CA Amiens, ch. économique, 27 février 2025, n° 24/01910
AMIENS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
HL (SASU)
Défendeur :
Hl (SASU)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mathieu
Vice-président :
Mme Grevin
Conseiller :
Mme Dubaele
Avocats :
Me Dongmo Guimfak, Me Melin, SCP Gossard Bolliet Melin
DECISION
Par acte authentique en date du 1er février 2022, M. [G] [N] et son épouse, Mme [L] [D], ont donné à bail commercial à la société Alyiah, un local situé [Adresse 2] à [Localité 5], moyennant un loyer mensuel de 1.678,57 euros, hors charges, payable par avance.
Par acte authentique en date du 7 avril 2023, la SASU HL est venue aux droits de la société Alyiah. Aux termes du même acte la SASU HL a versé à la société Alyiah une somme de 3.186 euros, égale au montant du dépôt de garantie et M. [O] [T] s'est porté caution du paiement des loyers, charges, accessoires, intérêts, dommages et intérêts, indemnités dues au titre de stipulation de pénalité, indemnité d'occupation, et sur toutes les sommes dues en cas de condamnation judiciaire en exécution du bail.
Les époux [N] ont fait délivrer, par acte de commissaire de justice en date du 27 octobre 2023, à la SASU HL un commandement de payer visant la clause résolutoire, pour un montant de 3.522,06 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 24 novembre 2023.
Par actes de commissaire de justice des 22 et 23 janvier 2024, les époux [N] ont fait assigner la SASU HL et M. [O] [T] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Compiègne en résiliation de bail, expulsion et paiement de provision.
Par une ordonnance de référé réputée contradictoire rendue le 4 avril 2024, le président du tribunal judiciaire de Compiègne a :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail commercial en date du 1er février 2022 à la date du 28 novembre 2023 ;
- ordonné l'expulsion de la société SASU HL, celle de tous occupants de son chef et de tous les biens immobiliers des lieux situés au 45 rue Saint-Corneille à Compiègne, sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé le délai de 8 jours à compter de la signification de l'ordonnance ;
- condamné solidairement par provision la société SASU HL et M. [T], ce dernier en qualité de caution, à payer à M. et Mme [N] la somme de 3.513,03 euros au titre du solde des loyers et charges selon le décompte arrêté au 24 novembre 2023 et, à compter du mois de novembre 2023, la somme de 1.778,57 euros au titre des indemnités d'occupations et jusqu'à libération effective des lieux ;
- condamné solidairement la société SASU HL et Monsieur [T] à payer à M. et Mme [N] une somme de 1.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, en ce compris le coût du commandement de payer ;
- rejeté toutes les autres demandes plus amples et contraires.
Par un acte en date du 24 avril 2024, M. [T] et la SASU HL ont interjeté appel de cette ordonnance.
Saisie à la requête de M. [T] et de la SASU HL, la première présidente de cette cour les a déboutés de leur demande de suspension de l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance de référé du président du tribunal judiciaire de Compiègne en date du 4 avril 2024 et les a condamnés aux dépens de l'instance.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées électroniquement le 26 juin 2024, M. [T] et la SASU HL concluent à l'infirmation de l'ordonnance déférée et demandent à la cour de leur accorder des délais de paiement sur 24 mois à hauteur de 400 euros mensuels.
Ils exposent que si la SASU HL a eu des retards de loyers, c'est parce qu'elle ne faisait pas assez de rentrées d'argent, mais que cependant, elle s'est améliorée, a payé ses employés et entend payer ses bailleurs.
Ils précisent que M. [T] y a mis toutes ses économies et a contracté un prêt familial de 60.000 euros pour apurer sa dette.
Aux termes de leurs dernières écritures notifiées électroniquement le 19 juillet 2024, M. et Mme [N] concluent à la confirmation de l'ordonnance entreprise et demandent à la cour de condamner solidairement M. [T] et la SASU HL à leur payer la somme de 2.000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Ils s'opposent à l'octroi de délais de paiement et précisent que la preneuse peine à régler le loyer courant et que seuls deux virements de 400 euros ont été effectués depuis le 4 avril 2024, la SASU HL, ayant au demeurant cessé son activité au sein de l'établissement loué puisqu'une mesure de radiation du RCS a été prononcée le 1er mars 2024.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 décembre 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
Aux termes de l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.
L'article 835 du même code énonce que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
L'article L 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit d'effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
En l'espèce, il n'existe aucune contestation sérieuse sur la régularité du commandement délivré le 27 octobre 2023 en ce qu'il correspond exactement au détail des montants réclamés préalablement au preneur par le bailleur. En annexe du commandement, figure le détail complet des loyers et charges dus ainsi que le décompte des versements effectués.
La clause résolutoire incluse dans le bail dont s'agit a été reproduite dans le commandement, lequel énonce expressément qu'à défaut de paiement dans le délai d'un mois, le bailleur entend se prévaloir du jeu de la clause résolutoire.
Devant la cour, la SASU HL (preneur) et M. [T] (caution) qui n'avaient pas comparu devant le premier juge ne critiquent pas la validité du commandement de payer, ni le montant de la créance sollicitée pour un montant total de 3.513,03 euros au titre de l'arriéré locatif au 24 novembre 2023, leur réclamation se limitant à solliciter des délais de paiement sur 24 mois.
Force est de constater qu'en l'absence de paiement des causes du commandement dans le délai d'un mois, le jeu de la clause résolutoire est acquis, avec toutes les conséquences résultant de la résiliation du bail.
Par conséquent, il convient de confirmer l'ordonnance critiquée en ce qu'elle a :
- constaté l'acquisition de la clause résolutoire du bail commercial en date du 1er février 2022 à la date du 28 novembre 2023 ;
- ordonné l'expulsion de la société SASU HL, celle de tous occupants de son chef et de tous les biens immobiliers des lieux situés au 45 rue Saint-Corneille à Compiègne, sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé le délai de 8 jours à compter de la signification de l'ordonnance ;
- condamné solidairement par provision la société SASU HL et M. [T], ce dernier en qualité de caution, à payer à M. et Mme [N] la somme de 3.513,03 euros au titre du solde des loyers et charges selon le décompte arrêté au 24 novembre 2023 et, à compter du mois de novembre 2023, la somme de 1.778,57 euros au titre des indemnités d'occupations et jusqu'à libération effective des lieux.
Toutefois, il y a lieu de relever que postérieurement à cette décision, deux versements de 400 euros ont été réalisés par la SASU HL les 16 avril 2024 et 29 avril 2024, ce qui réduit à 2.713,03 euros le solde des loyers et charges dus au jour de la résiliation du bail.
S'agissant des délais de paiement, en vertu de l'article 1343-5 du code civil, cette décision relève de l'appréciation souveraine des juges du fond.
En l'espèce, force est de constater qu'au soutien de leur demande de délais de grâce, la SASU HL et M. [T] ne produisent aucune pièce pour justifier de la réalité du plan d'apurement de la dette proposé. De plus, il apparaît que la vitalité économique de la SASU HL est obérée puisque les intimés produisent le relevé RCS de cette dernière faisant état d'une fermeture administrative depuis le 1er mars 2024. Aussi, en l'absence de perspectives économiques et financières de la SASU HL démontrées par les appelants, il convient de les débouter de leur demande de délais de paiement.
Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, la SASU HL et M. [T] succombant, ils seront tenus in solidum aux dépens d'appel.
Les circonstances de l'espèce commandent de débouter les époux [N] de leur demande en paiement à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt rendu par mise à disposition au greffe,
Confirme l'ordonnance rendue le 4 avril 2024 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Compiègne, en toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
Constate que postérieurement à cette décision, deux versements de 400 euros ont été réalisés par la SASU HL les 16 avril 2024 et 29 avril 2024, ce qui réduit à 2.713,03 euros le solde des loyers et charges dus au jour de la résiliation du bail.
Déboutons la société SASU HL et M. [O] [T] de leur demande de délais de paiement.
Déboutons M. [G] [N], et son épouse, Madame [L] [D] de leur demande en paiement à titre d'indemnité pour frais irrépétibles.
Condamnons in solidum la SASU HL et M. [O] [T] aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.