CA Nîmes, 1re ch., 27 février 2025, n° 24/02208
NÎMES
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/02208 -
N° Portalis DBVH-V-B7I-JH25
AG
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
14 mars 2019
RG:17/01049
SA CIC SUD OUEST
C/
[G]
SCI CP
Copie exécutoire délivrée
le 27 février 2025
à :
- Me Sylvie Sergent
- Me Alain Rollet
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 27 FEVRIER 2025
Décision déférée à la cour : jugement du tribunal de grande instance de Montpellier en date du 14 mars 2019, N°17/01049
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre,
Mme Alexandra Berger, conseillère,
Mme Audrey Gentilini, conseillère,
GREFFIER :
Mme Nadège Rodrigues, greffière, lors des débats, et Mme Audrey Bachimont, greffière, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 janvier 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 février 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
La Sa CIC SUD OUEST
RCS de Bordeaux n° 456 204 809, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Sylvie Sergent de la Selarl Delran Bargeton Dyens Sergent Alcalde, postulante, avocate au barreau de Nîmes
Représentée par Me Gilles Lasry de la Scp d'avocats Brugues - Lasry, plaidant, avocat au barreau de Montpellier
INTIMÉS :
M. [Y] [G]
né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 11]
[Adresse 6]
[Localité 5]
La Sci CP, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 12]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentés par Me Alain Rollet, postulant, avocat au barreau de Nîmes
Représentés par Me Michel Gouron, plaidant, avocat au barreau de Montpellier
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 27 février 2025, par mise à disposition au greffe de la cour
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Le 23 juillet 2002, la société Banque CIC Sud-Ouest a consenti à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Carrosserie 113-Lunel un prêt de 42 685 euros dont son gérant M. [Y] [G] s'est porté caution solidaire du remboursement.
Le 25 mars 2005, l'entreprise a été placée en redressement judiciaire.
La banque a déclaré sa créance au passif le 22 avril 2005.
Un plan de redressement arrêté le 29 mars 2007 a prévu la reprise du paiement des échéances du prêt.
Le 23 octobre 2013, M. [G] a apporté à la société civile immobilière CP un immeuble évalué à 500 000 euros en contrepartie de 500 000 parts d'une valeur nominale de un euro.
Le 3 mars 2015, il a été condamné en sa qualité de caution solidaire par la cour d'appel de Montpellier à payer à la Banque CIC Sud-Ouest la somme de 34 852,26 euros outre intérêts.
Le 1er juillet 2015, il a cédé la nue-propriété de ses parts dans la Sci CP à une société BM.
Par acte en date du 17 février 2017, la Banque CIC Sud-Ouest a assigné M. [G] et cette Sci en nullité et en inopposabilité de l'apport réalisé le 23 octobre 2013 devant le tribunal de grande instance de Montpellier qui, par jugement du 14 mars 2019 confirmé par arrêt du 12 janvier 2022 de la cour d'appel de Montpellier, l'a déboutée ses demandes.
La banque a formé un pourvoi à l'encontre de cet arrêt que le 29 mai 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions.
La Cour a jugé que la cour d'appel n'avait pas donné de base légale à sa décision en ne recherchant pas, comme cela lui était demandé, si la difficulté de négocier les parts sociales et le risque d'inscription d'hypothèques sur l'immeuble du chef de la Sci ne constituaient pas des facteurs de diminution de la valeur du gage du créancier et d'appauvrissement du débiteur.
La Banque CIC Sud-Ouest a saisi la cour d'appel de renvoi le 28 juin 2024.
Par ordonnance du 28 août 2024, l'affaire a été fixée à bref délai à l'audience du 14 janvier 2025.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS
Au terme de ses conclusions récapitulatives régulièrement notifiées le 3 janvier 2025, la Banque CIC Sud-Ouest demande à la cour :
- de déclarer irrecevables les conclusions des intimés notifiées le 19 décembre 2024,
- d'infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier du 14 mars 2019
En conséquence
- de juger nul et non avenu ou à tout le moins inopposable l'acte d'apport passé par acte de Me [E], notaire à [Localité 10] le 23 octobre 2013 publié le 13 novembre 2013 vol.2013 P n°15677,
- de juger nuls et non avenus ou à tout le moins inopposables l'acte de cession du 1er juillet 2015 et le procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015,
- d'ordonner le retour dans le patrimoine immobilier de M. [G] de l'immeuble sis à [Localité 8], [Adresse 6], [Adresse 7] et [Adresse 2]
- d'ordonner la publication au 1er bureau de la publicité foncière de [Localité 9],
- de condamner solidairement M. [G] et la SCI CP au paiement de la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article 1231-1 du code civil,
- de les condamner solidairement à payer la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle soutient :
- que les conclusions notifiées par les intimés sont irrecevables en application de l'article 1037-1 du code de procédure civile,
- que l'apport d'un immeuble à une société par le débiteur la prive de la possibilité de mettre en place une voie d'exécution sur cet immeuble, le débiteur n'en étant plus propriétaire et la saisie des parts sociales ayant peu d'intérêt ; la cession de la nue-propriété des parts réduit encore la valeur de ces parts et démontre la volonté du débiteur de faire échapper ses biens au gage des créanciers ;
- que ses demandes en nullité et inopposabilité de l'acte de cession du 1er juillet 2015 et du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015 sont recevables en ce qu'elles se rattachent par un lien de dépendance nécessaire à la demande en nullité de l'acte d'apport ;
- que le débiteur a commis une double fraude à son égard, en apportant son bien immobilier à une société dont il est le gérant postérieurement à son assignation en paiement, et en cédant ensuite la nue-propriété de ses parts dans cette société.
Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 19 décembre 2024, M. [G] et la Sci CP demandent à la cour :
- de confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Montpellier
- de juger mal fondée la demande de nullité de l'acte d'apport passé par-devant Me [E]
- de rejeter toute demande nouvelle en cause d'appel
- de rejeter toute demande non conforme à l'article 1341-2 du code civil
- de rejeter les demandes de l'appelante à l'encontre de M. [G]
- de condamner la banque à payer à M. [G] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Ils répliquent :
- que les demandes relatives à l'acte de cession du 1er juillet 2015 et au procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015 sont irrecevables comme nouvelles en cause d'appel ; la cassation de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Montpellier est sans incidence sur ce point ;
- que la demande de retour dans le patrimoine de M. [G] du bien immobilier n'est pas prévue par l'article 1341-2 du code civil ;
- qu'il n'y a pas eu d'appauvrissement du patrimoine de M. [G], puisque les parts sociales qu'il détient dans la SCI ont une valeur égale à celle de l'immeuble apporté, ni de fraude aux droits de la banque en l'absence de preuve qu'il serait insolvable ;
- que la banque ne rapporte pas la preuve d'une difficulté à négocier les parts sociales qui constituerait un facteur de diminution de son gage et d'appauvrissement de son débiteur ;
- que la Sci existe depuis 2002, et que la cession de nue-propriété a été réalisée dans un but uniquement successoral ;
- que la créance de la banque n'est pas importante, en comparaison des revenus de M. [G].
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile.
MOTIFS
* recevabilité des conclusions des intimés
En application de l'article 1037-1 du code de procédure civile, dans sa version applicable avant le 1er septembre 2024, la déclaration de saisine est signifiée par son auteur aux autres parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation dans les dix jours de la notification par le greffe de l'avis de fixation.
Les conclusions de l'auteur de la déclaration de saisine sont remises au greffe et notifiées dans un délai de deux mois suivant cette déclaration.
Les parties adverses remettent et notifient leurs conclusions dans un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'auteur de la déclaration.
Les parties qui ne respectent pas ces délais sont réputées s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elles avaient soumis à la cour d'appel dont l'arrêt a été cassé.
En l'espèce, la banque a saisi la cour d'appel de renvoi par déclaration du 28 juin 2024.
Elle a remis ses conclusions au greffe le 21 août 2024 et les a signifiées aux intimés le 27 août 2024, qui disposaient ainsi d'un délai de deux mois à compter de cette date pour notifier leurs conclusions.
Or, ceux-ci n'ont notifié leurs conclusions que le 19 décembre 2024, soit postérieurement au délai de deux mois susvisé, de sorte qu'elles sont irrecevables.
Devant la cour d'appel de Montpellier, M. [G] sollicitait :
- la confirmation du jugement
- le rejet de toute demande nouvelle en cause d'appel
- le rejet des demandes de la banque à son égard
- la condamnation de la banque à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Il soutenait :
- que les dispositions de l'article 566 du code de procédure civile faisaient obstacle à la demande nouvelle, tendant à voir juger nuls et non avenus et à tout le moins inopposables à la banque l'acte de cession du 1er juillet 2015 et le procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015 ;
- qu'il n'y avait eu aucun appauvrissement, la valeur de son patrimoine étant identique, avant comme après l'apport de l'immeuble ;
- que la banque ne rapportait pas la preuve d'une fraude à ses droits, faute d'établir que l'immeuble apporté aurait une valeur supérieure à 500 000 euros ou qu'un tiers aurait reçu les parts sociales émises en contrepartie de cet apport ;
- que la Sci CP avait une existence juridique très antérieure à l'acte d'apport, qui n'avait qu'un objectif familial, tout comme la cession de la nue-propriété.
* recevabilité des demandes relatives à l'acte de cession du 1er juillet 2015 et au procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Selon l'article 566 du même code les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la compensation ou le complément nécessaire.
Après avoir rappelé les dispositions de l'article 624 du même code, la Cour de cassation a jugé que « la cassation de l'arrêt en ce qu'il rejette la demande en nullité ou en inopposabilité de l'acte d'apport du 23 octobre 2013 entraîne la cassation des dispositions de cet arrêt déclarant irrecevables les mêmes demandes portant sur la cession, le 1er juillet 2015, de la nue-propriété des parts émises en rémunération de l'apport, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. »
La fin de non-recevoir soulevée est par conséquent rejetée, les prétentions de l'appelante relatives la cession de la nue-propriété des parts le 1er juillet 2015 étant le complément nécessaire de ses demandes relatives à l'acte d'apport.
Le jugement est donc infirmé de ce chef.
* nullité ou inopposabilité des actes d'apport et de cession
Selon l'article 1167 du code civil, dans sa version ici applicable, les créanciers peuvent en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits.
L'action paulienne permet à un créancier d'agir contre le débiteur qui, par un comportement frauduleux ayant pour effet de diminuer la valeur de son patrimoine, tente d'échapper à ses obligations.
L'appauvrissement du débiteur, qui doit caractériser l'acte argué de fraude paulienne, peut recouvrir une très grande variété d'actes, et notamment ceux qui, sans rendre le débiteur insolvable, modifient la consistance de son patrimoine, remplaçant un bien facilement appréhendable par un bien plus facile à dissimuler ou moins facile à saisir.
Ainsi, l'action paulienne peut être exercée lorsque, du fait d'un apport en société, des immeubles ont été remplacés, dans le patrimoine d'un débiteur, par des parts sociales difficilement négociables.
En l'espèce, la banque a assigné M. [G] en paiement du solde d'un prêt dont il s'était porté caution solidaire le 11 avril 2013.
En cours de procédure, le 23 octobre 2013, celui-ci a apporté à une société civile immobilière dont il était le gérant, un bien immobilier évalué à 500 000 euros, apport en contrepartie duquel il a reçu 500 000 parts dans cette société d'une valeur d'un euro chacune.
Il n'importe que l'immeuble ait été apporté à une société constituée de longue date au motif allégué de rétablir un lien de droit entre l'intimé et son épouse, avec laquelle il est marié sous le régime de la séparation de biens, dès lors que l'acte d'apport a surtout eu pour effet que l'immeuble est devenu le gage exclusif des créanciers de cette société, de telle sorte que les créanciers de son gérant, qui pouvaient auparavant le saisir et le vendre, n'avaient dès lors plus comme seul recours que d'appréhender et réaliser des droits mobiliers.
Le 1er juillet 2015, alors que la cour d'appel de Montpellier, par arrêt du 3 mars 2015, signifié le 13 mars 2015, l'a condamné à payer à la banque la somme de 34 852,86 euros avec intérêts au taux de 6,25% l'an à compter de l'assignation du 11 avril 2013, il a cédé la nue-propriété de l'intégralité de ses parts dans la Sci CP à une société BM, et en a conservé l'usufruit.
Ce faisant, concomitamment à l'assignation en paiement dont il faisait l'objet, il a soustrait son bien immobilier du gage de la créancière, en y substituant des parts sociales. qui, bien que correspondant à la valeur du bien, n'offraient pas les mêmes garanties dès lors que leur valeur est fonction des dettes de la Sci.
Alors qu'il avait connaissance du caractère certain, liquide et exigible de la créance de la banque à son égard, il a cédé la nue-propriété de ces parts, réduisant drastiquement la valeur de son patrimoine et rendant encore plus difficile leur appréhension par la créancière, la saisie de l'usufruit de parts sociales relevant d'un processus plus long, plus complexe et plus aléatoire que celle d'un bien immobilier.
Il en résulte que l'apport du bien immobilier à la Sci CP le 23 octobre 2013 suivi de la cession le 1er juillet 2015 de la nue-propriété des parts sociales obtenues en contrepartie ont constitué des actes d'appauvrissement du patrimoine du débiteur.
L'action paulienne ne rend pas l'acte nul, mais inopposable au créancier qui en est victime.
Ce mécanisme permet de réintégrer dans le patrimoine du débiteur les biens dont il s'est dessaisi frauduleusement, que le créancier peut donc saisir pour recouvrer sa créance.
Par conséquent, les actes d'apport et de cession litigieux sont déclarés inopposables à l'appelante, par voie d'infirmation du jugement de ce chef.
* nullité ou inopposabilité du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire
L'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015des associés de la Sci CP a adopté la résolution suivante :
'L'assemblée générale décide de modifier l'article 17.2 des statuts, en son deuxième alinéa de la page 14, par adjonction de la mention suivante :
'Seuls les nus-propriétaires votent aux assemblées générales ordinaires, extraordinaires et annuelles d'approbation des comptes''.
La banque ne développe aucun moyen au soutien de sa demande de nullité ou d'inopposabilité à son égard de cette délibération dont il n'est pas soutenu qu'elle constituerait directement un acte d'appauvrissement du débiteur.
Cette demande est donc rejetée.
* demande de dommages et intérêts
Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
L'appelante ne développe aucun moyen au soutien de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil.
Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
* autres demandes
Le jugement est infirmé en ce qu'il a condamné la Banque CIC Sud-Ouest aux dépens et à payer à M. [G] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les intimés, qui succombent, sont condamnés aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.
Ils sont condamnés in solidum à payer à l'appelante la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier du 14 mars 2019, sauf en ce qu'il a débouté la société Banque CIC Sud-Ouest de sa demande de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau
Déclare recevables les demandes relatives à l'acte de cession du 1er juillet 2015 et au procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015 de la société Banque CIC Sud-Ouest,
Déclare l'acte d'apport du bien immobilier propriété de M. [Y] [G] à la SCI CP reçu le 23 octobre 2013 par Me [E], notaire à Pignan (Hérault) et publié le 13 novembre 2014 Vol 2013 P n°15677 inopposable à la société Banque CIC Sud-Ouest
Déclare l'acte de cession de la nue-propriété des parts de M. [Y] [G] dans la Sci CP à la SCI BM du 1er juillet 2015 inopposable à la société Banque CIC Sud-Ouest,
Déboute la société Banque CIC Sud-Ouest de sa demande de nullité ou d'inopposabilité du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015,
Y ajoutant
Condamne in solidum M. [Y] [G] et la Sci CP aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne in solidum M. [Y] [G] et la Sci CP à payer à la société Banque CIC Sud-Ouest la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRÊT N°
N° RG 24/02208 -
N° Portalis DBVH-V-B7I-JH25
AG
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
14 mars 2019
RG:17/01049
SA CIC SUD OUEST
C/
[G]
SCI CP
Copie exécutoire délivrée
le 27 février 2025
à :
- Me Sylvie Sergent
- Me Alain Rollet
COUR D'APPEL DE NÎMES
CHAMBRE CIVILE
1ère chambre
ARRÊT DU 27 FEVRIER 2025
Décision déférée à la cour : jugement du tribunal de grande instance de Montpellier en date du 14 mars 2019, N°17/01049
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre,
Mme Alexandra Berger, conseillère,
Mme Audrey Gentilini, conseillère,
GREFFIER :
Mme Nadège Rodrigues, greffière, lors des débats, et Mme Audrey Bachimont, greffière, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 14 janvier 2025, où l'affaire a été mise en délibéré au 27 février 2025.
Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.
APPELANTE :
La Sa CIC SUD OUEST
RCS de Bordeaux n° 456 204 809, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Sylvie Sergent de la Selarl Delran Bargeton Dyens Sergent Alcalde, postulante, avocate au barreau de Nîmes
Représentée par Me Gilles Lasry de la Scp d'avocats Brugues - Lasry, plaidant, avocat au barreau de Montpellier
INTIMÉS :
M. [Y] [G]
né le [Date naissance 1] 1968 à [Localité 11]
[Adresse 6]
[Localité 5]
La Sci CP, prise en la personne de son gérant en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 12]
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentés par Me Alain Rollet, postulant, avocat au barreau de Nîmes
Représentés par Me Michel Gouron, plaidant, avocat au barreau de Montpellier
ARRÊT :
Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Isabelle Defarge, présidente de chambre, le 27 février 2025, par mise à disposition au greffe de la cour
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Le 23 juillet 2002, la société Banque CIC Sud-Ouest a consenti à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Carrosserie 113-Lunel un prêt de 42 685 euros dont son gérant M. [Y] [G] s'est porté caution solidaire du remboursement.
Le 25 mars 2005, l'entreprise a été placée en redressement judiciaire.
La banque a déclaré sa créance au passif le 22 avril 2005.
Un plan de redressement arrêté le 29 mars 2007 a prévu la reprise du paiement des échéances du prêt.
Le 23 octobre 2013, M. [G] a apporté à la société civile immobilière CP un immeuble évalué à 500 000 euros en contrepartie de 500 000 parts d'une valeur nominale de un euro.
Le 3 mars 2015, il a été condamné en sa qualité de caution solidaire par la cour d'appel de Montpellier à payer à la Banque CIC Sud-Ouest la somme de 34 852,26 euros outre intérêts.
Le 1er juillet 2015, il a cédé la nue-propriété de ses parts dans la Sci CP à une société BM.
Par acte en date du 17 février 2017, la Banque CIC Sud-Ouest a assigné M. [G] et cette Sci en nullité et en inopposabilité de l'apport réalisé le 23 octobre 2013 devant le tribunal de grande instance de Montpellier qui, par jugement du 14 mars 2019 confirmé par arrêt du 12 janvier 2022 de la cour d'appel de Montpellier, l'a déboutée ses demandes.
La banque a formé un pourvoi à l'encontre de cet arrêt que le 29 mai 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions.
La Cour a jugé que la cour d'appel n'avait pas donné de base légale à sa décision en ne recherchant pas, comme cela lui était demandé, si la difficulté de négocier les parts sociales et le risque d'inscription d'hypothèques sur l'immeuble du chef de la Sci ne constituaient pas des facteurs de diminution de la valeur du gage du créancier et d'appauvrissement du débiteur.
La Banque CIC Sud-Ouest a saisi la cour d'appel de renvoi le 28 juin 2024.
Par ordonnance du 28 août 2024, l'affaire a été fixée à bref délai à l'audience du 14 janvier 2025.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS
Au terme de ses conclusions récapitulatives régulièrement notifiées le 3 janvier 2025, la Banque CIC Sud-Ouest demande à la cour :
- de déclarer irrecevables les conclusions des intimés notifiées le 19 décembre 2024,
- d'infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier du 14 mars 2019
En conséquence
- de juger nul et non avenu ou à tout le moins inopposable l'acte d'apport passé par acte de Me [E], notaire à [Localité 10] le 23 octobre 2013 publié le 13 novembre 2013 vol.2013 P n°15677,
- de juger nuls et non avenus ou à tout le moins inopposables l'acte de cession du 1er juillet 2015 et le procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015,
- d'ordonner le retour dans le patrimoine immobilier de M. [G] de l'immeuble sis à [Localité 8], [Adresse 6], [Adresse 7] et [Adresse 2]
- d'ordonner la publication au 1er bureau de la publicité foncière de [Localité 9],
- de condamner solidairement M. [G] et la SCI CP au paiement de la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article 1231-1 du code civil,
- de les condamner solidairement à payer la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Elle soutient :
- que les conclusions notifiées par les intimés sont irrecevables en application de l'article 1037-1 du code de procédure civile,
- que l'apport d'un immeuble à une société par le débiteur la prive de la possibilité de mettre en place une voie d'exécution sur cet immeuble, le débiteur n'en étant plus propriétaire et la saisie des parts sociales ayant peu d'intérêt ; la cession de la nue-propriété des parts réduit encore la valeur de ces parts et démontre la volonté du débiteur de faire échapper ses biens au gage des créanciers ;
- que ses demandes en nullité et inopposabilité de l'acte de cession du 1er juillet 2015 et du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015 sont recevables en ce qu'elles se rattachent par un lien de dépendance nécessaire à la demande en nullité de l'acte d'apport ;
- que le débiteur a commis une double fraude à son égard, en apportant son bien immobilier à une société dont il est le gérant postérieurement à son assignation en paiement, et en cédant ensuite la nue-propriété de ses parts dans cette société.
Au terme de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 19 décembre 2024, M. [G] et la Sci CP demandent à la cour :
- de confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Montpellier
- de juger mal fondée la demande de nullité de l'acte d'apport passé par-devant Me [E]
- de rejeter toute demande nouvelle en cause d'appel
- de rejeter toute demande non conforme à l'article 1341-2 du code civil
- de rejeter les demandes de l'appelante à l'encontre de M. [G]
- de condamner la banque à payer à M. [G] la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Ils répliquent :
- que les demandes relatives à l'acte de cession du 1er juillet 2015 et au procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015 sont irrecevables comme nouvelles en cause d'appel ; la cassation de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Montpellier est sans incidence sur ce point ;
- que la demande de retour dans le patrimoine de M. [G] du bien immobilier n'est pas prévue par l'article 1341-2 du code civil ;
- qu'il n'y a pas eu d'appauvrissement du patrimoine de M. [G], puisque les parts sociales qu'il détient dans la SCI ont une valeur égale à celle de l'immeuble apporté, ni de fraude aux droits de la banque en l'absence de preuve qu'il serait insolvable ;
- que la banque ne rapporte pas la preuve d'une difficulté à négocier les parts sociales qui constituerait un facteur de diminution de son gage et d'appauvrissement de son débiteur ;
- que la Sci existe depuis 2002, et que la cession de nue-propriété a été réalisée dans un but uniquement successoral ;
- que la créance de la banque n'est pas importante, en comparaison des revenus de M. [G].
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile.
MOTIFS
* recevabilité des conclusions des intimés
En application de l'article 1037-1 du code de procédure civile, dans sa version applicable avant le 1er septembre 2024, la déclaration de saisine est signifiée par son auteur aux autres parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation dans les dix jours de la notification par le greffe de l'avis de fixation.
Les conclusions de l'auteur de la déclaration de saisine sont remises au greffe et notifiées dans un délai de deux mois suivant cette déclaration.
Les parties adverses remettent et notifient leurs conclusions dans un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'auteur de la déclaration.
Les parties qui ne respectent pas ces délais sont réputées s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elles avaient soumis à la cour d'appel dont l'arrêt a été cassé.
En l'espèce, la banque a saisi la cour d'appel de renvoi par déclaration du 28 juin 2024.
Elle a remis ses conclusions au greffe le 21 août 2024 et les a signifiées aux intimés le 27 août 2024, qui disposaient ainsi d'un délai de deux mois à compter de cette date pour notifier leurs conclusions.
Or, ceux-ci n'ont notifié leurs conclusions que le 19 décembre 2024, soit postérieurement au délai de deux mois susvisé, de sorte qu'elles sont irrecevables.
Devant la cour d'appel de Montpellier, M. [G] sollicitait :
- la confirmation du jugement
- le rejet de toute demande nouvelle en cause d'appel
- le rejet des demandes de la banque à son égard
- la condamnation de la banque à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Il soutenait :
- que les dispositions de l'article 566 du code de procédure civile faisaient obstacle à la demande nouvelle, tendant à voir juger nuls et non avenus et à tout le moins inopposables à la banque l'acte de cession du 1er juillet 2015 et le procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015 ;
- qu'il n'y avait eu aucun appauvrissement, la valeur de son patrimoine étant identique, avant comme après l'apport de l'immeuble ;
- que la banque ne rapportait pas la preuve d'une fraude à ses droits, faute d'établir que l'immeuble apporté aurait une valeur supérieure à 500 000 euros ou qu'un tiers aurait reçu les parts sociales émises en contrepartie de cet apport ;
- que la Sci CP avait une existence juridique très antérieure à l'acte d'apport, qui n'avait qu'un objectif familial, tout comme la cession de la nue-propriété.
* recevabilité des demandes relatives à l'acte de cession du 1er juillet 2015 et au procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
Selon l'article 566 du même code les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la compensation ou le complément nécessaire.
Après avoir rappelé les dispositions de l'article 624 du même code, la Cour de cassation a jugé que « la cassation de l'arrêt en ce qu'il rejette la demande en nullité ou en inopposabilité de l'acte d'apport du 23 octobre 2013 entraîne la cassation des dispositions de cet arrêt déclarant irrecevables les mêmes demandes portant sur la cession, le 1er juillet 2015, de la nue-propriété des parts émises en rémunération de l'apport, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. »
La fin de non-recevoir soulevée est par conséquent rejetée, les prétentions de l'appelante relatives la cession de la nue-propriété des parts le 1er juillet 2015 étant le complément nécessaire de ses demandes relatives à l'acte d'apport.
Le jugement est donc infirmé de ce chef.
* nullité ou inopposabilité des actes d'apport et de cession
Selon l'article 1167 du code civil, dans sa version ici applicable, les créanciers peuvent en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits.
L'action paulienne permet à un créancier d'agir contre le débiteur qui, par un comportement frauduleux ayant pour effet de diminuer la valeur de son patrimoine, tente d'échapper à ses obligations.
L'appauvrissement du débiteur, qui doit caractériser l'acte argué de fraude paulienne, peut recouvrir une très grande variété d'actes, et notamment ceux qui, sans rendre le débiteur insolvable, modifient la consistance de son patrimoine, remplaçant un bien facilement appréhendable par un bien plus facile à dissimuler ou moins facile à saisir.
Ainsi, l'action paulienne peut être exercée lorsque, du fait d'un apport en société, des immeubles ont été remplacés, dans le patrimoine d'un débiteur, par des parts sociales difficilement négociables.
En l'espèce, la banque a assigné M. [G] en paiement du solde d'un prêt dont il s'était porté caution solidaire le 11 avril 2013.
En cours de procédure, le 23 octobre 2013, celui-ci a apporté à une société civile immobilière dont il était le gérant, un bien immobilier évalué à 500 000 euros, apport en contrepartie duquel il a reçu 500 000 parts dans cette société d'une valeur d'un euro chacune.
Il n'importe que l'immeuble ait été apporté à une société constituée de longue date au motif allégué de rétablir un lien de droit entre l'intimé et son épouse, avec laquelle il est marié sous le régime de la séparation de biens, dès lors que l'acte d'apport a surtout eu pour effet que l'immeuble est devenu le gage exclusif des créanciers de cette société, de telle sorte que les créanciers de son gérant, qui pouvaient auparavant le saisir et le vendre, n'avaient dès lors plus comme seul recours que d'appréhender et réaliser des droits mobiliers.
Le 1er juillet 2015, alors que la cour d'appel de Montpellier, par arrêt du 3 mars 2015, signifié le 13 mars 2015, l'a condamné à payer à la banque la somme de 34 852,86 euros avec intérêts au taux de 6,25% l'an à compter de l'assignation du 11 avril 2013, il a cédé la nue-propriété de l'intégralité de ses parts dans la Sci CP à une société BM, et en a conservé l'usufruit.
Ce faisant, concomitamment à l'assignation en paiement dont il faisait l'objet, il a soustrait son bien immobilier du gage de la créancière, en y substituant des parts sociales. qui, bien que correspondant à la valeur du bien, n'offraient pas les mêmes garanties dès lors que leur valeur est fonction des dettes de la Sci.
Alors qu'il avait connaissance du caractère certain, liquide et exigible de la créance de la banque à son égard, il a cédé la nue-propriété de ces parts, réduisant drastiquement la valeur de son patrimoine et rendant encore plus difficile leur appréhension par la créancière, la saisie de l'usufruit de parts sociales relevant d'un processus plus long, plus complexe et plus aléatoire que celle d'un bien immobilier.
Il en résulte que l'apport du bien immobilier à la Sci CP le 23 octobre 2013 suivi de la cession le 1er juillet 2015 de la nue-propriété des parts sociales obtenues en contrepartie ont constitué des actes d'appauvrissement du patrimoine du débiteur.
L'action paulienne ne rend pas l'acte nul, mais inopposable au créancier qui en est victime.
Ce mécanisme permet de réintégrer dans le patrimoine du débiteur les biens dont il s'est dessaisi frauduleusement, que le créancier peut donc saisir pour recouvrer sa créance.
Par conséquent, les actes d'apport et de cession litigieux sont déclarés inopposables à l'appelante, par voie d'infirmation du jugement de ce chef.
* nullité ou inopposabilité du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire
L'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015des associés de la Sci CP a adopté la résolution suivante :
'L'assemblée générale décide de modifier l'article 17.2 des statuts, en son deuxième alinéa de la page 14, par adjonction de la mention suivante :
'Seuls les nus-propriétaires votent aux assemblées générales ordinaires, extraordinaires et annuelles d'approbation des comptes''.
La banque ne développe aucun moyen au soutien de sa demande de nullité ou d'inopposabilité à son égard de cette délibération dont il n'est pas soutenu qu'elle constituerait directement un acte d'appauvrissement du débiteur.
Cette demande est donc rejetée.
* demande de dommages et intérêts
Aux termes de l'article 954 du code de procédure civile les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
L'appelante ne développe aucun moyen au soutien de sa demande de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1231-1 du code civil.
Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
* autres demandes
Le jugement est infirmé en ce qu'il a condamné la Banque CIC Sud-Ouest aux dépens et à payer à M. [G] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les intimés, qui succombent, sont condamnés aux entiers dépens de la procédure de première instance et d'appel.
Ils sont condamnés in solidum à payer à l'appelante la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Montpellier du 14 mars 2019, sauf en ce qu'il a débouté la société Banque CIC Sud-Ouest de sa demande de dommages et intérêts,
Statuant à nouveau
Déclare recevables les demandes relatives à l'acte de cession du 1er juillet 2015 et au procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015 de la société Banque CIC Sud-Ouest,
Déclare l'acte d'apport du bien immobilier propriété de M. [Y] [G] à la SCI CP reçu le 23 octobre 2013 par Me [E], notaire à Pignan (Hérault) et publié le 13 novembre 2014 Vol 2013 P n°15677 inopposable à la société Banque CIC Sud-Ouest
Déclare l'acte de cession de la nue-propriété des parts de M. [Y] [G] dans la Sci CP à la SCI BM du 1er juillet 2015 inopposable à la société Banque CIC Sud-Ouest,
Déboute la société Banque CIC Sud-Ouest de sa demande de nullité ou d'inopposabilité du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 2 juillet 2015,
Y ajoutant
Condamne in solidum M. [Y] [G] et la Sci CP aux dépens de première instance et d'appel,
Condamne in solidum M. [Y] [G] et la Sci CP à payer à la société Banque CIC Sud-Ouest la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Arrêt signé par la présidente et par la greffière.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,