Cass. com., 12 février 2025, n° 23-17.483
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vigneau
Rapporteur :
Mme de Lacaussade
Avocats :
SAS Hannotin Avocats, SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 avril 2023), le 3 janvier 2019, la Selarl Pharmacie centrale (la Selarl), dont le capital social de 10 000 euros était détenu à raison de 51 % par M. [L], qui en était le gérant, et de 49 % par la société de participations financières de profession libérale Bouras (la société Bouras), a cédé son fonds de commerce de pharmacie à la Selas Pharmacie centrale [Localité 4], en cours de formation, dont le capital social a été divisé en 1 000 parts, M. [L] en détenant une et la Selarl les 999 autres.
2. Le même jour, l'assemblée générale extraordinaire de la Selarl a procédé, sous conditions suspensives, à la réduction de 4 900 euros de son capital par voie de rachat et annulation des 4 900 parts détenues par la société Bouras, au prix de 355 000 euros, puis, M. [L], en sa qualité d'associé devenu unique de la Selarl, a décidé la transformation de la société, sans création d'une personne morale nouvelle, en une société de participations financières de profession libérale (SPFPL) de pharmaciens d'officine dénommée SPFPL Financière [L] (la société Financière [L]), dont il est demeuré gérant.
3. Le 6 mars 2019, l'assemblée générale extraordinaire de la Selarl, après avoir constaté la réalisation des conditions suspensives, a réitéré sa décision de procéder à la réduction du capital dans les conditions précédemment exposées, puis M. [L] a réitéré sa décision de transformer la Selarl en SPFPL.
4. Après mises en demeure infructueuses de régler le montant de la cession des parts, le solde créditeur de son compte courant d'associé et les intérêts dus sur ces montants, la société Bouras a assigné la société Financière [L] et M. [L], le 2 juillet 2019, en annulation de la réduction de capital et paiement de ces montants.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. La société SPFPL Bouras fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'annulation relative à la décision de réduction du capital de la Selarl Pharmacie centrale et au rachat de ses parts sociales, alors « que, sauf stipulation contraire, le rachat des parts sociales d'un associé par la société, qui provoque l'annulation de ses parts, fait naître à la charge de la société l'obligation de rembourser le compte courant de l'associé ; qu'il en résulte que le défaut de remboursement par la société du compte courant d'associé entraîne la résolution de la délibération ayant prononcé le rachat et l'annulation des parts de l'associé concerné ; qu'en énonçant que "si la société Bouras était donc légitime à solliciter le remboursement de son compte courant, celle-ci n'est pas fondée à faire état du défaut de remboursement de ce compte courant à l'appui de sa demande de résolution", la cour d'appel a violé l'article 1224 du code civil. »
Réponse de la Cour
7. Après avoir rappelé les dispositions des articles 1103 et 1104, 1654 et 1224 du code civil, l'arrêt relève, d'une part, que la décision, lors de l'assemblée générale extraordinaire de la Selarl du 3 janvier 2019, du rachat et de l'annulation de 4 900 parts sociales appartenant à la société Bouras, moyennant une valeur de cession de 355 000 euros, avait été prise sous trois conditions suspensives tenant à l'enregistrement de la déclaration modificative d'exploitation de la Selarl en SPFPL, à l'enregistrement de la déclaration d'exploitation de la Selas Pharmacie centrale [Localité 4] et à l'absence d'opposition des créanciers sociaux à la réduction de capital, d'autre part, qu'il avait été constaté leur réalisation lors de l'assemblée générale extraordinaire du 6 mars 2019 de la Selarl Pharmacie centrale à laquelle assistaient les deux associés et qu'était joint un certificat du greffier du tribunal de commerce de Versailles, attestant qu'aucune opposition à la réduction de capital ne lui avait été remise.
8. L'arrêt ajoute que, lors de ces assemblées, comme dans une note du 27 juillet 2018, il était uniquement évoqué, comme condition du « rachat/annulation » des parts sociales détenues par la société Bouras, le paiement de la somme de 355 000 euros sans autre précision ni sur les modalités de règlement de cette somme ni sur le remboursement du compte courant détenu par cette dernière.
9. Après avoir énoncé que, sauf stipulation contraire, tout associé était en droit d'exiger à tout moment et peu important les motifs de sa demande le remboursement du solde de son compte courant, dès lors que l'avance ainsi consentie constituait un prêt à durée indéterminée, et constaté, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la commune intention des parties, qu'en l'absence de stipulation contraire, l'obligation de payer le prix des parts faisant l'objet d'un rachat et celle de rembourser le compte-courant étaient indépendantes l'une de l'autre, la cour d'appel en a exactement déduit que, si la société Bouras était en droit de solliciter le remboursement de son compte courant, elle n'était pas fondée à faire état du défaut de remboursement de celui-ci au soutien d'une demande de résolution de la convention de rachat de ses parts.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.