CA Poitiers, 1re ch., 4 mars 2025, n° 23/00746
POITIERS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Défendeur :
France Effect (SASU), Axa France IARD (SA), Caisse primaire d'assurance maladie de Charente Maritime
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Monge
Conseillers :
M. Orsini, M. Maury
Avocats :
Me Lagrave, SCP Lagrave - Jouteux, Me Gallet, SCP Gallet-Allerit-Wagner
EXPOSÉ :
[M] [Y] a été brûlée à la main le 18 juillet 2020 alors qu'elle venait d'allumer lors d'une fête familiale et amicale l'un des deux fumigènes 'baby shower' qu'elle avait achetés au prix total de 16,50 € pour cette occasion le mois précédent sur le site de la société France Effect afin de révéler, par la couleur de la fumée, le sexe du bébé qu'elle portait.
Soutenant que ce fumigène présentait un défaut s'étant traduit par une combustion anormale entraînant aussitôt une brûlure à sa main tandis que celui allumé et tenu simultanément par son compagnon avait fonctionné normalement, madame [Y] a fait assigner la société France Effect et l'assureur de celle-ci, la compagnie Axa France Iard, devant le tribunal judiciaire de La Rochelle par actes des 1er et 3 février 2022 pour entendre juger en présence de la caisse primaire d'assurance maladie de Charente maritime (CPAM 17) que la responsabilité de France Effect dans l'accident était engagée sur le fondement des articles 1245 et suivants du code civil en raison du défaut de son produit et pour voir
-à titre principal : condamner solidairement les défenderesses à lui verser 6.000€ en réparation de son préjudice outre 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile
-à titre subsidiaire : ordonner une expertise médicale avant dire droit sur la liquidation de son préjudice et condamner les défenderesses à lui payer une provision de 1.500€ à valoir sur son indemnisation, outre 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les sociétés France Effect et Axa France Iard ont conclu au rejet de ces demandes et sollicité chacune une indemnité pour frais irrépétibles en soutenant que la preuve d'un défaut du produit n'était pas rapportée alors que l'accident avait pour cause une utilisation du fumigène non-conforme aux préconisations, et en objectant que le préjudice allégué n'était pas justifié.
La CPAM 17 n'a pas comparu.
Par jugement du 7 février 2023, le tribunal judiciaire de La Rochelle a
* débouté Mme [M] [Y] de l'ensemble de ses demandes y compris celle fondée sur l'article 700 du code de procédure civile
* condamné Mme [Y] à verser 1.000€ à la SASU France Effect en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
* condamné Mme [Y] à verser 1.000€ à la société AXA France Iard en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
* condamné Mme [M] [Y] aux entiers dépens.
Pour statuer ainsi, le tribunal a retenu, en substance,
- que l'utilisation d'un produit inflammable, par nature dangereux, requérait de vérifier et de respecter les conditions d'utilisations préconisées par le producteur
- que le mode d'emploi faisait état de différentes précautions d'emploi dont celles de se placer dos au vent, de frotter la pointe à friction avec le bras tendu et le fumigène incliné à 45° vers l'extérieur et de l'insérer ensuite dans un sol meuble ou autre matériau non inflammable puis de s'éloigner
- qu'il ressortait de l'enregistrement vidéo de l'accident produit aux débats d'une part, que le fumigène s'était bien déclenché et avait diffusé de la fumée pendant plusieurs secondes, ce qui excluait a priori un défaut, et d'autre part que Mme [Y] n'avait respecté aucune des consignes de sécurité, s'étant placée en travers du vent, ayant fait de grands mouvements avec le fumigène et l'ayant gardé en main
- qu'en outre, aucun geste de recul ni manifestation quelconque n'était visible sur la vidéo, de nature à laisser penser que Mme [Y] avait été brutalement brûlée par le fumigène.
[M] [Y] a relevé appel le 27 mars 2023.
Les dernières écritures prises en compte par la cour au titre de l'article 954 du code de procédure civile ont été transmises par la voie électronique
* le 5 octobre 2023 par Mme [Y]
* le 29 novembre 2023 par la société France Effect et par la société Axa France Iard.
Mme [M] [Y] demande à la cour de la déclarer recevable et fondée en son appel, y faisant droit de réformer la décision du 7 février 2023 en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande principale et de sa demande subsidiaire, et statuant à nouveau
¿ à titre principal :
- de condamner solidairement les sociétés France Effect et Axa France Iard à lui payer
.6.000€ en réparation de l'ensemble de ses préjudices dont le préjudice corporel
.3.500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
.outre aux entiers dépens
¿ à titre subsidiaire :
- de dire la société France Effect entièrement responsable du préjudice corporel qu'elle a subi et la compagnie Axa France Iard tenue à la garantir
- d'allouer à Mme [Y] une provision de 1.500€ à valoir sur l'indemnisation définitive de son préjudice corporel
- Avant dire droit sur le quantum : d'ordonner une expertise médicale
¿ en tout état de cause :
- de condamner solidairement les sociétés France Effect et Axa France Iard à lui payer 3.500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle indique prouver la réalité, la cause et la gravité de sa brûlure à la main, qui lui a causé de très vives douleurs et lui a valu des soins pour brûlure au 2ème degré, du pouce et du majeur droits, 33 jours d'arrêt de travail et 20 séances de massage.
Elle récuse toute faute dans l'utilisation du fumigène en indiquant qu'il n'y avait aucune notice d'utilisation proprement dite, mais un mode d'emploi énonçant simplement '1. ôter le bouchon du haut, 2. prendre le bouchon du bas (frottoir) 3. Le frotter en tournant la tête à friction', ce qu'elle a fait correctement, ainsi qu'il ressort clairement de la vidéo de la scène, qu'elle produit. Elle objecte que rien ne permet de s'assurer que la notice d'utilisation produite aux débats en cause d'appel par la société France Effet serait celle relative aux fumigènes à main qu'elle a achetés, que la référence qui y figure n'est pas celle portée sur sa facture ni celle figurant sur la description du produit apparaissant sur internet.
Elle indique qu'il n'est dit nulle part qu'il serait proscrit de faire des mouvements ni d'allumer le fumigène à la verticale.
Elle réfute les reproches adverses, entérinés par le premier juge, en faisant valoir qu'il suffit d'aller sur le site internet pour constater que le 'baby shower' qu'elle avait acheté est un 'fumigène à main'. Elle conteste ne pas s'être tenue dos au vent, et ajoute que le vent n'a eu de toute façon aucune incidence dans la survenance de l'accident. Elle indique n'avoir nullement donné le fumigène à tenir à sa fille.
Elle fait valoir que son compagnon a tenu et agité comme elle l'autre fumigène, sans problème aucun, et qu'il n'est que de visionner la vidéo de la scène pour constater la différence de combustion entre les deux.
Elle indique que la défectuosité du fumigène qu'elle a allumé est établie, et que c'est ce défaut qui est directement à l'origine de sa blessure.
Elle indique ne pas garder de séquelles de l'accident, et être à même de chiffrer son préjudice de douleur et moral.
Elle formule subsidiairement une demande d'expertise médicale.
Les sociétés France Effect et Axa France Iard demandent à la cour
- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions
- de condamner Mme [Y] à payer 3.000€ à chacune d'elles au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- de condamner Mme [Y] aux entiers dépens d'appel.
Elles font valoir que l'appel ne porte pas sur les condamnations aux dépens et au paiement d'indemnités pour frais irrépétibles, qui ne peuvent donc qu'être confirmées.
Elles indiquent que Mme [Y] n'a jamais pris contact avec France Effect avant que son assureur ne tente de mettre en cause sa responsabilité.
Elles rappellent que l'article 1245-3 du code civil relatif à la responsabilité du fait des produits défectueux, dispose que dans l'appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, et qu'aux termes de l'article 1245-12, la responsabilité du producteur peut être réduite ou supprimée, compte tenu de toutes les circonstances, lorsque le dommage est causé conjointement par un défaut du produit et par la faute de la victime.
Elles font valoir que la demanderesse ne peut se contenter de procéder par déduction en inférant un défaut du fait qu'elle a subi une brûlure, et qu'il lui incombe de rapporter la preuve d'un défaut inhérent au produit vendu.
Elles considèrent que cette preuve fait défaut en l'espèce.
Elles soutiennent que cette preuve ne résulte pas de ce que selon les dires de Mme [Y], son fumigène n'aurait pas été aussi fonctionnel que celui de son compagnon.
Elles assurent que le produit acheté par Mme [Y] n'était pas un fumigène à main comme elle le prétend, et qui était dénommé à l'époque 'fumigène torche', terme absent de la facture, mais un fumigène à frottoir, qui se déclenchait bras tendu puis se posait au sol.
Elles affirment qu'il est clairement établi par les productions que Mme [Y] n'a pas utilisé le produit conformément aux préconisations applicables, figurant sur la notice qui est livrée avec l'emballage et dont elle n'a jamais contesté la présence, puisqu'elle n'était pas dos au vent, qu'elle a fait de grands mouvements en tenant le fumigène une fois celui-ci allumé, et qu'elle l'a ensuite tenu à l'horizontale, avant de le transmettre à sa fille en bas-âge alors que l'âge minimal d'utilisation est de 18 ans, ce qui est un comportement parfaitement irresponsable.
Elles objectent que l'indemnisation sollicitée est forfaitaire.
Elles estiment inutile l'expertise subsidiairement sollicitée.
La CPAM de Charente maritime, assignée par acte du 17 mai 2023 à personne habilitée, ne comparaît pas.
L'ordonnance de clôture est en date du 16 septembre 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
* sur le périmètre de l'appel
La déclaration d'appel vise les chefs de décision querellés parmi lesquels ne figurent pas ceux ayant dans le dispositif du jugement
- condamné Mme [Y] à verser 1.000€ à la SASU France Effect en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné Mme [Y] à verser 1.000€ à la société AXA France Iard en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné Mme [M] [Y] aux entiers dépens.
Le dispositif de ses conclusions d'appelante, sur lequel la cour doit seul statuer, en application de l'article 954, alinéa 4, du code de procédure civile, ne sollicite pas la réformation ou l'annulation du jugement de ces chefs.
La cour n'est donc pas saisie de ces chefs de décision.
* sur la responsabilité recherchée de la société France Effect
La responsabilité de la société France Effect est recherchée au titre de la réparation d'un préjudice résultant d'une atteinte à la personne, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux en vertu des articles 1245-1 et suivants du code civil.
La société France Effect, à laquelle [M] [Y] prouve par la production de la facture éditée à son nom en date du 28 mai 2020 avoir acheté deux fumigènes baby shower couleur rose, ne discute pas sa qualité à défendre à cette action.
Selon l'article 1245-3 du code civil, un produit est défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre.
Dans l'appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances, et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation.
Aux termes de l'article 1245-8, le demandeur doit prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage.
L'article 1245-10 prévoit que la responsabilité du producteur est une responsabilité de plein droit.
Selon l'article 1245-12, sa responsabilité peut être réduite ou supprimée, compte tenu de toutes les circonstances, lorsque le dommage est causé conjointement par un défaut du produit et par la faute de la victime ou d'une personne dont la victime est responsable.
Madame [M] [Y] prouve la réalité de son dommage, au moyen du certificat médical établi le 20 juillet 2020 par un médecin généraliste de [Localité 10] énonçant qu'elle présente une brûlure de 2ème degré du pouce droit face latérale ainsi que du majeur droit nécessitant des pansements quotidiens par une infirmière ; par l'ordonnance établie le même jour par ce praticien puis celle du 10 août 2020 prescrivant 20 séances de massages avec physiothérapie et rééducation de la main droite avec comme indication 'trauma main avec brûlures de fumigène' ; par le certificat d'arrêt de travail établi par ce médecin ; et par les clichés photographiques de ces deux doigts sur lesquels une brûlure est nettement visible.
Elle prouve le défaut du fumigène qu'elle a allumé et tenu le jour des faits, au moyen d'une photographie de ce produit sous ses deux faces (cf sa pièce n°13), et de la vidéo, dont ni la date ni l'intégrité ne sont suspectes, qu'elle produit, la montrant aux côtés de son compagnon et de leur enfant, elle et lui tenant chacun l'un des deux fumigènes baby shower commandés auprès de la société France Effect, dont la couleur, rose ou bleu, avait été choisie pour révéler ainsi à leurs proches le sexe de l'enfant qu'ils attendaient, vidéo sur laquelle on les voit l'un et l'autre simultanément ôter le bouchon, actionner le frottoir, déclencher ainsi une fumée rose qui s'en échappe et agiter le fumigène par des mouvements du bras qui le tient, celui tenu par l'homme dégageant une fumée rose homogène pendant tout le reste de la durée de la vidéo, tandis que celui actionné par la femme laisse échapper une brève volute épaisse de fumée rose qui s'épuise en quelques secondes après lesquelles, alors que l'autre continue donc d'émettre, madame [Y] regarde l'objet inactif et, alternativement, celui toujours en action tenu par son compagnon, lit d'abord le manchon puis parle à son compagnon qui tout en continuant à tenir son fumigène en action se penche vers celui inerte de sa compagne, le prend et l'observe d'un air perplexe tandis qu'elle-même regarde sa main qui venait de tenir l'objet et la secoue à plusieurs reprises.
La différence manifeste de durée et de volume de l'émanation de fumée entre ces deux fumigènes identiques vendus par France Effect, démontre que celui déclenché par Madame [Y] a dysfonctionné, avec une qualité et une durée d'émission de fumée beaucoup trop courte pour correspondre à son objet de signalisation accompagnant une annonce festive, atteint à l'inverse par l'autre, qui a dégagé une fumée homogène pendant plusieurs dizaines de secondes.
La gestuelle de madame [Y], qui dans une ambiance d'exclamations de sa famille commentant l'annonce du sexe féminin du prochain bébé, se dessaisit du fumigène pour regarder sa main puis la secouer en redescendant aussitôt du monticule où ils étaient montés pour être visibles par l'assemblée, ne laisse pas de doute sur le fait qu'elle a sur le champ ressenti une brûlure à la main, dont l'intensité va notoirement crescendo, avec des rougeurs et plaies qui apparaissent progressivement.
Il ressort de ces éléments concordants la preuve, par la demanderesse, que le fumigène acheté à France Effect qu'elle a actionné a, durant son fonctionnement, dégagé dans son manche qu'elle tenait une chaleur soudaine d'une très forte intensité qui est à l'origine de ses brûlures au pouce et au majeur de cette main.
Le produit ne présentait pas, en cela, la sécurité à laquelle on pouvait légitimement s'attendre.
La société France Effect n'établit pas que madame [Y] aurait commis, dans son utilisation du fumigène, une faute susceptible de réduire ou de supprimer sa responsabilité.
Elle produit, pour reprocher à Mme [Y] de ne pas s'y être conformée, une notice d'utilisation que celle-ci nie avoir connu ou pu connaître et conteste être celle de ce fumigène.
Elle ne fournit ni preuve ni indice que cette notice a été fournie d'une manière ou d'une autre à madame [Y], sur l'objet lui-même, dans son emballage ou par renvoi s'y référant.
Bien plus, l'intimée tente de tromper la religion de la cour en présentant comme la notice d'utilisation du fumigène baby shower qu'elle a vendu à [M] [Y] selon facture FA002996 du 28 juin 2020 sur commande référencée 19024 un mode d'emploi qui est celui d'un 'artifice d'extérieur' d'une hauteur d'effet de 3 mètres et nécessitant des précautions d'utilisations propres à un tel produit, sans rapport avec un fumigène 'baby shower' dont l'appelante démontre en tant que de besoin qu'il est un fumigène à main, alors que l'artifice est un produit dangereux nécessitant de le rentrer dans le sol quand il est actionné et de s'en éloigner en respectant une distance de sécurité de 8 mètres, comme l'indique cette notice.
Il est totalement inopérant, à cet égard, pour l'intimée, d'appuyer la production du mode d'emploi de cet artifice
- de clichés photographiques qui établissent au contraire qu'il ne s'agit pas du fumigène baby shower dont l'appelante produit elle-même la photographie (cf pièce n°3 de l'intimée et pièce n°13 de l'appelante)
- de la facture qu'elle a établie en date du 11 juin 2020 pour son client [D] [R], étranger à la présente instance, et qui porte en désignation du produit l'indication 'fumigène à goupille rose 1 minute' qui n'est pas celle du produit vendu à Mme [Y], indiqué sur la facture comme 'fumigène baby shower -Couleurs : Rose' (cf pièce n° 4 de l'intimée et n°1 de l'appelante).
Il n'est pas justifié d'autres instructions d'utilisation du fumigène vendu à Mme [Y] par la société France Effect que celles figurant sur son manche énonçant avec trois cartouches illustrés '1. ôter le bouchon du haut, 2. prendre le bouchon du bas (frottoir) 3. Le frotter en tournant la tête à friction' et auxquels la vidéo qu'elle produit montre qu'elle s'est conformée.
Ces instructions ne proscrivent ni n'évoquent des mouvements du bras tenant le fumigène actionné, tels que madame [Y] en a fait quelques uns, et rien n'établit qu'il se soit agi là de sa part d'une méconnaissance de consignes ou d'une imprudence ni plus généralement d'une faute, étant observé que son compagnon en a fait tout autant et n'a pas été brûlé.
Il est, de même, inopérant, pour l'appelante, d'évoquer la position face au vent, dont les seules instructions susindiquées figurant sur le fumigène ne parlent pas, et qui sont en tout état de cause sans incidence causale avérée avec l'accident, le compagnon de Mme [Y], positionné comme elle à ses côtés, n'ayant pas été brûlé, et ces considérations tirées du sens du vent s'entendant notoirement pour éviter que la fumée dégagée n'atteigne, ou du moins n'atteigne trop, le visage, ce qui n'est pas en cause en l'espèce, où il s'agit de brûlures à la main qui tenait le manche et non de lésions causées par la fumée.
Les griefs de violation des instructions d'utilisation, d'imprudence et de faute opposés par la société France Effect et son assureur à Mme [Y], de pure opportunité -et même gratuits, en ce qu'elles prétendent que la vidéo montrerait qu'elle a passé son fumigène à sa fille, ce qu'elle n'a pas fait-, sont ainsi dépourvus de toute pertinence, et il n'est plus généralement démontré aucune circonstance propre à réduire ou a fortiori à supprimer la responsabilité de l'intimée au titre du défaut de son produit.
Ce défaut est directement, et seul, à l'origine de la brûlure de Mme [Y].
La société France Effect sera ainsi, par infirmation du jugement, déclarée responsable du préjudice causé à Mme [Y] par son produit et tenue de le réparer, solidairement avec son assureur Axa France, qui ne discute pas le principe de sa garantie.
* sur le préjudice
Madame [Y] justifie avoir été brûlée au deuxième degré au pouce et au majeur de la main droite.
La gravité de cette blessure ressort de la durée de l'arrêt de travail que son médecin lui a prescrit pendant 33 jours, durant lesquels elle a reçu des soins infirmiers continus puis a dû s'astreindre à 20 séances de massage.
Elle indique ne pas conserver de séquelles de cette brûlure.
Son préjudice comprend donc les souffrances endurées le jour de l'accident et durant la période ayant précédé la complète guérison de ses brûlures, ainsi que le préjudice moral éprouvé du fait de se trouver ainsi douloureusement blessée pendant une fête familiale et amicale.
Son évaluation ne nécessite pas de recourir à une expertise médicale, et il sera réparé par l'allocation de la somme, nullement forfaitaire, de 6.000€.
* sur les dépens d'appel et l'application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour
Les sociétés France Effect et Axa France Iard succombent devant la cour et supporteront donc les dépens d'appel.
Elles verseront in solidum la somme de 3.500€ à [M] [Y] au titre de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
la cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort dans les limites de l'appel :
INFIRME le jugement déféré
statuant à nouveau :
DIT que la société France Effect est responsable sur le fondement de la responsabilité des produits défectueux, des brûlures subies en juillet 2020 par [M] [Y] en utilisant un fumigène qu'elle lui a vendu
CONDAMNE in solidum la SASU France Effect et la société Axa France Iard à payer à madame [Y] la somme de 6.000€ en réparation de son préjudice
REJETTE toutes demandes autres ou contraires
DÉCLARE le présent arrêt commun à la CPAM de Charente Maritime
LES CONDAMNE in solidum aux dépens d'appel
CONDAMNE in solidum la SASU France Effect et la société Axa France Iard à verser 3.500€ à [M] [Y] au titre de l'application des dispositions de
l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.