CA Paris, Pôle 1 - ch. 11, 5 mars 2025, n° 25/01197
PARIS
Ordonnance
Autre
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
L. 742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour
des étrangers et du droit d'asile
ORDONNANCE DU 05 MARS 2025
(1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 25/01197 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CK4VB
Décision déférée : ordonnance rendue le 03 mars 2025, à 16h04, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris
Nous, Pascal Latournald, magistrat à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Catherine Charles, greffier aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANT :
M. [W] [T] [F]
né le 19 octobre 2000 à [Localité 2], de nationalité colombienne
RETENU au centre de rétention : [3]
assisté de Me Soufia Henni, avocat de permanence au barreau de Paris et de Mme [V] [Y] (Interprète en espagnol) tout au long de la procédure devant la cour et lors de la notification de la présente ordonnance, serment préalablement prêté
INTIMÉ :
LE PREFET DE POLICE
représenté par Me Isabelle Zerad du cabinet Tomasi, avocat au barreau de Lyon
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l'heure de l'audience
ORDONNANCE :
- contradictoire
- prononcée en audience publique
- Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l'application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;
Constatant qu'aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'est disponible pour l'audience de ce jour ;
- Vu l'ordonnance du 03 mars 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris, déclarant recevable la requête en contestation de la légalité du placement en rétention, ordonnant la jonction des deux procédures, la rejetant, disant n'y avoir lieu à statuer sur la requête en contestation de la décision de placement en rétention, rejetant l'exception de nullité soulevée et ordonnant la prolongation du maintien de M. [W] [T] [F], dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée maximale de 26 jours, à compter du 02 mars 2025 soit jusqu'au 28 mars 2025 ;
- Vu l'appel motivé interjeté le 03 mars 2025, à 18h39, réitéré le 04 mars 2025 à 14h01, par M. [W] [T] [F] ;
- Après avoir entendu les observations :
- de M. [W] [T] [F], assisté de son avocat, qui demande l'infirmation de l'ordonnance ;
- du conseil du préfet de police tendant à la confirmation de l'ordonnance ;
SUR QUOI,
Sur la procédure antérieure au placement en rétention
Aux termes de l'article L 741-6 du CESEDA, la décision de placement en rétention est prise par l'autorité administrative, après l'interpellation de l'étranger ou, le cas échéant, lors de sa retenue aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour, à l'expiration de sa garde à vue, ou à l'issue de sa période d'incarcération en cas de détention.
Il appartient au juge judiciaire, en sa qualité de gardien de la liberté individuelle, de se prononcer sur les irrégularités, invoquées par l'étranger, affectant les procédures préalables à la notification de la décision de placement en rétention. (2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.002, Bull. 1995, II, n° 221, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.006, Bull. 1995, II, n° 212, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.005, Bull., 1995, II, n° 211).
Aux termes de l'article L. 743-12 du CESEDA, " en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction (') qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger ". Aucune nullité ne peut être formelle, il doit donc être démontré en quoi celle-ci affecte effectivement les droits reconnus à l'étranger.
Il faut donc démontrer que l'irrégularité a causé à la personne une atteinte à ses intérêts " pas de nullité sans grief ".
De même en matière de contentieux administratif, l'ordre administratif, par arrêt d'assemblée du 23 décembre 2011, le Conseil d'État rendait l'arrêt Danthony énonçant qu'un vice de procédure n'entraîne l'illégalité d'une décision administrative qu'en deux situations :
¢soit s'il a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise,
¢soit s'il a privé les intéressés d'une garantie.
(CE Ass. 23 déc. 2011, Danthony)
Cette exigence du vice substantiel développé par l'arrêt du CE assemblée 23 décembre 2011 Danthony: suppose que seuls les vices de procédure ayant eu une influence sur le contenu de la décision ou ayant privé l'administré d'une garantie entraîne une irrégularité de la décision.
Il faut donc une atteinte aux droits de la personne.
Etant précisé que les irrégularités portant ou non atteinte aux droits de la personne relèvent de l'appréciation souveraine des juges du fond ( Cass. 1re civ., 15 oct. 2020, n° 20-15.691. - Cass. 1re civ., 10 févr. 2021, n° 19-25.224. Cass. 1re civ., 3 mars 2021, n° 19-23.581 ).
Pour soutenir l'irrégularité de la procédure et partant la nullité de la décision de placement en rétention, [W] [T] [F] allègue divers moyens dont :
"la tardiveté de l'information donnée au procureur de la République s'agissant de son placement en garde à vue, en l'espèce 25 minutes
"L'absence d'attestation de conformité de la procédure.
Sur l'absence de l'attestation de conformité
L'article 801-1 du code de procédure pénale prévoit '' I. - Tous les actes mentionnés au présent code, qu'il s'agisse d'actes d'enquête ou d'instruction ou de décisions juridictionnelles ou de toute autre pièce de la procédure, peuvent être établis ou convertis sous format numérique.
Le dossier de la procédure peut être intégralement conservé sous format numérique, dans des conditions sécurisées, sans nécessite d'un support papier.
Lorsque ces actes sont établis sous format numérique et que les dispositions du présent code exigent qu'ils soient signés, ils font l'objet, quel qu'en soit le nombre de pages et pourchaque signataire, d'une signature unique sous forme numérique, selon des modalités techniques qui garantissent que l'acte ne peut plus ensuite être modifié. Ces actes n'ont pas a être revêtus d'un sceau.''.
L'article D589 du code de procédure pénale prévoit que "Toute pièce de procédure, établie ou convertie sous format numérique en application du premier alinéa de l'article 801-1, peut être transmise ou consultée par les personnes autorisées selon les dispositions du présent code.
Les Services de la police nationale, les unités de la gendarmerie nationale, les fonctionnaires et agents exerçant des pouvoirs de police judiciaire, les services pénitentiaires et de la protection judiciaire de la jeunesse ainsi que, sur autorisation expresse, toute personne publique ou privée, peuvent établir, convertir et transmettre à l'autorité judiciaire des pièces de procédure sous format numérique, sans nécessité d'un support papier.
Les autorisations mentionnées à l'alinéa précèdent peuvent être délivrées soit, dans le cadre d'un protocole, par le ministère de la justice ou à défaut par les chefs de la juridiction destinataire, soit dans le cadre d'une procédure, par le magistrat sous la direction duquel l'enquête est menée, l'officier de police judiciaire procédant à l'enquête ou, sous le contrôle de ce dernier, l'agent de police judiciaire. S'agissant des personnes privées, le protocole précité peut être conclu avec la personne-morale ou l'organisme professionnel dont elles relèvent ou sous le contrôle duquel elles sont placées.
Tout support papier dont le contenu a été converti sous format numérique peut être restitué à son possesseur ou détruit dès lors que la pièce sous format numérique a vocation à être transmise à l'autorité judiciaire." .
L'article D589 -2 du code de procédure pénale précise que 'Constituent des procédés de signature sous forme numérique au sens du troisième alinéa du I de l'article 801-1 la signature électronique et la signature manuscrite recueillie sous forme numérique.
Lorsqu'il n'est pas exigé que le signataire soit identifié personnellement au sein de l'acte, est assimilé a un procédé de signature sous forme numérique le cachet électronique.
Toute personne, y compris celles concourant à la procédure au sens de l'article 11, peut recourir aux procédés mentionnés aux alinéas précédents.".
L'article A53-8 du code de procédure pénale dispose que 'Toute pièce de procédure sous format numérique peut, s'il y a lieu, être imprimée par les magistrats et agents de greffe qui les assistent, les services de la police nationale, les unités de Ia gendarmerie nationale, les fonctionnaires et agents exerçant des pouvoirs de police judiciaire, les services pénitentiaires ou de la protection judiciaire de la jeunesse afin d'être remise ou transmise sous format papier.
Les pièces ayant fait |'objet d'un procédé de signature sous forme numérique au sens de l'article D. 589-2 conservent leur valeur probante, après leur impression, s'il est joint une attestation unique indiquant qu'elles sont fidèles à leur version sous format numérique dont est détenteur le service mentionné au premier alinéa ou si chaque impression fait l'objet d'une mention certifiant sa fidélité par le service précité."
En l'espèce il ressort des pièces de la procédure établie par la police aux frontières de Roissy aeroport, que chacun des procès-verbaux a été signé soit par signature électronique pour les agents de police, soit de façon manuscrite selon procédé numérique.
Il est exact que ne figure pas en procédure l'attestation unique indiquant que les pèces imprimées sont fidèles à la version numérique.
Toutefois le retenu ne fait pas valoir qu'un des procès-verbaux qui figure au dossier sous forme papier ne correspondrait pas à celui de la version numérique, et ne justifie pas que cette irrégularité porte atteinte à ses droits, ce moyen sera rejeté.
Le moyen de nullité sera donc rejeté.
Sur le moyen tiré de l'avis tardif au procureur de la République du placement en garde à vue
Selon les dispositions de l'article 63 I du code de procédure pénale, 'Seul un officier de police judiciaire peut, d'office ou sur instruction du procureur de la République, placer une personne en garde à vue. Dès le début de la mesure, l'officier de police judiciaire informe le procureur de la République, par tout moyen, du placement de la personne en garde à vue. Il lui donne connaissance des motifs justifiant, en application de l'article 62-2, ce placement et l'avise de la qualification des faits qu'il a notifiée à la personne en application du 2° de l'article 63-1. Le procureur de la République peut modifier cette qualification ; dans ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à la personne dans les conditions prévues au même article 63-1.'
Il importe de rappeler que l'heure de début de la garde à vue, pour l'application de la disposition susvisée, s'entend de l'heure de présentation à l'officier de police judiciaire.
En l'espèce, [W] [T] [F] a été interpellé et placé en garde à vue le 27 février 2025 à 8 heures, et l'avis au Procureur de la République date du même jour à 8 heures 25, de sorte que ce délai de 25 minutes ne saurait être considéré comme tardif.
Dès lors, le moyen soulevé sera rejeté.
Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention
Le contentieux de la contestation de la régularité du placement en rétention (erreur manifeste d'appréciation ou défaut de motivation) ne peut être porté devant la cour d'appel que s'il a fait l'objet d'une requête écrite au juge dans les 4 jours du placement en rétention, sauf à vider de leur sens les dispositions légales de l'article L.741-10 du CESEDA imposant un délai strict de 4 jours et une requête écrite au magistrat du siège.
En l'espèce le retenu avait fait parvenir à la juridiction de première instance une requête en contestation dans les délais.
Sur le moyen tiré de l'absence de motivation de l'arrêté de placement en rétention
Aux termes de l'article L 741-6 du CESEDA, la décision de placement en rétention est prise par l'autorité administrative. Elle est écrite et motivée.
Aux termes des articles combinés L. 211-5 du Code des relations entre le public et l'administration et L. 741-6 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la motivation des actes administratifs en ce compris les décisions de placement en rétention doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, ce qui doit s'entendre comme les éléments factuels qui justifient le recours à la mesure.
Par arrêt du 5 octobre 2022 (Cass.civ.1 ère - n°21-14.571), la 1 ère Chambre civile de la Cour de cassation a rappelé : " la décision de placement en rétention administrative doit être écrite et motivée. Pour satisfaire à l'exigence de motivation, la décision doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
L'obligation de motivation des actes administratifs, sanctionnée au titre du contrôle de la légalité externe de l'acte, doit être existante, factuelle en rapport avec la situation de l'intéressé et non stéréotypée.
Cependant, cette motivation n'est pas tenue de reprendre l'ensemble des éléments de la personnalité ou de la situation de fait de l'intéressé dès lors qu'elle contient des motifs spécifiques à l'étrangers sur lesquels l'autorité préfectorale a appuyé sa décision.
Il est constant que le préfet statue en fonction des éléments qui sont en sa possession au moment où il prend son arrêté.
Ainsi, dés lors que l'arrêté de placement en rétention administrative contient des motivations individualisées justifiant, au regard des articles L 741-1 et L 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'option prise par l'autorité préfectorale quant à la rétention et mentionnant l'absence de vulnérabilité au sens de l'article L 741-4 du même code, l'acte administratif doit être reconnu comme comportant une motivation suffisante indépendamment de toute appréciation de fond.
En défense, il est fait grief à la décision de placement en centre de rétention de ne pas ne remplir pas les exigences de motivations posées par la loi.
Sur ce,
La cour constate que l'arrêté de placement en rétention fait expressément référence à l'obligation de quitter le territoire français (OQTF) prise le même jour.
De plus, l'arrêté de placement en rétention administrative est motivé en relevant que [W] [T] [F] :
- A explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son OQTF,
- A fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par un état membre de SCHENGEN
- Ne justifie pas de résidence effective ou permanente,
- Ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement.
Aussi, la présence d'une motivation de l'arrêté est suffisante en soi.
Ce moyen de légalité est écarté.
Sur le moyen tiré d'une violation du principe de proportionnalité
En application de l'article L.741-1 du CESEDA, " L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision ".
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente. "
Enfin, l'article L. 741-4 énonce que " La décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.
Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention. "
L'article L741-6 du CESEDA qui implique que la décision de placement en rétention soit " écrite et motivée "."
Il ne résulte pas de ce texte la nécessité de mentionner l'ensemble des éléments personnels professionnels et familiaux inhérents à l'intéressé mais de préciser les points sur lesquels la décision de rétention se fonde.
De sorte que le préfet qui n'est pas tenu de de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l'intéressé mais seulement des motifs positifs qu'il retient qui suffisent à justifier le placement en rétention.
S'agissant du contrôle opéré par le juge, concernant cette motivation, il y a lieu de se placer à la date à laquelle le préfet a statué pour procéder à l'examen de la légalité de l'arrêté de placement en rétention.
Il convient de rappeler que sous couvert de contrôle de proportionnalité le juge judiciaire ne saurait se prononcer sur le bien-fondé de la décision préfectorale d'éloignement de l'intéressé et donc sur une quelconque appréciation du " droit au séjour " qui serait invoqué par l'intéressé.
L'intéressé fait valoir un défaut d'examen sérieux et individuel de sa situation personnelle puisqu'il a remis son passeport et dispose d'une adresse en France,
Sur ce
La cour relève que l'arrêté de placement en rétention apparaît suffisamment motivé au regard de la situation personnelle de [W] [T] [F] puisqu'il ressort que ce dernier ne présente pas de garanties propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement dans la mesure où il a déjà fait l'objet d'un placement en zone d'attente le 22 février 2025 et qu'il a mis en échec son retour en Colombie et a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son OQTF, a déjà fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par un état membre de SCHENGEN et ne justifie pas de résidence effective ou permanente, sauf à produire pour les besoins de l'audience une attestation d'hébergement chez un compatriote résidant à [Localité 1], laquelle n'emporte pas la conviction de la cour sur sa sincérité.
Cet arrêté de placement en rétention et portant obligation de quitter le territoire sans délai prononcé le 27 février 2025, lequel considérait qu'il ressortait de l'examen de sa situation, que l'intéressé était célibataire et sans enfant de sorte qu'il n'y a pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale.
En conséquence, au vu de ces éléments, il apparaît que la décision de placement en rétention est motivée et proportionnée.
Sur la demande d'assignation à résidence
Aux termes de l'article L. 743-13 du CESEDA, le juge peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives, après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la mesure d'éloignement en instance d'exécution.
L'assignation à résidence concernant un étranger qui s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français en vigueur, d'une interdiction de retour sur le territoire français en vigueur, d'une interdiction de circulation sur le territoire français en vigueur, d'une interdiction administrative du territoire en vigueur, d'une mesure de reconduite à la frontière en vigueur, d'une interdiction du territoire dont il n'a pas été relevé, ou d'une mesure d'expulsion en vigueur doit faire l'objet d'une motivation spéciale.
[W] [T] [F] conteste l'arrêté de placement en rétention pris à son encontre au motif qu'il n'aurait pas tenu compte de sa situation personnelle, et notamment du fait qu'il dispose d'une adresse en France.
S'agissant de l'absence de garanties de représentation, après avoir rappelé les articles L 741-1 et L 612-3 du CESEDA, le représentant de la Préfecture conclut que l'attestation d'hébergement présentée est postérieure à sa décision de placement en centre de rétention administrative et qu'elle est insuffisante à fournir des garanties de représentation suffisantes pour que le requérant soit assigné à résidence.
Sur ce,
A titre liminaire, il convient de souligner qu'un placement puis un maintien en rétention ont pour but d'assurer l'effectivité d'une mesure de reconduite à la frontière, ou d'éloignement du territoire français, et que la motivation de tels actes ne s'apprécie pas seulement par rapport à des garanties de représentation formelles (passeport, adresse) mais aussi par rapport à l'évaluation de la volonté de l'étranger de se conformer aux décisions administratives le concernant, autrement dit concrètement celle d'obtempérer aux décisions administratives quand il est invité à quitter le territoire national français.
Eu égard au texte précité, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile confère au magistrat du siège la possibilité d'ordonner une assignation à résidence de l'étranger qui dispose de " garanties de représentation effectives". Ces garanties résultent de deux éléments : l'existence d'un domicile connu et la présentation d'un document d'identité permettant l'admission dans le pays de retour.
La remise du passeport à un service de police ou de gendarmerie doit être réalisée au préalable, le magistrat ne pouvant pas prescrire cette obligation le jour où il prononce l'assignation à résidence (Cass. 1re civ., 4 juill. 2018, n° 17-20.760 : JurisData n° 2018-011772).
En l'espèce force est de constater que l'appelant a remis passeport postérieurement à son placement en rétention.
De plus il a démontré sa volonté de ne pas se conformer à la décision de quitter l'espace SCHENGEN puisqu'il a déjà mis en échec son retour en Colombie alors qu'il était en zone d'attente.
Enfin il ne produit aucune attestation de logement ce qui ne saurait constituer une garantie suffisante et justifier du domicile fixe de l'intéressé.
Aucun autre moyen n'étant invoqué au soutien des critiques articulées à l'encontre de la décision dont appel, celle-ci sera confirmée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
CONFIRMONS l'ordonnance,
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 05 mars 2025 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS : Pour information : L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L'intéressé L'interprète L'avocat de l'intéressé
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
L. 742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour
des étrangers et du droit d'asile
ORDONNANCE DU 05 MARS 2025
(1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 25/01197 - N° Portalis 35L7-V-B7J-CK4VB
Décision déférée : ordonnance rendue le 03 mars 2025, à 16h04, par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris
Nous, Pascal Latournald, magistrat à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Catherine Charles, greffier aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANT :
M. [W] [T] [F]
né le 19 octobre 2000 à [Localité 2], de nationalité colombienne
RETENU au centre de rétention : [3]
assisté de Me Soufia Henni, avocat de permanence au barreau de Paris et de Mme [V] [Y] (Interprète en espagnol) tout au long de la procédure devant la cour et lors de la notification de la présente ordonnance, serment préalablement prêté
INTIMÉ :
LE PREFET DE POLICE
représenté par Me Isabelle Zerad du cabinet Tomasi, avocat au barreau de Lyon
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l'heure de l'audience
ORDONNANCE :
- contradictoire
- prononcée en audience publique
- Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l'application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;
Constatant qu'aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'est disponible pour l'audience de ce jour ;
- Vu l'ordonnance du 03 mars 2025 du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Paris, déclarant recevable la requête en contestation de la légalité du placement en rétention, ordonnant la jonction des deux procédures, la rejetant, disant n'y avoir lieu à statuer sur la requête en contestation de la décision de placement en rétention, rejetant l'exception de nullité soulevée et ordonnant la prolongation du maintien de M. [W] [T] [F], dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée maximale de 26 jours, à compter du 02 mars 2025 soit jusqu'au 28 mars 2025 ;
- Vu l'appel motivé interjeté le 03 mars 2025, à 18h39, réitéré le 04 mars 2025 à 14h01, par M. [W] [T] [F] ;
- Après avoir entendu les observations :
- de M. [W] [T] [F], assisté de son avocat, qui demande l'infirmation de l'ordonnance ;
- du conseil du préfet de police tendant à la confirmation de l'ordonnance ;
SUR QUOI,
Sur la procédure antérieure au placement en rétention
Aux termes de l'article L 741-6 du CESEDA, la décision de placement en rétention est prise par l'autorité administrative, après l'interpellation de l'étranger ou, le cas échéant, lors de sa retenue aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour, à l'expiration de sa garde à vue, ou à l'issue de sa période d'incarcération en cas de détention.
Il appartient au juge judiciaire, en sa qualité de gardien de la liberté individuelle, de se prononcer sur les irrégularités, invoquées par l'étranger, affectant les procédures préalables à la notification de la décision de placement en rétention. (2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.002, Bull. 1995, II, n° 221, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.006, Bull. 1995, II, n° 212, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.005, Bull., 1995, II, n° 211).
Aux termes de l'article L. 743-12 du CESEDA, " en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction (') qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger ". Aucune nullité ne peut être formelle, il doit donc être démontré en quoi celle-ci affecte effectivement les droits reconnus à l'étranger.
Il faut donc démontrer que l'irrégularité a causé à la personne une atteinte à ses intérêts " pas de nullité sans grief ".
De même en matière de contentieux administratif, l'ordre administratif, par arrêt d'assemblée du 23 décembre 2011, le Conseil d'État rendait l'arrêt Danthony énonçant qu'un vice de procédure n'entraîne l'illégalité d'une décision administrative qu'en deux situations :
¢soit s'il a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise,
¢soit s'il a privé les intéressés d'une garantie.
(CE Ass. 23 déc. 2011, Danthony)
Cette exigence du vice substantiel développé par l'arrêt du CE assemblée 23 décembre 2011 Danthony: suppose que seuls les vices de procédure ayant eu une influence sur le contenu de la décision ou ayant privé l'administré d'une garantie entraîne une irrégularité de la décision.
Il faut donc une atteinte aux droits de la personne.
Etant précisé que les irrégularités portant ou non atteinte aux droits de la personne relèvent de l'appréciation souveraine des juges du fond ( Cass. 1re civ., 15 oct. 2020, n° 20-15.691. - Cass. 1re civ., 10 févr. 2021, n° 19-25.224. Cass. 1re civ., 3 mars 2021, n° 19-23.581 ).
Pour soutenir l'irrégularité de la procédure et partant la nullité de la décision de placement en rétention, [W] [T] [F] allègue divers moyens dont :
"la tardiveté de l'information donnée au procureur de la République s'agissant de son placement en garde à vue, en l'espèce 25 minutes
"L'absence d'attestation de conformité de la procédure.
Sur l'absence de l'attestation de conformité
L'article 801-1 du code de procédure pénale prévoit '' I. - Tous les actes mentionnés au présent code, qu'il s'agisse d'actes d'enquête ou d'instruction ou de décisions juridictionnelles ou de toute autre pièce de la procédure, peuvent être établis ou convertis sous format numérique.
Le dossier de la procédure peut être intégralement conservé sous format numérique, dans des conditions sécurisées, sans nécessite d'un support papier.
Lorsque ces actes sont établis sous format numérique et que les dispositions du présent code exigent qu'ils soient signés, ils font l'objet, quel qu'en soit le nombre de pages et pourchaque signataire, d'une signature unique sous forme numérique, selon des modalités techniques qui garantissent que l'acte ne peut plus ensuite être modifié. Ces actes n'ont pas a être revêtus d'un sceau.''.
L'article D589 du code de procédure pénale prévoit que "Toute pièce de procédure, établie ou convertie sous format numérique en application du premier alinéa de l'article 801-1, peut être transmise ou consultée par les personnes autorisées selon les dispositions du présent code.
Les Services de la police nationale, les unités de la gendarmerie nationale, les fonctionnaires et agents exerçant des pouvoirs de police judiciaire, les services pénitentiaires et de la protection judiciaire de la jeunesse ainsi que, sur autorisation expresse, toute personne publique ou privée, peuvent établir, convertir et transmettre à l'autorité judiciaire des pièces de procédure sous format numérique, sans nécessité d'un support papier.
Les autorisations mentionnées à l'alinéa précèdent peuvent être délivrées soit, dans le cadre d'un protocole, par le ministère de la justice ou à défaut par les chefs de la juridiction destinataire, soit dans le cadre d'une procédure, par le magistrat sous la direction duquel l'enquête est menée, l'officier de police judiciaire procédant à l'enquête ou, sous le contrôle de ce dernier, l'agent de police judiciaire. S'agissant des personnes privées, le protocole précité peut être conclu avec la personne-morale ou l'organisme professionnel dont elles relèvent ou sous le contrôle duquel elles sont placées.
Tout support papier dont le contenu a été converti sous format numérique peut être restitué à son possesseur ou détruit dès lors que la pièce sous format numérique a vocation à être transmise à l'autorité judiciaire." .
L'article D589 -2 du code de procédure pénale précise que 'Constituent des procédés de signature sous forme numérique au sens du troisième alinéa du I de l'article 801-1 la signature électronique et la signature manuscrite recueillie sous forme numérique.
Lorsqu'il n'est pas exigé que le signataire soit identifié personnellement au sein de l'acte, est assimilé a un procédé de signature sous forme numérique le cachet électronique.
Toute personne, y compris celles concourant à la procédure au sens de l'article 11, peut recourir aux procédés mentionnés aux alinéas précédents.".
L'article A53-8 du code de procédure pénale dispose que 'Toute pièce de procédure sous format numérique peut, s'il y a lieu, être imprimée par les magistrats et agents de greffe qui les assistent, les services de la police nationale, les unités de Ia gendarmerie nationale, les fonctionnaires et agents exerçant des pouvoirs de police judiciaire, les services pénitentiaires ou de la protection judiciaire de la jeunesse afin d'être remise ou transmise sous format papier.
Les pièces ayant fait |'objet d'un procédé de signature sous forme numérique au sens de l'article D. 589-2 conservent leur valeur probante, après leur impression, s'il est joint une attestation unique indiquant qu'elles sont fidèles à leur version sous format numérique dont est détenteur le service mentionné au premier alinéa ou si chaque impression fait l'objet d'une mention certifiant sa fidélité par le service précité."
En l'espèce il ressort des pièces de la procédure établie par la police aux frontières de Roissy aeroport, que chacun des procès-verbaux a été signé soit par signature électronique pour les agents de police, soit de façon manuscrite selon procédé numérique.
Il est exact que ne figure pas en procédure l'attestation unique indiquant que les pèces imprimées sont fidèles à la version numérique.
Toutefois le retenu ne fait pas valoir qu'un des procès-verbaux qui figure au dossier sous forme papier ne correspondrait pas à celui de la version numérique, et ne justifie pas que cette irrégularité porte atteinte à ses droits, ce moyen sera rejeté.
Le moyen de nullité sera donc rejeté.
Sur le moyen tiré de l'avis tardif au procureur de la République du placement en garde à vue
Selon les dispositions de l'article 63 I du code de procédure pénale, 'Seul un officier de police judiciaire peut, d'office ou sur instruction du procureur de la République, placer une personne en garde à vue. Dès le début de la mesure, l'officier de police judiciaire informe le procureur de la République, par tout moyen, du placement de la personne en garde à vue. Il lui donne connaissance des motifs justifiant, en application de l'article 62-2, ce placement et l'avise de la qualification des faits qu'il a notifiée à la personne en application du 2° de l'article 63-1. Le procureur de la République peut modifier cette qualification ; dans ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à la personne dans les conditions prévues au même article 63-1.'
Il importe de rappeler que l'heure de début de la garde à vue, pour l'application de la disposition susvisée, s'entend de l'heure de présentation à l'officier de police judiciaire.
En l'espèce, [W] [T] [F] a été interpellé et placé en garde à vue le 27 février 2025 à 8 heures, et l'avis au Procureur de la République date du même jour à 8 heures 25, de sorte que ce délai de 25 minutes ne saurait être considéré comme tardif.
Dès lors, le moyen soulevé sera rejeté.
Sur la contestation de l'arrêté de placement en rétention
Le contentieux de la contestation de la régularité du placement en rétention (erreur manifeste d'appréciation ou défaut de motivation) ne peut être porté devant la cour d'appel que s'il a fait l'objet d'une requête écrite au juge dans les 4 jours du placement en rétention, sauf à vider de leur sens les dispositions légales de l'article L.741-10 du CESEDA imposant un délai strict de 4 jours et une requête écrite au magistrat du siège.
En l'espèce le retenu avait fait parvenir à la juridiction de première instance une requête en contestation dans les délais.
Sur le moyen tiré de l'absence de motivation de l'arrêté de placement en rétention
Aux termes de l'article L 741-6 du CESEDA, la décision de placement en rétention est prise par l'autorité administrative. Elle est écrite et motivée.
Aux termes des articles combinés L. 211-5 du Code des relations entre le public et l'administration et L. 741-6 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la motivation des actes administratifs en ce compris les décisions de placement en rétention doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, ce qui doit s'entendre comme les éléments factuels qui justifient le recours à la mesure.
Par arrêt du 5 octobre 2022 (Cass.civ.1 ère - n°21-14.571), la 1 ère Chambre civile de la Cour de cassation a rappelé : " la décision de placement en rétention administrative doit être écrite et motivée. Pour satisfaire à l'exigence de motivation, la décision doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
L'obligation de motivation des actes administratifs, sanctionnée au titre du contrôle de la légalité externe de l'acte, doit être existante, factuelle en rapport avec la situation de l'intéressé et non stéréotypée.
Cependant, cette motivation n'est pas tenue de reprendre l'ensemble des éléments de la personnalité ou de la situation de fait de l'intéressé dès lors qu'elle contient des motifs spécifiques à l'étrangers sur lesquels l'autorité préfectorale a appuyé sa décision.
Il est constant que le préfet statue en fonction des éléments qui sont en sa possession au moment où il prend son arrêté.
Ainsi, dés lors que l'arrêté de placement en rétention administrative contient des motivations individualisées justifiant, au regard des articles L 741-1 et L 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'option prise par l'autorité préfectorale quant à la rétention et mentionnant l'absence de vulnérabilité au sens de l'article L 741-4 du même code, l'acte administratif doit être reconnu comme comportant une motivation suffisante indépendamment de toute appréciation de fond.
En défense, il est fait grief à la décision de placement en centre de rétention de ne pas ne remplir pas les exigences de motivations posées par la loi.
Sur ce,
La cour constate que l'arrêté de placement en rétention fait expressément référence à l'obligation de quitter le territoire français (OQTF) prise le même jour.
De plus, l'arrêté de placement en rétention administrative est motivé en relevant que [W] [T] [F] :
- A explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son OQTF,
- A fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par un état membre de SCHENGEN
- Ne justifie pas de résidence effective ou permanente,
- Ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement.
Aussi, la présence d'une motivation de l'arrêté est suffisante en soi.
Ce moyen de légalité est écarté.
Sur le moyen tiré d'une violation du principe de proportionnalité
En application de l'article L.741-1 du CESEDA, " L'autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quatre jours, l'étranger qui se trouve dans l'un des cas prévus à l'article L. 731-1 lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision ".
Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l'article L. 612-3 ou au regard de la menace pour l'ordre public que l'étranger représente. "
Enfin, l'article L. 741-4 énonce que " La décision de placement en rétention prend en compte l'état de vulnérabilité et tout handicap de l'étranger.
Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d'accompagnement de l'étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention. "
L'article L741-6 du CESEDA qui implique que la décision de placement en rétention soit " écrite et motivée "."
Il ne résulte pas de ce texte la nécessité de mentionner l'ensemble des éléments personnels professionnels et familiaux inhérents à l'intéressé mais de préciser les points sur lesquels la décision de rétention se fonde.
De sorte que le préfet qui n'est pas tenu de de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l'intéressé mais seulement des motifs positifs qu'il retient qui suffisent à justifier le placement en rétention.
S'agissant du contrôle opéré par le juge, concernant cette motivation, il y a lieu de se placer à la date à laquelle le préfet a statué pour procéder à l'examen de la légalité de l'arrêté de placement en rétention.
Il convient de rappeler que sous couvert de contrôle de proportionnalité le juge judiciaire ne saurait se prononcer sur le bien-fondé de la décision préfectorale d'éloignement de l'intéressé et donc sur une quelconque appréciation du " droit au séjour " qui serait invoqué par l'intéressé.
L'intéressé fait valoir un défaut d'examen sérieux et individuel de sa situation personnelle puisqu'il a remis son passeport et dispose d'une adresse en France,
Sur ce
La cour relève que l'arrêté de placement en rétention apparaît suffisamment motivé au regard de la situation personnelle de [W] [T] [F] puisqu'il ressort que ce dernier ne présente pas de garanties propres à prévenir le risque de soustraction à la mesure d'éloignement dans la mesure où il a déjà fait l'objet d'un placement en zone d'attente le 22 février 2025 et qu'il a mis en échec son retour en Colombie et a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son OQTF, a déjà fait l'objet d'une décision d'éloignement exécutoire prise par un état membre de SCHENGEN et ne justifie pas de résidence effective ou permanente, sauf à produire pour les besoins de l'audience une attestation d'hébergement chez un compatriote résidant à [Localité 1], laquelle n'emporte pas la conviction de la cour sur sa sincérité.
Cet arrêté de placement en rétention et portant obligation de quitter le territoire sans délai prononcé le 27 février 2025, lequel considérait qu'il ressortait de l'examen de sa situation, que l'intéressé était célibataire et sans enfant de sorte qu'il n'y a pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale.
En conséquence, au vu de ces éléments, il apparaît que la décision de placement en rétention est motivée et proportionnée.
Sur la demande d'assignation à résidence
Aux termes de l'article L. 743-13 du CESEDA, le juge peut ordonner l'assignation à résidence de l'étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives, après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l'original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d'un récépissé valant justification de l'identité et sur lequel est portée la mention de la mesure d'éloignement en instance d'exécution.
L'assignation à résidence concernant un étranger qui s'est préalablement soustrait à l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français en vigueur, d'une interdiction de retour sur le territoire français en vigueur, d'une interdiction de circulation sur le territoire français en vigueur, d'une interdiction administrative du territoire en vigueur, d'une mesure de reconduite à la frontière en vigueur, d'une interdiction du territoire dont il n'a pas été relevé, ou d'une mesure d'expulsion en vigueur doit faire l'objet d'une motivation spéciale.
[W] [T] [F] conteste l'arrêté de placement en rétention pris à son encontre au motif qu'il n'aurait pas tenu compte de sa situation personnelle, et notamment du fait qu'il dispose d'une adresse en France.
S'agissant de l'absence de garanties de représentation, après avoir rappelé les articles L 741-1 et L 612-3 du CESEDA, le représentant de la Préfecture conclut que l'attestation d'hébergement présentée est postérieure à sa décision de placement en centre de rétention administrative et qu'elle est insuffisante à fournir des garanties de représentation suffisantes pour que le requérant soit assigné à résidence.
Sur ce,
A titre liminaire, il convient de souligner qu'un placement puis un maintien en rétention ont pour but d'assurer l'effectivité d'une mesure de reconduite à la frontière, ou d'éloignement du territoire français, et que la motivation de tels actes ne s'apprécie pas seulement par rapport à des garanties de représentation formelles (passeport, adresse) mais aussi par rapport à l'évaluation de la volonté de l'étranger de se conformer aux décisions administratives le concernant, autrement dit concrètement celle d'obtempérer aux décisions administratives quand il est invité à quitter le territoire national français.
Eu égard au texte précité, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile confère au magistrat du siège la possibilité d'ordonner une assignation à résidence de l'étranger qui dispose de " garanties de représentation effectives". Ces garanties résultent de deux éléments : l'existence d'un domicile connu et la présentation d'un document d'identité permettant l'admission dans le pays de retour.
La remise du passeport à un service de police ou de gendarmerie doit être réalisée au préalable, le magistrat ne pouvant pas prescrire cette obligation le jour où il prononce l'assignation à résidence (Cass. 1re civ., 4 juill. 2018, n° 17-20.760 : JurisData n° 2018-011772).
En l'espèce force est de constater que l'appelant a remis passeport postérieurement à son placement en rétention.
De plus il a démontré sa volonté de ne pas se conformer à la décision de quitter l'espace SCHENGEN puisqu'il a déjà mis en échec son retour en Colombie alors qu'il était en zone d'attente.
Enfin il ne produit aucune attestation de logement ce qui ne saurait constituer une garantie suffisante et justifier du domicile fixe de l'intéressé.
Aucun autre moyen n'étant invoqué au soutien des critiques articulées à l'encontre de la décision dont appel, celle-ci sera confirmée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
CONFIRMONS l'ordonnance,
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 05 mars 2025 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS : Pour information : L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L'intéressé L'interprète L'avocat de l'intéressé