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Décisions

CA Douai, 8e ch. sect. 1, 27 février 2025, n° 22/04945

DOUAI

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Benhamou

Vice-président :

M. Vitse

Conseiller :

Mme Ménegaire

Avocats :

Me Deffrennes, Me Foutry, Me Habib

T. prox. Maubeuge, du 16 sept. 2022, n° …

16 septembre 2022

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES:

Dans le cadre d'un démarchage à domicile le 8 novembre 2017, Mme [R] [L] a conclu avec la SAS IMMO CONFORT, représentant la SAS IC GROUPE, un contrat afférent à la fourniture et la pose d'une centrale de 16 panneaux photovoltaïques, ainsi qu'à la livraison et la pose d'un ballon thermodynamique de 200 litres, moyennant la somme de 27.900 euros TTC.

Afin de financer une telle installation, Mme [R] [L] s'est vue consentir par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne de CETELEM selon offre préalable acceptée en date du 8 novembre 2017 un crédit d'un montant de 27.900 euros remboursable en 156 mensualités de 144,08 euros au taux annuel effectif global de 4,80 % avec un différé de 180 jours.

Le 26 décembre 2017, Mme [R] [L] signait avec la SAS IMMO CONFORT un procès-verbal de réception des travaux ainsi qu'un formulaire de demande de financement auprès de la SA BNP PARIS PERSONAL FINANCE venant aux droits de CETELEM.

Le 13 décembre 2018, la SAS IC GROUPE était placée en liquidation judiciaire, Maître [B] [G] étant désigné es qualité de liquidateur de la société précitée venant aux droits de la SAS IMMO CONFORT.

Se plaignant du défaut de fonctionnement de l'installation, Mme [R] [L] par actes séparés en date du 28 avril 2021 faisait assigner en justice Maître [B] [G], es qualité de mandataire liquidateur de la SAS IC GROUPE venant aux droits de la SAS IMMO CONFORT, et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, exerçant sous l'enseigne CETELEM aux fins notamment de voir prononcer la nullité des contrats de vente et de crédit affecté.

Par jugement en date du 16 septembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Maubeuge, a:

- déclaré recevable Mme [R] [L] et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM en leur action,

- prononcé la résolution du contrat de vente intervenu le 8 novembre 2017 par bon de commande n°85243 entre la SAS IMMO CONFORT et Mme [R] [L],

- prononcé la caducité du contrat de crédit affecté n°41396368619001 intervenu entre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM et Mme [R] [L] en date du 8 novembre 2017,

- débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM de sa demande de restitution du montant du capital prêté au titre du contrat de crédit n°41396368619001 du 8 novembre 2017 à l'encontre de Mme [R] [L],

- débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM de sa demande de condamner Mme [R] [L] à poursuivre le règlement du contrat de crédit n°41396368619001 du 8 novembre 2017,

- condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts, les sommes perçues par une mensualité de 256,10 euros puis 45 mensualités de 266,88 euros depuis le 7 juillet 2018, soit 12 265,10 euros TTC, dont le total sera à parfaire en quittances et deniers,

- débouté Mme [R] [L] de sa demande indemnitaire au titre du préjudice financier tendant à voir condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA CETELEM à lui payer la somme de 4554 euros,

- condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts la somme de 1902 euros TTC au titre du préjudice économique,

- débouté Mme [R] [L] de sa demande indemnitaire au titre du préjudice moral tendant à voir condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à lui payer la somme de 3000 euros,

- condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à verser à Mme [R] [L] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 21 octobre 2022, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a:

' déclaré recevable Mme [R] [L] et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM en leur action,

' prononcé la résolution du contrat de vente intervenu le 8 novembre 2017 par bon de commande n°85243 entre la SAS IMMO CONFORT et Mme [R] [L],

' prononcé la caducité du contrat de crédit affecté n°41396368619001 intervenu entre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM et Mme [R] [L] en date du 8 novembre 2017,

' débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM de sa demande de restitution du montant du capital prêté au titre du contrat de crédit n°41396368619001 du 8 novembre 2017 à l'encontre de Mme [R] [L],

' débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM de sa demande de condamner Mme [R] [L] à poursuivre le règlement du contrat de crédit n°41396368619001 du 8 novembre 2017,

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts, les sommes perçues par une mensualité de 256,10 euros puis 45 mensualités de 266,88 euros depuis le 7 juillet 2018, soit 12 265,10 euros TTC, dont le total sera à parfaire en quittances et deniers,

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts la somme de 1902 euros TTC au titre du préjudice économique,

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à verser à Mme [R] [L] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Vu les dernières conclusions de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en date du 5 juillet 2023, et tendant notamment à voir:

- réformer le jugement querellé en ce qu'il a déclaré recevable Mme [R] [L] et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM en leur action, prononcé la résolution du contrat de vente intervenu le 8 novembre 2017 par bon de commande n°85243 entre la SAS IMMO CONFORT et Mme [R] [L], prononcé la caducité du contrat de crédit affecté n°41396368619001 intervenu entre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM et Mme [R] [L] en date du 8 novembre 2017,débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM de sa demande de restitution du montant du capital prêté au titre du contrat de crédit n°41396368619001 du 8 novembre 2017 à l'encontre de Mme [R] [L], débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM de sa demande de condamner Mme [R] [L] à poursuivre le règlement du contrat de crédit n°41396368619001 du 8 novembre 2017, condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts, les sommes perçues par une mensualité de 256,10 euros puis 45 mensualités de 266,88 euros depuis le 7 juillet 2018, soit 12 265,10 euros TTC, dont le total sera à parfaire en quittances et deniers, condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts la somme de 1902 euros TTC au titre du préjudice économique, condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à verser à Mme [R] [L] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

Et statuant à nouveau,

A titre principal,

- constater que Mme [R] [L] ne justifie nullement de sa déclaration de créance alors qu'elle a engagé son action postérieurement au jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire de la société IMMO CONFORT,

- par conséquent dire et juger que Mme [R] [L] est irrecevable à agir en nullité (et en résolution) du contrat principal conclu avec la société IMMO CONFORT et en conséquence à agir en nullité ( et le cas échéant en résolution) du contrat de crédit affecté qui lui a été consenti par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,

A titre subsidiaire,

- débouter Mme [R] [L] de l'intégralité de ses prétentions telle que formulées à l'encontre de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE.

Vu les dernières conclusions de Mme [R] [L] en date du 29 octobre 2024, et tendant à voir :

' infirmer le jugement querellé en ce qu'il a:

' prononcé la résolution du contrat entre la société IMMO CONFORT et Mme [L],

' prononcé la caducité du contrat de crédit affecté conclu entre la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et Mme [L],

' débouté Mme [L] de sa demande indemnitaire au titre du préjudice financier,

' débouté Mme [L] de sa demande indemnitaire au titre du préjudice moral tendant à voir condamner la BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à lui payer la somme de 3.000 euros,

- confirmer la décision attaquée en ce qu'elle a:

' déclaré recevable Mme [L] en son action,

' débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande de restitution du montant du capital prêté au titre du contrat de crédit à l'encontre de Mme [R] [L],

' débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande de condamner Mme [R] [L] à poursuivre le règlement du contrat de crédit,

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts, les sommes perçues par une mensualité de 256,10 euros puis 45 mensualités de 266,88 euros depuis le 7 juillet 2018, soit 12.265,10 euros TTC, dont le total sera à parfaire,

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts la somme de 1902 euros TTC au titre du préjudice économique,

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Mme [R] [L] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance,

Et statuant à nouveau,

' débouter la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM,

A titre principal,

' prononcer la nullité du contrat de vente conclu le 8 novembre 2017 entre Mme [R] [L] et la société IC GROUPE sous l'enseigne IMMO CONFORT,

' prononcer la nullité subséquente du contrat de crédit affecté conclu le 8 novembre 2017 entre Mme [R] [L] et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM,

En tout état de cause,

' condamner la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Mme [L] l'intégralité des sommes versées jusqu'à l'arrêt à intervenir outre les mensualités postérieures acquittées soit la somme de 13.866,98 euros sauf à parfaite,

A titre subsidiaire,

' condamner la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Mme [L] la somme de 13.866,98 euros sauf à parfaire, à titre de dommages et intérêts du fait de la négligence fautive de la banque,

A titre infiniment subsidiaire,

Si la Cour ne faisait pas droit aux demandes de Mme [R] [L] considérant que la banque n'a pas commis de fautes,

' prononcer la déchéance du droit de la banque BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux intérêts du crédit affecté,

' ordonner la poursuite du paiement par Mme [L] des échéances mensuelles du prêt hors intérêts et assurance selon le nouveau tableau d'amortissement communiqué par la banque BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,

En toute état de cause,

' condamner la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Mme [R] [L] la somme de :

- 4.554 euros au titre de son préjudice financier sauf à parfaire,

- 3.000 euros au titre de son préjudice moral,

' condamner la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [R] [L] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel,

' condamner la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux entiers dépens d'appel.

En ce qui la concerne la SELAS ALLIANCE prise en la personne de Maître [B] [G] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUP anciennement dénommée IMMO CONFORT a été assignée devant la cour par la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE par acte de commissaire de justice en date du 12 décembre 2022 signifié à personne morale étant précisé que cet acte extrajudiciaire a été reçu par une personne habilitée à le réceptionner. Toutefois subséquemment cet intimée n'a pas constitué avocat ni donc conclu en cause d'appel.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties qui ont constitué avocat et conclu devant la cour, il convient de se référer à leurs écritures respectives.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 novembre 2024.

- MOTIFS DE LA COUR:

- Sur la recevabilité de l'action de Mme [R] [L]:

L'article L622-21 du code de commerce dans sa version résultant de l'ordonnance n°2008-1345 du 18 décembre 2008 et applicable au présent litige relatif aux procédures collectives, dispose en substance:

'I.-Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :

1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;

2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.'

Par suite en application de la disposition précitée, les actions ne tendant pas au paiement d'une somme d'argent ne sont nullement concernées par l'arrêt des poursuites dans le cadre d'une procédure collective et notamment d'une liquidation judiciaire.

Dans le cas présent l'intimée, Mme [R] [L] ne formule nullement de demande en paiement de somme d'argent dirigée contre la société IC GROUPE.

Son action à l'égard d'une telle société ne vise qu'à obtenir le prononcé de la nullité du contrat de vente conclu par Mme [R] [L] avec cette société.

Par ailleurs cette intimée ne sollicite nullement la résolution de ce contrat.

Par suite les créances de Mme [R] [L] n'avaient pas à être déclarées au passif.

Ainsi son action n'était en aucune manière soumise à la suspension des poursuites individuelles.

Il convient dès lors de confirmer le jugement querellé en ce qu'il a déclaré recevable l'action de Mme [R] [L].

- Sur la nullité du contrat principal de vente:

L'article L221-5-1° du code de la consommation s'agissant des contrats conclus hors établissement prévoit en substance que préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible notamment les informations prévues à l'article L. 111-1.

L'article L 111-1 du même code quant à lui dans sa version résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et applicable au présent litige, dispose:

«Avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes:
1° Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné;
2° Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4;
3° En l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
4° Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu'elles ne ressortent pas du contexte ;
5° S'il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l'existence et aux modalités de mise en 'uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles;
6° La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés par décret en Conseil d'État.
Les dispositions du présent article s'appliquent également aux contrats portant sur la fourniture d'eau, de gaz ou d'électricité, lorsqu'ils ne sont pas conditionnés dans un volume délimité ou en quantité déterminée, ainsi que de chauffage urbain et de contenu numérique non fourni sur un support matériel. Ces contrats font également référence à la nécessité d'une consommation sobre et respectueuse de la préservation de l'environnement.»

De plus l'article L111-2 du code de la consommation dans sa version résultant de l'ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 et qui a vocation à s'appliquer au présent litige, dispose:

'Outre les mentions prévues à l'article L. 111-1, tout professionnel, avant la conclusion d'un contrat de fourniture de services et, lorsqu'il n'y a pas de contrat écrit, avant l'exécution de la prestation de services, met à la disposition du consommateur ou lui communique, de manière lisible et compréhensible, les informations complémentaires relatives à ses coordonnées, à son activité de prestation de services et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

Les informations complémentaires qui ne sont communiquées qu'à la demande du consommateur sont également précisées par décret en Conseil d'Etat.'

L'article R111-2 du même code dans sa version résultant du décret n°2016-884 du 29 juin 2016, et applicable au présent litige, dispose en substance:

L'article L 221-9 du dit code dispose quant à lui:

«Le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l'accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l'engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.
Le contrat mentionne, le cas échéant, l'accord exprès du consommateur pour la fourniture d'un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l'expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l'exercice de son droit de rétractation.
Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l'article L. 221-5.»

Par ailleurs l'article L 242-1 du même code prévoit en ce qui le concerne que les dispositions de l'article L 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

Au cas particulier la nature complexe de l'opération contractuelle en question implique impérativement que soit précisées certaines caractéristiques essentielles. Faute de telles précisions le consommateur ne sera pas en mesure de procéder ' comme il peut légitimement en ressentir la nécessité - à une comparaison pertinente entre diverses offres de même nature proposées sur le marché afin d' opérer le choix qui lui paraît le plus judicieux.

Dans le cas présent le bon de commande s'agissant de la marque des panneaux photovoltaïques indique de manière pour le moins imprécise : 'Panneaux photovoltaïques [...] Soluxtec ou puissance équivalente'. Cela signifie qu'il peut s'agir de panneaux de marque Soluxtec ou d'une toute autre marque. Ainsi la marque des panneaux solaires en cause est choisie discrétionnairement par le vendeur de panneaux photovoltaïques. Or la Cour de cassation dans un arrêt de principe du 24 janvier 2024 a considéré que constitue une caractéristique essentielle la marque du bien ou du service faisant l'objet du contrat ( Civ, 1ère, 24 janvier 2024, n° du pourvoi 21-20.691).

De plus un tel bon de commande s'agissant de la date de livraison précise de manière particulièrement vague: 'Date prévue de livraison: 2 à 12 semaines'. Force est ainsi de constater qu'un tel bon de commande rédigé de manière particulièrement sommaire, ne spécifie nullement s'agissant d'une opération complexe la date exacte de livraison et le calendrier précis des travaux concernant la prestation fournie avec notamment la date des démarches administratives visant à obtenir l'autorisation de la mairie et la date du raccordement ERDF qui conditionne le fonctionnement effectif de l'installation.

Il ressort ainsi des observations qui précédent, que la consommatrice en cause, Mme [R] [L] n'a pas été suffisamment informée sur la prestation qu'elle entendait obtenir dans le cadre du contrat en cause - étant bien entendu que la marque des panneaux photovoltaïques et le calendrier des travaux apparaissent comme des caractéristiques essentielles et même primordiales de la prestation en cause. Il est ainsi incontestable que le bon de commande en question ne satisfait pas aux exigences protectrices du consommateur résultant des dispositions précitées du code de la consommation sans qu'il soit besoin d'apprécier si ces éléments ont été déterminants du consentement s'agissant d'une nullité d'ordre public.

En outre il ne résulte d'aucun élément objectif du dossier que Mme [R] [L] même si elle avait connaissance des irrégularités du bon de commande, ait manifesté la volonté non équivoque de renoncer à la nullité qui en découle, étant entendu que son acceptation de la livraison n'a pu avoir pour effet de couvrir ces irrégularités ainsi que la nullité qui a vocation à les sanctionner. Au regard de sa qualité de simple profane elle devait de toute évidence ignorer que le défaut des mentions obligatoires entachant le bon de commande était sanctionné par la nullité de cet acte juridique s'agissant d'une nullité relative dans le cadre protecteur du droit de la consommation. Il ne ressort par ailleurs d'aucun élément objectif du dossier que l'acquéreur ait confirmé cet acte nul en renonçant à la nullité qui en découle notamment en adressant au vendeur un courrier recommandé faisant état de sa renonciation explicite à la nullité de cet acte juridique.

Il convient dès lors d'infirmer le jugement querellé en ce qu'il a prononcé la résolution du contrat de vente intervenu le 8 novembre 2017 par bon de commande n°85243 entre la SAS IMMO CONFORT et Mme [R] [L]. Il y a lieu par suite, statuant à nouveau, de prononcer la nullité du contrat de vente conclu le 8 novembre 2017 entre Mme [R] [L] et la société IC GROUPE sous l'enseigne IMMO CONFORT.

- Sur la nullité du contrat de crédit affecté:

En application des dispositions de l'article L 312-55 du code de la consommation, le contrat est annulé ou résolu de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui même résolu ou annulé.

Dans le cas présent le contrat principal de vente ayant été annulé, il convient d'infirmer le jugement querellé en ce qu'il a prononcé la caducité du contrat de crédit affecté intervenu entre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et Mme [R] [L], et statuant à nouveau, de prononcer la nullité de ce contrat de crédit.

- Sur les conséquences de la nullité du contrat principal de vente et du contrat de crédit:

Dans le cas présent l'annulation du contrat principal de vente et du contrat de crédit qui certes anéantit ces deux conventions ne saurait toutefois conduire au rétablissement mécanique du statu quo ante. En effet il faudra tenir compte aussi le cas échéant, des conséquences de l'éventuelle privation de la banque de sa créance de restitution.

' Sur les conséquences de la nullité du contrat principal de vente:

Au regard du prononcé de la nullité du contrat principal de vente, la SELAS ALLIANCE prise en la personne de Maître [B] [G] es qualité de liquidateur judiciaire de la société IC GROUP anciennement dénommée IMMO CONFORT devra restituer le prix de vente à Mme [R] [L] étant entendu que celle-ci devra restituer le matériel installé.

' Sur les conséquences de la nullité du contrat de crédit affecté:

Il résulte d'une jurisprudence bien établie que commet une faute la banque qui verse les fonds prêtés au vendeur de panneaux photovoltaïques sans avoir dûment et préalablement vérifié la conformité du bon de commande aux dispositions du code de la consommation. La banque commet également une faute en ne s'assurant pas au moyen de toutes démarches utiles, de la bonne exécution des travaux par le vendeur des panneaux photovoltaïques conformément à ses engagements contractuels avant de débloquer les fonds prêtés.

Au cas particulier l'objectivité commande de constater que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a commis une faute en ne vérifiant pas la conformité du bon de commande litigieux affecté de graves irrégularités aux dispositions d'ordre public du code de la consommation lorsqu'elle a débloqué les fonds du crédit affecté.

Pour obtenir la réparation de son préjudice, le consommateur doit établir l'existence de ce préjudice et le fait qu'il est dûment corrélé à la faute de la banque.

Au cas d'espèce force est de constater que la faillite du vendeur doit être considérée comme générant un préjudice suffisant pour priver le prêteur de sa créance de restitution. En effet du fait de cette déconfiture Mme [R] [L] se verra incontestablement dans l'impossibilité de récupérer le prix de vente auprès de la société IC GROUPE sous l'enseigne IMMO CONFORT placée en liquidation judiciaire - alors même que cette restitution du prix aurait été la conséquence juridique normale et automatique résultant de l'annulation du contrat de vente. Il convient de souligner qu'au cas particulier la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de la société IC GROUPE sous l'enseigne IMMO CONFORT rend absolument certaine et non pas seulement probable la non restitution du prix par cette société.

La faute de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE en l'espèce a causé à Mme [R] [L] un préjudice incontestable qui doit être justement et exactement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution. Il doit en effet être fait application dans le cas présent du principe fondamental dans la sphère de la responsabilité civile de la réparation intégrale du préjudice qui commande de réparer tout le préjudice mais rien que le préjudice.

Dans un arrêt de principe en date du 10 juillet 2024 la première chambre civile de la Cour de cassation a considéré que lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, le consommateur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal (Cass. Civ, 1ère 10 juillet 2024, n° du pourvoi 23-15.802).

La Cour suprême estime ainsi qu'en libérant le capital emprunté sans vérifier la régularité du contrat principal, la banque a manqué à ses obligations, et que d'autre part, l'emprunteur avait subi un préjudice consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès d'un vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente du matériel. Elle en déduit que la banque dans ce cas doit être condamnée à restituer à l'emprunteur à titre de dommages et intérêts une somme correspondant au capital emprunté.

Il est donc logique au regard des observations qui précédent, que la SA COFIDIS soit privée de sa créance de restitution.

Il convient dès lors de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM de sa demande de restitution du montant du capital prêté au titre du contrat de crédit n°41396368619001 du 8 novembre 2017 à l'encontre de Mme [R] [L].

S'agissant des dommages et intérêts alloués à l'emprunteur et devant correspondre en principe au montant du capital emprunté, il convient toutefois impérativement de ne pas statuer ultra petita c'est à dire au delà des sommes demandées par Mme [R] [L]. Par ailleurs il ne peut être allouée à celle-ci une somme supérieure au préjudice effectivement subi par l'emprunteuse. Cette appréciation du montant exact de la somme devant être allouée au titre de la réparation du préjudice relève de l'appréciation souveraine du juge.

Il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement querellé en ce qu'il a:

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts, les sommes perçues par une mensualité de 256,10 euros puis 45 mensualités de 266,88 euros depuis le 7 juillet 2018, soit 12 265,10 euros TTC, dont le total sera à parfaire en quittances et deniers,

' débouté Mme [R] [L] de sa demande indemnitaire au titre du préjudice financier tendant à voir condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA CETELEM à lui payer la somme de 4554 euros,

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts la somme de 1902 euros TTC au titre du préjudice économique.

Il convient par suite, statuant à nouveau, de condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Mme [R] [L] la somme de 13.866,98 euros en réparation du préjudice subi à raison de la faute de la banque.

Au regard des considérations qui précédent et en adoptant les motifs non contraires et pertinents du premier juge le jugement querellé sera donc confirmé pour le surplus.

- Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel:

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Mme [R] [L] les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.

Il convient dès lors de condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [R] [L] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.

En revanche il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE les frais irrépétibles exposés par elle devant la cour et non compris dans les dépens.

Il y a lieu en conséquence de débouter la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.

- Sur le surplus des demandes:

Au regard des considérations qui précédent, il y a lieu de débouter les parties de toutes leurs autres demandes.

- Sur les dépens d'appel:

Il convient de condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE qui succombe, aux entiers dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

- Infirme le jugement querellé en ce qu'il a:

' prononcé la résolution du contrat de vente intervenu le 8 novembre 2017 par bon de commande n°85243 entre la SAS IMMO CONFORT et Mme [R] [L],

' prononcé la caducité du contrat de crédit affecté n°41396368619001 intervenu entre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM et Mme [R] [L] en date du 8 novembre 2017,

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts, les sommes perçues par une mensualité de 256,10 euros puis 45 mensualités de 266,88 euros depuis le 7 juillet 2018, soit 12.265,10 euros TTC, dont le total sera à parfaire en quittances et deniers,

' débouté Mme [R] [L] de sa demande indemnitaire au titre du préjudice financier tendant à voir condamner la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE venant aux droits de la SA CETELEM à lui payer la somme de 4.554 euros,

' condamné la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM à payer à Mme [R] [L] à titre de dommages et intérêts la somme de 1.902 euros TTC au titre du préjudice économique,

- Confirme le jugement entrepris pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Prononce la nullité du contrat de vente conclu le 8 novembre 2017 entre Mme [R] [L] et la société IC GROUPE sous l'enseigne IMMO CONFORT,

- Prononce la nullité du contrat de crédit affecté n°41396368619001 intervenu entre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sous l'enseigne CETELEM et Mme [R] [L] en date du 8 novembre 2017,

- Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à verser à Mme [R] [L] la somme de 13.866,98 euros en réparation du préjudice subi à raison de la faute de la banque,

- Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à Mme [R] [L] la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,

- La déboute de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel,

- Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,

- Condamne la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE qui succombe, aux entiers dépens d'appel.

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