Cass. com., 29 janvier 2025, n° 23-21.527
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
Rapporteur :
Mme Comte
Avocats :
Me Soltner, SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet
Exposé du litige
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 12 juillet 2023), le 22 avril 2015, la société Cabinet Habilis (la société Habilis), titulaire de la carte professionnelle « transactions sur immeubles et fonds de commerce », a confié à M. [P] un mandat de représentation en tant qu'agent commercial. Le 4 décembre 2020, elle a signifié à M. [P] la résiliation de son contrat.
2. Sollicitant la réparation de son préjudice consécutif à la rupture du contrat, M. [P] a assigné la société Habilis.
Moyens
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. M. [P] fait grief à l'arrêt de limiter à 10 000 euros le montant de la condamnation de la société Habilis au titre de l'indemnité consécutive à la rupture, alors « que l'indemnité de cessation de contrat due à l'agent commercial a pour objet la réparation du préjudice qui résulte pour lui de la perte pour l'avenir des revenus tirés de l'exploitation de la clientèle commune ; que la fixation de l'indemnité de cessation de contrat doit ainsi se faire par référence aux seules rémunérations perçues par l'agent en exécution du contrat rompu ; qu'en l'espèce, pour fixer l'indemnité de cessation de contrat due par la société Habilis à M. [P], la cour d'appel s'est fondée, par motifs propres et adoptés, sur les circonstances inopérantes que le contrat ne comportait aucune clause de non-concurrence, que M. [P] avait retrouvé un emploi dès après la rupture du contrat et qu'il ne produisait aucun élément sur les rémunérations qu'il percevait au titre de ce nouvel emploi ; qu'en se déterminant ainsi, en fixant l'indemnité de cessation de contrat due à M. [P] par des motifs impropres à établir la perte pour l'avenir des revenus tirés par lui de l'exploitation de la clientèle commune, et en ne déterminant pas le montant de l'indemnité par référence à cette perte, la cour d'appel a violé l'article L.134-12 du code de commerce. »
Motivation
Réponse de la Cour
Vu l'article L.134-12, alinéa 1er, du code de commerce :
4. Selon ce texte, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.
5. Il en résulte que la cessation du contrat d'agence commerciale donne droit à réparation du préjudice résultant, pour l'agent commercial, de la perte pour l'avenir des revenus tirés de l'exploitation de la clientèle commune. Il n'y a donc pas lieu, aux fins d'évaluer ce préjudice, de tenir compte des circonstances postérieures à la cessation du contrat telles que la conclusion par l'agent d'un nouveau contrat en vue de prospecter la même clientèle pour un autre mandant.
6. Pour fixer l'indemnité compensatrice de rupture du contrat d'agent commercial, l'arrêt retient que ce contrat ne comporte aucune clause de non-concurrence, que M. [P] a retrouvé un emploi dans la même branche presqu'immédiatement et qu'il ne produit aucun élément sur les commissions qu'il a perçues depuis la rupture du contrat.
7. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à évaluer le préjudice résultant de la cessation du contrat d'agence commerciale, constitué par la perte pour l'avenir des revenus tirés de l'exploitation de la clientèle commune, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Dispositif
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé le montant de l'indemnité compensatrice de rupture à la somme de 10 000 euros, et statué sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 12 juillet 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ;
Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis autrement composée.