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Décisions

CA Nîmes, 4e ch. com., 28 février 2025, n° 24/01964

NÎMES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

In Extenso Provence (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Codol

Conseillers :

M. Maitral, Mme Vareilles

Avocats :

Me Collion, Me Floutier, SCP Fontaine et Floutier Associes, Me Simon, SELARL Simon Avocat, Me Signorile

T. com. Avignon, du 18 juin 2021, n° 201…

18 juin 2021

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 29 juillet 2021 par Monsieur [V] [B] à l'encontre du jugement rendu le 18 juin 2021 par le tribunal de commerce d'Avignon dans l'instance n° RG 2014009604 ;

Vu l'arrêt du 14 septembre 2022 rendu par la 4ème chambre commerciale de la cour d'appel de Nîmes dans l'instance n° RG 21/02962 ordonnant le retrait de l'affaire du rôle des affaires de la cour d'appel de Nîmes ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 19 décembre 2024 par Monsieur [V] [B], appelant, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 1er octobre 2024 par la SAS In Extenso Provence, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu l'ordonnance du 3 octobre 2024 de clôture de la procédure à effet différé au 23 janvier 2025.

***

Le 31 mars 2011, Monsieur [V] [B] et la société In Extenso Provence (IEP) ont conclu une convention de prestations aux termes de laquelle Monsieur [B] confiait à son prestataire, la sous-traitance de l'activité de commissariat aux comptes qu'il exerçait dans le secteur d'[Localité 4] concernant des dossiers listés en annexe 1.

Le 29 juin 2011, la société Cabinet [V] [B] et le prestataire ont conclu une convention de cession de clientèle portant sur l'activité d'expertise comptable pour un prix de 188.275 euros entraînant le transfert de la clientèle du cabinet, des salariés ainsi que de la cession des locaux professionnels.

Par courrier adressé le 10 novembre 2012, Monsieur [B] s'ouvre auprès du prestataire de difficultés apparues dans le cadre de la convention de prestations, notamment liées selon lui à sa non-conformité à l'avis du H3C du 24 juin 2010, à des insuffisances de la part de l'intimée dans l'exécution des prestations et à la juste répartition des tâches et des revenus entre les équipes de l'intimée. Il propose la correction de certaines dispositions du contrat de manière à rééquilibrer trois points :

Respect de l'ensemble des normes d'exercice professionnel (NEP) ;

Se donner les moyens d'une transmission à terme ;

Rééquilibrage financier induit par un engagement obligatoire a minima.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 20 juillet 2013, Monsieur [B] indique avoir décidé de mettre un terme à la convention de prestation portant sur la sous-traitance de missions de commissariat aux comptes avec prise d'effet au 31 décembre 2013.

La société In Extenso Provence conteste les conditions de cette résiliation réclamant le paiement de certaines factures restées impayées et les parties décident d'initier une procédure d'arbitrage. Le tribunal arbitral n'a pas pu être constitué et la société In Extenso Provence décide alors unilatéralement de dénoncer le jeu de la clause compromissoire.

Par arrêt du 19 septembre 2019, la cour d'appel de Nîmes, réformant le jugement rendu le 23 février 2018 par le tribunal de commerce d'Avignon, dit que la clause d'arbitrage est inapplicable et l'action de la société In Extenso recevable sans accueillir la demande d'évocation de l'affaire.

***

Par jugement du 18 juin 2021, le tribunal de commerce d'Avignon a :

condamné l'appelant à payer à l'intimée la somme totale de 180.399,66 euros TTC représentant les factures 004/2012 du 30 septembre 2012 d'un montant de 62.626,15 euros, 001/2013 du 15 mars 2013 d'un montant de 44.990,93 euros et 002/2013 du 18 décembre 2013 d'un montant de 72.782,58 euros,

jugé bien fondé le non-renouvellement de la convention de prestations de sous-traitance dénoncée le 20 juillet 2013, déboutant ainsi l'intimée de la demande en paiement de la somme de 117.773,51 euros en réparation du préjudice né de l'utilisation abusive de la faculté de résiliation de la convention;

débouté la société intimée de ses demandes aux fins d'annulation de la convention de cession de clientèle d'expertise-comptable et de condamnation du cabinet [V] [B] à reverser le prix de cession de 188.275 euros lui restituant les éléments reçus ainsi que le transfert des contrats de travail ;

condamné l'appelant au paiement de la somme de 8.000,00 euros à l'intimée, à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné l'appelant aux dépens, dont ceux de greffe, liquidés, s'agissant du seul coût du présent jugement, à la somme de 93,60 euros TTC.

Monsieur [V] [B] a relevé appel de ce jugement pour le voir infirmer, annuler, ou réformer en ce qu'il a condamné Monsieur [B] à payer à la société In Extenso Provence la somme de 180.399,66 euros, outre 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et les entiers dépens.

Après retrait du rôle à la demande des parties, l'affaire a été réinscrite le 10 juin 2024.

Dans ses dernières conclusions, Monsieur [V] [B], appelant, demande à la cour, au visa de l'article 1117 du code civil, et de l'avis du H3C du 24 juin 2010, de :

« A titre liminaire,

Juger irrecevable les demandes à l'encontre de la société FMA,

Juger irrecevable les demandes de nullité de la convention de cession de clientèle,

Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce d'Avignon le 18 juin 2021 en ce qu'il a condamné Monsieur [V] [B] à payer à In Extenso Provence la somme de 180.399,66 euros, outre 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens

Par conséquent, statuant de nouveau,

A titre principal,

Juger l'absence de conformité de la convention de prestations à l'avis du H3C du 24 juin 2010 ;

Juger la nullité de la convention de prestations,

Débouter la société In Extenso Provence, de l'ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire,

Juger que les trois factures produites par IEP ne constituent pas des créances certaines, liquides et exigibles.

Rejeter toutes les demandes d'IEP au titre de la convention de prestations ;

En tout état de cause,

Soustraire aux condamnations la somme de 47.520 euros TTC correspondant aux prestations réalisées par Monsieur [V] [B] au cours des exercices 2012 et 2013

Soustraire aux condamnations la somme de 53.036,80 euros TTC correspondant aux mauvaises prestations réalisées par In Extenso Provence dans le cadre de l'exécution de la convention de sous-traitance de missions de commissariat aux comptes.

Condamner IEP au paiement d'une somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner IEP aux entiers dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile. ».

Au soutien de ses prétentions, Monsieur [V] [B], appelant, expose que la société [V] [B] et Associés ( FMA) a été mise hors de cause en première instance, que seul Monsieur [V] [B] a interjeté appel et que la société In Extenso Provence (IEP) n'a pas formé d'appel incident. La société FMA n'étant pas partie à la procédure d'appel, Monsieur [B] en déduit que la demande de nullité pour dol de la convention de cession de clientèle est irrecevable, pour avoir été conclue entre les sociétés IEP et FMA.

Il se prévaut à titre principal de la nullité du contrat de sous-traitance liée au non-respect du cadre légal du commissariat aux comptes par la convention de prestations ce que révèle l'avis du H3C. Il critique le jugement qui a n'a retenu qu'un caractère consultatif à cet avis alors qu'il doit être suivi sous peine de sanction. Monsieur [B] indique avoir été confronté à des procédures disciplinaires et pénales motivées entre autres par le non-respect des règles relatives à la collaboration externe au regard de l'avis du H3C du 24 juin 2010. Il affirme que les normes d'audit ou normes d'exercice professionnel constituent l'ensemble des règles auxquelles se réfère le commissaire aux comptes dans l'exercice de ses missions et que ces normes accèdent au statut d'arrêté ministériel, ce qui les rend opposables aux tiers. Monsieur [B] fait valoir que la convention de prestations n'est pas conforme comme le souligne l'avis du H3C rendu le 24 juin 2010 en l'absence de la répartition des travaux confiés au professionnel et aux conditions de réalisation de ces derniers et explique que la rémunération des dossiers ne témoignait d'aucune répartition entre l'appelant et l'intimé. Le refus opposé par le prestataire quant à la mise en conformité de la convention, proposée par l'appelant le 10 novembre 2012, justifie donc, selon lui, le non-paiement de factures qui ne prenaient pas en compte les exigences posées dans l'avis du H3C et qu'il soit mis un terme à la convention dans les formes contractuellement prévues, avec information délivrée à la compagnie régionale.

Il rappelle à cet égard qu'un premier contrôle exercé fin 2011 par la compagnie régionale des commissaires aux comptes lui imposait de mettre en application les Normes d'Exercice Professionnel (NEP)et de matérialiser la supervision des travaux faits par les collaborateurs ; il s'est vu ainsi signifier un avertissement le 10 janvier 2012. Un second contrôle était prévu pour la fin d'année 2013.

Sous la menace d'une sanction si le deuxième contrôle prévu n'était pas satisfaisant, et compte-tenu du refus opposé par le prestataire de mise en conformité de la convention à l'avis émis par le H3C, alors qu'il devait faire le constat de l'insuffisance de la prestation confiée à la société IEP, Monsieur [B] prétend qu'il n'avait pas d'autre choix que dénoncer la convention pour reprendre le suivi des dossiers. Il conclut ainsi à la nullité de l'engagement.

A titre subsidiaire, Monsieur [B] expose que le contrat de sous-traitance n'a pas été parfaitement exécuté, que les trois factures pour un montant total de 180 399,66 euros ne respectent pas les termes de la convention, en particulier son article 7.1 et que lui-même a passé du temps pour superviser les travaux, ce dont il doit être convenablement indemnisé.

Il indique que la piètre qualité de la prestation confiée à l'intimée l'a exposé à des recommandations émises le 14 novembre 2013 par la chambre régionale des commissaires aux comptes (CRCC), à une convocation suivie d'une lettre de reproches du parquet général.

Il précise que si la convention a été signée en mars 2011, la question des commissariats aux comptes n'a été abordée et réglée entre les parties qu'au cours de l'année 2012. Eu égard au refus de modification de la convention par la société IEP, il n'a eu d'autre choix que de dénoncer cette convention dans le délai de préavis de 3 mois, en septembre 2013, privant ainsi la rupture de tout caractère abusif.

Il réfute avoir bénéficié d'une quelconque marge et il demande à ce que les honoraires de la société IEP soient réduits en raison de la mauvaise qualité de son travail.

Dans ses dernières conclusions, la société In Extenso Provence (IEP), intimée, demande à la cour de :

« Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné Monsieur [V] [B] au paiement de la somme de 180.399,66 euros TTC, représentant les factures 004/2012 du 30 septembre 2012, d'un montant de 62.626,15 euros (PJ 12) ; 001/2013 du 15 mars 2013 d'un montant de 44.990,93 euros (PJ 13) ; et 002/2013 du 18 décembre 2013 d'un montant de 72.782,58 euros (PJ 14),

Réformer la décision entreprise en ce qu'elle a écarté :

1/ La demande de condamnation de Monsieur [B] sur le fondement des articles 1231-1 et 1231-2 du code civil, au paiement de la somme de 117.773,51 euros en réparation du préjudice que l'utilisation abusive de la faculté de résiliation de la convention de prestation a fait subir à la SAS IEP,

2/ La demande de condamnation de la SARL FMA, sur le fondement de l'article 1110 ancien (1132 et 1133 nouveaux) du code civil, prononcer l'annulation de la cession des éléments transmissibles, corporels et incorporels, de l'activité d'expertise comptable de la SARL FMA à la SAS IEP, le dol commis par Monsieur [B] qui, en même temps, était et demeure le représentant légal de la SARL FMA, soit la rupture fautive de la convention de prestations, prive ladite cession de tout consentement utilement donné par la SAS IEP, et de toute cause, et consécutivement la condamner à reverser à la SAS IEP le prix de ladite cession de 188.275,00 euros, la SAS IEP lui restituant de son côté les éléments reçus, le transfert des contrats de travail faisant partie des conséquences de l'annulation.

Condamner Monsieur [B],

Sur le fondement des articles 1101, 1134 ancien (1103 nouveau) et 1135 ancien (1194 nouveau) du code civil, au paiement de la somme de 180.399,66 euros TTC représentant les factures 004/2012 du 30 septembre 2012, d'un montant de 62.626,15 euros ; 001/2013 du 15 mars 2013 d'un montant de 44.990,93 euros ; et 002/2013 du 18 décembre 2013 d'un montant de 72.782,58 euros,

Sur le fondement des articles 1231-1 et 1231-2 du code civil, au paiement de la somme de 117.773,51 euros en réparation du préjudice que l'utilisation abusive de la faculté de résiliation de la convention de prestation a fait subir à la SAS IEP,

Concernant la SARL FMA,

Sur le fondement de l'article 1110 ancien (1132 et 1133 nouveaux) du code civil, prononcer l'annulation de la cession des éléments transmissibles, corporels et incorporels, de l'activité d'expertise comptable de la SARL FMA à la SAS IEP, le dol commis par Monsieur [B] qui, en même temps, était et demeure le représentant légal de la SARL FMA, soit la rupture fautive de la convention de prestations, prive ladite cession de tout consentement utilement donné par la SAS IEP, et de toute cause,

Consécutivement la condamner à reverser à la SAS IEP le prix de ladite cession de 188.275,00 euros, la SAS IEP lui restituant de son côté les éléments reçus, le transfert des contrats de travail faisant partie des conséquences de l'annulation,

Condamner Monsieur [B] au paiement de la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ».

Au soutien de ses prétentions, la société In Extenso Provence, intimée, expose que Monsieur [B] a rompu abusivement la convention de prestation, rappelant que ce dernier a encaissé la somme de 180.399,66 euros qu'il a facturé aux clients pour les prestations effectuées par IEP démontrant par la même que le prestataire a bien rempli ses engagements.

Elle allègue que, dans un premier temps, Monsieur [B] a tenté de remettre en cause la convention par le biais d'une offre de révision au prétexte de défaillances sur les compétences mises en 'uvre, sous menace d'une résiliation anticipée. Elle qualifie l'avertissement de novembre 2011 de fantomatique, car jamais produit. La société IEP a refusé les modifications du contrat tenant notamment à la nouvelle facturation proposée, et a contesté les critiques formées à l'encontre de son travail en lien avec le non-respect des NEP, ce qui a entraîné la dénonciation de l'accord par Monsieur [B].

Le prestataire considère que cette rupture est fautive et brutale car son refus de modifier la convention initiale, était légitime face aux demandes exorbitantes et unilatérales proposées plus de 18 mois après la conclusion de la convention , mais également au regard d'une parfaite exécution de sa prestation, et compte-tenu du positionnement de Monsieur [B] qui a tenté d'imposer de nouvelles conditions à son avantage en menaçant le prestataire de faire usage de cette faculté de dénonciation. Il qualifie ce chantage de man'uvres dolosives. Si Monsieur [B] pouvait dénoncer la convention, celle-ci devait se faire dans le respect de l'article 1195 du code civil rappelant qu'aucune clause du contrat ne prévoyait une faculté unilatérale de résiliation de sorte que l'usage abusif de cette clause détournée de sa finalité rend la rupture de la convention fautive. La société IEP considère que son préjudice est d'au moins l'équivalent d'une année d'exercice, ce qui correspond à une somme de 117 773,51 euros.

La société IEP soutient que la rupture fautive de la convention prive la cession de clientèle de tout consentement utilement donné et, sur le fondement de l'article 1116 du code civil, conclut à l'annulation de la cession des éléments transmissibles corporels et incorporels de l'activité d'expertise comptable de la société FMA. Elle affirme qu'il n'y aurait pas eu cession de la clientèle « expertise-comptable » si la convention de prestations destinée à permettre à IEP d'obtenir sa nomination de commissaire aux comptes titulaire n'avait pas été passée.

L'intimée dénonce également la mauvaise foi de Monsieur [B] qui est à l'origine de l'échec de la procédure d'arbitrage, parce qu'il n'a pas signifié dans le délai imparti le nom de son arbitre.

Ensuite, le prestataire défend la légalité de la convention de prestation de services négociée par les parties qui respecte le cadre légal du commissariat aux comptes. Selon l'intimée, le contrôleur ne dit absolument pas que la convention est contraire à l'avis donné par le H3C ni aux dispositions de l'article L 823-13 du code de commerce. La société IEP commente les points positifs et négatifs mentionnés par le contrôleur pour faire valoir que Monsieur [B] ne peut se prévaloir de ses propres fautes pour remettre en cause les conventions passées, surtout après avoir encaissé l'intégralité des honoraires résultant du travail du prestataire. Ce dernier considère que les points négatifs relevés par le contrôleur n'étaient pas de nature à compromettre le maintien des liens contractuels ou l'activité de commissariat aux comptes alors même que le signataire des mandats était Monsieur [B].

La société IEP souligne que l'appelant n'a subi aucun préjudice du chef de son intervention puisque les factures ont bien été honorées par les clients, et elle considère avoir bien rempli ses engagements compte tenu du caractère approprié des politiques et procédures du Cabinet mises en place et de leur application effective en vue de garantir la qualité et l'indépendance du contrôle légal des comptes et la conformité à la règlementation en vigueur. Elle conteste toute valeur probatoire aux pièces fournies en première instance le 20 juin 2019, aux courriers de l'avocat général du 6 octobre 2014, du procureur général du 21 novembre 2014, du syndic de la compagnie des commissaires aux comptes du 4 avril 2014 qui ne contiennent aucune référence à la période durant laquelle la société IEP est intervenue.

Enfin, la société IEP tient à préciser que les mandats afférents à l'audit des comptes clos en 2011 ont été traités par ses soins, contrairement à ce qu'indique l'appelant et ont donné lieu à facturation.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur la procédure :

La société [V] [B] et Associés ( FMA), défenderesse en première instance n'a fait l'objet d'aucune condamnation. Seul Monsieur [V] [B] a interjeté appel le 29 juillet 2021 et la société In Extenso Provence (IEP) n'a pas formé d'appel provoqué. La société FMA n'étant pas partie à la procédure d'appel, la demande de nullité pour dol de la convention de cession de clientèle présentée par la société IEP est irrecevable parce qu'elle a été conclue entre les sociétés IEP et FMA.

Sur le contrat de prestation :

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 20 juillet 2013, Monsieur [B] a dénoncé la convention de prestations au motif essentiel que la société In Extenso Provence laissait l'ancien collaborateur de Monsieur [B] sans contrôle. Monsieur [B] prétend avoir dû effectuer lui-même cette mission de contrôle tout en reversant 100% des honoraires à la société In Extenso, ce qui n'est pas satisfaisant.

Monsieur [B] fait valoir une non-conformité de la convention de prestations ce qui la rend nulle.

Il se fonde sur un avis du H3C du 24 juin 2010 qui est antérieur à la convention de prestations. Cet avis envisage le recours à des experts-comptables mais précise que le commissaire aux comptes détenteur du mandat doit veiller à ce que ces collaborateurs externes accomplissent leurs travaux dans le respect des règles applicables à la profession de commissaire aux comptes, notamment du code de déontologie.

Par conséquent, le grief exposé par Monsieur [B] dans sa lettre de résiliation du contrat est inopérant car le contrôle de son ancien collaborateur lui incombe.

Le H3C est en outre d'avis que la relation contractuelle soit formalisée entre les parties et que le contrat doit prévoir l'étendue des travaux confiés au professionnel et les conditions de réalisation de ces derniers, étant précisé que le commissaire aux comptes ne peut déléguer la totalité de ses travaux.

En l'espèce, la convention de prestations stipule que le prestataire doit réaliser les travaux et mission d'audit pour des dossiers listés dans une annexe 1 à compter du 31 juillet 2011, en contrepartie du reversement des honoraires facturés au client.

Sur ce point, la convention de prestations n'est pas conforme à l'avis du H3C. Cependant, les avis du H3C n'ont pas valeur normative mais d'informations délivrées par une autorité reconnue à destination des professionnels.

Par conséquent, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a retenu que si la convention de prestations est incomplète et comporte quelques maladresses, pour autant ces inexactitudes ne peuvent remettre en cause la validité de cette convention au fond.

La résiliation du contrat doit donc intervenir dans le respect des clauses contractuelles.

Elle est fondée sur l'article 4 du contrat visé dans la lettre du 20 juillet 2013, avec application d'un délai de préavis de 3 mois. Monsieur [B] précise que le contrat aura pour terme le 31 décembre 2013.

Aux termes de cet article, la convention de prestations est conclue pour une durée initiale expirant le 31 décembre 2012, renouvelable par tacite reconduction pour de nouvelles périodes de douze mois. Une dénonciation du contrat peut être faite à l'initiative de l'une ou l'autre des parties signifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, trois mois au moins avant l'arrivée du terme.

Cette faculté de résiliation ne suppose pas la démonstration d'une faute du cocontractant. Elle résulte de la seule convenance des parties et Monsieur [B] pouvait parfaitement, au vu de l'échec de sa demande d'avenant, user de cette faculté. Il a respecté le délai de prévenance et le terme du contrat. La résiliation n'est donc pas abusive et la société IEP sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

Sur la demande en paiement de factures :

Dans le courrier de résiliation du 20 juillet 2013, Monsieur [B] conteste la facturation de la société In Extenso Provence et n'accepte de régler qu'une facture n°0042012. Il fait état d'un travail de contrôle qu'il a dû effectuer sans en être rémunéré puisque tous les honoraires perçus devaient être rétrocédés à la société IEP.

Pour justifier les divers manquements du prestataire, Monsieur [B] - dans un courrier du 10 novembre 2012 adressé à la société In Extenso Provence - fait état d'un avertissement qui lui a été délivré en 2011 par la compagnie régionale de [Localité 6] portant sur le non-respect des NEP. La Pièce 6 produite à cet effet par l'appelant consiste en un courrier du 10 janvier 2012 qui se réfère à un rapport définitif non produit et recommande à Monsieur [B] de mettre en application l'ensemble des NEP et de matérialiser la supervision des travaux réalisés par les collaborateurs.

Il n'est pas indiqué dans ce courrier sur quelle période porte le contrôle. La société IEP soutient, sans être utilement contredite que ce contrôle portait sur les missions afférentes aux exercices clos en 2010. La date du contrôle (14 novembre 2011) accrédite l'allégation de la société IEP. En outre, la société IEP a débuté sa mission le 31 juillet 2011, ce qui ne permettait pas au contrôleur de relever des dysfonctionnements sur des missions en cours depuis quelques mois seulement.

En conséquence, Monsieur [B] ne peut imputer à la société IEP une violation de ses obligations contractuelles du fait de cet avertissement.

Dans son pré-rapport de contrôle périodique de 2013 portant sur les missions exécutées en 2012, il est mentionné que les recommandations émises lors du contrôle précédent ont été largement prises en compte mais qu'il reste des diligences à accomplir sur certaines NEP. Ainsi que l'a retenu le jugement déféré, le constat de diligences non ou partiellement accompli est faible au regard de la situation de conflit larvé et des efforts déployés entre les deux contrôles.

Quant aux divers courriers communiqués par Monsieur [B] (sa pièce 13), ils se réfèrent à un rapport définitif et à une dénonciation qui ne sont pas produits, de sorte qu'ils sont dépourvus de toute valeur probatoire.

Aux termes de l'article 6.1 du contrat, Monsieur [B] doit régler immédiatement toutes les sommes restant dues au prestataire au titre du présent contrat. Les factures adressées par la société IEP sont conformes aux exigences de l'article 7.1 de la convention. Monsieur [B] conclut à une réduction du montant de ces honoraires au motif qu'il a dû consacrer un temps certain au contrôle de la prestation de la société IEP. Mais ce travail découle naturellement de sa qualité de commissaire aux comptes titulaire et le contrat, qui fait la loi entre les parties, ne prévoit pas de rémunération à ce titre. Monsieur [B], qui n'a pas respecté l'article 6.1 du contrat, doit donc payer les sommes dues à la société IEP.

Sur les frais de l'instance :

Monsieur [B], qui succombe, devra supporter les dépens de l'instance mais l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Déclare irrecevables les demandes de la société In Extenso Provence d'annulation pour dol de la convention de cession de clientèle et en restitution du prix de cession, des éléments reçus, de transfert des contrats de travail,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions déférées à la cour,

Y ajoutant,

Déboute les parties de leur demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [V] [B] aux dépens d'appel.

Arrêt signé par la présidente et par la greffière.

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