte de 30 euros par jour de retard, à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement ;
Condamné la société à verser à Mme [K] la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Débouté les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires ;
Condamné la société aux dépens.
Par déclaration du 15 février 2022, la société a interjeté appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées, déposées au greffe le 19 octobre 2022, elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, à titre principal, de débouter Mme [K] de ses demandes et, à titre subsidiaire, de requalifier le licenciement en faute grave, à titre infiniment subsidiaire, de requalifier le licenciement pour cause réelle et sérieuse et de fixer l'indemnité de congés payés restant dus à 707,39 euros et, en tout état de cause, de condamner Mme [K] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile concernant la première instance outre 1 500 euros concernant la présente procédure, et à prendre en charge les dépens d'instance.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées, déposées au greffe le 20 juillet 2022, Mme [K] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a omis de condamner la société à la somme de 68,71 euros au titre des congés payés afférents au rappel de salaire de 687,11 euros, en ce qu'il a limité le quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 1 505,43 euros, alloué une somme globale de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail (préjudice moral, préjudice matériel et licenciement vexatoire), et en ce qu''il l'a déboutée de ses demandes tendant à la condamnation de la société à lui verser la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de l'exécution fautive du contrat de travail, la somme de 2 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice matériel distinct, la somme de 2 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct et la somme de 1 500 euros de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, et, statuant à nouveau, de :
Condamner la société à lui payer les sommes suivantes :
68,71 euros à titre de congés payés afférents au rappel de salaire du 10 au 18 décembre et du 27 décembre 2018 ;
5 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de l'exécution fautive du contrat de travail ;
3 010,86 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
2 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice matériel distinct ;
2 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct ;
1 500 euros de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire ;
3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel ;
Condamner la société aux dépens d'instance et d'appel ;
Débouter la société de toutes ses demandes plus amples ou contraires.
La clôture de la mise en état a été ordonnée le 8 octobre 2024.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques ou qu'elles constituent en réalité des moyens.
1-Sur la demande de rappel de salaire du 10 au 18 décembre 2018 et du 27 décembre 2018
En application de l'article L.3242-1 du code du travail, le paiement de la rémunération est effectué une fois par mois. L'employeur fixe librement la date de versement de la paye, contrairement à ce que soutient Mme [K].
Il ressort des pièces communiquées par l'employeur que plusieurs salariés refusaient de pointer au domicile des clients afin d'enregistrer leurs heures de passage, et donc leurs horaires de travail. Ces mauvaises pratiques générant une perte de temps pour le service chargé de la paye, la société a décidé de continuer à verser le salaire des employés respectueux de la procédure le 5 du mois et d'en différer le paiement au 15 du mois pour les autres. Ce changement a été explicité et annoncé par courriel de Mme [W], du service comptabilité, en date du 5 novembre 2018 et en tout état de cause, Mme [K] ne conteste pas en avoir eu connaissance.
Elle ne conteste pas davantage ne pas avoir travaillé du 10 au 18 décembre 2018, soutenant s'être trouvée dans l'impossibilité de financer l'achat de carburant et donc de se rendre avec son propre véhicule chez les clients en raison du paiement retardé de son salaire et du remboursement de ses frais professionnels.
L'employeur justifie pourtant qu'il versait régulièrement des acomptes à la salariée et celle-ci ne conteste pas ne pas en avoir spécifiquement demandé pour faire face à cette situation incontestablement difficile. Par ailleurs, la société verse aux débats l'attestation de Mme [W] qui indique avoir proposé à la salariée de travailler chez des clients à proximité de son domicile pour lui éviter un déplacement en véhicule, en dépit des changements de planning que cela nécessitait. Même si cette attestation émane d'une salariée de l'employeur, elle est suffisamment précise et circonstanciée, avec l'identité des clients concernés, pour être revêtue d'une force probante suffisante.
La cour en déduit en conséquence que c'est de son propre chef, en refusant d'accepter le changement de planning que lui proposait Mme [W] et en s'abstenant de solliciter un acompte, que Mme [K] a refusé d'exécuter la prestation de travail programmée. Aucune faute ne peut être reprochée à l'employeur qui avait dès lors le droit de procéder à une retenue de salaire.
Quant à la journée du 27 décembre, l'employeur ne justifie pas que les 2 heures de travail programmées au domicile de Mme [L] n'ont pas été effectuées, d'autant que le planning prévu n'a pas été réalisé au vu de la feuille de présence renseignée par Mme [K] alors que seules 2 heures ont été déduites de la paye.
Le jugement sera en conséquence réformé de ce chef et la société sera condamnée à rembourser à Mme [K] la somme de 19,76 euros à titre de rappel de salaire pour la journée du 27 décembre 2018, outre les congés payés afférents.
2-Sur le licenciement
Aux termes de l'article L.1235-1 du code du travail, le juge doit apprécier la régularité de la procédure de licenciement et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur.
En application de l'article L.1232-6 du même code, la lettre de licenciement, éventuellement complétée en application de l'article R.1232-13, fixe les limites du litige. La cause du licenciement doit être objective et reposer sur des faits matériellement vérifiables. Les faits doivent être établis et constituer la véritable cause de licenciement. Ils doivent être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement. Il appartient au juge du fond, qui n'est pas lié par la qualification donnée au licenciement, de vérifier la réalité des faits reprochés au salarié et de les qualifier, puis de dire s'ils constituent une cause réelle et sérieuse au sens de l'article L.1232-1 du code du travail, l'employeur devant fournir au juge les éléments lui permettant de constater le caractère réel et sérieux du licenciement.
La faute lourde est caractérisée par l'intention de nuire à l'employeur, laquelle implique la volonté du salarié de lui porter préjudice dans la commission du fait fautif et ne résulte pas de la seule commission d'un acte préjudiciable à l'entreprise.
Il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la faute lourde et de l'intention de nuire qui la caractérise.
Enfin, aucun fait déjà sanctionné ne peut donner lieu à une nouvelle sanction, l'employeur ayant épuisé son pouvoir disciplinaire. L'employeur qui, ayant connaissance de divers faits commis par le salarié, considérés par lui comme fautifs, choisit de n'en sanctionner que certains, ne peut plus ultérieurement prononcer une nouvelle mesure disciplinaire pour sanctionner les autres faits antérieurs à la première sanction.
L'existence de nouveaux griefs autorise cependant l'employeur à tenir compte de griefs antérieurs, qu'ils aient ou non déjà été sanctionnés.
En l'espèce, la lettre de licenciement se fonde sur le courrier adressé le 14 décembre 2018 au procureur de la République pour lui demander de saisir le tribunal de commerce aux fins de liquidation judiciaire de la société sur la base de renseignements tronqués, sur le défaut de respect de l'obligation de télépointage et sur les pressions exercées auprès de ses collègues.
Mme [K] fait valoir que l'employeur avait épuisé son pouvoir disciplinaire lorsqu'il a prononcé son licenciement dans la mesure où il avait connaissance de l'existence de la lettre envoyée au procureur de la République lorsqu'il lui a notifié un avertissement avec mise à pied disciplinaire le 21 janvier 2019.
Celui-ci, sur qui repose la charge de la preuve de la date à laquelle les faits fautifs ont été porté à sa connaissance, reste taisant sur ce point et n'apporte ainsi aucun élément habile à éclairer la cour. Il ne pouvait donc exciper du courrier du 14 décembre pour licencier Mme [K].
Il ne pouvait davantage se fonder sur le défaut de respect par la salariée de son obligation de télépointage dans la mesure où cette faute a déjà été sanctionnée par l'avertissement avec mise à pied du 21 janvier et où il ne rapporte pas la preuve de manquements postérieurs.
Quant aux pressions exercées, la lettre de licenciement n'indique ni l'identité des personnes concernées, ni la date des pressions, ni leur contenu. Ce grief est donc trop imprécis pour motiver un licenciement.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il sera également confirmé sur l'indemnité compensatrice de préavis, sur le rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, sur l'indemnité légale de licenciement, dont la société ne conteste pas les montants.
3-Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, Mme [K] peut prétendre à des dommages et intérêts sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail, lequel dispose que, dans une entreprise employant au moins 11 salariés, ce qui n'est pas contesté, « « Si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux, soit, pour un salarié dont l'ancienneté au jour de la rupture était de un an, une indemnité compris entre un et deux mois de salaire brut.
Pour déterminer le montant de l'indemnité, le juge peut tenir compte, le cas échéant, des indemnités de licenciement versées à l'occasion de la rupture, à l'exception de l'indemnité de licenciement mentionnée à l'article L.1234-9. »
En l'espèce, en considération de la situation particulière de Mme [K], notamment de son âge (51 ans) et de son ancienneté (1 an et 9 mois) au terme du préavis, des circonstances de la rupture, de sa capacité à retrouver un emploi compte tenu de sa formation, le jugement sera confirmé sur le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
4-Sur l'indemnité de congés payés
L'article L.3141-28 du code du travail dispose en ses deux premiers alinéas :
« Lorsque le contrat de travail est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit, pour la fraction de congé dont il n'a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé déterminée d'après les articles L.3141-24 à L.3141-27.
L'indemnité est due que cette rupture résulte du fait du salarié ou du fait de l'employeur. »
Cet article est d'ordre public, si bien que l'employeur est redevable de l'indemnité de congés payés nonobstant les dispositions contraires de la convention collective.
Il ressort de ses propres indications sur l'attestation destinée au Pôle emploi que Mme [K] avait acquis 24 jours de congés, si bien qu'il devra lui verser une indemnité de 1 395,72 euros.
Le jugement sera réformé en ce sens.
5-Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
En application de l'article L 1222-1 du code du travail, le contrat de travail s'exécute de bonne foi. Cette obligation est réciproque.
Mme [K] soutient que l'employeur a failli à plusieurs reprises à son obligation de loyauté, en virant pendant son salaire de novembre avec retard, en retenant injustement son salaire du 10 au 18 décembre 2018 et du 27 décembre 2018, en lui refusant le paiement de ses congés acquis et en faisant des déclarations contradictoires au Pôle emploi, en la licenciant de façon abusive et en la menaçant, par le biais de la lettre de licenciement.
Sur le premier point, le contrat de travail ne prévoyait pas une date de versement du salaire et, si l'employeur a l'obligation de respecter la périodicité mensuelle de paiement des salaires, il n'est pas tenu de respecter une date précise. En l'occurrence, le décalage apporté au virement du salaire de Mme [K] du mois de novembre 2018 s'explique par son non-respect des consignes données quant à l'utilisation du télépointage.
Sur l'indemnité de congés payés, l'employeur a simplement fait application des dispositions de la convention collective qui prévoyaient de ne pas verser d'indemnité de congés payés aux salariés licenciés pour faute grave ou lourde. Il ne peut donc être jugé qu'il a commis une faute contractuelle, même s'il a reporté les congés restant à prendre sur l'attestation destinée au Pôle emploi.
Mme [K] ne peut prétendre à être indemnisée sur le fondement de l'article L.1222-1 du code du travail pour avoir été licenciée, alors qu'elle le sera déjà sur le fondement de l'article L.1235-3 du même code.
Par ailleurs, dans le courrier signé par Mme [C] et Mme [K], également salariée de la société Athena Services à domicile, à destination du procureur de la République et daté du 14 décembre 2018, celles-ci se sont contentées d'indiquer : « Merci de bien vouloir demander au tribunal de commerce de se saisir d'office afin de prononcer la liquidation judiciaire de la société et de faire appel aux AGS pour nos salaries dus » et de joindre la lettre signée de 7 salariées et envoyée en courrier recommandé avec avis de réception à l'employeur, le 12 décembre précédent, dans lequel il était indiqué que le salaire d'octobre avait été viré avec retard et que le salaire de novembre ne l'avait pas encore été.
Ce faisant, Mme [C] et Mme [K] se sont abstenues d'exposer au procureur de la République l'intégralité de la situation, si bien qu'il a pu penser que la société se trouvait en état de cessation des paiements.
Mme [K] ne peut donc à présent utilement soutenir que l'employeur s'est comporté de façon déloyale en lui rappelant les termes de l'article 441-7 du code pénal, au demeurant inapplicables à la présente situation, et en lui indiquant qu'il se réservait le droit de déposer plainte à son encontre.
Enfin, concernant les retenues opérées sur le salaire de décembre 2018, la cour a considéré que seule la retenue portant sur la journée du 27 décembre 2018 n'aurait pas dû être effectuée.
S'agissant d'une somme minime, la cour considère que Mme [K] n'a pas subi un préjudice que ne réparerait le paiement du rappel de salaire correspondant par l'employeur.
La salariée sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts, en infirmation du jugement.
6-Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice matériel distinct
Mme [K] ne peut solliciter des dommages et intérêts pour réparer les conséquences financières de son licenciement alors qu'elle a déjà été indemnisée de ce préjudice sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail.
Le jugement sera donc infirmé de ce chef et elle sera déboutée de sa demande.
7-Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral distinct
Mme [K] ne peut solliciter des dommages et intérêts pour réparer le préjudice moral subi du fait de son licenciement alors qu'elle a déjà été indemnisée de ce préjudice sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail.
Le jugement sera donc infirmé de ce chef et elle sera déboutée de sa demande.
8-Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire
Aux termes de l'article L. 2281-1 du code du travail, « les salariés bénéficient d'un droit à l'expression directe et collective sur le contenu, les conditions d'exercice et l'organisation de leur travail. (...) ».
Selon l'article L. 2281-2 du même code, « l'expression directe et collective des salariés a pour objet de définir les actions à mettre en 'uvre pour améliorer leurs conditions de travail, l'organisation de l'activité et la qualité de la production dans l'unité de travail à laquelle ils appartiennent et dans l'entreprise. »
Enfin l'article L. 2281-3 du même code dispose que « les opinions que les salariés, quelle que soit leur place dans la hiérarchie professionnelle, émettent dans l'exercice du droit d'expression ne peuvent motiver une sanction ou un licenciement. »
Il résulte par ailleurs de l'article L. 1121-1 du code du travail et de l'article 10, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que « sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression. »
Use ainsi de sa liberté d'expression le salarié qui dénonce de bonne foi des pratiques frauduleuses ou des infractions pénales.
Toutefois, contrairement à ce que soutient Mme [K], adresser au procureur de la République, avec Mme [C], un courrier au procureur de la République pour lui demander de faire placer son employeur en liquidation judiciaire constitue un abus dans l'exercice de sa liberté d'expression dans la mesure où les deux salariées ont donné à penser au ministère public que la société n'était plus en état de payer les salaires, alors qu'elles savaient que cela ne correspondait pas à la situation réelle.
De même, Mme [K] soutient que la procédure de licenciement n'a pas été respectée sans développer le moindre moyen de droit ou de fait à l'appui de cette affirmation.
Elle sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, en infirmation du jugement .
9-Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Les dépens de première instance et d'appel seront laissés à la charge de la société.
L'équité commande de condamner la société à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel, la somme allouée en première instance étant confirmée.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Infirme le jugement entrepris, sauf sur l'indemnité compensatrice de préavis, l'indemnité légale de licenciement, les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le rappel de salaire sur mise à pied conservatoire et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société Athena Services à domicile à verser à Mme [X] [K] la somme de 19,76 euros à titre de rappel de salaire pour la journée du 27 décembre 2018, outre 1,98 euros de congés payés afférents ;
Condamne la société Athena Services à domicile à verser à Mme [X] [K] la somme de 1 395,72 euros à titre d'indemnité de congés payés ;
Déboute Mme [X] [K] de sa demande de rappel de salaire pour la période du 10 au 18 décembre 2018, de ses demandes de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, pour préjudice matériel distinct, pour préjudice moral distinct et pour licenciement vexatoire ;
Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de Mme [X] [K] ;
Condamne la société Athena Services à domicile à verser à Mme [X] [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel .
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,