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Décisions

CA Paris, Pôle 6 ch. 4, 12 février 2025, n° 21/03864

PARIS

Arrêt

Autre

PARTIES

Défendeur :

La Société Parisienne de Nettoyage de Surfaces Parinet (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Meunier

Vice-président :

M. Malinosky

Conseiller :

Mme Norval-Grivvet

Avocats :

Me Franc, Me Hinoux

Cons. prud'h. Bobigny, du 24 mars 2021, …

24 mars 2021

FAITS ET PROCÉDURE

Par contrat de travail à durée indéterminée du 15 novembre 1971, M. [N] [L] a été engagé par la société Parinet, spécialisée dans la maçonnerie générale et gros 'uvre de bâtiment, en qualité de directeur technique, statut cadre, position C, échelon 1, coefficient 130 de la convention collective des ingénieurs et cadres du Bâtiment et des travaux publics et pour une rémunération brute mensuelle de 33 000 frs (5030 euros)outre un 13ème mois et une prime annuelle en fonction des résultats de l'entreprise.

A compter du 25 octobre 1990, M. [L] devient actionnaire de la société Parinet, à hauteur de 10 % du capital. Un pacte d'associés prévoit qu'à l'issue du contrat de travail de M. [L] celui-ci s'engage à céder la totalité des actions en sa possession à la société Pelissolo Construction, actionnaire majoritaire.

Le 2 août 2012, ayant atteint l'âge légal de la retraite, M. [L] quitte la société et les parties signent un protocole transactionnel actant, d'une part, l'attribution d'une indemnité transactionnelle de départ à la retraite et, d'autre part, la signature d'un nouveau contrat de travail en qualité de directeur technique.

Ainsi, M. [L] a été réengagé le 2 août 2013, sans reprise d'ancienneté, aux termes d'un nouveau contrat de travail en cumul d'emploi retraite, en qualité de Directeur technique de la société Parinet, sa rémunération brute mensuelle est portée à 12 000 euros sur 13 mois pour un horaire de 169 heures, les autres mentions de l'ancien contrat de travail étant maintenues.

La société Parinet a moins de dix salariés.

Le 5 décembre 2016, le commissaire aux comptes de la société Parinet a alerté les dirigeants de la société sur des anomalies de comptabilité.

Le 26 janvier 2017, M. [L] saisit le conseil de prud'hommes de Bobigny, aux fins de voir notamment prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et condamner la société Parinet à lui payer diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par lettre recommandée du 26 janvier 2017, la société convoque M. [L] à un entretien préalable pour le 7 février 2017, avec mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre recommandée en date du 3 mars 2017, il est licencié pour faute lourde.

Le 24 février 2017, la société Parinet a déposé une plainte simple, contre M. [L], auprès de Monsieur le Procureur de la République près du Tribunal judiciaire de Bobigny puis un complément de plainte du 2 novembre 2017.

Le 6 mars 2017, M. [L] a déposé une nouvelle requête au conseil de Prud'hommes de Bobigny afin de contester son licenciement.

Le 31 juillet 2018, la société Parinet a déposé une plainte avec constitution partie civile.

Par jugement en date du 24 mars 2021, le conseil de prud'hommes de Bobigny, a :

- Condamné la société Parinet à verser à M. [L] la somme de 15 503,49 euros au titre du solde transactionnel.

- Rappelé que les créances de nature salariale portent intérêts de droit à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation, soit le 31 janvier 2017, et les créances à caractère indemnitaire portent intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du présent jugement,

- Débouté M. [L] du surplus de ses demandes ;

- Débouté la société Parinet de sa demande reconventionnelle.

- Condamné la société Parinet aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 20 avril 2021, M. [L] a régulièrement interjeté appel du jugement.

Par ordonnance du 4 octobre 2021, le conseiller de la mise en état a désigné M. [F] [V] en qualité de médiateur et fixé ses missions. Les parties ont échoué à se rapprocher et à concilier.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Aux termes de ses uniques conclusions remises via le réseau virtuel des avocats le 29 juin 2021, M. [L] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Parinet à lui payer la somme lui restant due au titre du protocole transactionnel soit 15 503,49 euros.

- Infirmer le jugement sur le surplus,

- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date du licenciement soit le 3 mars 2017,

Subsidiairement,

- Dire et juger sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M. [L].

Statuer à nouveau,

- Condamner la société Parinet à payer à M. [L] les sommes suivantes :

* 151 087,51 euros à titre de rappel de salaire du 1er janvier 2014 au 31 janvier 2017 ;

* 15 108,75 euros au titre des congés payés afférents ;

* 14 000 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

* 14 400 euros à titre d'indemnité de congés payés ;

* 36 000 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

* 3 600 euros au titre des congés payés afférents ;

* 150 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions remises via le réseau virtuel des avocats le 23 septembre 2024, la société parisienne de nettoyage de surface Parinet, venant aux droits de la société Parinet, demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Bobigny, en ce qu'il a débouté M. [L] de ses demandes :

- à titre principal, sur la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ;

- à titre subsidiaire sur de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.

- Infirmer le jugement prud'homal précité en ce qu'il a débouté la société Parinet de ses demandes reconventionnelles.

Statuant à nouveau,

- Débouter M. [L] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société Parinet ;

- Débouter M. [L] de sa demande de contestation de son licenciement pour faute lourde.

En conséquence, débouter M. [L] de ses demandes de :

- 151 087,51 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er janvier 2014 au 31 janvier 2017 ;

- 15 108,75 euros au titre des congés payés afférents :

- 14 000 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- 14 400 euros à titre d'indemnité de congés payés ;

- 36 000 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 3 600 euros au titre des congés payés afférents :

- 150 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner M. [L] à payer à la société Parinet les sommes de :

* 1 500 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement des détournements de M. [L]

* 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 septembre 2024.

Par conclusions du 7 novembre 2024, M. [L] sollicite de la cour de :

- Révoquer l'ordonnance de clôture ;

- Réouvrir les débats ;

- Prononcer un sursis à statuer jusqu'à l'issue de la procédure pénale en cours devant Mme le juge d'instruction du tribunal judiciaire de Bobigny sous le N~ de parquet 1823300151 ;

A défaut,

- Renvoyer à une prochaine audience afin de permettre à M. [L] de conclure à nouveau.

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et, en application de l'article 455 du code de procédure civile, aux dernières conclusions échangées en appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture et le sursis à statuer

M. [L] soutient que, d'une part, sa mise en examen par le magistrat chargé de l'instruction du Tribunal judiciaire de Bobigny, sa convocation pour un premier interrogatoire pour le 22 octobre 2024 et sa convocation pour une confrontation avec le dirigeant de la société Parinet pour le 28 novembre 2024 sont des éléments nouveaux constitutifs d'une cause grave permettant de révoquer l'ordonnance de clôture et le prononcé d'un sursis à statuer.

La société Parinet est taisante sur les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture et sur le sursis à statuer

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture

L'article 803, 1er alinéa du code de procédure civile dispose que 'l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue ; la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation'.

La cour relève que, d'une part, l'ordonnance de clôture est du 24 septembre 2024 et, d'autre part, que M. [L] a été convoqué le 18 septembre 2024 par le juge d'instruction du Tribunal judiciaire de Bobigny pour un premier interrogatoire pour le 22 octobre 2024 et une confrontation avec le dirigeant de la société le 28 novembre 2024.

La connaissance de ces éléments postérieurs à l'ordonnance de clôture constitue, au regard du litige, une cause grave nécessitant la révocation de l'ordonnance de clôture.

La cour prononce, donc, la révocation de l'ordonnance de clôture.

Sur la demande de sursis à statuer

L'article 378 du code de procédure civile dispose que 'la décision de sursis suspend le cours de l'instance pour le temps ou jusqu'à la survenance de l'événement qu'elle détermine'.

En l'espèce, la cour relève que M. [L] a été licencié pour faute lourde pour des malversations qu'il aurait commises pendant la relation contractuelle, étant rappelé qu'il était directeur technique, associé à hauteur de 10% des actions et administrateur de la société Parinet.

Par ailleurs, suite à la plainte avec constitution de partie civile de la société Parinet, un juge d'instruction a été désigné et les parties ont été récemment convoquées pour leurs auditions et pour une confrontation.

La saisie de la juridiction pénale étant, aux dires de la société, en relation directe avec l'exécution du contrat de travail de directeur technique de M. [L], il y a lieu de prononcer un sursis à statuer dans l'attente de la décision pénale.

Sur les demandes accessoires

Les dépens suivent le sort de ceux de l'instance principale.

Il sera sursis à statuer sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,

PRONONCE la révocation de l'ordonnance de clôture du 24 septembre 2024.

SURSEOIT à statuer sur l'ensemble des demandes dans l'attente du devenir de la plainte avec constitution de partie civile de la société parisienne de nettoyage de surfaces Parinet, venant aux droits de la Sarl Parinet, en cours d'instruction devant le Tribunal judiciaire de Bobigny;

DIT qu'il appartiendra à la partie la plus diligente de réintroduire l'affaire au rôle de la cour sur simple requête.

RÉSERVE les dépens qui suivront le sort de ceux de l'instance principale.

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