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Décisions

CA Paris, Pôle 4 - ch. 1, 21 février 2025, n° 24/13684

PARIS

Arrêt

Autre

CA Paris n° 24/13684

21 février 2025

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 21 FÉVRIER 2025

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/13684 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJ235

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Juin 2024 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2023F01092

APPELANT

Monsieur [E] [X] né le 04 avril 1964 à [Localité 16] (Algérie),

[Adresse 15]

[Localité 5] (Algérie)

Représenté par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS- VERSAILLES- REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 assisté de Me Aude DUCRET, avocat au barreau de PARIS, toque : R049

INTIMES

Monsieur [I] [Z]

[Adresse 9]

[Localité 12]

Assignation devant la cour d'appel de Paris - Pôle 4 chambre 1- en date du 26 aôut 2024 à tiers à domicile conformément à l'article 658 du CPC

Monsieur [V] [M] né le 20 janvier 1968 à [Localité 14], (Algérie),

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représenté et assisté de Rafik RABIA, avocat au barreau de PARIS, toque : W16

S.E.L.A.R.L. ASTEREN agissant par Maître [O] [D] es qualité de liquidateur de la société Le Carrefour et prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 11]

Représentée par Me Mohammed KHAMLICHI, avocat au barreau de PARIS assistée de Me Ahlem BEN ABDERRAZAK, avocat au barreau de PARIS, toque : E 1082

S.C.I. BREMENT immatriculée auRCS de Lyon sous le numéro 914 718 259 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 7]

Assignation devant la cour d'appel de Paris - Pôle 4 chambre 1- en date du 26 aôut 2024 à étude conformément à l'article 658 du CPC

S.A.R.L. LE CARREFOUR immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 441 024 619 prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 13]

Représentée par Me Mohammed KHAMLICHI, avocat au barreau de Paris assistée de Me Ahlem BEN ABDERRAZAK, avocat au barreau de PARIS, toque :

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 octobre 2024 audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Catherine GIRARD-ALEXANDRE,conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Ange SENTUCQ , présidente de chambre

Nathalie BRET, conseillère

Catherine GIRARD- ALEXANDRE, conseillère

Greffier, lors des débats : Marylène BOGAERS.

ARRÊT :

- par défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour initialement prévue le 20 décembre 2024 prorogé au 07 février 2025 puis au 21 février 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Ange SENTUCQ , présidente de chambre et par Marylène BOGAERS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCEDURE

La SARL Le Carrefour, créée aux termes de ses statuts constitutifs en date du 2 octobre 2001 avec pour objet social l'acquisition, la prise en gérance et l'exploitation de tous fonds de commerce de débits de boissons, restaurant, prestations de services ainsi que toutes activités connexes s'y rattachant, entre Monsieur [E] [X] et Monsieur [V] [M], respectivement détenteurs de 51% et 49 % du capital social, et dont Monsieur [M] était le gérant statutaire jusqu'à la révocation de son mandat le 18 octobre 2021, était propriétaire d'un bien immobilier à usage mixte commercial et d'habitation situé au [Adresse 10] à [Localité 13] consistant en un terrain sur lequel est édifiée une propriété bâtie composée d'une boutique avec deux chambres, une cuisine, WC et cave au rez-de-chaussée, un appartement de type 1 au 1er étage et trois boxes dans la cour.

Une promesse unilatérale de vente sous conditions suspensives portant sur ce bien immobilier a été conclue par acte notarié du 15 juin 2017 entre la SARL Le Carrefour et la société Vinci Immobilier Résidentiel, qui a fait l'objet de trois avenants les 23 mars 2018, 20 décembre 2018 et 11 mars 2019.

Arguant d'une perte de confiance à l'égard du gérant notamment en raison de la falsification alléguée du procès-verbal d'assemblée générale l'ayant autorisé à vendre le seul actif de la société, Monsieur [X] a obtenu, par ordonnance du président du tribunal de commerce de Bobigny en date du 5 mars 2021, la désignation d'un administrateur ad'hoc de la SARL Le Carrefour afin de convoquer une assemblée générale aux fins de révocation éventuelle du mandat de gérant de Monsieur [M] et désignation d'un nouveau gérant, ce qui a été fait aux termes de l'assemblée générale susmentionnée du 18 octobre 2021 qui a désigné Monsieur [I] [Z] en qualité de gérant.

Suivant acte authentique en date du 26 septembre 2022, la SARL Le Carrefour, représentée par Monsieur [Z], a vendu à la SCI Brément le bien immobilier susvisé, pour le prix de 835.000 € payable en totalité au plus tard le 25 septembre 2028 au moyen de deux échéances, soit à concurrence de 435.000 € au plus tard le 25 septembre 2025 et de 400.000 € au plus tard le 25 septembre 2028, sans intérêts et sans inscription de l'hypothèque légale spéciale du vendeur et de l'action résolutoire sur dispense expresse du notaire par le vendeur.

Monsieur [M] a fait assigner par actes d'huissier séparés en date des 7 mars, 8 mars, 28 mars, et 3 avril 2023 Monsieur [Z], Monsieur [X], la SARL Le Carrefour et la SCI Brément, devant le tribunal de commerce de Bobigny aux fins, à titre principal, de voir annuler la délibération du 13 juin 2023 autorisant la vente du bien immobilier et annuler l'acte de cession immobilière du 26 septembre 2023 intervenu entre la SCI Brément et la société Le Carrefour, à titre subsidiaire d'ordonner une mesure d'expertise pour apprécier la lésion de 7/12 du prix, et en tout état de cause de voir condamner solidairement Monsieur [X], Monsieur [Z] et la SCI Brément à lui payer la somme de 835.000 € à titre de dommages et intérêts.

Monsieur [M] ayant été désigné à nouveau gérant de la SARL Le Carrefour par une assemblée générale du 9 novembre 2023, la société Le Carrefour a déposé également des

conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 13 juin 2022 et à l'annulation de la vente subséquente.

Monsieur [X] a soulevé une exception d'incompétence du tribunal de commerce au profit du tribunal judiciaire de Bobigny sur le fondement de l'article R211-3-26 du code de l'organisation judiciaire, qui a été rejetée par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 25 juin 2024.

Monsieur [X] a interjeté appel par déclaration du 9 aôut 2024 et a été autorisé à assigner à jour fixe par ordonnance du Premier président en date du 12 août 2024, à l'audience de la présente chambre de la cour du 16 octobre 2024.

Par ses dernières conclusions du 14 octobre 2024, Monsieur [X] demande à la cour de:

INFIRMER le jugement du Tribunal de commerce de Bobigny du 25 juin 2024 en ce qu'il n'a pas fait droit à son exception d'incompétence et l'a condamné aux dépens;

Et statuant de nouveau,

DECLARER INCOMPETENT le tribunal de commerce de Bobigny pour connaitre du litige initié par Monsieur [M] au profit du TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY;

DEBOUTER toutes demandes contraires au présent dispositif ;

CONDAMNER Monsieur [M] à payer la somme de 3000 € à Monsieur [E] [X] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER le même aux entiers dépens de l'instance.

Aux termes de ses dernières conclusions du 1er octobre 2024, Monsieur [M] demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner Monsieur [X] à lui payer la somme de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par leurs dernières conclusions du 1er octobre 2024, la SELARL ASTEREN ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Le Carrefour, désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 27 mars 2024 ayant prononcé la liquidation judiciaire de la SARL Le Carrefour et cette dernière concluent également à la confirmation du jugement, et à la condamnation de Monsieur [X] à leur verser la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [Z] assigné par acte extrajudiciaire du 26 août 2024 remis à son épouse n'a pas constitué avocat.

La SCI Brément, assigné à domicile par acte du 26 août 2024, n'a pas constitué avocat.

MOTIVATION

- Sur l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [X]

Monsieur [X] fait valoir au soutien de son exception d'incompétence fondée sur les dispositions de l'article R.211-3-26 du code de l'organisation judiciaire, que le tribunal judiciaire a compétence exclusive pour connaître des actions immobilières pétitoires, soit celles qui portent sur un bien immobilier et protègent un droit réel, et que tel est le cas d'une action en nullité d'une vente d'un immeuble dans la mesure où elle a pour conséquence la réintégration d'un bien dans le patrimoine du vendeur, donc un transfert de propriété; qu'en l'espèce, la demande principale de Monsieur [M] tend à " annuler l'acte de cession immobilière du 26 septembre 2022 '" pour vice du consentement et absence de contrepartie; que l'assignation contient deux demandes et deux parties liées distinctes, soit l'annulation de la délibération du 13 juin 2022 autorisant la vente du bien immobilier fondée sur un prétendu abus de majorité et la contrariété à l'intérêt social, et l'annulation de la vente fondée sur de prétendus "vices du consentement", " absence de contrepartie financière", "contenu illicite" et lésion; qu'en conséquence, l'objet de l'action engagée par Monsieur [M] est d'obtenir la nullité d'une vente immobilière afin que le bien immobilier réintègre le patrimoine du vendeur titulaire d'un titre de propriété antérieur, dont il entend se prévaloir, de sorte qu'il revendique donc bien l'existence d'un droit de propriété dont il a été privé ou qui lui a été nié.

Au visa de l'article L.110-1- 2° du code de commerce, il soutient par ailleurs que traditionnellement, l'acte de vente d'un bien immobilier est un acte civil par nature qui échappe à la commercialité, et ce n'est que lorsque l'achat du bien immobilier est conclu aux fins de revente avec une recherche de profit/lucrativité, donc dans le cadre d'une activité de marchand de biens qu'elle devient un acte de commerce; que tel n'est pas le cas en l'espèce, le tribunal de commerce ayant jugé à tort que la SARL Le Carrefour réalisait un acte de commerce en vendant son seul actif social dans le but de cesser toute activité et que la SCI Brément réalisait un acte de commerce alors qu'elle est une société civile exerçant une activité civile et que la seule exonération des droits de mutation est insuffisante pour la considérer comme ayant réalisé un acte de commerce; qu'en outre, le bien immobilier loué ayant été vendu à une société civile immobilière, le tribunal de commerce a jugé encore de façon erronée que le litige est une litige entre commerçants.

Monsieur [M] fait valoir que l'action qu'il a engagée n'est pas une action pétitoire dès lors qu'il n'existe ni revendication ni négation de droit de propriété, l'objet de son action étant l'annulation d'un acte juridique dont l'objet est une cession immobilière et non pas le bien immobilier sur lequel serait revendiqué un droit de propriété au détriment de la SCI Brément.

Il souligne par ailleurs que la cour relèvera avec évidence la qualité de commerçant des parties, la société Le Carrefour étant une société commerciale (SARL) régie par le code de commerce et exerçant une activité commerciale d'acquisition et vente de tout bien immobilier, et la société Le Brément une société civile immobilière ayant un objet commercial, celle-ci ayant été exonérée des droits de mutation en déclarant dans l'acte de vente son activité comme étant commerciale.

La SELARL ASTEREN et la SARL Le Carrefour soutiennent en premier lieu que l'action engagée par Monsieur [M] ne vise ni à établir un droit de propriété ni à le nier, mais à obtenir l'annulation d'un acte juridique, soit la délibération autorisant la cession; que l'acte de vente dont la nullité est recherchée constitue un acte de commerce au sens de l'article L. 110-1 2° du code de commerce, le Kbis de la société Le Carrefour mentionnant une activité d'acquisition et vente de tous biens immobiliers bâtis ou non bâtis, soit une activité commerciale qui englobe l'achat pour revente, et la SCI Le Brément ayant acheté pour revendre, ce qui résulte des mentions de l'acte de vente et de l'exonération de droits de mutation dont elle a bénéficié.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article L. 211-3 du code de l'organisation judiciaire, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-22 du 23 mars 2019 (qui se borne à remplacer les termes « tribunal de grande instance » par « tribunal judiciaire »), le tribunal judiciaire connaît de toutes les affaires civiles et commerciales pour lesquelles compétence n'est pas attribuée, en raison de la nature de la demande, à une autre juridiction.

L'article R.211-3-26 5° dispose que le tribunal judiciaire a compétence exclusive notamment en matière d'actions immobilières pétitoires.

Aux termes de l'article L. 721-3 du code de commerce : " Les tribunaux de commerce connaissent :

1° Des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre artisans, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux ;

2° De celles relatives aux sociétés commerciales ;

3° De celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes.

Ce dernier texte fait ainsi reposer la compétence du tribunal de commerce sur :

un critère subjectif, celui de la qualité de commerçant de toutes les parties au litige, peu important son objet (1 ) ;

un critère objectif lorsque le litige est relatif à des actes de commerce, peu important la qualité des parties au litige (3 ),

et enfin, un critère spécifique concernant les litiges relatifs aux sociétés commerciales (2 ).

S'agissant du critère prévu au 2° de l'article L.721-3 précité, il est constant qu'il n'est dérogé à la compétence exclusive des tribunaux de commerce pour connaître de ces contestations que dans l'hypothèse où celles-ci mettent en cause une personne non commerçante qui est extérieure au pacte social et n'appartient pas aux organes de la société, auquel cas cette personne dispose du choix de saisir le tribunal civil ou le tribunal de commerce (Com., 18 novembre 2020, pourvoi n° 19-19.463; Com.,15 décembre 2021, pourvoi n° 21-11.957, 21-11.882). Il en résulte que lorsqu'un litige oppose le dirigeant ou un autre mandataire social ou l'associé d'une société commerciale à cette société ou à un autre de ses associés ou de ses mandataires sociaux et porte sur une contestation relative à cette société commerciale, il relève de la compétence exclusive du tribunal de commerce (Com., 20 décembre 2023 pourvoi n°22-11.185.)

En l'espèce, il résulte de l'assignation introductive d'instance délivrée par Monsieur [M] que celui-ci formule deux demandes principales :

la première tendant à l'annulation de la délibération de l'assemblée générale de la SARL Le Carrefour du 22 juin 2022 ayant autorisé la cession des biens et droits immobiliers détenus par elle [Adresse 10] et [Adresse 6] à [Localité 13], moyennant le prix de 835.000 € et ayant conféré tous pouvoirs à son gérant Monsieur [Z] pour signer tous actes et accomplir toutes les formalités nécessaires à ladite vente, au motif invoqué d'un abus de majorité constitué par la contrariété à l'intérêt social de la société de cet acte, consenti dans le seul intérêt de l'associé majoritaire,

la seconde tendant à l'annulation de la vente subséquente du 26 septembre 2022 entre la société Le carrefour et la SCI Brément aux motifs d'une part d'une absence de consentement ou de pouvoir en suite de la nullité de la décision ayant autorisé la vente, d'autre part de contrepartie illusoire (article 1169 du code civil) et de contenu illicite (article 1162 du code civil et L.241-3 du code de commerce punissant l'abus de bien social), et enfin pour cause de lésion de plus du 7/12 ((article 1674 du code civil).

Il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient Monsieur [X], la demande principale de Monsieur [M] n'est pas une action immobilière pétitoire, dès lors que la première demande vise la nullité de la délibération de l'assemblée générale des associés de la SARL Le Carrefour ayant autorisé la vente, qui ressort incontestablement de la compétence exclusive du tribunal de commerce par application de l'article L.721-3 2° du code de commerce et de la jurisprudence susvisée, quand bien même l'objectif final poursuivi est la nullité de la vente immobilière, pour des motifs découlant en partie au moins du succès de la première demande.

A supposer même que l'on considère la demande en nullité de la vente comme une demande principale autonome, celle-ci ne peut s'analyser en une action pétitoire laquelle s'entend de celle qui tend à faire reconnaître ou dénier un droit ou une situation juridique existante, alors que l'action en nullité vise à invalider un acte juridique en raison d'un vice ou d'une irrégularité qui l'affecte et a pour effet d'anéantir rétroactivement les effets de cet acte.

Le fait que par l'effet de la nullité, le transfert du droit de propriété se trouve rétroactivement anéanti est sans incidence sur la qualification de l'action en nullité ainsi exercée.

Enfin, l'article L.110-1 du code de commerce répute acte de commerce " tout achat de biens immeubles aux fins de les revendre, à moins que l'acquéreur n'ait agi en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les revendre en bloc ou par locaux" ce qui confère compétence au tribunal de commerce pour connaître d'une action personnelle immobilière lorsqu'elle constitue une contestation relative à un acte de commerce, peu important la qualité des personnes parties au litige.

Or, en l'espèce, la vente du 26 septembre 2022 s'analyse en un acte de commerce par nature au sens de l'article L.110-1 2° à l'égard de la SCI Brément, dont il résulte des mentions de l'acte authentique du 26 septembre 2022 qu'elle a déclaré :

être assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, dans le cadre de son activité économique et agir en tant que tel;

prendre l'engagement de revendre l'immeuble désigné ci-dessus, dans les 5 ans de la présente vente, dans les conditions prévues par l'article 1115 du Code général des impôts.

Il ne saurait être contesté au regard de ces mentions que l'élément déterminant de la qualification d'acte de commerce, soit l'intention de revendre qui fait apparaître le désir de réaliser un bénéfice qui est le propre de l'activité commerciale, fait défaut en l'espèce, la SCI Brément ayant expressément déclaré cette intention et prenant l'engagement d'y procéder dans les cinq ans de la vente.

De surcroit, Monsieur [X] qui conteste la commercialité de l'acte par rapport à l'acquéreur ne produit aucune pièce justificative permettant de prouver, contre les mentions de l'acte authentique, le caractère civil de l'acte.

Par ailleurs, il est constant qu'en application de l'article L.210-1 du code de commerce, est commerciale à raison de sa forme et quel que soit son objet une société à responsabilité limitée, et que les actes accomplis par un commerçant pour les besoins de son commerce sont commerciaux par accessoire.

La SARL Le Carrefour est une société commerciale par la forme, peu important son objet social, étant toutefois rappelé qu'aux termes de ses statuts, elle avait pour objet l'acquisition, la prise en gérance et l'exploitation de tous fonds de commerce de débits de boissons, restaurant, prestations de services ainsi que toutes activité connexes s'y rattachant, et que l'extrait Kbis à jour au 19 septembre 2022 fait mention au titre des activités principales de l'acquisition et la vente de tous biens immobiliers bâtis ou non bâtis, leur administration, leur gestion, la location, l'acquisition, et la vente de fonds de commerce.

Il ne saurait être utilement soutenu que la vente par une société commerciale de son seul et unique actif immobilier constitue un acte civil, et ce d'autant qu'il est indiqué dans l'acte de vente qu'étant soumis à l'impôt sur les sociétés, la plus-value est considérée comme un résultat de l'exercice social en cours.

En conséquence, les demandes formées par Monsieur [M] et la SARL Le Carrefour relevant bien de la compétence matérielle du tribunal de commerce, le jugement rendu par celui de Bobigny le 25 juin 2024 sera confirmé en ce qu'il a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Monsieur [X].

- Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile en première instance.

Monsieur [X], partie perdante, est condamné aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à Monsieur [M] d'une part, et la SELARL ASTEREN ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Le Carrefour d'autre part, la somme de 4.000 € chacun.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Bobigny en date du 25 juin 2024;

Condamne Monsieur [E] [X] aux dépens d'appel;

Condamne Monsieur [E] [X] à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

à Monsieur [V] [M] la somme de 4.000 €;

à la SELARL ASTEREN ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL Le Carrefour la somme de 4.000 €.

LE GREFFIER,

LA PRÉSIDENTE,

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