CA Nancy, 1re ch., 24 février 2025, n° 23/01710
NANCY
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
La Montmedienne (SCI), Le Marvillois (SAS)
Défendeur :
Gil et Associes (SAS), SMABTP (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Cunin-Weber
Vice-président :
M. Silhol
Conseiller :
M. Firon
Avocats :
Me Gerard, Me Adam, Me Guillaume, Me Dupied, Me Vasseur
EXPOSÉ DU LITIGE
La SCI la Montmédienne a entrepris la construction d'un atelier de boucherie-charcuterie avec espace de vente, destiné à être exploité par la SAS le Marvillois.
La maîtrise d''uvre a été confiée à Monsieur [C] [R], architecte.
Le 5 novembre 2018, le lot n°8 'chape/carrelage', comprenant la réalisation de la chape, l'étanchéité des sols, le carrelage et les plinthes a été confié à la SAS Gil et Associés pour un prix total de 107500 euros TTC.
Les délais de réalisation étaient fixés au 23 novembre 2018 pour la réalisation de l'isolation et de la chape, et au 1er février 2019 pour la pose des carrelages du magasin, des locaux sociaux et des locaux de travail.
Un procès-verbal de réception a été établi le 25 juin 2019 comportant des réserves sans lien avec le présent litige.
L'activité a débuté dans les lieux le 9 septembre 2019.
Le 23 octobre 2019, la SCI la Montmédienne a constaté des infiltrations d'eaux usées au niveau du caniveau et du siphon de sol de la salle de cuisson, provenant des vidanges des cuves de cuisson et des lavages. Ces eaux, infiltrées dans le plancher, s'évacuaient dans la cheminée de la salle de fumage située en-dessous, dans un local enterré.
Afin de solutionner provisoirement le problème, il a été procédé au percement de plusieurs trous dans le plancher afin de libérer le passage de l'eau.
Par acte du 18 novembre 2019, la SCI la Montmédienne a fait assigner la SAS Gil et Associés, la Société Mutuelle d'Assurance du BTP (ci-après 'la SMABTP'), assureur de la SAS Gil et Associés, ainsi que Monsieur [R] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bar-le-Duc, afin de voir ordonner une mesure d'expertise judiciaire.
Par ordonnance de référé du 28 janvier 2020, il a été fait droit à cette demande et Madame [J] [H] a été désignée pour y procéder.
L'expert a déposé son rapport en date du 28 mai 2021.
Par acte du 19 octobre 2020, la SAS Gil et Associés a fait assigner la SCI la Montmédienne devant le tribunal judiciaire de Verdun afin d'obtenir le paiement du solde du marché.
Par conclusions reçues le 18 février 2021, la SAS le Marvillois est intervenue volontairement à l'instance.
Par acte du 8 février 2022, la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois ont fait assigner Monsieur [R] devant le tribunal judiciaire de Verdun afin de voir consacrer sa responsabilité et d'indemnisation de leur préjudice. Cette instance a été jointe à l'instance principale.
Par acte du 15 avril 2022, la SAS Gil et Associés a fait assigner la SMABTP devant le tribunal judiciaire de Verdun afin de la voir condamnée à la garantir des éventuelles condamnations prononcées à son encontre. Cette instance a également été jointe à l'instance principale.
Par jugement contradictoire du 26 mai 2023, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal judiciaire de Verdun a :
- déclaré recevable l'intervention de la SAS le Marvillois,
- condamné la SCI la Montmédienne à payer à la SAS Gil et Associés la somme de 36968,23 euros au titre du solde du prix du marché de travaux,
- constaté que la chape et le carrelage réalisés par la SAS Gil et Associés sont affectés d'un désordre qui compromet la solidité de l'ouvrage, l'affecte dans l'un de ses éléments constitutifs et le rend impropre à sa destination,
- dit que ce désordre relève de la garantie décennale,
- déclaré Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés responsables in solidum des conséquences de ce désordre sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- condamné in solidum Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 10000 euros en réparation de son préjudice matériel,
- condamné la SMABTP, solidairement avec la SAS Gil et Associés, à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 10000 euros en réparation de son préjudice matériel,
- condamné la SMABTP à garantir la SAS Gil et Associés des condamnations prononcées à son encontre au profit de la SAS Gil et Associés en réparation du préjudice matériel, dans les termes et limites de la police souscrite,
- débouté la SAS le Marvillois de l'intégralité de ses demandes,
- condamné Monsieur [R] à garantir la SAS Gil et Associés et la SMABTP, son assureur, des condamnations prononcées à leur encontre, à hauteur de 50 %, au titre du préjudice matériel résultant du désordre affectant le lot n° 8, chape/carrelage,
- condamné in solidum, soit chacun pour le tout, la SAS Gil et Associés et la SMABTP, son assureur, à garantir Monsieur [R] des condamnations prononcées à son encontre à hauteur de 50 %, au titre du préjudice matériel résultant du désordre affectant le lot n°8, chape/carrelage,
- dit qu'en cas d'insolvabilité d'un des codébiteurs résultant de son placement en liquidation judiciaire, sa part sera répartie, par contribution, entre les codébiteurs solvables,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamné in solidum, soit chacun pour le tout, Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 3000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum, soit chacun pour le tout, Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés aux entiers dépens qui comprendront en outre le coût de la procédure de référé et celui de l'expertise judiciaire.
Sur la demande de la SAS Gil et Associés en paiement du solde du prix dirigée à l'encontre de la SCI la Montmédienne
Tenant compte d'un retard de neuf semaines, les premiers juges ont retenu des pénalités de retard de 6450 euros TTC.
Eu égard aux travaux non réalisés par la SAS Gil et Associés, ils ont ramené le montant du marché à la somme de 103932,38 euros TTC, duquel ils ont déduit le montant réglé de 60514,15 euros TTC et les pénalités de retard de 6450 euros TTC, pour condamner la SCI la Montmédienne à payer la somme de 36968,23 euros à la SAS Gil et Associés.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et perte de trésorerie présentée par la SAS Gil et Associés à l'encontre de la SCI la Montmédienne
Le tribunal a rejeté cette demande au motif que la SAS Gil et Associés ne démontrait pas l'existence d'un préjudice indépendant de celui résultant du retard de paiement et qu'elle ne rapportait pas la preuve de la mauvaise foi de la SCI la Montmédienne, qui n'avait suspendu son paiement qu'en raison de l'apparition de désordres.
Sur la demande d'indemnisation des préjudices consécutifs au défaut d'étanchéité du sol de la salle de cuisson
Les premiers juges ont retenu que ce désordre relevait de la garantie décennale dès lors qu'il était apparu postérieurement à la réception, qu'il n'était ni apparent, ni réservé à cette date, qu'il compromettait la solidité de l'ouvrage et le rendait impropre à sa destination.
Ils ont considéré qu'il résultait du rapport d'expertise judiciaire que la SAS Gil et Associés était parfaitement informée de la problématique du décalage des cloisons et de la présence d'une salle en sous-sol, qu'il lui appartenait en conséquence de s'informer sur la destination future du local et sur la consistance des existants sur lesquels elle intervenait, pour en conclure qu'elle ne pouvait pas se prévaloir d'un défaut d'information.
Ils ont relevé que Monsieur [R] ne contestait pas que lui soit imputée une part de responsabilité et qu'il lui incombait de concevoir un système d'étanchéité adapté aux besoins de l'activité envisagée.
Ils ont ajouté qu'il n'appartenait pas au maître de l'ouvrage, la SCI la Montmédienne, ne disposant pas de compétences particulières dans le domaine de la construction et de l'étanchéité, de donner des directives techniques au maître d''uvre ou à l'entrepreneur, soulignant qu'il était sans emport que les siphons et caniveaux de sol aient été choisis et retenus par le maître de l'ouvrage.
Le tribunal a considéré que Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés n'établissaient pas l'existence d'une cause étrangère susceptible de les exonérer, ni une immixtion fautive du maître de l'ouvrage, pour les déclarer responsables in solidum du préjudice subi par la SCI la Montmédienne.
Il a évalué le préjudice matériel de la SCI la Montmédienne à la somme de 10000 euros en tenant compte d'un montant des travaux de reprise non discuté de 8309,40 euros, du perçage de la dalle, ainsi que d'une évacuation quasi quotidienne des eaux écoulées au moyen de seaux.
Il a condamné solidairement la SMABTP et son assuré la SAS Gil et Associés à payer cette somme de 10000 euros à la SCI la Montmédienne au motif que le désordre relevait de la garantie décennale et que la compagnie d'assurance ne pouvait pas opposer à la SCI la Montmédienne les plafonds et franchises contractuels.
Sur la demande de réparation du préjudice immatériel de la SAS le Marvillois
Le tribunal a rejeté cette demande en relevant tout d'abord que la SAS le Marvillois ne produisait aucun document attestant d'une date prévue de début d'activité.
Il a ajouté qu'il résultait du courrier de Monsieur [R] du 31 juillet 2019 que le retard de la SAS Gil et Associés était de neuf semaines, et non de cinq mois et demi. Il a considéré qu'il n'était pas démontré que le retard de réalisation de ce seul lot avait, d'une part, retardé la réalisation d'autres lots et, d'autre part, retardé d'autant le début d'activité.
Le tribunal a souligné que selon le rapport d'expertise judiciaire, le désordre étant apparu très tôt après le démarrage de l'activité, il n'y avait pas eu de trouble de jouissance grâce à la solution provisoire mise en place par le maître de l'ouvrage et l'exploitant.
Il a également relevé que selon l'expert judiciaire, les travaux de reprise pouvaient être exécutés sur une courte période, notamment pendant les congés de l'entreprise.
Il en a conclu qu'il n'était pas prouvé que les retards et désordres imputables à la SAS Gil et Associés et Monsieur [R] avaient de façon certaine retardé le début de l'activité de la SAS le Marvillois et donc occasionné une perte d'exploitation.
Sur les recours en garantie
Indiquant que la stipulation de franchise en matière de garantie décennale était licite à l'égard de l'assuré, les premiers juges ont condamné la SMABTP à garantir la SAS Gil et Associés des condamnations prononcées au titre du préjudice matériel, dont à déduire la franchise de 2200 euros.
Ils ont fixé la part de responsabilité de Monsieur [R] et de la SAS Gil et Associés à 50 % chacun et ont condamné en conséquence Monsieur [R] à garantir la SAS Gil et Associés et la SMABTP à hauteur de 50 %, et la SAS Gil et Associés et la SMABTP in solidum à garantir Monsieur [R] à hauteur de 50 %.
Par déclaration reçue au greffe de la cour, sous la forme électronique, le 2 août 2023, la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois ont relevé appel de ce jugement.
Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour sous la forme électronique le 13 mars 2024 , auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois demandent à la cour, sur le fondement des articles 1103, 1217 et suivants, 1792 et suivants et 1240 du code civil, de :
- dire et juger recevable et bien-fondé l'appel interjeté par la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois,
Partant,
- réformer sinon infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :
- condamné la SCI la Montmédienne à payer à la SAS Gil et Associés la somme de 36968,32 euros au titre du solde du prix du marché de travaux,
- condamné in solidum Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 10000 euros en réparation de son préjudice matériel, et ce alors que la SCI la Montmédienne avait sollicité une condamnation à hauteur de 30000 euros,
- 'condamné la SMABTP à garantir la SAS Gil et Associés des condamnations prononcées à son encontre au profit de la SAS Gil et Associés' en réparation du préjudice matériel dans les termes et limites de la police souscrite, s'agissant d'une erreur de plume manifestement matérielle,
- débouté la SAS le Marvillois de l'intégralité de ses demandes,
- condamné in solidum soit chacun pour le tout, Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 3000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et ce alors que la SCI la Montmédienne avait sollicité une condamnation à la somme de 5000 euros,
- confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :
- déclaré recevable l'intervention de la SAS le Marvillois,
- constaté que la chape et le carrelage réalisés par la SAS Gil et Associés étaient affectés d'un désordre qui compromet la solidité de l'ouvrage, l'affecte dans l'un de ses éléments constitutifs et le rend impropre à sa destination,
- dit que ce désordre relevait de la garantie décennale,
- déclaré Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés responsables in solidum des conséquences de ce désordre sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- débouté la SAS Gil et Associés de sa demande de dommages et intérêts 'pour résistance abusive et perte de trésorerie',
- condamné in solidum, soit chacun pour le tout, Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés, aux entiers dépens qui comprendront en outre le coût de la procédure de référé et celui de l'expertise judiciaire,
Et statuant à nouveau,
- débouter la SAS Gil et Associés de l'ensemble de ses fins, moyens et conclusions, subsidiairement, limiter la condamnation de la SCI la Montmédienne au paiement de la somme de 214,87 euros TTC au titre du solde du marché de la SAS Gil et Associés,
- condamner solidairement sinon in solidum la SAS Gil et Associés, Monsieur [R] et la SMABTP à payer à la SCI la Montmédienne la somme globale de 30000 euros au titre du coût des travaux de reprise chiffrés par l'expert, ainsi que de l'ensemble des travaux provisoires qu'elle a dû effectuer pour permettre à son locataire de poursuivre son activité, ainsi que des désagréments en ayant découlé,
- condamner solidairement sinon in solidum la SAS Gil et Associés, Monsieur [R] et la SMABTP à payer à la SAS le Marvillois la somme de 736425,52 euros au titre de son préjudice économique,
- débouter la SAS Gil et Associés, la SMABTP et Monsieur [R] de l'ensemble de leurs fins, moyens et conclusions plus amples ou contraires,
- condamner solidairement sinon in solidum la SAS Gil et Associés, Monsieur [R] et la SMABTP à payer à la SCI la Montmédienne et à la SAS le Marvillois la somme de 5000 euros à chacune au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et la même somme selon les mêmes modalités au titre des frais irrépétibles d'appel,
- condamner in solidum la SAS Gil et Associés et Monsieur [R] aux entiers dépens de première instance en ce compris le coût de la procédure de référé et celui de l'expertise judiciaire,
- condamner solidairement sinon in solidum la SAS Gil et Associés, Monsieur [R] et la SMABTP aux entiers frais et dépens d'appel.
Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour sous la forme électronique le 5 septembre 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [R] demande à la cour de :
- confirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu le 26 mai 2023 par le tribunal judiciaire de Verdun,
En cas d'infirmation,
- limiter l'indemnisation du préjudice de la SCI la Montmédienne à la somme de 8309,45 euros TTC,
- ordonner un partage de responsabilité entre la société Gil et Associés, Monsieur [R] et la SCI la Montmédienne, lequel devra être largement favorable à Monsieur [R] sans pouvoir dépasser les 1/3,
- condamner in solidum les sociétés Gil et Associés et SMABTP à relever et garantir, le cas échéant, Monsieur [R] de toutes condamnations qui pourraient éventuellement intervenir à son encontre à hauteur du partage de responsabilité en raison de leurs fautes sinon implications respectives sur la base de leur responsabilité délictuelle sinon quasi-délictuelle,
- dire qu'en cas de liquidation judiciaire d'une des parties, sa quote-part devra être repartie entre les codéfendeurs condamnés in solidum et au prorata de leur part de responsabilité,
Sur le préjudice de la SAS le Marvillois,
- débouter la SAS le Marvillois de sa demande d'indemnisation,
À titre subsidiaire,
- condamner in solidum les sociétés Gil et Associés, SMABTP et SCI la Montmédienne à relever et garantir, le cas échéant, Monsieur [R] de toutes condamnations qui pourraient éventuellement intervenir à son encontre à hauteur du partage de responsabilité en raison de leurs fautes sinon implications respectives sur la base de leur responsabilité délictuelle sinon quasi-délictuelle,
- dire qu'en cas de liquidation judiciaire d'une des parties, sa quote-part devra être repartie entre les codéfendeurs condamnés in solidum et au prorata de leur part de responsabilité,
Dans tous les cas,
- condamner in solidum les défenderesses ou toute partie perdante à payer à Monsieur [R] une indemnité de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens d'appel, de première instance et celle de référé.
Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour sous la forme électronique le 19 décembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SAS Gil et Associés demande à la cour, sur le fondement des articles 1231 et suivants du code civil, de :
- constater que les travaux confiés à la SAS Gil et Associés par la SCI la Montmédienne ont été réceptionnés depuis longue date,
- constater que les travaux confiés à la SAS Gil et Associés par la SCI la Montmédienne ont permis de créer un atelier qui est actuellement exploité depuis plusieurs années par la SAS le Marvillois,
- constater que Madame [H], expert judiciaire, a confirmé que les désordres objet de sa mission étaient la conséquence d'une modification d'implantation jamais confirmée par un plan officiel ou « a minima par écrit »,
- constater que Madame [H] a homologué le chiffrage des travaux de remise en état au montant de 8309,40 euros TTC,
- constater que Madame [H] a confirmé l'absence de tout préjudice de jouissance qui aurait pu être subi par la SCI la Montmédienne ou par la SAS le Marvillois,
En conséquence,
- dire et juger que la SAS Gil et Associés était fondée à être réglée du solde de ses prestations sans qu'il ne puisse lui être imputé une quelconque part de responsabilité se rapportant aux désordres objet de la mesure d'expertise judiciaire confiée à Madame [H],
- infirmer le jugement de première instance en ce que la SCI la Montmédienne n'a été condamnée qu'à devoir verser à la SAS Gil et Associés la somme de 36968,23 euros au titre du solde du prix du marché des travaux,
Et statuant à nouveau de ce chef,
- condamner la SCI la Montmédienne à devoir verser à la SAS Gil et Associés la somme de 46985,85 euros à titre de solde de son marché,
Subsidiairement,
- confirmer le jugement de première instance en ce que la SCI la Montmédienne a été condamnée à devoir verser à la SAS Gil et Associés la somme de 36968,23 euros par application du décompte général et définitif établi et vérifié par Monsieur [R], maître d''uvre,
- infirmer par ailleurs le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Verdun le 26 mai 2023 en ce que la SAS Gil et Associés a été déclarée responsable, pour partie, de désordres et en ce qu'elle a été condamnée, in fine, à devoir s'acquitter au bénéfice de la SCI la Montmédienne de 50 % de son préjudice matériel chiffré à la somme de 10000 euros,
Statuant à nouveau de ce chef,
- débouter la SCI la Montmédienne de toutes ses demandes formulées à l'encontre de la SAS Gil et Associés,
À titre très subsidiaire,
- condamner Monsieur [R] à devoir garantir la SAS Gil et Associés de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre au bénéfice des parties adverses,
- condamner également la SMABTP à devoir garantir la SAS Gil et Associés de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au bénéfice des parties adverses,
En tout état de cause,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Verdun le 26 mai 2023 en ce que la SAS Gil et Associés a été déboutée de sa demande d'indemnisation complémentaire,
Et statuant à nouveau de ce chef,
- condamner in solidum la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois à devoir verser à la SAS Gil et Associés une indemnité d'un montant de 15000 euros à titre de dommages et intérêts, tant en raison de la résistance abusive opposée par la SCI la Montmédienne qu'en raison de l'automatique perte de trésorerie subie par la SAS Gil et Associés,
- confirmer par ailleurs le jugement de première instance en ce que la SAS le Marvillois a été déboutée de l'intégralité de ses demandes et, très subsidiairement, condamner Monsieur [R] et la SMABTP à devoir garantir la SAS Gil et Associés de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au bénéfice de la SAS le Marvillois,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Verdun le 26 mai 2023 s'agissant de la question des frais irrépétibles de défense,
Statuant à nouveau de ce chef,
- condamner in solidum la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois ainsi que Monsieur [C] [R] à devoir verser à la SAS Gil et Associés une indemnité d'un montant de 3000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à raison de la procédure de première instance et condamner in solidum la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois à devoir verser à la SAS Gil et Associés une indemnité d'un montant de 2000 euros du chef de ses frais irrépétibles d'appel,
En tout état de cause,
- débouter la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois mais aussi Monsieur [R] et le cas échéant la SMABTP de toutes leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamner enfin in solidum la SCI la Montmédienne, la SAS le Marvillois, Monsieur [R] et le cas échéant la SMABTP aux entiers dépens de première instance et condamner in solidum la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois aux dépens d'appel.
Au dernier état de la procédure, par conclusions reçues au greffe de la cour sous la forme électronique le 4 juillet 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la SMABTP demande à la cour de :
- déclarer l'appel interjeté par la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois mal fondé,
- dire et juger l'appel interjeté par la SMABTP recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement en ce qu'il a :
- déclaré Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés responsables in solidum des désordres sur le fondement de l'article 1792 du code civil,
- condamné in solidum Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 10000 euros en réparation de son préjudice matériel,
- condamné in solidum la SMABTP et la SAS Gil et Associés à garantir Monsieur [R] des condamnations prononcées à son encontre,
- condamné la SMABTP à garantir la SAS Gil et Associés des condamnations prononcées à son encontre au profit de la SAS Gil et Associés en réparation du préjudice matériel dans les termes et limites de la police souscrite,
- débouter la SCI la Montmédienne de ses demandes et subsidiairement, faire application de la franchise et déduire 2200 euros de la condamnation de la SMABTP,
- condamner Monsieur [R] à garantir la SAS Gil et Associés et partant la SMABTP de toute éventuelle condamnation au profit de la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois,
- condamner la SCI la Montmédienne à régler à la SMABTP la somme de 5000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SCI la Montmédienne en tous les dépens de première instance et d'appel dont distraction, pour ceux d'appel, au profit de la SCP Barbara Vasseur-Renaud Petit, avocats associés, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 12 novembre 2024.
L'audience de plaidoirie a été fixée au 25 novembre 2024 et le délibéré au 3 février 2025, délibéré prorogé au 24 février 2025.
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR LES DEMANDES PRINCIPALES
Sur la demande de la SAS Gil et Associés en paiement du solde du prix dirigée à l'encontre de la SCI la Montmédienne
La SCI la Montmédienne sollicite l'infirmation du jugement l'ayant condamnée à payer à la SAS Gil et Associés la somme de 36968,23 euros au titre du solde du marché, en soutenant qu'en vertu d'un décompte de Monsieur [R] du 31 juillet 2019, elle n'est redevable que de la somme de 214,87 euros TTC, en raison notamment d'acomptes payés pour un montant total de 81046,84 euros HT.
En réplique, elle sollicite la confirmation du jugement concernant les indemnités de retard en faisant notamment valoir les absences injustifiées de la SAS Gil et Associés sur le chantier.
La SAS Gil et Associés sollicite également l'infirmation du jugement et demande la condamnation de la SCI la Montmédienne à lui payer la somme de 46985,85 euros. Elle conteste les pénalités de retard pour un montant de 6450 euros TTC en prétendant qu'elle n'est pas responsable des aléas techniques, de l'absence de finition des travaux faisant l'objet d'autres lots confiés à d'autres entreprises, outre la prise en considération des intempéries. Elle affirme par ailleurs avoir toujours fait en sorte que ses travaux soient réalisés dans les délais convenus. Enfin, elle fait valoir que les relevés de situation dressés par un maître d''uvre ne valent pas justificatifs de paiement.
C'est à l'entrepreneur qu'il incombe de prouver la réalité des événements qu'il allègue pour justifier un retard qui, selon lui, ne lui est pas imputable. En l'espèce, les procès-verbaux de chantier établissent l'absence récurrente de la SAS Gil et Associés sur le chantier. Cette dernière ne rapportant pas la preuve des événements qu'elle allègue pour justifier son retard, c'est par des motifs que la cour adopte que le tribunal a à bon droit retenu un retard de neuf semaines et des pénalités de retard d'un montant de 6450 euros TTC.
Tenant compte d'un montant initial de 89583,33 euros HT, d'une déduction pour travaux non réalisés de 2973,01 euros HT, soit un montant de 86610,32 euros HT, il en résulte un montant de 103932,38 euros TTC, dont à déduire les pénalités de retard d'un montant de 6450 euros TTC, soit 97482,38 euros.
Concernant le montant réglé par la SCI la Montmédienne, en présence d'un désaccord entre le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur, un simple décompte établi par le maître d''uvre est insuffisamment probant et il incombe au maître de l'ouvrage, en application du second alinéa de l'article 1353 du code civil, de rapporter la preuve des paiements effectués. En l'espèce, la SCI la Montmédienne ne prouve nullement avoir effectué des règlements à hauteur de 81046,84 euros HT, comme mentionné sur le décompte critiqué. Le premier juge a retenu à bon droit des règlements d'un montant de 50428,46 euros HT, soit 60514,15 euros TTC. Il en résulte un montant dû de 36968,23 euros TTC.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la SCI la Montmédienne à payer la somme de 36968,23 euros à la SAS Gil et Associés.
Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et perte de trésorerie présentée par la SAS Gil et Associés à l'encontre de la SCI la Montmédienne et de la SAS le Marvillois
La SAS Gil et Associés allègue une résistance abusive de la SCI la Montmédienne, à l'origine d'une perte de trésorerie. Elle fait valoir que cette dernière ne pouvait opérer une retenue contractuelle qu'à hauteur de 5 % du marché et non retenir, à tout le moins, la somme de 36968,23 euros. Elle relève que les travaux de remise en état ont été chiffrés par l'expert judiciaire à la somme de 8309,40 euros TTC et ajoute que l'expert judiciaire a retenu une responsabilité du maître de l'ouvrage relative à la modification de l'implantation des locaux qui n'a pas été portée à sa connaissance.
L'article 1231-6 du code civil dispose : 'Les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.
Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.
Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire'.
En l'espèce, en ne faisant qu'alléguer une 'perte de trésorerie', la SAS Gil et Associés ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un préjudice indépendant du retard de paiement.
Par ailleurs, la SCI la Montmédienne n'a pas réglé les sommes demandées par la SAS Gil et Associés en raison d'une part des réserves signalées lors de la réception, puis d'autre part de l'apparition d'infiltrations d'eau. La SAS Gil et Associés ne démontre pas la mauvaise foi de la SCI la Montmédienne et le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de cette demande.
Sur l'indemnisation des préjudices résultant du défaut d'étanchéité du sol de la salle de cuisson
Sur la détermination des responsabilités
La SAS Gil et Associés conteste tout manquement à son devoir de conseil en affirmant n'avoir jamais été informée de la modification de l'implantation des locaux. Elle précise qu'aucun plan de coupe ne lui a été communiqué et qu'aucun plan ne faisait apparaître une cloison décalée. Elle en déduit que sa responsabilité ne peut pas être retenue. Elle sollicite le rejet de la demande et, à titre subsidiaire, la garantie de Monsieur [R].
La SMABTP conclut à l'absence de responsabilité de son assuré, la SAS Gil et Associés. Elle reproche à l'expert judiciaire d'avoir fait état d'un prétendu défaut de conseil de la part de cette dernière en soutenant qu'il a ainsi méconnu l'étendue de ses pouvoirs dès lors que, en application des dispositions de l'article 238 alinéa 3 du code de procédure civile, l'expert ne doit jamais porter d'appréciation d'ordre juridique.
Elle ajoute que la SAS Gil et Associés n'a jamais été informée du changement d'implantation des locaux intervenu en cours de chantier et qu'aucun plan de coupe ne lui a été communiqué.
Elle rappelle que selon l'expert, le maître de l'ouvrage aurait dû alerter la SAS Gil et Associés de la destination des locaux en raison de l'activité qui y était destinée, et notamment de la présence d'importantes quantités d'eau.
Elle souligne par ailleurs que selon l'expert judiciaire, le maître d''uvre aurait dû alerter la SAS Gil et Associés du système d'étanchéité à prévoir du fait de la modification de la configuration des lieux. La SMABTP soutient donc que la SAS Gil et Associés et elle-même doivent être mises hors de cause et, à titre subsidiaire, que la part de responsabilité de son assuré ne peut être supérieure à 10 %.
Monsieur [R] soutient que sa part de responsabilité doit être limitée à un tiers. Il fait valoir que l'imputabilité des désordres doit être répartie entre la SCI la Montmédienne qui n'a pas exprimé correctement ses besoins, la SAS Gil et Associés au titre de son devoir de conseil et lui-même au titre de son devoir de conseil. Il en conclut que 'les défenderesses' doivent être condamnées in solidum à le garantir de toute condamnation sur le fondement de leur responsabilité délictuelle, sinon quasi-délictuelle.
La SCI la Montmédienne conteste que sa responsabilité puisse être retenue, comme l'évoquait l'expert, en faisant valoir qu'elle n'est pas un professionnel de la construction et que la destination des locaux ne pouvait pas être ignorée par le maître d''uvre et par l'entrepreneur. Elle soutient que Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés avaient parfaitement connaissance des modifications d'implantation et qu'ils n'ont pas conseillé le maître de l'ouvrage à ce sujet. S'agissant de la critique adressée à l'expert qui aurait outrepassé ses fonctions, elle rétorque que cela n'empêche pas les juridictions du fond de juger comme elle l'entendent.
L'article 1792 du code civil dispose : ' Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère'.
Selon l'article 1792-1 du même code, 'Est réputé constructeur de l'ouvrage : 1° Tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage [...]'.
En l'espèce, après la signature du procès-verbal de réception le 25 juin 2019 et le début d'activité au mois de septembre 2019, il a été constaté à la fin octobre une infiltration des eaux usées issues du caniveau de sol situé dans la salle de cuisson, provenant des vidanges des cuves de cuisson et des lavages du local. Ces eaux, infiltrées dans le plancher, s'évacuaient dans la cheminée de fumage.
Selon le rapport d'expertise judiciaire, la partie d'ouvrage posant problème est située dans le local de cuisson. À cet endroit, le sol est constitué d'une part d'un dallage sur terre-plein, d'autre part d'un plancher en porte-à-faux au-dessus du local enterré situé en sous-sol. Le caniveau dans lequel se déversent les eaux de lavage et de cuisson se situe à la limite entre les deux types de planchers. L'expert a constaté, sous le plancher du local enterré, la présence de microfissures et une teinte légèrement brun orangé en sous face, laissant penser que les armatures du plancher s'oxydent déjà, ainsi que la présence de stalactites situées au centre du local enterré, indiquant que le plancher béton est déjà poreux et que les eaux sont déjà chargées en minéraux, malgré une date de construction très récente.
Ce désordre provient de l'absence d'un système d'étanchéité liquide, adapté au principe constructif existant, à savoir la présence d'un plancher intermédiaire et non plus d'un dallage sur terre-plein comme prévu initialement, cette modification d'implantation en cours de chantier n'ayant pas été suivie par la modification du système d'étanchéité. En effet, le caniveau de récupération des eaux se situe pratiquement à la jonction entre les deux systèmes constructifs (dalle sur terre-plein et plancher intermédiaire) et c'est à ce niveau que se situe le problème d'infiltration. Dans ce cas particulier, où le sol de la salle de cuisson est situé à la fois sur terre-plein et sur local enterré, il aurait fallu considérer le cas le plus défavorable et prévoir un système d'étanchéité liquide sur plancher intermédiaire (et non sur dallage) et poser un caniveau avec siphon à platine.
Ce désordre est apparu après la réception de l'ouvrage. Il n'était pas apparent à cette date et n'avait fait l'objet d'aucune réserve. En outre, il résulte du rapport d'expertise judiciaire que ce désordre, consistant en une infiltration d'eau dans le complexe du plancher bas - rez-de-chaussée, est de nature à fragiliser le plancher dans sa structure et sa solidité. Il relève donc de la garantie décennale à laquelle sont tenus, en application des dispositions de l'article 1792-1 du code civil rappelées ci-dessus, la SAS Gil et Associés et Monsieur [R]. Ces derniers ne peuvent s'en exonérer qu'en rapportant la preuve de l'existence d'une cause étrangère ou d'une immixtion fautive du maître de l'ouvrage à l'origine de ce désordre.
La SAS Gil et Associés prétend n'avoir jamais été informée de la modification de l'implantation des locaux. Cependant, il est indiqué en page 20 du rapport d'expertise judiciaire que, au cours d'une réunion d'expertise du 24 juin 2020, 'Monsieur GIL indique que des modifications de prestations de son lot ont été rapidement décidées, sur sa proposition, motivées par des modifications au niveau de l'implantation des locaux : principalement salle de cuisson et fumoir. Il est alors décidé de réaliser un système de protection sous carrelage (SPEC) pour le plancher intermédiaire du seul fumoir situé au dessus d'un local enterré, tandis que tous les autres locaux (y compris la salle de cuisson) n'en sont pas équipés car « situés sur terre plein ». Il est également décidé la pose d'un caniveau dans la salle de cuisson, alors qu'un seul siphon de sol était initialement prévu. Il n'existerait pas de descriptif contractuel de cette prestation modifiée'.
Par ailleurs, en réponse à un dire de l'avocat de la SAS Gil et Associés, l'expert judiciaire a indiqué qu'au moment du démarrage de son intervention en novembre 2018, cette dernière 'ne pouvait pas ne pas avoir pris connaissance des lieux puisqu'ils étaient déjà construits, même si les plans n'avaient pas encore été mis à jour'. Il ajoute qu'il est mentionné, dès le mois de novembre 2018 sur les comptes-rendus de chantier pour le lot n° 8 'bien prévoir l'étanchéité sur l'emprise cave', indiquant une juxtaposition de locaux au-dessus de la cave. L'expert judiciaire en conclut que 'se rendant compte d'une superposition du local de cuisson à cheval sur terre-plein et un local enterré, il aurait été du ressort de l'entreprise, qui n'est pas qu'un simple exécutant mais un spécialiste avisé et expérimenté, de soulever la problématique'. Il résulte de ces développements que lors de la réalisation de ses travaux, la SAS Gil et Associés avait connaissance de la modification d'implantation des locaux. Il lui incombait par conséquent, en sa qualité de professionnel de la construction, de s'informer sur la destination future du local et sur la consistance des existants sur lesquels elle intervenait.
Le moyen de la SMABTP, assureur de la SAS Gil et Associés, selon lequel l'expert judiciaire a méconnu l'étendue de ses pouvoirs en faisant état d'un défaut de conseil de la part de cette dernière, ne peut être retenu. En application des dispositions de l'article 238 alinéa 3 du code de procédure civile, l'expert 'ne doit jamais porter d'appréciations d'ordre juridique'.
En l'espèce, l'expert judiciaire n'a fait qu'indiquer que la SAS Gil et Associés avait nécessairement connaissance de la modification de l'implantation des locaux, pour en tirer des conséquences d'ordre technique quant à la nécessaire adaptation de sa prestation et à l'information du maître de l'ouvrage à ce sujet. L'expert judiciaire n'a donc pas porté une appréciation d'ordre juridique, n'ayant fait que des observations d'ordre pratique quant au rôle des intervenants à l'opération de construction.
S'agissant de Monsieur [R], il soutient que sa part de responsabilité doit être limitée à un tiers et ne conteste donc pas que lui soit imputée une part de responsabilité. L'expert judiciaire indique que Monsieur [R] devait attirer l'attention de la SAS Gil et Associés sur le système d'étanchéité à prévoir du fait de la modification de la configuration des lieux, ainsi que celle de la SCI la Montmédienne pour ses commandes de siphon et de caniveau.
Il incombait donc à Monsieur [R] de concevoir un système d'étanchéité adapté à la modification d'implantation des locaux et aux besoins de l'activité envisagée.
Enfin, l'expert indique : 'Il y a donc, à mon sens, à la fois une demande insuffisante de la part du maître d'ouvrage sur l'utilisation du local et des obligations qui en découlent [...]'.
Cependant, la SAS Gil et Associés et Monsieur [R] avaient connaissance de la destination des locaux et devaient donc prévoir la présence d'importantes quantités d'eau.
Par ailleurs, il n'appartenait pas à la SCI la Montmédienne, maître de l'ouvrage ne disposant pas de compétences particulières dans le domaine de la construction et de l'étanchéité, de donner des directives techniques au maître d''uvre et à l'entrepreneur. C'était au contraire à ces derniers qu'il revenait d'avertir le maître de l'ouvrage des conséquences de la modification d'implantation des locaux sur les siphons et caniveaux de sol, choisis par le maître de l'ouvrage.
Compte tenu des développements qui précèdent, Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés n'établissent pas l'existence d'une immixtion fautive du maître de l'ouvrage, ni d'une cause étrangère susceptible de les exonérer.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il les a déclarés responsables in solidum du préjudice subi par la SCI la Montmédienne.
Sur le préjudice matériel de la SCI la Montmédienne
La SCI la Montmédienne sollicite l'allocation d'une somme globale de 30000 euros, tenant compte de ses préjudices et du coût des travaux de remise en état. Elle expose avoir été contrainte, outre de réaliser des travaux provisoires, de vidanger l'équivalent de trois grands seaux d'eau tous les deux jours. Elle sollicite également à ce titre l'indemnisation du retard subi dans la prise de possession de l'immeuble. En réplique, elle expose que l'attribution de pénalités de retard ne l'empêche pas de se prévaloir de préjudices supplémentaires résultant de ce retard. Elle fait valoir un début d'activité de la SAS le Marvillois retardé de neuf semaines, cette dernière n'ayant pu commencer son exploitation que le 20 septembre 2019. Elle soutient que ce début d'activité retardé lui cause également un préjudice, en tant que propriétaire du bâtiment, car elle n'a pu en prendre possession qu'à compter du mois de septembre 2019, au lieu du mois d'avril 2019. La SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois ajoutent que le fait qu'elles aient le même représentant est sans incidence.
S'agissant du moyen opposé par la SMABTP relatif à la TVA, la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois répliquent qu'une indemnité compensatoire d'un préjudice n'est pas assujettie à la TVA et que le tribunal a estimé ce préjudice à ce montant sans considération de la déductibilité potentielle d'une partie de cette somme.
Monsieur [R] considère que la SCI la Montmédienne ne justifie pas d'un préjudice à hauteur de 30000 euros, le devis des travaux étant de 8309,40 euros TTC.
La SAS Gil et Associés rappelle que les travaux de remise en état ont été chiffrés par l'expert à la somme de 8309,40 euros TTC après débat contradictoire. Elle expose que l'exploitation des locaux ne relevait pas de la SCI la Montmédienne, mais de la SAS le Marvillois.
La SMABTP soutient que la SCI la Montmédienne doit justifier qu'elle n'est pas assujettie à la TVA pour pouvoir prétendre à une indemnisation TTC. Elle relève que cette dernière ne conteste pas ne pas être assujettie à la TVA et en conclut qu'elle n'a droit qu'à une indemnité hors taxes.
Elle retient de ce fait le montant de 6924,50 euros HT pour le coût des travaux dont elle déduit sa franchise de 1100 euros, doublée puisque s'agissant d'un sinistre de première année suivant réception, soit 2200 euros, franchise qu'elle considère comme opposable aux tiers lésés conformément à l'article L. 112-6 du code des assurances, soit un préjudice de 4724,50 euros.
Enfin, la SMABTP sollicite l'infirmation du jugement qui, selon elle, a condamné deux fois la SAS Gil et Associés à verser 10000 euros au titre du préjudice matériel de la SCI la Montmédienne, une fois in solidum avec Monsieur [R] et l'autre fois avec elle.
À titre infiniment subsidiaire, la SMABTP sollicite la garantie de Monsieur [R].
Si la SCI la Montmédienne pourrait effectivement solliciter l'indemnisation d'un préjudice causé par le retard, en sus de la somme calculée au titre des pénalités de retard, c'est à la condition de démontrer l'existence d'un préjudice personnel et certain. Les appelantes sollicitent l'indemnisation du préjudice subi par la SAS le Marvillois du fait du retard, dès lors que c'est cette dernière qui exploite un commerce dans les locaux souffrant de désordres. La SCI la Montmédienne n'explique nullement en quoi, en tant que propriétaire, elle subirait elle-même un préjudice du fait de ce retard. Ce chef de demande ne sera donc pas retenu.
Il résulte du rapport d'expertise judiciaire que les travaux de reprise, acceptés par les parties, consistent en la création d'un cuvelage sur une zone restreinte autour du caniveau d'évacuation des eaux usées. Ils ont fait l'objet d'un devis de la part de la SAS Gil et Associés d'un montant de 8309,40 euros TTC. Cette somme ne résultant pas d'une facture et donc de frais effectivement supportés par la SCI la Montmédienne, au sujet desquels il pourrait éventuellement être tenu compte d'une déductibilité de la TVA, il y a lieu d'en tenir compte en tant qu'élément d'appréciation du préjudice global, comportant également le perçage de la dalle, ainsi que l'évacuation régulière des eaux écoulées au moyen de seaux. En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum la SAS Gil et Associés et Monsieur [R] à payer une somme totale de 10000 euros à la SCI la Montmédienne.
S'agissant de la SMABTP, elle sera condamnée solidairement avec son assuré, la SAS Gil et Associés, étant relevé que, s'agissant d'une assurance obligatoire, elle ne peut pas opposer à la SCI la Montmédienne les plafonds et franchises contractuels.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné solidairement la SMABTP et la SAS Gil et Associés à payer la somme de 10000 euros à la SCI la Montmédienne.
En revanche, le jugement sera infirmé en ce qu'il a cumulativement :
- condamné in solidum Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 10000 euros en réparation de son préjudice matériel,
- condamné la SMABTP, solidairement avec la SAS Gil et Associés, à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 10000 euros en réparation de son préjudice matériel,
ce qui aboutit à une double indemnisation du même préjudice matériel à la charge de la SAS Gil et Associés.
Statuant à nouveau, Monsieur [R], la SAS Gil et Associés et la SMABTP seront condamnés à payer à la SAS Gil et Associés la somme de 10000 euros en réparation de son préjudice matériel, cette condamnation étant prononcée solidairement entre la SAS Gil et Associés et la SMABTP, et in solidum entre Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés.
Sur la demande d'indemnisation du préjudice de la SAS le Marvillois
Les appelantes soutiennent que la SAS le Marvillois n'a pu commencer l'exploitation que le 20 septembre 2019, au lieu du mois d'avril 2019 et qu'il en résulte une perte d'activité de cinq mois et demi.
Elles précisent que la SAS le Marvillois agit sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle, qu'il est indifférent que cette dernière et la SCI la Montmédienne aient le même représentant, tout comme le fait que la SAS le Marvillois n'ait pas été partie aux opérations d'expertise.
Se fondant sur une attestation de son expert-comptable, tenant compte d'un taux de marge brute de 45,68 %, la SAS le Marvillois allègue un préjudice mensuel de 98190,07 euros, soit un montant total de 540045,38 euros.
Elle prétend que les premiers juges ont considéré à tort que le retard n'était que de neuf semaines, durée qui n'a été retenue par l'expert que pour le retard de la SAS Gil et Associés alors qu'il a été nécessaire de faire appel à une autre société pour achever les travaux. Elle affirme que le tribunal ne pouvait sans se contredire retenir l'existence d'une impropriété à destination pour finalement écarter de la période d'indemnisation la période postérieure à la réception du lot confié à la SAS Gil et Associés, qui a été nécessaire pour rendre l'ouvrage propre à son exploitation.
La SAS le Marvillois ajoute deux mois supplémentaires d'indemnisation, soit un mois durant lequel le fumoir était inutilisable, outre deux semaines pour la réalisation des travaux de reprise.
Elle conteste l'affirmation selon laquelle les travaux de reprise pourraient être réalisés durant la période de congé de l'entreprise au regard de la réalité d'une période de fermeture.
Elle ajoute que la remise en service d'un fumoir obsolète n'était pas une solution satisfaisante, mais seulement une contrainte.
La SAS Gil et Associés rétorque que la SAS le Marvillois n'était pas partie aux opérations d'expertise judiciaire et que si elle y était intervenue, l'expert aurait fait appel à un sapiteur expert-comptable. Elle soutient que l'attestation de son expert-comptable est insuffisante pour démontrer la réalité et le quantum de son préjudice.
Elle relève que l'année 2021 faisait suite à la crise sanitaire et à la période de confinement, ayant eu pour effet une modification des habitudes des Français, notamment leurs pratiques alimentaires.
Elle approuve le tribunal ayant considéré qu'il n'était pas démontré en quoi le retard de réalisation de son lot aurait retardé les autres lots et le début d'activité.
Elle rappelle la solution provisoire mise en place consistant en la remise en fonction d'un fumoir et reproche à la SAS le Marvillois de ne pas produire d'éléments comptables précis.
Elle indique enfin que dans l'hypothèse d'un préjudice établi, la SAS le Marvillois aurait été fondée à rechercher la responsabilité de son bailleur.
La SMABTP relève tout d'abord que la SAS le Marvillois ne précise pas le fondement juridique de sa demande. Elle indique que la garantie décennale ne profite qu'au maître de l'ouvrage et que la SAS le Marvillois doit donc rapporter la preuve d'une faute liée aux désordres et d'un lien de causalité.
Elle soutient que le préjudice économique allégué n'est pas consécutif aux désordres.
Elle relève que le contrat de bail a une date d'effet fixée à septembre 2019, ce qui correspond au commencement de l'activité, et que la SAS le Marvillois ne peut donc faire valoir un préjudice économique lié à une perte d'activité de cinq mois et demi entre avril 2019 et septembre 2019.
Elle rétorque par ailleurs que le chiffre d'affaires a pu augmenter du fait de la fermeture de deux autres établissements en 2020 et 2021, concentrant l'activité sur celui de [Localité 3].
Elle reproche à la SAS le Marvillois de ne produire aucun document comptable au soutien de sa demande, l'attestation établie par son expert-comptable étant insuffisante.
Elle approuve le jugement ayant constaté qu'aucun document ne justifiait une date de début d'activité et le rapport d'expertise judiciaire n'ayant retenu aucune période d'inactivité, la durée des travaux étant de seulement 8 jours, et donc réalisables sur une période de congés.
Elle souligne que le bail de la SAS le Marvillois a commencé après l'achèvement des travaux et que cette dernière n'avait donc aucun titre sur le local durant la période alléguée de son préjudice.
Elle fait valoir que les exclusions de garanties stipulées aux articles 29.15 à 29.18 des conditions générales sont opposables en application de l'article L. 112-6 du code des assurances.
La SMABTP considère que l'imputabilité du prétendu préjudice de la SAS le Marvillois est entièrement fondée sur le rapport d'expertise judiciaire, alors que cette dernière n'était pas partie à cette expertise judiciaire.
Elle ajoute qu'à supposer qu'un préjudice distinct soit démontré, les pénalités de retard devraient être soustraites, puisqu'elles visent justement à réparer un tel préjudice.
Elle fait encore valoir le plafond de 500000 euros par sinistre et la franchise de 1100 euros.
Monsieur [R] soutient que le préjudice économique de la SAS le Marvillois n'est pas justifié, que cette demande ne repose sur aucun fondement juridique et qu'en tout état de cause, elle doit rapporter la preuve d'une faute et d'un lien de causalité.
Il relève que le bail a une date d'effet fixée à septembre 2019 et qu'il n'existe donc aucune perte économique.
Il conteste le calcul présenté pour justifier de ce préjudice économique en relevant qu'il s'agit d'une simple évaluation et qu'à la date du 30 juin 2021, le chiffre d'affaires a pu augmenter du fait de la fermeture de deux autres établissements en 2020 et 2021, concentrant l'activité sur celui de [Localité 3].
Il soutient par ailleurs que ce préjudice économique n'est pas démontré, en l'absence de production de documents comptables, l'attestation établie par l'expert-comptable étant insuffisante. Il produit quant à lui les bilans comptables de la SAS le Marvillois.
Selon l'article 1240 du code civil, 'Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer'.
Un manquement de nature contractuelle est susceptible de constituer une faute de nature délictuelle pouvant engager la responsabilité du contractant à l'égard d'un tiers ayant subi un préjudice de ce fait, dès lors qu'il établit la preuve de cette faute, de son préjudice et du lien de causalité certain et direct entre les deux.
En vertu de l'article 9 du code de procédure civile, 'Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention'.
En l'espèce, le fait que la SAS le Marvillois n'ait pas été partie aux opérations d'expertise ne l'empêche pas d'utiliser le rapport d'expertise judiciaire, réalisé de façon contradictoire entre toutes les autres parties à la procédure.
Néanmoins, elle ne démontre pas que son activité devait démarrer au mois d'avril 2019. En effet, la seule pièce produite à ce sujet, son inscription au registre national des entreprises, n'a pas de valeur probante à cet égard en ce qu'il n'est nullement établi à quelle date et dans quelles circonstances la SAS le Marvillois a mentionné le 16 avril 2019 en tant que date de début d'activité.
Ensuite, elle n'explique pas en quoi le retard allégué d'avril à septembre 2019, antérieur aux infiltrations apparues à la fin du mois d'octobre 2019, pourrait être imputable à Monsieur [R].
Concernant cette période antérieure aux infiltrations, les premiers juges ont à bon droit relevé qu'il résultait du courrier de Monsieur [R] du 31 juillet 2019 que le retard de la SAS Gil et Associés était de neuf semaines, et non de cinq mois et demi. Ils ont exactement souligné qu'il n'était pas démontré que le retard de réalisation de ce seul lot avait, d'une part, retardé la réalisation d'autres lots et, d'autre part, retardé d'autant le début d'activité de la SAS le Marvillois.
S'agissant de la période postérieure au début des infiltrations, il résulte du rapport d'expertise judiciaire que, le désordre étant apparu très tôt après le démarrage de l'activité, il n'y a pas eu de trouble de jouissance grâce à la solution provisoire mise en place, soit le percement de trous dans le plancher du local afin d'évacuer l'eau, ainsi que la remise en service d'un autre fumoir. Dès lors, contrairement à ce que soutiennent les appelantes, il n'est pas contradictoire de retenir l'existence d'une impropriété à destination et de rejeter l'indemnisation de la période postérieure à la réception du lot confié à la SAS Gil et Associés, puisque des solutions ont été mises en place pour remédier aux désordres. Il n'est par ailleurs pas contestable que la remise en service d'un fumoir était une contrainte. Toutefois, de ce fait, la SAS le Marvillois ne rapporte pas la preuve d'un préjudice d'exploitation pendant cette période.
Par ailleurs, l'expert judiciaire a indiqué que les travaux de reprise devraient pouvoir être réalisés en huit jours, suggérant qu'ils pourraient l'être au cours d'une période de fermeture de l'établissement. Les appelantes font valoir que les premiers juges ont repris ces propos de l'expert judiciaire, 'sans même se prononcer (ce que n'a pas davantage fait l'expert) sur la réalité de périodes de fermeture de l'entreprise'. Cependant, seule la SAS le Marvillois peut donner des précisions quant à la réalité des périodes de fermeture, leurs dates, leurs durées, ce qu'elle ne fait pas. Cet argument ne peut donc pas être retenu.
Enfin, pour justifier de son préjudice allégué, la SAS le Marvillois ne produit qu'une attestation établie par son expert-comptable le 7 juillet 2021 mentionnant, pour le point de vente de [Localité 3], son chiffre d'affaires et son taux de marge brute pour l'année 2019, ainsi que pour la période du 1er janvier au 30 juin 2021. Force est de constater que cette seule attestation, émanant de son propre expert-comptable, est insuffisamment probante pour démontrer la réalité et le quantum du préjudice allégué.
Or, c'est Monsieur [R] qui produit les comptes annuels de la SAS le Marvillois desquels il résulte un chiffre d'affaires de 2004434 euros pour l'exercice arrêté au 31 décembre 2018, de 2362535 euros pour l'exercice arrêté au 31 décembre 2019, de 3036666 euros pour celui arrêté au 31 décembre 2020 et enfin de 2618107 euros pour l'exercice du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022. Étant souligné que la SAS le Marvillois a fermé deux de ses établissements en 2020 et 2021, ce qui a eu pour effet de concentrer son activité sur l'établissement de [Localité 3], puis a ouvert un nouvel établissement le 1er juillet 2021, en l'absence de pièces comptables suffisamment objectives et précises produites par la SAS le Marvillois concernant le seul établissement de [Localité 3], il ne peut être constaté aucun préjudice économique durant la période litigieuse.
En conséquence, les appelantes ne démontrent pas que les retards et désordres imputables à la SAS Gil et Associés et Monsieur [R] ont de façon certaine retardé le début de l'activité de la SAS le Marvillois et de ce fait occasionné une perte d'exploitation.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
Sur les recours en garantie
Les premiers juges ont à bon droit relevé que la stipulation de franchise en matière de garantie décennale était licite à l'égard de l'assuré. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la SMABTP à garantir la SAS Gil et Associés des condamnations prononcées au titre du préjudice matériel, dont à déduire la franchise de 2200 euros.
Au regard des manquements respectifs de Monsieur [R] et de la SAS Gil et Associés à leurs obligations contractuelles, le tribunal a exactement fixé leurs parts de responsabilité à 50 % chacun et condamné en conséquence Monsieur [R] à garantir la SAS Gil et Associés et la SMABTP à hauteur de 50 %, et la SAS Gil et Associés et la SMABTP à garantir Monsieur [R] à hauteur de 50 %.
Le jugement sera confirmé sur ces questions, sauf en ce que, dans son dispositif, il a condamné la SMABTP à garantir la SAS Gil et Associés des condamnations prononcées à son encontre au profit de la SAS Gil et Associés en réparation du préjudice matériel, dans les termes et limites de la police souscrite.
Statuant à nouveau, la SMABTP sera condamnée à garantir la SAS Gil et Associés des condamnations prononcées à son encontre au profit de la SCI la Montmédienne en réparation du préjudice matériel, dans les termes et limites de la police souscrite.
SUR LES DÉPENS ET L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE
Au regard des développements qui précèdent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné in solidum, soit chacun pour le tout, Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés aux entiers dépens qui comprendront en outre le coût de la procédure de référé et celui de l'expertise judiciaire, ainsi qu'à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 3000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois succombant dans leur recours, elles seront condamnées in solidum aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Barbara Vasseur-Renaud Petit, avocats associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elles seront en outre condamnées in solidum à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel :
- la somme de 2000 euros à la SAS Gil et Associés,
- la somme de 2000 euros à Monsieur [R].
La SCI la Montmédienne sera condamnée à payer à la SMABTP la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel, cette dernière ne dirigeant pas sa demande contre la SAS le Marvillois.
Enfin, la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois seront déboutées de leur propre demande présentée sur ce même fondement pour la procédure d'appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Verdun le 26 mai 2023 en ses dispositions contestées, sauf en ce qu'il a :
- condamné in solidum Monsieur [C] [R] et la SAS Gil et Associés à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 10000 euros en réparation de son préjudice matériel,
- condamné la SMABTP, solidairement avec la SAS Gil et Associés, à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 10000 euros en réparation de son préjudice matériel,
- condamné la SMABTP à garantir la SAS Gil et Associés des condamnations prononcées à son encontre au profit de la SAS Gil et Associés en réparation du préjudice matériel, dans les termes et limites de la police souscrite ;
Statuant à nouveau sur ces chefs de décision infirmés et y ajoutant,
Condamne Monsieur [C] [R], la SAS Gil et Associés et la SMABTP à payer à la SCI la Montmédienne la somme de 10000 euros (DIX MILLE EUROS) en réparation de son préjudice matériel, cette condamnation étant prononcée solidairement entre la SAS Gil et Associés et la SMABTP, et in solidum entre Monsieur [R] et la SAS Gil et Associés ;
Condamne la SMABTP à garantir la SAS Gil et Associés des condamnations prononcées à son encontre au profit de la SCI la Montmédienne en réparation du préjudice matériel, dans les termes et limites de la police souscrite ;
Condamne in solidum la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel :
- la somme de 2000 euros (DEUX MILLE EUROS) à la SAS Gil et Associés,
- la somme de 2000 euros (DEUX MILLE EUROS) à Monsieur [C] [R] ;
Condamne la SCI la Montmédienne à payer à la SMABTP la somme de 2000 euros (DEUX MILLE EUROS) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;
Déboute la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois de leur demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;
Condamne in solidum la SCI la Montmédienne et la SAS le Marvillois aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Barbara Vasseur-Renaud Petit, avocats associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par