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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 4-2, 28 février 2025, n° 20/01064

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Autre

CA Aix-en-Provence n° 20/01064

28 février 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2

ARRÊT AU FOND

DU 28 FEVRIER 2025

N° 2025/038

Rôle N° RG 20/01064 - N° Portalis DBVB-V-B7E-BFPND

[M] [Y]

C/

S.A.R.L. ALLIANCE PROPRETÉ MULTISERVICES

Copie exécutoire délivrée

le : 28/02/2025

à :

Me Dominique LEDUC, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(vest 228)

Me Laurence BRANDEHO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

(vest 264)

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'AIX-EN-PROVENCE - section - en date du 10 Décembre 2019, enregistré au répertoire général sous le n° 17/00321.

APPELANT

Monsieur [M] [Y], demeurant [Adresse 8] - [Localité 2]

représenté par Me Dominique LEDUC, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE

S.A.R.L. ALLIANCE PROPRETÉ MULTISERVICES, demeurant [Adresse 11] - [Localité 1]

représentée par Me Laurence BRANDEHO, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 11 Décembre 2024 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre

M. Guillaume KATAWANDJA, Conseiller

Madame Muriel GUILLET, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Février 2025.

Délibéré prorogé au 28 Février 2025.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Février 2025.

Signé par Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre et Mme Caroline POTTIER, adjointe administrative faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu l'arrêt avant dire droit en date du 26 juillet 2024 auquel il convient de se reporter pour plus ample exposé des faits , de la procédure et des prétentions des parties

l'appelant a notifié ses pièces par RPVA le 14 août 2024 . Le 4 septembre 2024 il a déposé et notifié ses conclusions n° 5 .

La société intimée a déposé et notifié ses conclusions n°6 et son bordereau de pièces n°6 par RPVA le 23 octobre 2024

MOTIFS DE LA DÉCISION

I/. Sur la recevabilité des pièces postérieures au licenciement produites par l'appelant

La société intimée fait remarquer que dans le cadre de la présente instance l'appelant produit aux débats des pièces ( documents administratifs , pièces comptables , courriels , bulletins de paie ) dont la date est postérieure à son licenciement et dont elle soutient qu'elles ont été obtenues frauduleusement par l'intéressé hors l'exercice de ses fonctions .Elle fait valoir qu'elle a déposé une plainte pour vol de ce chef ( pièce 38)

L'appelant fait valoir que les pièces produites sont nécessaires à sa défense car l'employeur produit aux débats un procès verbal d'huissier dont il ressort qu'il a lui même modifié des documents pour lui en imputer ensuite la responsabilité . Il fait valoir qu'il avait un accès général à la boîte mail de l'entreprise dont l'employeur lui a remis les codes.

La cour rappelle qu'en matière prud'homale, la preuve est libre et qu'il appartient donc au juge d'apprécier la valeur probante des pièces qui lui sont soumises y compris celles émanant des parties elles-mêmes.

la cour de cassation décide désormais (arrêt de l'assemblée plénière du 22/12/2013 pourvoi N°20.648), au visa des articles 6 et 8 de la convention européenne des droit de l'hommes et de l'article 9 du code de procédure civile, que la production d'une preuve obtenue par des moyens déloyaux ou illicites n'entraîne pas nécessairement son rejet des débats le juge devant apprécier si l'utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit bafoué et le droit à la preuve.

Il ressort en l'espèce de l'ensemble de la procédure , et notamment de l'utilisation régulière de la boîte mail de M [G] par l'appelant pour adresser des mails à la clientèle sous sa propre signature pendant l'exécution du contrat de travail , que l'entreprise a laissé libre accès au salarié à l'ensemble de ses documents administratifs et comptables figurant sur l'ordinateur de son secrétariat,.

Si il n'est pas contestable que l'utilisation postérieure au licenciement de l'accès donné dans le cadre des fonctions ou de tout autre moyen d'accès aux données de l'entreprise pour se procurer ses données doit être considérée comme illicite , la cour considère que le salarié auquel la lettre de licenciement reproche, une baisse du chiffre d'affaires de l'entreprise en lien avec les résiliations de clients consécutives à ses fautes , un défaut de gestion administrative du personnel et notamment dans la gestion des absence de Mme [W] ou l'emploi de Mme [A] et qui fait par ailleurs valoir l'utilisation de documents falsifiés , ne peut apporter la preuve contraire aux griefs qu'en se fondant sur les documents dont seul l'employeur était en possession .

Par ailleurs le salarié qui formule une prétention au titre des heures supplémentaires non rémunérées accomplies au profit de l'employeur mais également de la société Avenir propreté justifie également de la nécessité de la production des documents concernant cette dernière .

La cour considère donc que l'intégralité des pièces de l'appelant est recevable.

II/. Sur l'exécution du contrat de travail

A/ sur la demande de reclassification et le rappel de salaire afférent .

La qualification professionnelle du salarié qui doit être précisée dans le contrat de travail est déterminée en référence à la classification fixée par la convention collective applicable dans l'entreprise.

En cas de litige, il appartient au juge d'apprécier les fonctions réellement exercées par le salarié.

En cas de sous-classement, le salarié doit être replacé de manière rétroactive au niveau auquel son poste correspond. Il peut alors prétendre à un rappel de salaire correspondant au minimum conventionnel afférent à ce coefficient.

En cas de différend sur la catégorie professionnelle qui doit être attribuée à un salarié, ce dernier doit établir la nature de l'emploi effectivement occupé et la qualification qu'il requiert.

Au terme de son contrat de travail L'appelant est classé Agent de Maîtrise MP 3 de la convention collective des entreprises de propreté , il fait valoir que les fonctions exercées en qualité de chef de secteur directement rattaché au directeur de l'entreprise correspondent à la classification MP 5 car il établissait les devis et tarifs ainsi que les propositions de contrats

qu'il signait avant des les remettre aux clients.

L'intimée fait valoir qu'il appartient à l'appelant de démontrer qu'il assurait de façon permanente des fonctions relevant du niveau MP 5 . Qu'en l'espèce l'appelant se contente d'énumérer des taches sans rapporter la preuve de leur exécution .Elle conteste sa participation à la négociation des contrats et souligne qu'il se trouvait cantonné au suivi et à la surveillance des chantiers.

La cour retient que la convention collective retient comme critères classant des agents de Maîtrise

- l'autonomie/initiative ;

- la technicité ;

- la responsabilité.

L'agent de maître MP 3

- assure les relations commerciales avec le client quant aux interventions réalisées.

- peut apporter une assistance technique et conseiller soit les clients soit les services concernés pour définir les besoins et les programmes d'exécution.

- sait comprendre des études complexes et diversifiées.

- possède les connaissances et l'expérience permettant d'assurer la gestion et le suivi des travaux et interventions.

- sait rechercher les adaptations et les solutions compatibles entre elles pour que les travaux soient conformes aux objectifs définis et aux résultats attendus.

- assure et veille à l'efficacité des travaux et moyens mis en place.

- peut encadrer des équipes en cas d'opérations mettant en 'uvre des techniques particulières ou lors d'interventions spécifiques.

- met en place les moyens de contrôle de qualité adaptés.

L'agent de maîtrise MP 5

- reçoit des directives précisant le cadre de ses activités, ses moyens, les objectifs et les règles de gestion. Il peut lui être confié une délégation commerciale et l'établissement des relations clients entreprise.

- sait rechercher les dysfonctionnements et les analyse pour soit les éliminer soit les signaler.

- participe à la négociation commerciale en apportant ses connaissances et savoir-faire.

- coordonne et assure la gestion et l'organisation des sites d'un secteur donné.

- effectue les liaisons fonctionnelles avec la hiérarchie et les responsables des entreprises clientes.

Ce qui distingue l'agent de maîtrise MP 5 c'est donc son autonomie dans les relations clients /entreprise dans le respect des directives de l'employeur ainsi que dans la gestion et l'organisation des sites d'un secteur donné.

En l'espèce le contrat de travail de l'appelant lui confie , dans le respect des directives de gestion et objectifs fixés par l'employeur , la gestion administrative du personnel et notamment la gestion de son embauche et des éléments de paie , l'établissement des devis pour les travaux exceptionnels , la mise en place des moyens humains et matériels pour la bonne réalisation des chantiers de son secteur, le contrôle des commandes de produits, le contrôle de la sécurité .

Ainsi le contrat de travail confie à l'appelant la définition des moyens appropriés à l'exécution des chantiers de son secteur et non le seul contrôle de leur efficacité.

L'appelant verse aux débats ,en pièce 76 annexe 4 figurant au bordereau des pièces communiquées , 11 propositions de contrats signées de sa main pour le compte de l'employeur démontrant sa participation effective à la négociation commerciale

Ces fonctions excèdent la définition des fonctions de l'agent de Maîtrise MP3 et justifient la demande de reclassification ainsi que le rappel de salaire subséquent dont le montant n'est pas critiqué par l'employeur .

Le jugement est donc infirmé en ce sens.

B/ Sur la demande de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires de 2015 à 2017

Les heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale de travail, soit 35 heures par semaine ; Cette durée du travail hebdomadaire s'entend des heures de travail effectif et des temps assimilés ;

Depuis un arrêt du 10 septembre 2015 sur question préjudicielle (C - 266/14) la CJUE considère que pour des salariés itinérants sans lieu de travail fixe habituel , le temps de trajet doit être considéré comme du temps de travail ; Elle énonce que :''L'article 2, point 1, de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail , doit être interprété en ce sens que,

dans des circonstances telles que celles en cause au principal, dans lesquelles les travailleurs n'ont pas de lieu de travail fixe ou habituel , constitue du ' temps de travail ', au sens de cette disposition, le temps de déplacement que ces travailleurs consacrent aux déplacements quotidiens entre leur domicile et les sites du premier et du dernier clients désignés par leur employeur'.

Pour dire si ce temps de trajet doit être considéré comme temps de travail effectif, il y a lieu de prendre en compte le degré de dépendance, l'absence de liberté de choix, la contrainte imposée par l'employeur dans l'organisation du temps de déplacement. Si ces éléments ne sont pas réunis, le temps de déplacement peut se situer en dehors du travail effectif au sens de la directive.

Eu égard à l'obligation d'interprétation des articles L3121-1 et L3121-4 du code du travail à la lumière de la directive 2003/88/CE, la Cour de cassation s'est récemment alignée sur

la jurisprudence européenne, et énonce qu'il faut tenir compte des contraintes auxquelles le salarié itinérant est réellement soumis pour déterminer si son temps de trajet entre ses 1er et derniers clients constitue ou non un temps de travail effectif (Cass. Soc. 23 nov. 2022 n° 20-21.924). Ainsi :

' si, pendant ces trajets, le salarié doit se tenir à la disposition de l'employeur et se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles, ce temps de trajet devra être compté en temps de travail effectif, notamment au titre du décompte des heures supplémentaires réalisées

Les heures supplémentaires ouvrent droit à une majoration salariale ou le cas échéant à un repos compensateur équivalent (articles L3121-27 et L3121-28 du code du travail).

Elles se décomptent par semaine (article L3121-29 du Code du travail).

A défaut d'accord, les heures supplémentaires donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 % (article L3121-36 du Code du travail)

Sont considérées comme heures supplémentaires les heures qui ont été accomplies avec l'accord au moins implicite de l'employeur ou si celui-ci les connaissant ne s'y est pas opposé, et notamment lorsque le salarié établit, à sa demande, des fiches de temps.

Il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant

(Soc., 18 mars 2020, pourvoi n° 18-10.919).

L'appelant soutient que le suivi d'une centaine de chantiers sur deux départements le contraignait à effectuer de manière habituelle 12 à 13 heures de travail par jour soit au minimum 60 heures par semaine dont 25 heures supplémentaires

.Il souligne qu'il restait à la disposition de l'employeur pendant ses temps de trajet au cours desquels il devait répondre au téléphone et donc se stationner ponctuellement moteur coupé ; qu'il lui arrivait également de stationner moteur tournant pour livrer des produits ménagers aux équipes de nettoyage.

Il précise en outre que suite à la démission de Mme [X] , chef d'équipe , il a été amené travailler le samedi pendant l'été afin d'assurer le nettoyage des appartements de la presqu'île de [Localité 5] à la sortie des locataires.

Il fait enfin valoir qu'il travaillait également pour le compte de l'employeur depuis son domicile .

Il produit aux débats

- des feuilles de géolocalisation d'août 2015 et de février à novembre 2016

il fait remarquer que l'intimée qui conteste ses demandes ne produit pas aux débats l'ensemble des relevés de géolocalisation qui sont en sa possession

- des e mails adressés tardivement ( p 66 e mail de contestation d'avertissement adressé à 20H55)

un mail adressé à l'employeur pendant ses congés le 23 septembre à 0H44 pour contester des remarques de l'employeur et solliciter une mise au point sur ses fonctions , horaires de travail dont il précise qu'ils sont de 12 à 13 heures par jour et employeurs .

- des relevés bancaires portant des virement de l'intimé correspondant selon l'appelant au remboursement de notes de frais de cartouches d'encre démontrant qu'il travaillait également depuis son domicile ce que l'employeur contrôlait au moyen du logiciel gratuit TEAM VIEWER.

- un décompte de son temps de travail pour les mois de juin et octobre 2016 comptabilisant l'amplitude horaire et le nombre d'heures de déplacement journalières dont le temps consacré au premier et dernier trajet de la journée qui doit selon lui être considéré comme du temps de travail effectif conformément à la jurisprudence européenne.

- les relevés de géolocalisation de M [UJ] ayant repris son secteur du 1 avril au 30 avril 2018

- un justificatif d'intervention au profit du magasin camaïeu de [Localité 13] le samedi 17 juin 2016

- un décompte des sommes dues au titre des heures supplémentaires

La société intimée fait valoir que

- l'appelant majore le suivi des chantiers dont certains ne justifient que des interventions ponctuelles, notamment s'agissant des entretiens de vitres, de sorte qu'en moyenne l'appelant gérait 60 chantiers réguliers ne générant pas d'heures supplémentaires ainsi qu'en atteste M [HY] et M [V] exerçant des fonctions identiques sur des secteurs plus vastes ou équivalents.

- Les relevés de géolocalisation produits par l'appelant sont incomplets et n'étayent pas suffisamment les heures supplémentaires réclamées sur l'ensemble de la période visée.

Qu'ils démontrent en revanche que l'appelant n'effectuait pas 300 visites de chantiers mensuelles ainsi qu'il le prétend mais entre 101 et 118 visites et passait un temps important à son domicile où il ne disposait d'aucun matériel pour effectuer un travail administratif contrairement à ce qu'il soutient ,et ce qui est attesté par M [HY] de sorte que ce temps ne peut être comptabilisé comme temps de travail effectif.

- que le temps du premier trajet le matin et du trajet retour le soir ne peuvent être considérés comme du temps de travail effectif au regard des dispositions de l'article L 3121-4 du code du travail étant précisé que le salarié ne démontre pas un temps de trajet anormal entre son domicile et son lieu de travail au regard de son obligation de mobilité

elle estime que les relevés de géolocalisation produits démontent un horaire effectif de travail de 154h30.

- que le salarié a bénéficié de 6 jours de récupérations non déduits des congés payés en novembre 2015.

- Que les mails produits ne démontrent aucune sollicitation de l'employeur en dehors des horaires de travail.

La cour retient qu' il n'est pas contesté en l'espèce que l'appelant exerçait à titre principal son activité de manière itinérante se déplaçant sur le site des clients de son secteur pour superviser la bonne exécution des missions de nettoyage confiées aux salariés de l'entreprise.

Si l'appelant était doté, aux termes de son contrat de travail , d'un téléphone portable lui permettant de contacter ses clients et son employeur ou d'être contacté par eux , aucun des

éléments produit aux débats ne permet pour autant d'affirmer qu'il restait en contact constant avec son employeur et ainsi soumis à son pouvoir de direction pendant les trajets effectués entre son domicile et les sites du premier et du dernier client avec le véhicule de service qui lui était confié; il ne démontre pas plus que l'organisation de ses tournées lui était imposée ni l'existence d'aucune contrainte imposée par l'employeur dans l'organisation du temps de déplacement .

La cour note que l'appelant communiquait par mail avec ses clients ou l'entreprise au moyen de l'adresse [Courriel 4] ( pièce 59, 66, 68 de l'intimée ) Toutefois rien ne permet de lier cette adresse à un ordinateur personnel utilisé depuis son domicile alors qu'il ressort de sa propre pièce 12 que l'employeur avait accès à cette boîte mail.

Enfin la Cour ne peut rapprocher la pièce dénommée annexe 3, produite par le salarié pour démontrer le paiement de cartouche d'imprimante au titre des frais professionnels , des paiements de l'employeur apparaissant sur les relevés de compte figurant en pièce 83 dès lors que les montants payés ne correspondent pas aux notes de frais émises et que ces dernières ne sont pas visées par l'employeur. Il convient de remarquer que l'utilisation du logiciel TEAM VIEWER n'est pas démontrée.

Dans ces conditions les temps de trajet et les temps passés à domicile se sont pas analysés par la cour comme du temps de travail effectif et comptabilisés comme tel .

Les attestations de M Monsieur [HY] , ayant succédé à l'appelant sur son secteur et M [V] ( p 32 et 76 de l'intimé ) sont en ce sens ainsi que les relevés de géolocalisation laissant apparaître de fréquents passages au siège de l'entreprise .

La cour retient que si l'appelant justifie que 99 chantiers lui étaient attribués au mois de septembre 2015 et 84 au mois de novembre 2016 ( p 46 et 52 de l'appelant ) les mentions du chiffre d'affaire mensuel par chantiers viennent démontrer que tous n'étaient manifestement pas d'égale importance .

Ainsi sur les 99 chantiers attribués au mois de septembre 2015 37 représentaient un chiffre d'affaire inférieur à 100 euros tandis que sur la période du mois de novembre 2016 31 chantiers n'atteignaient pas ce chiffre d'affaire .

Les feuilles de géolocalisation produites pour la période du 24 AU 31 août 2015(P 69 de l'appelant ) ne se rapporte pas à des déplacements de l'appelant

L'analyse des relevés de géolocalisation pour les mois de février à avril 2016 et les mois de mai à novembre 2016 ne permet pas , compte tenu de l'exclusion du premier et du dernier trajet et des temps passés au domicile , de retenir l'existence d' heures supplémentaires sur l'ensemble de la période de travail

La cour confirme donc le jugement en ce qu'il a débouté l'appelant de ses demandes au titre des heures supplémentaires , de la contrepartie obligatoire en repos , du rappel de majoration de salaire sur heures supplémentaires découlant de la rémunération minimale prévue par la convention collective.

C/ sur le travail dissimulé

Aux termes des dispositions de l'article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1º Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2º Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3º Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux

cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Aux termes des dispositions de l'article L. 8223-1 du même code qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel l'employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le paiement de cette indemnité suppose de rapporter la preuve, outre de la violation des formalités visées à l'article L. 8223-1, de la volonté chez l'employeur de se soustraire intentionnellement à leur accomplissement.

En l'espèce l'appelant fonde essentiellement sa demande sur l'existence d'heures supplémentaires n'apparaissant pas sur ses bulletins de salaire.

Pour démontrer l'intention frauduleuse de l'employeur il soutient que ces heures ont été pour partie accomplies sans contrat de travail ni de sous-traitance au profit de la société Avenir Propreté dont il affirme que le gérant de la société Alliance Propreté Multiservice était dirigeant de fait

L'intimée fait valoir qu'en réalité la société Avenir propreté est intervenue ponctuellement en qualité de sous traitant de la société Alliance Propreté qui a toujours été le seul employeur de l'appelant même si il est exact que certains de ses contrats ont été repris par la société Avenir propreté.

En l'espèce la cour n'a pas retenu l'existence d'heures supplémentaires non rémunérées de sorte que l'argumentation de l'appelant sur l'accomplissement de telles heures au profit d'une société tierce ne peut être accueillie. Il convient par ailleurs de rappeler que l'appelant agit à l'encontre de cette société dans le cadre d'un dossier distinct .

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a débouté M [L] à ce titre .

D/ Sur la validité des avertissements 4,15 et 25 novembre 2016

L'appelant demande à la cour de prononcer la nullité des avertissements dont il soutient par ailleurs qu'ils sont constitutifs de harcèlement moral;

Il fait valoir que l'employeur a immédiatement sanctionné par un avertissement des réclamations de clients sans recueillir ses observations.

Selon l'article L.1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

En vertu de l'article L.1333-1 du code du travail, en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.

L'employeur fournit à la juridiction les éléments retenus pour prendre la sanction.

Selon les dispositions de Article L1332-2 du code du travail lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.

Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise.

Au cours de l'entretien, l'employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié.

La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé.

Selon l'article L.1333-2, le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si un doute subsiste, il profite au salarié

il ressort de ces textes que pour prononcer les avertissements l'employeur n'était pas tenu de convoquer préalablement son salarié pour recueillir ses explications

1/ sur l'avertissement du 4 novembre 2016

Cet avertissement ( pièce 11 de l'appelant ) a été prononcé pour manquement aux obligations du contrat de travail s'agissant de la gestion des salariés .

Au terme de son contrat l'appelant doit assurer la gestion administrative du personnel et le reporting auprès du gérant sur le pilotage des activités . Il doit assurer en permanence la présence du personnel et procéder au remplacement des salariées absents dans les plus bref délais.

L'avertissement fait référence à une réclamation du client GOM concernant le chantier Feu vert grand littoral ainsi qu'à la réclamation du client Wodjcik entreprise.

La réclamation du client GOM , porte d'une part sur le non respect du jour d'intervention en septembre 2016 , elle est jointe à la lettre d'avertissement avec le planning démontrant le bien fondé de la réclamation

Le client [XC] s'est plaint d'un défaut total d'intervention sur son chantier

La cour remarque que dans son courrier adressé à l'employeur le 30 janvier 2016 l'appelant ne conteste par la réalité des faits dénoncés par les clients , il se contente de répondre qu'il les a résolus a posteriori;

Il produit en pièce 72 un planning d'intervention chez le client GOM au mois d'octobre 2016 qui ne correspond pas à la réclamation du client ainsi qu'une pièce venant expliquer ,sans éléments objectif à l'appui , le décalage de la prestation du jeudi 27 octobre 2016 à la semaine suivante ce qui est à l'origine de la réclamation à l'employeur .

Il ne justifie pas du reporting au gérant de la société préalablement à l'intervention du client .

La cour considère donc que l'avertissement est justifié et confirme le jugement de ce chef.

2/ sur l'avertissement du 15 novembre 2016

Il est consécutif à une réclamation du client [D] adressée par mail à l'appelant le 10 novembre 2016 dont l'employeur a pris connaissance le même jour .Le client se plaint du manque de sacs poubelle à disposition de la femme de ménage or le contrat de travail de l'appelant lui fait obligation de veiller de manière permanente à la mise en place des moyens humains et matériels pour la bonne réalisation des chantiers dont il a la charge .

L'avertissement vise par ailleurs la plainte d' une femme de ménage qui fait état du manque de produits de ménagers le 14 novembre .

L'employeur souligne que l'appelant est injoignable pour faire face aux urgences .

La réclamation de M [D] est jointe à l'avertissement , l'appelant a répondu le jour même par mail qu'il déposerait le matériel le lundi suivant

Aux termes de ses conclusions il fait valoir que les femmes de ménages sont régulièrement approvisionnées et que la rupture est due à l'utilisation des sacs par le client lui même

La cour retient toutefois que l'appelant procède par voie d'affirmation pour imputer la rupture de stock au client alors que celui ci fait état de ce que le femme de ménage manque de sacs poubelles ' depuis un certain temps '.

Par ailleurs il ne justifie pas d'une impossibilité d'être joint en raison de la panne de son téléphone professionnel dont il ne rapporte aucunement la preuve.

La cour considère que l'avertissement est justifié.

3/ Sur l'avertissement du 25 novembre 2016

Il fait état d'une nouvelle plainte du client GOM le 24 novembre 2016 pour non exécution de la prestation ainsi que d'une plainte du client Provence Menuiserie pour défaut d'exécution de la prestation de vitrerie .

Il rappelle la diminution du chiffre d'affaire sur le secteur géré par l'appelant en conséquence du non suivi des chantiers à l'origine de résiliations.

La cour constate que l'appelant ne produit aucune pièce susceptible de justifier les défauts de prestations reprochés et se contente d'alléguer une surcharge de travail du salarié affecté à l la prestation chez Provence Menuiserie alors qu'aux termes de son contrat il a la charge de l'établissement des plannings et des embauches .

L'avertissement est donc justifié.

Les sanctions étant justifiées ne peuvent en conséquence être invoquée par l'appelant à l'appui du harcèlement moral qu'il dénonce.

E/ Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-1088 du 8 août 2016, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, dans sa rédaction postérieure à la loi n° 2018-1088 du 8 août 2016, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout

harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles

En l'espèce le salarié fait valoir

'Que depuis septembre 2016 il a reçu 18 lettres de son employeur de nature disciplinaire , qu'il lui a été dès lors impossible de travailler sereinement car il se sentait surveillé.

'Que son poste a été transféré à Mme [C] qu'il a croisée dans l'entreprise le 3 octobre 2016 avant même son entretien préalable ce qui démontre que la décision de licenciement était déjà prise.

'Que depuis septembre 2016 l'employeur ne lui adressait plus la parole et ne lui communiquait plus les réclamations des clients pour ensuite pouvoir le sanctionner

'Qu'il a multiplié les sanctions disciplinaires

'Qu'il lui a supprimé sa boîte mail

'Qu'il a multiplié les pressions en lui demandant notamment la mise à jour du tableau des salariés et de leurs coordonnées la veille de ses congés. Alors que cette tâche incombe à la secrétaire comptable de la société

'Que l'employeur l'a dénigré auprès des salariés de l'entreprise

' que ces conditions de travail étaient mauvaise

'Que l'employeur l'a contraint à travailler pour la société avenir propreté sans rémunération supplémentaire .

Ainsi que la Cour l'a déjà souligné les courriers relatifs aux procédures disciplinaires jugées régulières et bien fondées ne peuvent être constitutifs d'acte de harcèlement moral .

Pour le surplus la cour constate que l'appelant ne justifie pas de la matérialité d'un entretien d'embauche de Mme [C] préalablement à son propre licenciement ;Il n'établit pas plus la réalité de sa mise à l'écart par l'employeur ou son éviction de la relation avec les clients alors que dans le cadre des multiples visites de chantier auxquelles il procédait il pouvait nécessairement se trouver en contact et résoudre les réclamations éventuelles;

il ne justifie pas de la suppression de sa boîte mail mais d'une simple création d'adresse professionnelle , ni d'une demande de l'employeur en vue d'établir la liste des salariés et de leur coordonnées la veille de ses congés tandis que l'attestation de M [T] produite en pièce 76 n'est pas suffisamment circonstanciée pour permettre de considérer que les propos dont il fait étant ont été tenus avant la rupture du contrat de travail. Enfin à l'appui de la dénonciation de ses conditions de travail il produit un e mail relatif aux conditions de travail de Mme [E] , femme de ménage , et non aux siennes propres .Il n'établit par ailleurs aucune pression ni promesse de l'employeur pour le contraindre à travailler pour la société AVENIR PROPRETE MUTISERVICE;

Dans ces conditions le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de sa demande au titre du harcèlement moral

F/ Sur l'absence de visite médicale d'embauche

Aux termes de l'article R. 4624-10 du code du travail dans sa version en vigueur du 1er juillet 2012 au 1er janvier 2017, le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail.

Si le salarié n'a pas été soumis à la visite médicale d'embauche dans les délais prescrits il est toutefois défaillant à rapporter la preuve du préjudice qu'il aurait subi du fait de cette carence de l'employeur.

Par conséquent le jugement est infirmé de ce chef.

II/. Sur la rupture du contrat de travail

A/ sur la régularité de la procédure de licenciement

L'appelant considère que l'entretien préalable est irrégulier dès lors que la lettre de convocation ne mentionne pas les griefs qui lui sont reprochés ce qu'il l'a empêché de préparer sa défense .

Selon l'article L1232-2 du code du travail, « l'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation.

La cour de cassation considère que l'énonciation de l'objet de l'entretien ( le licenciement ) dans la lettre de convocation adressée au salarié par un employeur qui veut procéder à son licenciement et la tenue d'un entretien préalable au cours duquel le salarié, qui a la faculté d'être assisté, et peut se défendre contre les griefs formulés par son employeur, satisfont à l'exigence de loyauté et du respect des droits du salarié et particulièrement des dispositions de l'article 7 de la convention 158 de l'OIT quand bien même la lettre de convocation ne fait pas mention des griefs de l'employeur .

En conséquence l'entretien préalable du 19 décembre 2016 au cours duquel l'appelant à été assisté de Mme [KH] [S] est régulier et le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de sa demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement .

B/ sur le bien fondé du licenciement

Aux termes de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

L'article L.1235-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise (Soc. 26 février 1991, Bull. 1991, V, n° 97 ; Soc. 27 septembre 2007, n° 06-43.867). Il incombe à l'employeur d'en rapporter la preuve.

La lettre de licenciement pour faute grave en date du 6 janvier 2017, qui fixe les limites du litige, reproche à l'appelant

- l'absence de salarié sur le chantier du client [RA] le vendredi 16 décembre 2016 en dépit du courrier de réclamation adressé par le client le 6 décembre 2016 menaçant de résilier le contrat

- la chute du chiffre d'affaire en relation avec les résiliations reçues tout au long de l'année et les demandes des clients exprimant le souhait de voir la gestion de leur site confié à un autre intervenant sous menace de résiliation ,la résiliation du chantier NEOLOG en janvier 2017 pour ce motif , la menace de résiliation des contrats par GOM [Localité 7]

- le défaut total d'exécution de la prestation de vitrerie sur le chantier du grand conseil de la mutualité à [Localité 10] malgré plusieurs relances .

- la mise en sortie de l'entreprise de Mmes [U] , [W] ET [I] sans justificatifs de démission adressés à la comptable , l'envoi tardif des justificatifs rendant impossible la régularisation de la situation de Mme [I] tandis que la démission de Mme [W] n'a jamais été adressée bien qu'elle ait été absente depuis le mois de mai 2016 outre l'octroi d'un CDD à la même salariée le 4 juin 2016 sans prise en compte de l'absence injustifiée depuis le 6 août 2016 ni alerte donnée à l'employeur

- l'emploi de Mme [P] sans DUE en novembre 2016 , et une DUE adressé le 7 décembre 2016 pour une prise de poste au 3 décembre 2016

Et conclut à une attitude désinvolte et un manque de professionnalisme constitutifs de faute grave.

Il convient d'examiner si l'employeur rapporte la preuve des griefs qu'il invoque.

1/ Sur le défaut de prestation du 16 décembre 2016 sur le chantier du client [RA]

C'est vainement que l'appelant soutient que l'employeur a épuisé son pouvoir disciplinaire alors que l'avertissement en date du 4 novembre 2016 sanctionnait des faits antérieurs .

Il ressort des pièces produites aux débats que le 6 décembre 2016 ( p 22 de l'intimée ) la société s'est plainte de la mauvaise exécution des prestations. Elle dénonçait ultérieurement un défaut de prestation le 16 décembre 2016

L'appelant ne conteste pas la réalité de l'absence de prestation le 16 décembre , il en conteste le caractère fautif au motif que le client qui avait accepté de changer le jour de la prestation confiée à Mme [K] s'est ravisé empêchant la salariée , employée le jour dit chez Mac Donald's, de lui donner satisfaction.

Toutefois la cour retient que l'appelant ne produit aux débats aucun document justifiant d'un accord du client pour changer le jour de la prestation .

En conséquence le grief est établi .

2/ Sur la chute du chiffre d'affaire en relation avec les résiliations des clients mécontents des prestations , la résiliation par neolog , la menace de résiliation par la société GOM et le défaut d'exécution des prestations pour le grand conseil de la mutualité à [Localité 10].

La société intimée produit aux débats des pièces largement postérieures à l'embauche de l'appelant en mars 2015 dont il ressort que

'la société YESS ELECTRIQUE a résilié son contrat Le 16 septembre 2015 au motif de la persistance de la dégradation des prestations de nettoyage sur son agence de [Localité 16] ( secteur de l'appelant ) et sa direction régionale en dépit d'une situation souvent signalée

'Que la société DHL [Localité 7] a résilié son contrat le 8 février 2016 en raison de la qualité des prestations de service après échange de lails

' que la Docteur [FO] installé à [Localité 7] a résilié son contrat le 23 novembre 2015 en raison des plaintes de ses clients faisant état de la saleté de son cabinet dont le nettoyage n'était pas fait ainsi que les vitres l'obligeant à intervenir pour suppléer la technicienne

'Que la société EDEA à [Localité 9] a résilié son contrat le 26 mai 2016

pour absentéisme , non respect du jour de l'entretien et absence totale d'entretien

'Que la société AMERICAN VINTAGE A [Localité 14] a résilié son contrat de nettoyage de vitres de sa boutique de [Localité 7] le 31 MAI 2016

'Que la société CIC a résilié son contrat le 22 octobre 2016

'Que la société SNG IMMOBILIER a résilié son contrat le 9 septembre 2016 suite aux plaintes des locataires concernant le nettoyage de l'immeuble

'Que la société optimum tracker a résilié son contrat le 21 octobre 2016 pour défaut de réalisation des prestation

La cour retient toutefois que l'employeur a sanctionné ces faits par la lettre de mise en garde adressée à son salarié le 31 octobre 2016 .

Si aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, les dispositions de L. 1332-4 du code du travail ne font pas obstacle à la prise en considération de faits antérieurs à deux mois dès lors que le comportement du salarié s'est poursuivi ou s'est réitéré dans ce délai (Soc., 15 juin 2022, pourvoi n° 20-23.183)

Or l'employeur fait en l'espèce état de la perte du chantier NEOLOG en janvier 2017 , de nouveaux faits concernant le client GOM et le grand conseil de la mutualité .

La cour ne trouve au dossier aucune pièce justifiant d'une résiliation par NEOLOG

En revanche l'intimée justifie de la réclamation de la société GOM pour prestation non réalisée au centre FEU VERT DE [Localité 6] le 16 décembre 2016 sans avis au client , de la mise en cause personnelle de M [F] en ces termes ' votre inspecteur ne gère pas comme il le devrait le suivi des chantiers et surtout ses agents de nettoyage ' ' en clair vos agents font comme ils veulent sans prévenir M [F] et ce sont mes clients qui en pâtissent ' et de la mise en péril du partenariat pour les marchés nationaux de GOM PROPRETÉ (feu vert , Marionnaud)

Le grief est donc partiellement établi.

3/ Sur les fautes dans la gestion des salariés

Aux termes de son contrat de travail l'appelant est tenu d'assurer la gestion du personnel en interface avec le service des ressources humaines dans le respect de la législation.

a) sur l'emploi de Mme [B]

La lettre de licenciement reproche à l'appelant l'emploi de Mme [B] sans contrat de travail en novembre 2016. L'intimée produit aux débats l'attestation circonstanciée de Mme [H] sécrétaire comptable faisant état de propos de l'appelant en ce sens .

Elle est toutefois contestée par l'appelant qui fait valoir que Mme [B] qui a rompu un CDI au 30 octobre 2016 , a retravaillé en CDD à compter du mois de décembre 2016 jusqu'au 31 janvier 2017 , la prestation de travail de novembre 2016 au profit des chantiers CFA [Localité 3], AMETRA [Localité 15] et [Adresse 12] [Localité 7] ayant été accomplie par M [Z] qui en atteste .

Pour sa part Mme [B] atteste ne pas avoir travaillé d'octobre 2016 à janvier 2017.

Néanmoins les affirmations de Mme [B] sont contredites par l'attestation de Mme [H] , l'existence d'un CDD en décembre 2016 accepté par la salariée (pièce 89 de l'appelant), l'émission de bulletins de salaires correspondant et la perceptions des salaires y compris pour le mois de novembre 2016 .

L'attestation de M [DF] vise essentiellement à dédouaner M [B] de toute imputation de travail dissimulé pour le mois de novembre 2016 ainsi que le confirme le mail de menace adressé à l'employeur ( P 77 de l'appelant , pièce 36 de l'employeur) , tandis que l'attestation de M [O] tend à dédouaner l'appelant .

La cour remarque toutefois que M [O] n'est pas pointé sur le chantiers CFA [Localité 3], AMETRA [Localité 15] et [Adresse 12] [Localité 7] en novembre 2016( pièces 43 et 44 de l'intimée) de sorte que son attestation est dénuée de force probante .

La cour considère que le grief est établi.

b) sur la transmission des lettres de démission de Mmes [U] , [I] et [W]

Le contrat de travail de l'appelant dispose en son article 6 qu'il doit remettre au secrétariat de l'établissement tout renseignement relatif au personnel et transmettre tout documents présenté par les salariés

Pour preuve de l'absence de transmission des lettres de démissions l'intimée produit l'attestation de Mme [H] et les mails qui lui ont été adressés par l'appelant le 8 décembre 2016 pour lui transmettre la démission de Mme [J] formalisée le 12 octobre 2016 pour le 12 novembre 2016 ainsi que le 16 décembre 2016 pour transmettre la démission de Mme [I] formalisée le 30 octobre 2016 pour le 30 novembre 2016 ( pièces 68 et 69 de l'intimée)

L'appelant conteste le grief au motif que Mmes [J] et [I] ont adressé leurs démissions directement à l'employeur tandis que Mme [W] qui ne s'est plus présentée sur son lieu de travail a été placée en absence injustifiée en août et septembre 2016 , le défaut de suivi de son dossier étant imputable aux remplaçantes de Mme [H] en congé maternité.

Il produit aux débats sa feuille de contrôle des salariés pour le mois de novembre 2016 établie le 4 décembre 2016 , des photos des lettres de démission de Mmes [J] et [I] ainsi que les feuilles de pointage de Mme [W] ( pièce 23-24 ) .

La cour retient que la production par l'appelant de sa feuille de contrôle de pointage des salariées établie le 4 décembre 2016 portant la mention ' STC ' ( pour solde de tout compte ) et la date de sortie des effectifs correspondant aux dates figurant dans les lettres de démission de Mesdames [J] et [I] démontre que M [Y] avait connaissance des lettres de démission des salariées qu'il produit en photo .Elle retient qu'il a adressé ces lettres à Mme [H] par mail après l'établissement de la feuille de pointage transmise à l'entreprise et sans commentaire d'un éventuel envoi de l'original par le salarié lui même ce qui accrédite l'attestation produite par l'intimée

Concernant Mme [NR] la cour note qu'elle est également notée ' STC ' le 5 novembre 2016 et a été placée en absence injustifiée pour les mois d'août et septembre 2016 , l'intimée ne produit toutefois aucune document justifiant d'une absence depuis le mois de mai ainsi que reproché dans la lettre de licenciement , ni ne produit le CDD conclu le 6 aout 2016 par l'appelant pendant l'absence injustifée . Le grief concernant cette salariée n'est donc pas établi.

En conclusion la cour considère que compte tenu de leur multiplicité et de leur récurrence ,en dépit des avertissements de l'employeur , les griefs retenus sont constitutifs de négligences graves qui ne peuvent s'analyser en insuffisance professionnelle au regard du curriculum vitae de l'appelant démontrant une expérience ancienne dans l'exercice de fonctions similaires mais également de la période d'essai précédé d'une collaboration en qualité de sous traitant. Compte tenu des pertes de marchés engendrées , de l'atteinte consécutive à l'image de l'entreprise sur le secteur géré et de la perte de confiance de l'employeur qui en est résultée la poursuite du contrat de travail s'avérait impossible . Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a retenu le bien fondé de la mesure de licenciement

Le caractère brutal du licenciement , précédé d'une mise en garde et de trois avertissements n'est pas établi tandis que la cour a déjà affirmé que la réception du successeur dans les locaux de l'entreprise antérieurement au licenciement n'est pas établie de sorte que le licenciement est également dépourvu de caractère vexatoire , le jugement est donc confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de sa demande de dommages intérêts de ce chef

III/. Sur les demandes au titre du préjudice moral résultant de l'exécution déloyale du contrat de travail

En l'espèce la cour a retenu l'absence de force probante des attestations de Mme [R], de M [DF] et de M [O], sur lesquelles l'appelant s'appuie pour démontrer une faute de l'employeur , pour des motifs étrangers à l'employeur .

Il ne lui appartient pas par ailleurs de critiquer les jugements non définitifs rendus par la conseil de prud'hommes de Marseille dans une instance distincte dont la décision , concernant M [O] ,ne fait pas grief à l'appelant .

L'appelant ne justifie d'aucun préjudice à l'appui de sa demande de dommages intérêts pour préjudice moral et défaut de loyauté , ni d'aucun manquement de l'employeur à son obligation de sécurité , le jugement est donc confirmé en ce qu'il a débouté l'appelant de sa demande de dommages intérêts ce chef

L'employeur démontre par la production de sa pièce 77 , régulièrement communiquée et qui ne saurait pas voie de conséquence être écartée des débats , que l'appelant a tenté de faire pression sur M [DF] pour l'amener à revenir sur sa mise en cause sans résultats néanmoins cette manoeuvre est postérieure à la rupture du contrat de travail et ne peut en conséquence fonder une demande de dommages intérêts pour inexécution fautive de ce dernier.

L'employeur soutient par ailleurs que pendant l'exécution du contrat l'appelant a falsifié des documents pour couvrir ses manquements dans l'exécution de ses obligations .

Il produit de manière régulière un constat d'huissier ( pièce 29 ) dont il ressort que sur l'ordinateur ' secrétaire pc ' de l'entreprise et dans un dossier dénommé MOMO 1( étant précisé que l'appelant signe ses mails momo ) attribué à l'appelant ont été retrouvé notamment des scanners de signature , tampons d'entreprises clientes , et documents vierges d'entreprises clientes pouvant servir la confection de documents falsifiés ;

Toutefois la cour note que ce constat effectué 6 mois après le licenciement démontre des modifications de fichiers postérieures au licenciement sans que l'employeur qui allègue que le salarié pouvait accéder à distance à l'ordinateur via l'installation du logiciel dénommé Team Viewer , n'en fasse la démonstration. A cet égard la cour ne saurait tenir pour preuve la plainte déposée par la société alliance propreté multiservice dont les suites sont à ce jour ignorées.

Enfin l'interprétation du contenu de la pièce 72 de l'intimée relative à la proposition de modification d'un compte rendu satisfaction client faite par l'appelant à Mme [N] de la société GOM est équivoque , les interlocuteurs ayant au préalable discuté de l'absence d'une case spécifique permettant de faire état d'une satisfaction moyenne .Le doute doit donc profiter à l'appelant sur ce point.

Dans ces conditions l'intimée est déboutée de sa demande de dommages intérêts et le jugement est confirmé.

Il convient de condamner l'employeur à remettre au salarié des documents de fin de contrats rectifiés portant notamment la classification de l'emploi occupé et la rémunération correspondante , ainsi qu'un bulletin de salaire rectifié de ce chef. Le prononcé d'une astreinte n'est pas nécessaire ;

Les sommes allouées porteront intérêts à compter du 15 mai 2017 date de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation , avec capitalisation des intérêts dus pour une année entière.

Chacune des parties succombant partiellement dans ses prétentions il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 en première instance comme en appel .

La cour fait masse des dépens de première instance et d'appel et dit qu'ils seront partagés par moitié entre les parties.

PAR CES MOTIFS

LA COUR STATUANT CONTRADICTOIREMENT

déclare recevables l'ensemble des pièces produites par M [Y]

Infirme le jugement en ce qu'il a :

- débouté M [Y] de sa demande au titre de la classification professionnel et du rappel de salaire afférent

- condamné la société ALLIANCE PROPRETÉ MULTISERVICES à payer à M [Y] la somme de 200 euros au titre de l'absence de visite médicale d'embauche et la somme de 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau de ces chefs

- Classe M [Y] au niveau agent de Maîtrise MP5 de la convention collective des entreprise de propreté

- Condamne la société ALLIANCE PROPRETÉ MULTISERVICES à payer à M [Y] la somme de 5534,78 euros outre 553,47 euros au titre des congés payés afférents au titre de rappel de salaire sur la classification MP5 avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2017 .

- Ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière

- Condamne la société ALLIANCE PROPRETÉ MULTISERVICES à remettre à M [Y] des documents de fin de contrat rectifié faisant état de la qualification retenue par le présent arrêt et un bulletin de salaire rectificatifs mentionnant les sommes perçues à titre de rappels de salaires.

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 au profit de l'une ou l'autre partie en première instance comme en appel

Confirme le jugement pour le surplus

Fait masse des dépens et dit qu'ils seront partagés par moitié entre les parties.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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