CA Aix-en-Provence, ch. 3-4, 6 mars 2025, n° 21/01476
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 06 MARS 2025
Rôle N° RG 21/01476 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG34M
[E] [O] épouse [X]
C/
[Y] [T]
SARL [10]
Société [7]
[A] [P]
Copie exécutoire délivrée
le : 6 Mars 2025
à :
Me Jean-françois JOURDAN
Me Sandra JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 03 Décembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 2017F00332.
APPELANTE
Madame [E] [O] épouse [X]
née le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 9], demeurant [Adresse 13]
représentée par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JF JOURDAN - PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Véronique BOLIMOWSKI de la SCP SCP DIDIER VALETTE - VÉRONIQUE BOLIMOWSKI, avocat au barreau de GRASSE,
INTIMES
Monsieur [Y] [T]
né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 6] (62), demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Michel LOPRESTI, avocat au barreau de GRASSE
SARL [10]
, demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Michel LOPRESTI, avocat au barreau de GRASSE
SELARL [7] es qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la SARL [10]
, demeurant [Adresse 5]
défaillante
PARTIE INTERVENANTE
Maître [A] [P]
es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL [10].
, demeurant [Adresse 3]
défaillant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 07 Janvier 2025 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente
Madame Laetitia VIGNON, Conseillère
Madame Gaëlle MARTIN, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2025,
Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La SARL [10], qui a pour dirigeant social M. [Y] [T], exploite un fonds de commerce de cave et restaurant.
Mme [E] [O] est intervenue au sein de la société [10] à deux titres:
- en qualité de salariée comptable à la suite de la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée, le 2 novembre 2020 et ce jusqu'au 7 novembre 2017, date de son licenciement pour faute grave,
- en qualité d'associée minoritaire, ayant acquis le 1er septembre 2012, 220 parts sociales sur les 1100 parts sociales composant le capital de ladite société, pour la somme de 100.000 euros.
Le capital social de la société [10], fixé à 110.000 euros, était divisé en 1100 parts sociales se répartissant comme suit :
- M. [Y] [T] 880 parts
- Mme [E] [O] 220 parts.
Par assignation du 27 novembre 2017, Mme [E] [O] faisait assigner M.[Y] [T] ainsi que la société [10] devant le tribunal de commerce de Cannes.
Se prévalant de sa qualité d'associée minoritaire au sein de la société [10] et, alléguant que son associé majoritaire aurait en sa qualité de gérant, commis divers manquements, elle sollicitait les indemnités suivantes :
- d'une part, au titre de l'action ut singuli, au profit de la société [10] (251.041,80 euros + 100.000 euros, le cas échéant à parfaire),
- d'autre part, en réparation de son propre préjudice personnel, une indemnité de 100.000 euros le cas échéant à parfaire.
Au cours de la procédure devant le tribunal de commerce de Cannes, la société [10] faisait l'objet de procédures collectives et des jugements suivants :
- par jugement du 29 mai 2018, le tribunal de commerce de Cannes ouvrait une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société [10] et désignait la société [7] en la personne de Maître [W], en qualité d'administrateur judiciaire ainsi que Maître [A] [P] aux fonctions de mandataire judiciaire,
- par jugement du 17 septembre 2019, le tribunal de commerce de Cannes arrêtait le plan de redressement par voie de continuation, nommait pour la durée du plan, Me [A] [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan, maintenait ce dernier comme mandataire judiciaire jusqu'à la fin de la procédure de vérification des créances, mettait fin à la mission de la société [7], prise en la personne de Me [J], fixait la durée du plan à dix années.
Les organes de la procédure de redressement judiciaire de la société [10] intervenaient volontairement à l'instance, par conclusions d'intervention volontaire séparées, sollicitant toutes deux la reconnaissance de la recevabilité de leurs interventions et indiquant toutes deux s'en remettre à la justice.
Aux termes de son jugement du 3 décembre 2020, le tribunal de commerce de Cannes se prononçait en ces termes :
- ordonne la cancellation des conclusions en défense de [Y] [T] au motif que les propos mettant en cause l'honnêteté de [E] [O], soulignant la stupidité de ses demandes et dénonçant son comportement frauduleux, revêtiraient un caractère outrageant et/ou injurieux,
- condamne M.[Y] [T] à payer à [E] [O] une somme d'un euro à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral,
- dit les interventions volontaires du mandataire judiciaire et de l'administrateur judiciaire irrecevables.
- dit irrecevable la demande de Mme [E] [O] visant à voir annuler le procès-verbal d'une assemblée générale du 16 novembre 2018,
- rejette l'irrecevabilité des demandes de [E] [O] tirée de son défaut de qualité à agir
et de la prescription triennale.
- déboute [E] [O] de ses demandes tendant à voir engager la responsabilité de [Y] [T] au titre de fautes de gestion contraires à l'intérêt social,
- déboute [E] [O] de sa demande tendant à voir dire et juger que la responsabilité de [Y] [T] se trouverait également engagée à l'égard de l'associe minoritaire,[E] [O] ne subissant pas un préjudice distinct de celui subi par la société,
- déboute [E] [O] de sa demande de voir condamner [Y] [T] au paiement d'une somme totale de 1.391.709,32 euros,
- donne acte à [Y] [T] qu'il reconnaissait que le montant du solde dû par la société [12] a la société [10] s'établit à 19.109,99 euros et de son engagement a rembourser cette créance pour partie,
- déboute [E] [O] de sa demande de voir condamner [Y] [T] à payer à la société [10] à titre de dommages et intérêts une somme de 100.000 euros outre intérêts au taux légal avec capitalisation,
- déboute [E] [O] de sa demande tendant à voir condamner [Y] [T] à lui payer à titre personnel une somme de 200.000 euros à a titre de dommages et intérêts au titre du préjudice personnel qu'elle aurait subi,
- déboute [E] [O] de sa demande de transmission du dossier au procureur de la république près le tribunal judiciaire de Grasse,
- déboute [E] [O] de sa demande de voir transmettre le dossier à l'administration fiscale,
- dit irrecevables les demandes de la société [10] pour n'être pas partie à l'instance,
- dit le tribunal de commerce incompétent pour connaître des demandes de [Y] [T] à l'encontre de [E] [O],
- déboute les parties de leur demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que chacun conservera ses dépens et frais du procès.
Mme [E] [O] a formé un appel le 1er février 2021 en intimant M. [Y] [T], la société [10], Maître [A] [P] en qualité de mandataire judiciaire de cette dernière, la société [7] en qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société [10].
La déclaration d'appel est ainsi rédigée :
- dit les interventions volontaires de Maître [P] es-qualité de commissaire à l'exécution du plan, et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] à la présente instance irrecevables,
- dit irrecevable la demande de Mme [E] [O] à l'encontre de la SARL [10] visant à voir annuler l'assemblée générale du 16 novembre 2018, cette société n'étant pas partie à l'instance,
- déboute Mme [E] [O] de sa demande à voir dire et juger que M. [Y] [T] a engagé sa responsabilité en commettant des fautes de gestion contraires à l'intérêt social,
affectant clairement la situation et le développement économique de la SARL [10],
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir dire et juger que la responsabilité de
M. [T] se trouve être également engagée vis-à-vis de l'actionnaire minoritaire, Mme
[E] [O] qui subit un préjudice distinct de celui subi par la société,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y]
[T] à procéder au remboursement dans les caisses de la SARL [10] les
sommes suivantes :
- 1) factures Millésime 85 : 124 034,76 euros,
- 2) factures ou livraisons marchandises : 62 234,00 euros (non réglées Club 108),
- 3) Smart : 7 371,80 euros,
- 4) voyage personnel M. [T] : 12 922,82 euros,
- 5) Réceptions personnelles M. [T] : 7 817,71 euros,
- 6) compte courant débiteur + rémunération indue : 110 280,03 euros,
- 7) intérêts bancaires supplémentaires : 13 351,27 euros,
- 8) frais acte et contentieux supplémentaires : 5 580,27 euros,
- 9) amendes et pénalités supplémentaires : 21 184,58 euros,
- 10) intérêts débiteurs : 26 680,07 euros,
- 11) recettes détournées de 2013 à 2016 : 1.000.252,01 euros
soit une somme totale de 1.391.709,32 euros,
- donne acte à M. [Y] [T] qu'il reconnait que, selon ses estimations, la société [12] devrait la somme de 19 109,99 euros à la SARL [10], somme qu'il s'engage à rembourser pour partie,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à verser à titre de dommages et intérêts à la SARL [10] une somme de 100.000 euros augmentée de l'intérêt au taux légal avec capitalisation dans les termes de l'article 1343-2 du
code Civil à compter de la décision à intervenir,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à verser au profit de Mme [E] [O] épouse [X] une somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au préjudice personnel subi par cette dernière lié à son comportement, et aux fautes commises à son préjudice,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande de transmission du présent dossier au Procureur de la République près le Tribunal Judiciaire de Grasse,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir transmettre le présent dossier à l'administration fiscale au titre de l'article L.101 du livre des procédures fiscales,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du
code de procédure civile,
- dit que chacun conservera ses dépens et frais du procès.
L'appelante notifiait sa déclaration d'appel les 30 avril et 3 mai 2021, par signification à l'étude pour les deux personnes concernées, à Me [A] [P] et à la société [7] en leurs qualités de mandataire judiciaire et d'administrateur judiciaire.
Par courrier du 4 mai 29 janvier 2021, la société [7] informait la cour que par jugement du 17 septembre 2019 il avait été mis fin à sa mission et que Me [A] [P] avait été désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
En cours de procédure, par jugement du 2 avril 2024, le tribunal de commerce de Cannes prononçait la résolution du plan de redressement et la liquidation judiciaire de la société [10].
Le 5 septembre 2024, l'appelante mettait en cause Me [A] [P] en qualité de liquidateur judiciaire, par signification de l'acte à personne morale.
Me [A] [P] n'intervenait pas à la procédure.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 10 décembre 2024.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 octobre 2024, Mme [E] [O] demande à la cour de :
- réformer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit les interventions volontaires de Maître [P] es-qualité de commissaire à l'exécution du plan, et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] à la présente instance irrecevables,
- dit irrecevable la demande de Mme [E] [O] à l'encontre de la SARL [10] visant à voir annuler l'assemblée générale du 16 novembre 2018, cette société n'étant pas partie à l'instance,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir dire et juger que M. [Y] [T] a engagé sa responsabilité en commettant des fautes de gestion contraires à l'intérêt social, affectant clairement la situation et le développement économique de la SARL [10],
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir dire et juger que la responsabilité de M. [T] se trouve être également engagée vis-à-vis de l'actionnaire minoritaire, Mme [E] [O] qui subit un préjudice distinct de celui subi par la société,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à procéder au remboursement dans les caisses de la SARL [10] les sommes suivantes :
- 1) factures Millésime 85 : 124 034,76 euros,
- 2)factures ou livraisons marchandises : 62 234,00 euros (non réglées Club 108),
- 3) Smart : 7 371,80 euros,
- 4) voyage personnel M. [T] : 12 922,82 euros,
- 5) Réceptions personnelles M. [T] : 7 817,71 euros,
- 6) compte courant débiteur + rémunération indue : 110 280,03 euros,
- 7) intérêts bancaires supplémentaires : 13 351,27 euros,
- 8) frais acte et contentieux supplémentaires : 5 580,27 euros,
- 9) amendes et pénalités supplémentaires : 21 184,58 euros,
- 10) intérêts débiteurs : 26 680,07 euros,
- 11) recettes détournées de 2013 à 2016 : 1.000.252,01 euros soit une somme totale de 1.391.709,32 euros,
- donné acte à M. [Y] [T] qu'il reconnait que, selon ses estimations, la société [12] devrait la somme de 19.109,99 euros à la SARL [10], somme qu'il s'engage à rembourser pour partie,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à verser à titre de dommages et intérêts à la SARL [10] une somme de 100.000 euros augmentée de l'intérêt au taux légal avec capitalisation dans les termes de l'article 1343-2 du code Civil à compter de la décision à intervenir,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à verser au profit de Mme [E] [O] épouse [X] une somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au préjudice personnel subi par cette dernière lié à son comportement, et aux fautes commises à son préjudice,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande de transmission du présent dossier au procureur de la république près le Tribunal Judiciaire de Grasse,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir transmettre le présent dossier à l'administration fiscale au titre de l'article L.101 du livre des procédures fiscales,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que chacun conservera ses dépens et frais du procès
Statuant de nouveau,
vu les articles l.223-22 et L 241-3 du code de commerce,
- accueillir valablement les interventions volontaires de Maître [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan, et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] à la présente instance ;
- prononcer la nullité de l'assemblée générale ordinaire du 16 novembre 2018 en toutes ses résolutions, pour abus de majorité, ladite assemblée ayant pour but de tenter de cacher, au bénéfice de M. [T], toutes les fautes de gestion commises par ce dernier sur les exercices 2012 à 2017,
- prononcer l'inopposabilité des comptes annuels de l'exercice clos le 31.12.2017 tant à Mme [O] en sa qualité d'associée minoritaire, qu'à la société [10], en raison de leurs inexactitudes et image infidèle ;
- condamner M. [Y] [T] qui a engagé sa responsabilité en commettant des fautes de gestion contraires à l'intérêt social, affectant clairement la situation et le développement économique de la SARL [10], à procéder au remboursement dans les caisses de la SARL [10] des sommes suivantes :
12) Factures Millésime 85 124 034,76 €
13) Factures ou livraisons marchandises Non réglées Club 108 62 234,00 €
14) Smart(véhicule) 7 371,80 €
15) Voyage personnel M. [T] 12 922,82 €
16) Réceptions personnelles M. [T] 7 817,71 €
17) Compte courant débiteur + rémunération indue 110 280,03 €
18) Intérêts bancaires supplémentaires 13 351,27 €
19) Frais acte et contentieux supplémentaires 5 580,27 €
20) Amendes et pénalités supplémentaires 21 184,58 €
21) Intérêts débiteurs 26 680,07 €
22) Recettes détournées de 2013 à 2016. 1.000.252,01€
Soit une somme totale de 1.391.709,32 €
- condamner M. [Y] [T] à verser à titre de dommages et intérêts à la SARL [10] une somme de 100.000 € augmentée de l'intérêt au taux légal avec capitalisation dans les termes de l'article 1343-2 du code civil à compter de l'assignation délivrée le 27 novembre 2017 ;
- condamner M. [Y] [T], qui a engagé sa responsabilité vis-à-vis de l'actionnaire minoritaire, Mme [E] [O] épouse [X], à lui verser une somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au préjudice personnel subi par cette dernière lié à son comportement, et aux fautes commises à son préjudice, augmentée de l'intérêt au taux légal avec capitalisation dans les termes de l'article 1343-2 du code civil à compter de l'assignation délivrée le 27 novembre 2017 ;
- ordonner la transmission du présent dossier au procureur de la république près le tribunal de grande instance de Grasse en application de l'article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale;
- communiquer à l'administration les éléments du présent dossier en application de l'article L 101 du code des procédures fiscales ;
- confirmer le jugement entrepris pour le surplus ;
y ajoutant, ordonner la cancellation des écritures d'appel signifiées le 22 juillet 2021 prises
sous la constitution de Me Sandra Juston reprenant les mêmes discours injurieux et /ou outrageants que ceux tenus en première instance ;
- condamner M. [Y] [T] au paiement au profit de Mme [E] [O] épouse [X] de la somme de 30.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 juillet 2021, M. [Y] [T] demande à la cour de :
- dire et juger Mme [E] [O] irrecevable et en tout cas mal fondée en son appel,
- dire et juger M. [Y] [T] recevable et bien fonde en ses conclusions et en son appel incident,
- réformer le jugement en ce qu'il a :
- ordonné la cancellation des conclusions de M. [Y] [T] alors que
lesdites écritures judiciaires ne contiennent ni propos injurieux ou outrageants,
- condamne M. [T] à payer à Mme [O] la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts en réparation d'un prétendu préjudice moral,
statuant de nouveau de ces chefs,
- débouter Mme [E] [O] de ses demandes, fins et conclusions à ce titre,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir soutenues par M. [Y] [T] tirées des règles de la prescription triennale et du défaut de qualité a agir de Mme [E] [O],
statuant de nouveau de ces chefs,
- dire et juger Mme [E] [O] irrecevable en son action ut singuli en application notamment des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile pour défaut de qualité et prescription triennale de l'article L223-23 du code de commerce,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [Y] [T] de sa demande de condamnation de Mme [E] [O] à lui payer à titre de dommages et intérêts une somme
à parfaire de 100.000 euros et en ce qu'il l'a également débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que concernant la condamnation aux dépens,
statuant de nouveau de ces chefs,
- faire notamment application des dispositions des articles 1240 et suivants du code civil et condamner Mme [E] [O] à payer à M. [Y] [T] à titre de dommages et intérêts, en réparation des préjudices de tous ordres subis, de nature économique,financière, juridique, morale, image, réputation et autres, à une somme à parfaire d'un montant de100.000 euros,
- condamner Mme [E] [O] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile a payer à M. [Y] [T] la somme de 25.000 euros en application des
dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- confirmer pour le surplus le jugement rendu par le tribunal de commerce de Cannes le 3 décembre 2020,
- débouter Mme [E] [O] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions pour le casou il serait admis la recevabilité de ses demandes malgré l'application des règles de la prescription triennale et son défaut de qualité a agir.
- dire et juger que Mme [E] [O] est défaillante à administrer la preuve dont elle à la charge de la commission par M. [Y] [T] d'un ou plusieurs manquements susceptibles de lui être imputés, ainsi que de l'existence d'un dommage réparable et d'un lien de causalité entre les dommages alléguée et les fautes alléguées et ce tant à l'égard de la société [10] qu'a l'égard de Mme [E] [O] a titre personnel.
- dire et juger que Mme [E] [O] est défaillante à administrer la preuve dont elle a la
charge de l'existence d'un dommage direct, certain, personnel et distinct de l'éventuel dommage
susceptible d'être cause à la personne morale.
- débouter en conséquence Mme [E] [O] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.En toute hypothèse, condamner Mme [E] [O] aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de Maître Sandra Juston, membre de la SCP Badie-Simon-Thibaud et Juston, avocat aux offres de droit.
MOTIFS
1-sur la recevabilité en première instance des interventions volontaires de Maître [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] en qualité d'administrateur judiciaire:
Vu l'article L 622-21 I et II du code de commerce dont il résulte que : L'administration de l'entreprise est assurée par son dirigeant et lorsque le tribunal, en application des dispositions de l'article L. 621-4, désigne un ou plusieurs administrateurs, il les charge ensemble ou séparément de surveiller le débiteur dans sa gestion ou de l'assister pour tous les actes de gestion ou pour certains d'entre eux.
Selon l'article 325 du code de procédure civile, l'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.
Vu l'article R 223-32 du code de commerce énonçant :Lorsque l'action sociale est intentée par un ou plusieurs associés, agissant soit individuellement, soit dans les conditions prévues à l'article R. 223-31, le tribunal ne peut statuer que si la société a été régulièrement mise en cause par l'intermédiaire de ses représentants légaux.Le tribunal peut désigner un mandataire ad hoc pour représenter la société dans l'instance, lorsqu'il existe un conflit d'intérêt entre celle-ci et ses représentants légaux.
Au cours de la procédure pendante devant le tribunal de commerce de Cannes, la société [10] faisait l'objet des procédures collectives et jugements suivants :
- par jugement du 29 mai 2018, le tribunal de commerce de Cannes ouvrait une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société [10] et désignait la société [7] en la personne de Maître [W], en qualité d'administrateur judiciaire ainsi que Maître [A] [P] aux fonctions de mandataire judiciaire,
- par jugement du 17 septembre 2019, le tribunal de commerce de Cannes arrêtait le plan de redressement par voie de continuation, nommait pour la durée du plan, Me [A] [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan, maintenait ce dernier comme mandataire judiciaire jusqu'à la fin de la procédure de vérification des créances, mettait fin à la mission de la société [7], prise en la personne de Me [J], fixait la durée du plan à dix années,
L'appelante demande d'abord à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit irrecevables les interventions volontaires de Maître [P] (en qualité de commissaire à l'exécution du plan) et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] ( en qualité d'administrateur judiciaire).
En première instance, Mme [E] [O] exerçait l'action sociale ut singuli pour le compte de la société au titre du préjudice subi par cette dernière, en sa qualité d'associée minoritaire. Elle sollicitait également l'annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018.
Mme [E] [O] avait fait assigner, outre M. [Y] [T], également la société [10], tandis que les organes de la procédure de redressement judiciaire intervenaient volontairement à l'instance (Me [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan et Me [W] en qualité d'administrateur judiciaire).
Il est de principe que lorsque l'action sociale est intentée par un associé, le tribunal ne peut statuer que si la société a été régulièrement mise en cause par l'intermédiaire de ses représentants légaux.
S'agissant tout d'abord de l'intervention volontaire de Me [W], en qualité d'administrateur judiciaire, celle-ci doit être déclarée irrecevable, au moment où le jugement a été rendu le 3 décembre 2020, dès lors que, par jugement du 17 septembre 2019, le tribunal de commerce de Cannes arrêtait le plan de redressement et mettait fin à la mission de la société [7]. En tout état de cause, l'intimée ne démontre pas quelle était la mission exacte de l'administrateur judiciaire, étant précisé qu'en cas de redressement judiciaire, l'administration de l'entreprise est assurée par son dirigeant et que l'administrateur n'a qu'une mission de surveillance de la gestion ou d'assistance.
S'agissant ensuite de l'intervention volontaire de Me [A] [P], en qualité de commissaire à l'exécution du plan, celle-ci est recevable, au regard des demandes indemnitaires qui avaient été alors formulées par l'associée minoritaire pour le compte de la société en redressement judiciaire.
L'argumentation de l'associé majoritaire, M. [Y] [T], selon lequel nul ne plaide par procureur, n'est pas pertinent, Mme [E] [O] ayant un intérêt propre à obtenir la recevabilité de l'intervention volontaire du commissaire à l'exécution du plan, celle-ci alléguant que la société [10] devait être représentée à l'instance pour que son action ut singuli prospère.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il déclare irrecevable l'intervention volontaire de la société [7] en qualité d'administrateur judiciaire et infirmé en ce qu'il déclare irrecevable celle de Me [A] [P], en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Statuant à nouveau, la cour déclare recevable l'intervention volontaire de Me [A] [P], en qualité de commissaire à l'exécution du plan, au moment où le juge de première instance a statué.
2-sur la recevabilité de l'action ut singuli de l'associée minoritaire
2-1 sur la recevabilité au regard de la prescription triennale
L'article L223-22 du code de commerce dispose :Les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.Si plusieurs gérants ont coopéré aux mêmes faits, le tribunal détermine la part contributive de chacun dans la réparation du dommage.Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, les associés peuvent, soit individuellement, soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, intenter l'action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société à laquelle, le cas échéant, les dommages-intérêts sont alloués.Est réputée non écrite toute clause des statuts ayant pour effet de subordonner l'exercice de l'action sociale à l'avis préalable ou à l'autorisation de l'assemblée, ou qui comporterait par avance renonciation à l'exercice de cette action.Aucune décision de l'assemblée ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les gérants pour faute commise dans l'accomplissement de leur mandat.
L'article L 223-23 du même code ajoute :Les actions en responsabilité prévues aux articles L. 223-19 et L. 223-22 se prescrivent par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation. Toutefois, lorsque le fait est qualifié crime, l'action se prescrit par dix ans.
Vu les articles 1315, alinéa 2, devenu 1353, alinéa 2,
Il résulte de ce texte que le point de départ du délai de la prescription triennale de l'action
ut singuli correspond à la période où le fait dommageable a pu être constaté ou au jour où il a été révélé en cas de dissimulation.
M. [Y] [T] conclut à l'irrecevabilité de l'action ut singuli de Mme [E] [O] pour cause de prescription triennale. Il précise que les actions en responsabilité prévues à l'article L223-22 se prescrivent par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation, que si des manquements fautifs seraient mis à jour imputables au gérant, le délai de prescription de trois ans court nécessairement à compter du fait dommageable, qu'il appartient à Mme [E] [O] de justifier de manière distincte quels sont véritablement les faits qu'elle prétend lui imputer. Il fait enfin valoir que l'appelante est entrée dans les effectifs de la société le 2 novembre 2010 avant de devenir son associée le 1er septembre 2012 et qu'en outre, elle était en charge de la tenue de la comptabilité, du suivi administratif et juridique et notamment de l'établissement des bulletins de salaire.
Pour s'opposer à l'irrecevabilité de son action ut singuli pour cause de prescription triennale, Mme [E] [O] prétend que le point de départ de la prescription se place à la date de réception du rapport de gestion, soit le 25 octobre 2018, qu'elle pouvait donc engager son action jusqu'au 25 octobre 2021, ce qu'elle a fait, l'assignation introductive d'instance datant du 27 novembre 2017.
En l'espèce, au soutien de son action ut singuli, l'associée minoritaire reproche les fautes suivantes commises par le dirigeant au préjudice de la société :non-recouvrement de factures Millésime, non-règlement de factures et de livraisons de marchandises par la société [11], un don à la compagne du dirigeant social d'un véhicule appartenant à la société la prise en charge de frais et dépenses personnelles du dirigeant social, la livraison de marchandises au profit de tierces entreprises, des rémunérations de gérance injustifiées, des abus de biens sociaux.
Il est de principe que la charge de la preuve du point de départ d'un délai de prescription incombe à celui qui invoque cette fin de non-recevoir.
En l'espèce, M. [Y] [T] se borne à affirmer que l'intimée était en charge de la tenue de la comptabilité, du suivi administratif et juridique et notamment de l'établissement des bulletins de salaire et qu'en conséquence, aucun événement juridique, comptable, financier ou autre,n'était susceptible de lui être caché. En se limitant à affirmer cela, l'appelant ne démontre aucunement à quelle date précise le fait dommageable a pu être constaté ou a été révélé en cas de dissimulation à Mme [E] [O].
La cour ne peut que rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription triennale opposée à l'action ut singuli et confirmer en conséquence le jugement sur ce point.
2-2 sur la recevabilité de l'action ut singuli au regard de la qualité pour agir
Vu l'article L622-20 al 1 du code de commerce selon lequel le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers.
Vu l'article L651-2 du même code selon lequel lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par
certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion.
Selon l'article L 233-22 al 3 du code de commerce que :Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, les associés peuvent, soit individuellement, soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, intenter l'action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société à laquelle, le cas échéant, les dommages-intérêts sont alloués.
Il est de principe que lorsque le redressement ou la liquidation judiciaire d'une société ne fait pas apparaître d'insuffisance d'actif, les actions exercées à l'encontre de son dirigeant sur le fondement des articles L. 223-22, L. 225-251 et L. 225-252 du code de commerce sont recevables.
L'intimé, dirigeant social, oppose à l'appelante, associée minoritaire, une fin de non-recevoir tirée d'un défaut de qualité pour exercer l'action ut singuli, précisant que la société [10] a été placée en redressement judiciaire le 29 mai 2018 et que, conformément à l'article L622-20 du code de commerce (applicable au redressement judiciaire en vertu de l'article L631-14 du même code), seul le mandataire judiciaire a qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers.
L'intimé ajoute que Mme [E] [O] n'a jamais mis en cause les organes de la procédure, que ces derniers sont intervenus volontairement, qu'ils s'en sont rapportés à la justice et n'ont pas exprimé qu'ils entendaient soutenir les prétentions de cette dernière, que le jugement a déclaré irrecevables leurs interventions et que nul ne plaidant par procureur, Mme [E] [O] n'est pas recevable à solliciter l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les interventions volontaires.
Cependant, en premier lieu, si le mandataire judiciaire désigné par le tribunal avait seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers,il résulte toutefois de l'articleL 222-23 du code de commerce, précédemment cité, que l'associée minoritaire pouvait, soit individuellement, soit en se groupant, intenter l'action sociale en responsabilité contre le gérant et qu'elle était habilitée à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société à laquelle.
De plus, l'action ut singuli échappe au monopole du commissaire à l'exécution du plan, lequel n'a qualité à agir qu'au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, qui est satisfait par l'adoption du plan.
Mme [E] [O] avait donc bien qualité à agir nonobstant l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire pour la société [10].
Par ailleurs, au jour où cette cour statue, la procédure de redressement judiciaire est désormais terminée, le tribunal de commerce de Cannes ayant, par jugement du 2 avril 2024, prononcé la résolution du plan de redressement et la liquidation judiciaire de la société [10].
Me [A] [P] a été désigné en qualité de liquidateur et mis en cause dans le cadre de cette instance en appel. Il n'a engagé aucune action contre M. [Y] [T] en sa qualité de dirigeant.
Or, une action en responsabilité ut singuli est possible même en cas de liquidation judiciaire dès lors qu'aucune insuffisance d'actif n'est apparue. En l'espèce, non seulement les pièces et les débats ne font pas ressortir une insuffisance d'actif, mais en outre, le liquidateur, n'a pas repris l'action ut singuli initialement exercée par Mme [E] [O].Ainsi, même si, au cours de la procédure, la société [10] s'est retrouvée en liquidation judiciaire, la procédure ne saurait devenir rétroactivement irrecevable, faute d'élément sur une insuffisance d'actifs.Par ailleurs, seule l'absence d'une insuffisance d'actif autorise le liquidateur à poursuivre l'action introduite sur le fondement du droit commun.
La cour, confirmant le jugement, ne peut que rejeter la fin de non-recevoir tiré d'un supposé défaut de qualité de Mme [S] [O] pour exercer l'action ut singuli.
3-sur la demande de Mme [E] [O] d'annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018
3-1sur la recevabilité de la demande d'annulation
Selon l'article 126 du code de procédure civile :Dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.Il en est de même lorsque, avant toute forclusion, la personne ayant qualité pour agir devient partie à l'instance.
Le jugement critiqué a déclaré irrecevable la demande de Mme [E] [O] d'annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018 au motif que la société [10] n'était pas partie à l'instance.
Mme [E] [O] sollicite l'infirmation du jugement sur ce point, soutenant que la société [10] était au contraire présente dans la procédure et régulièrement représentée.
En l'espèce, l'action de Mme [E] [O] en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018 nécessitait effectivement la mise en cause de la société [10], ce qui était bien le cas en première instance, l'assignation introductive d'instance ayant été délivrée tant contre le dirigeant social que contre la société elle-même (signification du 27 novembre 2017 à personne morale). En outre, lorsque Mme [E] [O] a présenté, en première instance, sa demande en annulation de l'assemblée générale, la société [10] était bien représentée par un avocat. Enfin, la société [10] est également une partie à l'instance en appel, celle-ci étant représentée par le même avocat que l'intimé. Enfin, le mandataire liquidateur de ladite société a bien été appelé en la cause selon acte d'huissier de l'appelante du 5 septembre 2024 (signifié à personne morale).
La cour, infirmant le jugement, déclare recevable l'action de Mme [E] [O] en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018.
Le jugement est également infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de la société [10] au motif que cette dernière n'était pas alors partie à l'instance.
3-2 sur le mal fondé de l'action en annulation de l'assemblée générale
Selon l'article L235-1 du code de commerce :La nullité d'une société ou d'un acte modifiant les statuts ne peut résulter que d'une disposition expresse du présent livre ou des lois qui régissent la nullité des contrats. En ce qui concerne les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions, la nullité de la société ne peut résulter ni d'un vice de consentement ni de l'incapacité, à moins que celle-ci n'atteigne tous les associés fondateurs. La nullité de la société ne peut non plus résulter des clauses prohibées par l'article 1844-1 du code civil.La nullité d'actes ou délibérations autres que ceux prévus à l'alinéa précédent ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative du présent livre, à l'exception de la première phrase du premier alinéa de l'article L. 225-35 et de la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 225-64, ou des lois qui régissent les contrats, à l'exception du dernier alinéa de l'article 1833 du code civil.
Vu l'article 1382 du code civil devenu 1240 du même code,
Vu 'article L 241-3 du code de commerce invoqué par l'appelante,
Est constitutive d'un abus de majorité la décision sociale prise contrairement à l'intérêt général de la société et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité des associés au détriment de la minorité.
Au soutien de sa demande d'annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018, Mme [S] [O] soutient que :
- l'assemblée générale convoquée le 25 octobre 2018 (et qui s'est tenue le 16 novembre 2018) avait pour objet de permettre au dirigeant de masquer toutes les fautes commises au préjudice de la société, mais également d'entériner des rémunérations de gérance injustifiées,
- la man'uvre est déloyale, et procède d'un abus de majorité,
- le gérant n'a pas respecté les règles comptables légales, puisqu'il a livré des informations insuffisantes et inexactes,
- cette assemblée générale a été tenue dans le seul intérêt personnel de l'actionnaire majoritaire, portant atteinte à l'intérêt social, puisque M. [T] a tenté par ce biais non seulement de faire entériner le bilan de 2017 effaçant ainsi ses fautes de gestion et autres détournements (dépenses faites à caractère personnel), mais également à valider, a posteriori et hors délai, les rémunérations de gérant qu'il s'est affectées indûment,
- s'agissant des rémunérations, M. [Y] [T] a entendu voir fixer rétroactivement la rémunération de la gérance sur l'exercice 2012 à la somme de 27.000 euros, et en 2013 à 45.000 euros, et ce alors même que lors de ces exercices, le capital social appartenait pour partie à M. [U] [L] (qui avait 160 parts) et que l'assemblée générale de 2018 ne peut avoir eu pour vocation de régulariser des rémunérations, qui devaient être validées par les associés qui détenaient alors le capital social.
S'agissant tout d'abord du grief tiré de la régularisation rétroactive de rémunérations irrégulières par la délibération critiquée, il ressort du document intitulé 'rapport de gestion à l'assemblée générale ordinaire du 16 novembre 2018"que le dirigeant social a demandé à l'assemblée générale ordinaire tenue à cette même date d'approuver sa rémunération au titre des exercices 2012 à 2017 à hauteur des montants suivants :
- 27 000 euros pour 2012,
- 45 000 euros pour 2013.
Selon le procès-verbal d'assemblée générale ordinaire du 16 novembre 2018, l'assemblée a voté une résolution fixant effectivement la rémunération de la gérance pour l'exercice 2013 à 45 000 euros, à la majorité des voix, M. [Y] [T] étant alors le seul associé présent, sur les deux associés que comptait alors la société (Mme [E] [O] étant absente). De plus, en 2013, au moment où le dirigeant social a encaissé la rémunération litigieuse il y avait trois actionnaires (Mme [S] [O] et M. [Y] [T],M. [U] [L]) et non pas seulement deux (Mme [S] [O] et M. [Y] [T]).
Cependant, l'article 18 des statuts, intitulé 'rémunération' est très flou et vague concernant les modalités de fixation de la rémunération du gérant, se bornant à prévoir: « Les modalités d'attribution de la rémunération, ainsi que son montant, sont fixés par décision ordinaire des associés ».
Outre le fait que les statuts sont très flous concernant les modalités de fixation de la rémunération du gérant, Mme [E] [O] n'établit pas en quoi les résolutions relatives aux rémunérations sont contraires à l'intérêt général de la société et prises dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des membres de la minorité.
Plus généralement, Mme [E] [O] n'établit pas précisément en quoi les autres résolutions prises lors de l'assemblée générale seraient constitutives d'un abus de majorité et annulables, étant précisé que certaines des résolutions adoptées ont en réalité soit refusé de donner quittus à la gérance, soit refusé d'approuver les comptes de certains exercices clos.
La cour rejette, au fond, l'action en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018.
La cour déboute également Mme [E] [O] de sa demande en inopposabilité des comptes annuels de l'exercice clos le 31 décembre 2017.
4-sur l'action en réparation de l'associé minoritaire pour le compte de la société [10] (action ut singuli)
Selon article L223-22 du code de commerce :Les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.Si plusieurs gérants ont coopéré aux mêmes faits, le tribunal détermine la part contributive de chacun dans la réparation du dommage.Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, les associés peuvent, soit individuellement, soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, intenter l'action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société à laquelle, le cas échéant, les dommages-intérêts sont alloués.Est réputée non écrite toute clause des statuts ayant pour effet de subordonner l'exercice de l'action sociale à l'avis préalable ou à l'autorisation de l'assemblée, ou qui comporterait par avance renonciation à l'exercice de cette action.Aucune décision de l'assemblée ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les gérants pour faute commise dans l'accomplissement de leur mandat
Au soutien de son action en réparation pour le compte de la société [10], Mme [S] [O] invoque différentes fautes du gérant qui doivent être examinées.
- sur la faute de gestion liée à un défaut de paiement de factures par la sociéfé [12]
Au soutien de son action ut singuli et de sa demande en condamnation de M. [Y] [T] à payer une somme de 124.034,96 euros à la société [10], Mme [E] [O] prétend que la cette dernière a régulièrement livré des vins et de l'alcool à une société créée par l'ex-compagne du dirigeant social, la société [12]. L'appelante précise que cette société destinataire des livraisons n'a pas réglé un grand nombre de factures, que M. [Y] [T] était associé au sein de cette société débitrice, qu'il a soit supprimé ces factures, soit ne les a volontairement pas données en saisie à la comptabilité.
Mme [E] [O] estime que M. [Y] [T] a bien commis des fautes de gestion, dès lors qu'il n'y a jamais eu le moindre paiement de ces factures, ni de retour de marchandises s'agissant de ces factures.
Pour s'opposer à toute responsabilité au titre des factures non recouvrées, M. [Y] [T] prétend que la société créancière [10] a retrouvé des documents de retour de marchandises de nature à établir que les comptes sont en réalité soldés. Il prétend aussi que le litige porte éventuellement sur un solde maximum décompte à arrêter de 19.109,99 euros, solde qu'il s'est engagé à prendre en charge avec son ex-compagne, lui par le débit de son compte courant à concurrence de 12.293,39 euros, elle par imputation sur le dividende restant à lui revenir à concurrence de 6816,60 euros.M. [Y] [T] estime qu'en tout état de cause, à supposer que ces allégations soient exactes il n'est pas démontré en quoi cela serait constitutif d'une faute de gestion ou caractéristique d'un délit susceptible de justifier qu'il doive en répondre financièrement a titre personnel.
Il résulte des éléments produits par l'appelante que la société [10] a effectivement livré des produits contenant de l'alcool à la société [12] et que certaines des factures correspondantes n'ont pas été réglées.
Ainsi, dans un courriel du 11 décembre 2014, adressé au dirigeant social de la société [10], l'associée de la société débitrice (et ex-compagne de ce dernier), indique : 'Puisque la [10] a besoin de règlement, ce que je peux comprendre, et bien tu prends un chéquier. Pas celui de [E], ni de [B], mais le tien personnellement et tu établis un chèque à l'ordre de Millesime 85. Mais tu es beaucoup plus doué pour emprunter de l'argent aux autres que de t'investir avec tes propres fonds'.
D'ailleurs, dans le document intitulé 'rapport de gestion à l'assemblée générale ordinaire du 16 novembre 2018", rédigé par le dirigeant social mis en cause, ce dernier reconnaît lui-même, s'agissant de la 'facture millésime 85 pour 36 076,11 euros', que ' des différents éléments en ma possession, il ressort que la dette réelle de Millésime 85 est de 19 109, 99 euros'.
Si le dirigeant social de la société [10] soutient avoir retrouvé des documents de 'retour des marchandises de la société [12] de nature à établir qu'en réalité les comptes seraient soldés', les pièces fournies sont en l'état inexploitables et ne permettent pas d'effectuer un rapprochement entre les factures impayées et les prétendus retours de marchandises.
Dès lors que la société [12] ne s'est pas acquittée de certaines de ses dettes auprès de la société [10], dans des proportions importantes, et que M. M. [Y] [T] n'aurait pas dû l'ignorer (en sa double qualité de dirigeant social de la société créancière et d'associé de la société débitrice), il a commis une faute de gestion en s'abstenant de toute démarche de recouvrement, même la plus minime soit-elle, comme des relances en paiement orales ou écrites. Si M. [Y] [T] prétend s'être engagé à prendre en charge, avec son ex-compagne, la dette de la société [12], il ne s'agit que de modalités de paiement, insusceptibles de neutraliser sa faute de gestion. Au demeurant, le dirigeant social ne démontre pas les paiements allégués, de sorte que le préjudice de la société [10] est encore d'actualité sur ce point.
Au regard des pièces parcellaires produites aux débats de part et d'autre, le préjudice de la société est de 4500 euros à ce titre, somme correspondant au préjudice de la société, constitué par les factures impayées.
Infirmant le jugement, la cour condamne M. [Y] [T] à payer à la société [10] une somme de 4500 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice en lien avec sa faute de gestion.
- sur la faute de gestion liée à un défaut de paiement de factures par la société à l'enseigne [11]
Mme [S] [O] sollicite la condamnation de M. [Y] [T] à payer à la société [10] la somme de 62.234 euros correspondant à l'établissement de factures
et à des livraisons de vin non réglées par la société à l'enseigne [11], lequel est un restaurant ouvert par la compagne de l'intimé et dont l'adresse est celle du domicile de ce dernier.
Pour s'opposer à toute indemnisation de la société [10] à ce titre, M. [Y] [T] indique qu'il ne reconnaît pas l'authenticité et la réalité des pièces produites par l'appelante, ajoutant qu'il n'est en tout état de cause pas établi en quoi ces faits seraient constitutifs d'une faute de gestion ou caractéristiques d'un délit susceptible de justifier qu'il en répondre financièrement a titre personnel.
En l'espèce, pour démontrer la réalité des factures impayées par la société ayant pour enseigne [11], l'appelante se limite à verser aux débats des factures et documents divers, parfois annotés, mais dont il n'est pas possible de tirer de quelconques certitudes.
Le jugement est confirmé en ce qu'il rejette l'action en responsabilité au titre des factures dues par le Club 108.
- sur la faute de gestion reprochée liée au véhicule Smart
Mme [S] [O] sollicite la condamnation de M. [Y] [T] à payer à la socité [10] une indemnité de 7.371,80 euros, indiquant que cette dernière avait conclu un contrat de location avec option d'achat en juin 2011 avec Mercedes Benz portant sur un voiture Smart.
L'appelante ajoute qu'en fin de contrat en juin 2013, la société [10] a acheté le véhicule mais que, finalement, M. [Y] [T] a donné ce dernier à Mme [Z] [N], son-ex compagne. L'appelante ajoute qu'un tel don a entraîné la perte d'un actif pour la société d'un montant de 7.371,80 euros. Mme [S] [O] nie le fait que M. [Y] [T] lui aurait donné des consignes pour que la cession du véhicule soit comptabilisée.
Pour s'opposer à toute condamnation ce titre, l'intimé répond qu'à supposer que ces allégations soient exactes il n'est pas démontré en quoi cela serait constitutif d'une faute de gestion ou caractéristiques d'un délit susceptible de justifier qu'il doive en répondre financièrement a titre personnel. Il ajoute qu'au soutien de ses allégations, l'appelante produit une unique pièce sous le numéro 41 correspondant a l'extrait du compte 615500 intitulé 'entretien bien mobilier » du grand livre de la société [10] de l'année 2013 sur lequel il est mentionne une écriture au débit de 7.371,80 euros.
Il fait enfin valoir que ce véhicule Smart a fait l'objet d'un contrat de location financière avec option d'achat, la valeur initiale au 15 juillet 2013 de 7371.80 euros devant être affectée d'une décote fixée en la matière à 149.10 euros par mois soit sur la durée de location de 23 mois, une décote de 3429.30 euros donnant une valeur résiduelle de 3.942,50 euros à la date de cession au mois de juin 2015 en faveur de Mme [N]. Il affirme enfin avoir pris en charge ledit prix de cession à titre personnel par le débit de son compte courant.
La véracité des faits dénoncés par l'appelante est établie. En effet, dans le rapport de gestion, M. [Y] [T] indique: 'je conteste ladite somme et reconnaît une valeur de 3 942,50 euros après amortissements, qui est affectée à mon compte courant. Je précise que, à l'époque, j'avais donné des instructions pour que ce bien comptabilisé par erreur, par Mme [O], en juillet 2013, dans les charges de l'exercice 2013 soit reclassé en immobilisation, ce qui n'a pas été fait. De ce fait, lors de la cession du véhicule dn juin 2015, il n'a pas été comptabilisé de sortie d'immobilisation'. En outre, dans ses dernières écritures, le dirigeant social réitère son affirmation selon laquelle la valeur résiduelle du véhicule transmis à Mme [N] au est de '3.942,50 euros a la date de cession au mois de juin 2015 en faveur de Mme [N]'.
Par ailleurs, le dirigeant social n'établit nullement qu'il aurait pris en charge le prix de la cession à son ex-compagne, à titre personnel, par le débit de son compte courant, contrairement à ce qu'il affirme.
Il ressort des éléments précédents que la voiture Smart, véhicule de société donné à une tierce personne, a donc initialement coûté 7 371, 80 euros à la société [10] et que cette voiture , élément d'actif, est finalement sorti du patrimoine de cette dernière et ce sans aucune contrepartie. Compte tenu des pièces parcellaires produites par l'appelante sur la valeur de cet actif , au moment où il est sorti du patrimoine social, la cour fixe l'indemnité de réparation à 3000 euros.
Statuant à nouveau, la cour condamne M. [Y] [T] à payer à la société [10] une somme de 3000 euros à titre de dommages-intérêts dans le cadre de l'action ut singuli.
- sur la faute de gestion reprochée tirée de la prise en charge de dépenses personnelles et de frais de réception du dirigeant social
Mme [E] [O] sollicite la condamnation de M. [Y] [T] à payer à la société la somme globale de 10.740,53 euros (2.922,82 euros + 7.817,71 euros) s'agissant de sommes prélevées sur les fonds de la société [10] pour financer des dépenses purement personnelles à son dirigeant. Elle ajoute qu'il ne saurait y avoir une quelconque compensation entre ces dépenses et le compte courant d'associé du dirigeant.
Pour se défendre, M. [Y] [T] répond que ces frais entraient dans l'exécution du mandat social, qu'il ne les a pas dissimulés, qu'il a fourni les pièces justificatives.
Les quelques éléments produits par l'appelante ne permettent pas de caractériser le fait que les dépenses litigieuses correspondent à des frais personnels du gérant et qu'ils sont sans lien avec sa fonction de dirigeant social d'une entreprise ayant pour objet l'import export de vins et spiritueux, de dégustation sur place et de petite restauration.
Le jugement est confirmé en ce qu'il déboute Mme [E] [O] de sa demande d'indemnisation de la société [10] de ce chef.
- sur la faute reprochée liée à la rémunération du gérant
Vu les articles L. 223-18 du code de commerce et 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016,
Il est de principe que la rémunération du gérant d'une société à responsabilité limitée est déterminée soit par les statuts, soit par une décision de la collectivité des associés.
Pour justifier sa demande en indemnisation de la société à hauteur de 45 000 euros, Mme [E] [O] allègue encore qu'en 2013 a été affectée au compte courant de M. [Y] [T] une somme de 45.000 euros au titre de sa rémunération, alors que l'article 18 des statuts de la société imposent la détermination de la rémunération du gérant par une assemblée générale et que, pourtant aucune assemblée n'a voté sa rémunération 2013 ni a priori, ni a posteriori.
Pour s'opposer à toute indemnisation de la société à ce titre, l'intimé répond qu'il n'y a pas lieu d'imputer la somme de 45 000 euros au débit de son compte courant mais que si tel était le cas, son compte courant n'en resterait pas moins créditeur.
Outre le fait que la cour a refusé d'annuler la résolution du 16 novembre 2018 ayant décidé de fixer la rémunération de la gérance pour l'exercice 2013 à la somme de 45 000 euros,
c'est à juste titre que le tribunal a relevé que les statuts prévoyaient, de façon générale, floue et sans plus de détails, que :'les modalités d'attribution de cette rémunération , ainsi que son montant, sont fixés par décision ordinaire des associés'.
Le jugement est confirmé en ce qu'il rejette la demande de l'appelante de condamnation de M. [Y] [T] à rembourser à la société [10] un indu de rémunération.
- sur la faute de gestion en lien avec de fausses écritures
L'appelante sollicite la condamnation de l'intimé à indemniser la société à hauteur de 110.280,03 euros, au titre de sommes affectées à tort sur le compte courant de ce dernier,dont le détail serait le suivant:
- la distribution de dividende 2011
- la rémunération non approuvée de 45.000 euros
- des sommes affectées à tort à ce dernier et qui concernait des clients de l'entreprise
- le remboursement d'un prêt personnel fait par M. [F].
En défense, l'intimé répond que ces prétentions ne sont pas documentées et en toute hypothèse contredites par les pièces versées aux débats. Il ajoute avoir personnellement procédé à remboursement du prêt de M. [F] (dont il avait bénéficié personnellement) par un virement bancaire de son compte personnel [8] du 12 mai 2015 pour un montant de 35.000 euros.
L'appelante ne démontre pas suffisamment la réalité de ses allégations sur les fautes de gestion commises par le dirigeant social, y compris s'agissant des faits liés au prêt personnel de M. [F] pour M. [Y] [T] (prêt personnel qui aurait été remboursé par la société [10], à la place de son dirigeant social, à M. [F]). En effet, s'il résulte des pièces produites par l'intimée que le dirigeant social a émis des chèques d'un montant total de 12 500 euros (10 650 euros selon l'intimée), tirées sur le compte de la société [10], au profit de son créancier et ce à la date du 26 juin 2015, le compte d'achat de marchandises laisse pour autant apparaître que le créancier personnel du dirigeant social était également le créancier de la société [10]. Or, les paiements faits par la société [10] le 26 juin 2015 correspondent à des dettes de celle-ci envers M. [F] au titre de factures dont rien ne permet de dire qu'elles seraient fausses.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il déboute Mme [E] [O] de sa demande à ce titre.
- sur la faute de gestion en lien avec un détournement de recettes
Mme [E] [O] sollicite une indemnité de1.000.252,01 euros au profit de la société [10], au titre de recettes faites par la société détournées par son dirigeant social de 2013 à 2016.
M. [Y] [T] nie tout détournement de recettes et soutient que l'appelante présente des pièces inexploitables, comportant certaines annotations manuscrites n'émanant pas de lui. Il précise que, pour certains salariés, un complément de rémunération leur était versé en espèces, mais qu'il ne s'agit pas d'un détournement de recettes dont il aurait personnellement profité.
En l'espèce, si les documents produits aux débats (et notamment le rapport de Mme [K] [R], commissaire aux comptes) attestent de l'existence d'écarts significatifs démontrant une absence de concordance entre le chiffre d'affaires enregistré en comptabilité contenu dans le bilan déposé au greffe et celui ressortant des tickets Z et déclarés sur les CA3 sur la période du 01/01/2015 au 31/12/2015, il n'est en revanche pas établi, sans nul doute possible, que cet écart résulterait d'un détournement de recettes ou de fautes de gestion commises par le dirigeant social. Les causes de cette absence de concordance demeurent à ce jour obscures, étant précisé que les autres documents produits par l'appelante ne corroborent pas les affirmations de l'intimée sur ce point.
Ainsi, si Mme [E] [O] produit plusieurs attestations concordantes et précises de salariés de la société [10], indiquant que leurs salaires leur étaient régulièrement payés en espèces par M. [Y] [T] (et que les heures supplémentaires n'apparaissaient pas, pour certains, sur leurs bulletins de salaire), ce qui constitue indéniablement une faute de gestion, le préjudice de la société n'est pas pour autant établi à ce jour. En effet, en agissant ainsi, M. [Y] [T] a uniquement payé des dettes sociales et n'a pas détourné, pour son profit personnel, des recettes. Enfin, Mme [E] [O] ne soutient pas que la société aurait subi un redressement fiscal et des pénalités en lien avec les salaires payés en espèces.
En revanche, il résulte de l'attestation précise de M. [H] [M] du 9 novembre 2017, que , le 2 ou 3 novembre 2017, M.[Y] [T] a retiré 100 euros en espèces de la caisse du restaurant 'pour le donner en cadeau à sa fille pour son anniversaire'. Cette attestation est corroborée par les autres attestations de salariés indiquant tous que le dirigeant social les payait régulièrement en espèces et dissimulait certaines heures de travail. En outre, elle démontre bien une faute de gestion du dirigeant social étant à l'origine d'un préjudice pour la société [10].
La cour, infirmant le jugement, condamne M. [Y] [T] à payer à la société [10] une somme de 100 euros au titre d'un détournement de recettes.
Compte tenu du caractère très limité du détournement de recettes prouvé mais également de l'absence de pièces probantes démontrant le lien entre les préjudices suivants et les fautes de gestions du dirigeant social, Mme [E] [O] doit être déboutée de ses demandes en indemnisation supplémentaires suivantes:
- intérêts bancaires supplémentaires 13 351,27 euros
- frais acte et contentieux supplémentaires 5 580,27 euros
- amendes et pénalités supplémentaires 21 184,58 euros
- intérêts débiteurs 26 680,07 euros.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
- sur les dommages-intérêts supplémentaires réclamés par l'associée minoritaire au nom de la société [10]
Mme [E] [O] sollicite, pour le compte de la société [10], des dommages-intérêts supplémentaires à hauteur de 100 000 euros, soutenant l'ampleur des fautes et détournements, ainsi que le fait que les fautes de gestions du dirigeant social ont contribué à la dégradation financière de la société, qui a été placée en redressement judiciaire par jugement
en date du 29 mai 2018.
Cependant, d'une part, le lien entre les fautes du dirigeant social et le redressement judiciaire n'est pas démontré et, d'autre part, il n'est pas établi l'existence d'un préjudice non déjà réparé.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il rejette cette demande indemnitaire supplémentaire de l'appelante à hauteur de 100 000 euros.
5-sur les demandes de l'associé minoritaire en réparation présentées pour son propre compte
Mme [E] [O] sollicite une indemnisation de 200 000 euros de la part du dirigeant social, lequel, selon elle, a commis des fautes ayant créé son préjudice distinct de celui de la société.
Concernant son préjudice personnel distinct de celui de la société [10], l'appelante indique qu'elle a investi 100.000 euros pour l'achat des parts sociales en 2012, qu'elle a contracté un crédit qu'elle continue de régler, qu'elle a apporté des sommes en compte courant, qu'elle a perdu la chance de percevoir des dividendes entre 2012 et 2018, qu'elle n'a pu à ce jour obtenir remboursement de son compte courant, d'autant que M. [Y] [T] a établi des comptes annuels clos le 31.12.2017 donnant une image infidèle des comptes de la société (commettant au passage un délit supplémentaire - celui de présentation de faux bilans), qu'elle donc perdu la chance de rentabiliser son investissement, et a subi un important préjudice financier et moral.
Si certaines fautes sont retenues à l'encontre du dirigeant social, il n'est pour autant pas démontré que les difficultés financières de l'entreprise, placée en redressement puis en liquidation judiciaire, sont imputables à ce dernier, étant précisé que les indemnisations accordées à la société [10] ne sont pas très élevées. De plus, si les fautes retenues ont , dans une certaine mesure, contribué à la dépréciation de la société, le préjudice subi par l'appelante n'est que le corollaire du dommage causé à la société [10] elle-même, et n'a donc pas entièrement un caractère personnel.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il rejette la demande indemnitaire personnelle de l'appelante.
6-sur la demande indemnitaire de M. [Y] [T] contre l'associée minoritaire au titre d'un préjudice moral et en lien avec des propos diffamatoires de cette dernière
Vu les articles 29 et 41 de la loi du 29 juillet 1881 :
Selon les quatrième et cinquième alinéas du second de ces textes, ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux, mais les juges saisis de la cause et statuant sur le fond pourront néanmoins prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants, ou diffamatoires et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts.
En outre, toute expression qui contient l'imputation d'un fait précis et déterminé de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne visée, constitue une diffamation, même si elle est présentée sous une forme déguisée ou dubitative ou par voie d'insinuation.
M. [Y] [T] sollicite la condamnation de l'appelante à lui régler une indemnité de 100 000 euros au titre d'un préjudice moral et d'anxiété, alléguant que Mme [E] [O] a porté atteinte à son honneur et sa réputation en lui imputant des manquements imaginaires. Il ajoute que cette dernière a commis des turpitudes directement a l'origine de la soumission de la société [10] à une procédure de redressement judiciaire.
En l'espèce, si Mme [E] [O] a, en particulier, reproché à M. [Y] [T], au travers de ses écritures développées au cours de cette procédure, d'avoir détourné des recettes et actifs qui appartenaient à la société [10],d'avoir perçu une rémunération indue et fait prendre en charge par la société des dépenses personnelles, il n'en demeure pas moins que la cour a estimé fondée une partie desdits reproches . Il a d'ailleurs été accordé des indemnités à la société victime des agissements de son dirigeant social.
De plus, contrairement à ce que qu'affirme M. [Y] [T], rien ne permet d'affirmer que les turpitudes reprochées à Mme [E] [O], au demeurant non démontrées, seraient à l'origine du redressement judiciaire de la société [10].
Enfin, c'est à juste titre que le jugement, qui sera confirmé sur ce point, a énoncé que le tribunal de commerce était incompétent pour connaître des demandes de M. [Y] [T] à l'encontre de Mme [E] [O], au titre des fautes commises par celle-ci en qualité de salariée.
Infirmant le jugement, la cour rejette la demande de M. [Y] [T] de dommages-intérêts au titre du préjudice moral allégué.
7-sur la suppression de certains discours des conclusions de M. [Y] [T] et de la société [10]
Selon l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 :Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l'identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure.
Selon les alinéas 3, 4, 5, 6 de l 'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 :Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux.Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts.Pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux, et, dans tous les cas, à l'action civile des tiers.
Selon les quatrième et cinquième alinéas du second de ces textes, ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux, mais les juges saisis de la cause et statuant sur le fond pourront néanmoins prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants, ou diffamatoires et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts.
De plus, toute expression qui contient l'imputation d'un fait précis et déterminé de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne visée, constitue une diffamation, même si elle est présentée sous une forme déguisée ou dubitative ou par voie d'insinuation.
Pour M. [Y] [T], le jugement doit être infirmé en ce qu'il a ordonné la suppression de certains termes de ses conclusions prises en première instance.Pour lui, il n'est ni injurieux ni outrageant de dire que Madame [O] a un comportement malhonnête, qu'elle est une tricheuse et que les manquements par elle commis sont susceptibles de recevoir des qualifications pénales.
Pour l'appelante, les propos contenus dans les conclusions de première instance, et désormais d'appel, doivent être supprimés, sur le fondement de l'article 41 alinéa 4 de la loi du 29 juillet 1881. Elle ajoute que le jugement doit également être confirmé en ce qu'il condamne M. [Y] [T] au paiement d'une somme de 1 euro à titre symbolique à titre de dommages et intérêts.
S'agissant tout d'abord des propos dont la suppression a été ordonnée en première instance par le tribunal, il ne s'agit pas de propos déterminés et précisés, le tribunal ayant seulement ordonné la 'cancellation des conclusions de M. [Y] [T] présentées sous la constitution de Maître [D] et le retrait des propos injurieux ou outrageants contenus dans lesdites conclusions'.
Le jugement, en ordonnant, de façon générale et non détaillé, la cancellation des conclusions de M. [Y] [T], présentées sous la constitution de Maître [D],n'a pas caractérisé précisément, comme l'exige la loi, les discours injurieux, outrageants, ou diffamatoires qu'il convenait de supprimer.
Le jugement est donc infirmé en ce qu'il ordonne une cancellation des conclusions de Maître [D] et en ce qu'il condamne M.[Y] [T] à payer à Mme [E] [O] une somme d'un euro a titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral.
Statuant à nouveau, la cour rejette la demande de Mme [E] [O] de cancellation des écritures prises en première instance par M. [Y] [T] et en indemnisation au titre de son préjudice moral.
S'agissant maintenant du discours tenu à hauteur d'appel par M. [Y] [T]; dans ses écritures, celui-ci indique :'il n'est ni injurieux ni outrageant de dire que Mme [O] a un comportement malhonnête, qu'elle est une tricheuse et que les manquements par elle commis sont susceptibles de recevoir des qualifications pénales'.
Ces propos ne constituent pas une expression qui contient l'imputation d'un fait précis et déterminé de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne visée. Il ne s'agit donc pas d'une diffamation au sens de la loi, ni même une injure ou un outrage.
La cour rejette la demande de Mme [E] [O] tendant à ordonner la cancellation des écritures d'appel signifiées le 22 juillet 2021 prises sous la constitution de Me Sandra Juston reprenant les mêmes discours injurieux et /ou outrageants que ceux tenus en première instance.
8-sur les demandes en lien avec le procureur de la république et l'administration fiscale
Selon l'article 40 du code de procédure pénale :Le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner conformément aux dispositions de l'article 40-1.Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.
L'article L101 du livre des procédures fiscales dispose :L'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle recueille, à l'occasion de toute procédure judiciaire, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une man'uvre quelconque ayant eu pour objet ou pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt.L'administration des finances porte à la connaissance du juge d'instruction ou du procureur de la République, spontanément dans un délai de six mois après leur transmission ou à sa demande, l'état d'avancement des recherches de nature fiscale auxquelles elle a procédé à la suite de la communication des indications effectuée en application du premier alinéa.Le résultat du traitement définitif de ces dossiers par l'administration des finances fait l'objet d'une communication au ministère public.
Mme [E] [O] sollicite qu'il soit ordonné la transmission du présent dossier au procureur de la république du tribunal de grande instance de Grasse en application de l'article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale et qu'il soit communiqué à l'administration les éléments du présent dossier en application de l'article L 101 du code des procédures fiscales.
En l'espèce, les éléments produits de part et d'autre ne permettent pas de considérer que les conditions d'une transmission au procureur de la République ou à l'administration fiscale sont réunies.
La cour dit n'y avoir lieu à faire droit à la demande de Mme [E] [O] de transmission du dossier aux autorités judiciaires et fiscales.
9-sur les frais du procès
Compte tenu de la solution apportée au litige, le jugement est infirmé du chef de l'article 700 et des dépens.
Statuant à nouveau, la cour condamne M. [Y] [T] à payer à Mme [E] [O] une somme de 25 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour les frais exposés en première instance qu'en appel.
M. [Y] [T] est également condamné à supporter la charge des entiers dépens exposés par toutes les parties tant en première instance qu'en appel.
M. [Y] [T] est débouté de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire:
- infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a :
- déclaré irrecevable l'intervention volontaire de la société [7] en qualité d'administrateur judiciaire au moment où le juge de première instance statuait,
- rejeté les fins de non-recevoir soulevées par M. [Y] [T] au titre d'un défaut de qualité à agir de Mme [E] [O] et de la prescription triennale,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande indemnitaire pour son propre compte au titre des agissements de M. [Y] [T] en qualité de dirigeant social,
- débouté Mme [E] [O] de son action ut singuli au titre des préjudices liés aux factures non réglées Club 108, aux voyages personnels du dirigeant social, aux réception s personnelles de ce dernier, au compte courant débiteur et à la rémunération indue, aux intérêts bancaires, aux frais actes et contentieux supplémentaires, amendes et pénalités supplémentaires, intérêts débiteurs,
- dit le tribunal de commerce incompétent pour connaître des demandes de M. [Y] [T] à l'encontre de Mme [E] [O] au titre des fautes commises par celle-ci en qualité de salariée.
statuant à nouveau et y ajoutant,
- rejette la demande de Mme [E] [O] de cancellation des écritures prises en première instance par M. [Y] [T] et en indemnisation au titre d'un préjudice moral en lien avec les propos contenus dans lesdites écritures,
- rejette la demande de Mme [E] [O] de suppression de propos de conclusions de M. [Y] [T] prises en appel,
- déclare recevable l'intervention volontaire de Me [A] [P], en qualité de commissaire à l'exécution du plan au moment ou le juge de première instance statue,
- déclare recevable l'action de Mme [E] [O] en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018,
- rejette, au fond, l'action de Mme [E] [O] en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018,
- déboute Mme [E] [O] de sa demande en inopposabilité des comptes annuels de l'exercice clos le 31 décembre 2017,
- condamne M. [Y] [T] à payer à la société [10] ;
4500 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice en lien avec sa faute de gestion (défaut de paiement par la société [12] de certaines factures),
3000 euros de dommages-intérêts en lien avec le véhicule Smart,
100 euros de dommages-intérêts en lien avec un détournement de recettes sociales,
- rejette la demande de M. [Y] [T] contre Mme [E] [O] de dommages-intérêts au titre du préjudice moral allégué,
- dit n'y avoir lieu à faire droit à la demande de Mme [E] [O] de transmission du dossier aux autorités judiciaires et fiscales,
- déboute M. [Y] [T] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,
- condamne M. [Y] [T] à payer à Mme [E] [O] une somme de 25 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour les frais exposés en première instance qu'en appel,
- condamne M. [Y] [T] à supporter la charge des entiers dépens exposés par toutes les parties tant en première instance qu'en appel.
Le Greffier, La Présidente,
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 06 MARS 2025
Rôle N° RG 21/01476 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG34M
[E] [O] épouse [X]
C/
[Y] [T]
SARL [10]
Société [7]
[A] [P]
Copie exécutoire délivrée
le : 6 Mars 2025
à :
Me Jean-françois JOURDAN
Me Sandra JUSTON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de CANNES en date du 03 Décembre 2020 enregistré au répertoire général sous le n° 2017F00332.
APPELANTE
Madame [E] [O] épouse [X]
née le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 9], demeurant [Adresse 13]
représentée par Me Jean-françois JOURDAN de la SCP JF JOURDAN - PG WATTECAMPS ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Véronique BOLIMOWSKI de la SCP SCP DIDIER VALETTE - VÉRONIQUE BOLIMOWSKI, avocat au barreau de GRASSE,
INTIMES
Monsieur [Y] [T]
né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 6] (62), demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Michel LOPRESTI, avocat au barreau de GRASSE
SARL [10]
, demeurant [Adresse 4]
représenté par Me Sandra JUSTON de la SCP BADIE, SIMON-THIBAUD, JUSTON, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE et ayant pour avocat plaidant Me Michel LOPRESTI, avocat au barreau de GRASSE
SELARL [7] es qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la SARL [10]
, demeurant [Adresse 5]
défaillante
PARTIE INTERVENANTE
Maître [A] [P]
es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL [10].
, demeurant [Adresse 3]
défaillant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 07 Janvier 2025 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente
Madame Laetitia VIGNON, Conseillère
Madame Gaëlle MARTIN, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2025.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 Mars 2025,
Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Présidente et Monsieur Achille TAMPREAU, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
La SARL [10], qui a pour dirigeant social M. [Y] [T], exploite un fonds de commerce de cave et restaurant.
Mme [E] [O] est intervenue au sein de la société [10] à deux titres:
- en qualité de salariée comptable à la suite de la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée, le 2 novembre 2020 et ce jusqu'au 7 novembre 2017, date de son licenciement pour faute grave,
- en qualité d'associée minoritaire, ayant acquis le 1er septembre 2012, 220 parts sociales sur les 1100 parts sociales composant le capital de ladite société, pour la somme de 100.000 euros.
Le capital social de la société [10], fixé à 110.000 euros, était divisé en 1100 parts sociales se répartissant comme suit :
- M. [Y] [T] 880 parts
- Mme [E] [O] 220 parts.
Par assignation du 27 novembre 2017, Mme [E] [O] faisait assigner M.[Y] [T] ainsi que la société [10] devant le tribunal de commerce de Cannes.
Se prévalant de sa qualité d'associée minoritaire au sein de la société [10] et, alléguant que son associé majoritaire aurait en sa qualité de gérant, commis divers manquements, elle sollicitait les indemnités suivantes :
- d'une part, au titre de l'action ut singuli, au profit de la société [10] (251.041,80 euros + 100.000 euros, le cas échéant à parfaire),
- d'autre part, en réparation de son propre préjudice personnel, une indemnité de 100.000 euros le cas échéant à parfaire.
Au cours de la procédure devant le tribunal de commerce de Cannes, la société [10] faisait l'objet de procédures collectives et des jugements suivants :
- par jugement du 29 mai 2018, le tribunal de commerce de Cannes ouvrait une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société [10] et désignait la société [7] en la personne de Maître [W], en qualité d'administrateur judiciaire ainsi que Maître [A] [P] aux fonctions de mandataire judiciaire,
- par jugement du 17 septembre 2019, le tribunal de commerce de Cannes arrêtait le plan de redressement par voie de continuation, nommait pour la durée du plan, Me [A] [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan, maintenait ce dernier comme mandataire judiciaire jusqu'à la fin de la procédure de vérification des créances, mettait fin à la mission de la société [7], prise en la personne de Me [J], fixait la durée du plan à dix années.
Les organes de la procédure de redressement judiciaire de la société [10] intervenaient volontairement à l'instance, par conclusions d'intervention volontaire séparées, sollicitant toutes deux la reconnaissance de la recevabilité de leurs interventions et indiquant toutes deux s'en remettre à la justice.
Aux termes de son jugement du 3 décembre 2020, le tribunal de commerce de Cannes se prononçait en ces termes :
- ordonne la cancellation des conclusions en défense de [Y] [T] au motif que les propos mettant en cause l'honnêteté de [E] [O], soulignant la stupidité de ses demandes et dénonçant son comportement frauduleux, revêtiraient un caractère outrageant et/ou injurieux,
- condamne M.[Y] [T] à payer à [E] [O] une somme d'un euro à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral,
- dit les interventions volontaires du mandataire judiciaire et de l'administrateur judiciaire irrecevables.
- dit irrecevable la demande de Mme [E] [O] visant à voir annuler le procès-verbal d'une assemblée générale du 16 novembre 2018,
- rejette l'irrecevabilité des demandes de [E] [O] tirée de son défaut de qualité à agir
et de la prescription triennale.
- déboute [E] [O] de ses demandes tendant à voir engager la responsabilité de [Y] [T] au titre de fautes de gestion contraires à l'intérêt social,
- déboute [E] [O] de sa demande tendant à voir dire et juger que la responsabilité de [Y] [T] se trouverait également engagée à l'égard de l'associe minoritaire,[E] [O] ne subissant pas un préjudice distinct de celui subi par la société,
- déboute [E] [O] de sa demande de voir condamner [Y] [T] au paiement d'une somme totale de 1.391.709,32 euros,
- donne acte à [Y] [T] qu'il reconnaissait que le montant du solde dû par la société [12] a la société [10] s'établit à 19.109,99 euros et de son engagement a rembourser cette créance pour partie,
- déboute [E] [O] de sa demande de voir condamner [Y] [T] à payer à la société [10] à titre de dommages et intérêts une somme de 100.000 euros outre intérêts au taux légal avec capitalisation,
- déboute [E] [O] de sa demande tendant à voir condamner [Y] [T] à lui payer à titre personnel une somme de 200.000 euros à a titre de dommages et intérêts au titre du préjudice personnel qu'elle aurait subi,
- déboute [E] [O] de sa demande de transmission du dossier au procureur de la république près le tribunal judiciaire de Grasse,
- déboute [E] [O] de sa demande de voir transmettre le dossier à l'administration fiscale,
- dit irrecevables les demandes de la société [10] pour n'être pas partie à l'instance,
- dit le tribunal de commerce incompétent pour connaître des demandes de [Y] [T] à l'encontre de [E] [O],
- déboute les parties de leur demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que chacun conservera ses dépens et frais du procès.
Mme [E] [O] a formé un appel le 1er février 2021 en intimant M. [Y] [T], la société [10], Maître [A] [P] en qualité de mandataire judiciaire de cette dernière, la société [7] en qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société [10].
La déclaration d'appel est ainsi rédigée :
- dit les interventions volontaires de Maître [P] es-qualité de commissaire à l'exécution du plan, et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] à la présente instance irrecevables,
- dit irrecevable la demande de Mme [E] [O] à l'encontre de la SARL [10] visant à voir annuler l'assemblée générale du 16 novembre 2018, cette société n'étant pas partie à l'instance,
- déboute Mme [E] [O] de sa demande à voir dire et juger que M. [Y] [T] a engagé sa responsabilité en commettant des fautes de gestion contraires à l'intérêt social,
affectant clairement la situation et le développement économique de la SARL [10],
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir dire et juger que la responsabilité de
M. [T] se trouve être également engagée vis-à-vis de l'actionnaire minoritaire, Mme
[E] [O] qui subit un préjudice distinct de celui subi par la société,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y]
[T] à procéder au remboursement dans les caisses de la SARL [10] les
sommes suivantes :
- 1) factures Millésime 85 : 124 034,76 euros,
- 2) factures ou livraisons marchandises : 62 234,00 euros (non réglées Club 108),
- 3) Smart : 7 371,80 euros,
- 4) voyage personnel M. [T] : 12 922,82 euros,
- 5) Réceptions personnelles M. [T] : 7 817,71 euros,
- 6) compte courant débiteur + rémunération indue : 110 280,03 euros,
- 7) intérêts bancaires supplémentaires : 13 351,27 euros,
- 8) frais acte et contentieux supplémentaires : 5 580,27 euros,
- 9) amendes et pénalités supplémentaires : 21 184,58 euros,
- 10) intérêts débiteurs : 26 680,07 euros,
- 11) recettes détournées de 2013 à 2016 : 1.000.252,01 euros
soit une somme totale de 1.391.709,32 euros,
- donne acte à M. [Y] [T] qu'il reconnait que, selon ses estimations, la société [12] devrait la somme de 19 109,99 euros à la SARL [10], somme qu'il s'engage à rembourser pour partie,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à verser à titre de dommages et intérêts à la SARL [10] une somme de 100.000 euros augmentée de l'intérêt au taux légal avec capitalisation dans les termes de l'article 1343-2 du
code Civil à compter de la décision à intervenir,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à verser au profit de Mme [E] [O] épouse [X] une somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au préjudice personnel subi par cette dernière lié à son comportement, et aux fautes commises à son préjudice,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande de transmission du présent dossier au Procureur de la République près le Tribunal Judiciaire de Grasse,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir transmettre le présent dossier à l'administration fiscale au titre de l'article L.101 du livre des procédures fiscales,
- Débouté Mme [E] [O] de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du
code de procédure civile,
- dit que chacun conservera ses dépens et frais du procès.
L'appelante notifiait sa déclaration d'appel les 30 avril et 3 mai 2021, par signification à l'étude pour les deux personnes concernées, à Me [A] [P] et à la société [7] en leurs qualités de mandataire judiciaire et d'administrateur judiciaire.
Par courrier du 4 mai 29 janvier 2021, la société [7] informait la cour que par jugement du 17 septembre 2019 il avait été mis fin à sa mission et que Me [A] [P] avait été désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
En cours de procédure, par jugement du 2 avril 2024, le tribunal de commerce de Cannes prononçait la résolution du plan de redressement et la liquidation judiciaire de la société [10].
Le 5 septembre 2024, l'appelante mettait en cause Me [A] [P] en qualité de liquidateur judiciaire, par signification de l'acte à personne morale.
Me [A] [P] n'intervenait pas à la procédure.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 10 décembre 2024.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 octobre 2024, Mme [E] [O] demande à la cour de :
- réformer partiellement le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit les interventions volontaires de Maître [P] es-qualité de commissaire à l'exécution du plan, et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] à la présente instance irrecevables,
- dit irrecevable la demande de Mme [E] [O] à l'encontre de la SARL [10] visant à voir annuler l'assemblée générale du 16 novembre 2018, cette société n'étant pas partie à l'instance,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir dire et juger que M. [Y] [T] a engagé sa responsabilité en commettant des fautes de gestion contraires à l'intérêt social, affectant clairement la situation et le développement économique de la SARL [10],
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir dire et juger que la responsabilité de M. [T] se trouve être également engagée vis-à-vis de l'actionnaire minoritaire, Mme [E] [O] qui subit un préjudice distinct de celui subi par la société,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à procéder au remboursement dans les caisses de la SARL [10] les sommes suivantes :
- 1) factures Millésime 85 : 124 034,76 euros,
- 2)factures ou livraisons marchandises : 62 234,00 euros (non réglées Club 108),
- 3) Smart : 7 371,80 euros,
- 4) voyage personnel M. [T] : 12 922,82 euros,
- 5) Réceptions personnelles M. [T] : 7 817,71 euros,
- 6) compte courant débiteur + rémunération indue : 110 280,03 euros,
- 7) intérêts bancaires supplémentaires : 13 351,27 euros,
- 8) frais acte et contentieux supplémentaires : 5 580,27 euros,
- 9) amendes et pénalités supplémentaires : 21 184,58 euros,
- 10) intérêts débiteurs : 26 680,07 euros,
- 11) recettes détournées de 2013 à 2016 : 1.000.252,01 euros soit une somme totale de 1.391.709,32 euros,
- donné acte à M. [Y] [T] qu'il reconnait que, selon ses estimations, la société [12] devrait la somme de 19.109,99 euros à la SARL [10], somme qu'il s'engage à rembourser pour partie,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à verser à titre de dommages et intérêts à la SARL [10] une somme de 100.000 euros augmentée de l'intérêt au taux légal avec capitalisation dans les termes de l'article 1343-2 du code Civil à compter de la décision à intervenir,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir condamner M. [Y] [T] à verser au profit de Mme [E] [O] épouse [X] une somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au préjudice personnel subi par cette dernière lié à son comportement, et aux fautes commises à son préjudice,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande de transmission du présent dossier au procureur de la république près le Tribunal Judiciaire de Grasse,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande à voir transmettre le présent dossier à l'administration fiscale au titre de l'article L.101 du livre des procédures fiscales,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que chacun conservera ses dépens et frais du procès
Statuant de nouveau,
vu les articles l.223-22 et L 241-3 du code de commerce,
- accueillir valablement les interventions volontaires de Maître [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan, et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] à la présente instance ;
- prononcer la nullité de l'assemblée générale ordinaire du 16 novembre 2018 en toutes ses résolutions, pour abus de majorité, ladite assemblée ayant pour but de tenter de cacher, au bénéfice de M. [T], toutes les fautes de gestion commises par ce dernier sur les exercices 2012 à 2017,
- prononcer l'inopposabilité des comptes annuels de l'exercice clos le 31.12.2017 tant à Mme [O] en sa qualité d'associée minoritaire, qu'à la société [10], en raison de leurs inexactitudes et image infidèle ;
- condamner M. [Y] [T] qui a engagé sa responsabilité en commettant des fautes de gestion contraires à l'intérêt social, affectant clairement la situation et le développement économique de la SARL [10], à procéder au remboursement dans les caisses de la SARL [10] des sommes suivantes :
12) Factures Millésime 85 124 034,76 €
13) Factures ou livraisons marchandises Non réglées Club 108 62 234,00 €
14) Smart(véhicule) 7 371,80 €
15) Voyage personnel M. [T] 12 922,82 €
16) Réceptions personnelles M. [T] 7 817,71 €
17) Compte courant débiteur + rémunération indue 110 280,03 €
18) Intérêts bancaires supplémentaires 13 351,27 €
19) Frais acte et contentieux supplémentaires 5 580,27 €
20) Amendes et pénalités supplémentaires 21 184,58 €
21) Intérêts débiteurs 26 680,07 €
22) Recettes détournées de 2013 à 2016. 1.000.252,01€
Soit une somme totale de 1.391.709,32 €
- condamner M. [Y] [T] à verser à titre de dommages et intérêts à la SARL [10] une somme de 100.000 € augmentée de l'intérêt au taux légal avec capitalisation dans les termes de l'article 1343-2 du code civil à compter de l'assignation délivrée le 27 novembre 2017 ;
- condamner M. [Y] [T], qui a engagé sa responsabilité vis-à-vis de l'actionnaire minoritaire, Mme [E] [O] épouse [X], à lui verser une somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts correspondant au préjudice personnel subi par cette dernière lié à son comportement, et aux fautes commises à son préjudice, augmentée de l'intérêt au taux légal avec capitalisation dans les termes de l'article 1343-2 du code civil à compter de l'assignation délivrée le 27 novembre 2017 ;
- ordonner la transmission du présent dossier au procureur de la république près le tribunal de grande instance de Grasse en application de l'article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale;
- communiquer à l'administration les éléments du présent dossier en application de l'article L 101 du code des procédures fiscales ;
- confirmer le jugement entrepris pour le surplus ;
y ajoutant, ordonner la cancellation des écritures d'appel signifiées le 22 juillet 2021 prises
sous la constitution de Me Sandra Juston reprenant les mêmes discours injurieux et /ou outrageants que ceux tenus en première instance ;
- condamner M. [Y] [T] au paiement au profit de Mme [E] [O] épouse [X] de la somme de 30.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 juillet 2021, M. [Y] [T] demande à la cour de :
- dire et juger Mme [E] [O] irrecevable et en tout cas mal fondée en son appel,
- dire et juger M. [Y] [T] recevable et bien fonde en ses conclusions et en son appel incident,
- réformer le jugement en ce qu'il a :
- ordonné la cancellation des conclusions de M. [Y] [T] alors que
lesdites écritures judiciaires ne contiennent ni propos injurieux ou outrageants,
- condamne M. [T] à payer à Mme [O] la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts en réparation d'un prétendu préjudice moral,
statuant de nouveau de ces chefs,
- débouter Mme [E] [O] de ses demandes, fins et conclusions à ce titre,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir soutenues par M. [Y] [T] tirées des règles de la prescription triennale et du défaut de qualité a agir de Mme [E] [O],
statuant de nouveau de ces chefs,
- dire et juger Mme [E] [O] irrecevable en son action ut singuli en application notamment des dispositions de l'article 122 du code de procédure civile pour défaut de qualité et prescription triennale de l'article L223-23 du code de commerce,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [Y] [T] de sa demande de condamnation de Mme [E] [O] à lui payer à titre de dommages et intérêts une somme
à parfaire de 100.000 euros et en ce qu'il l'a également débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que concernant la condamnation aux dépens,
statuant de nouveau de ces chefs,
- faire notamment application des dispositions des articles 1240 et suivants du code civil et condamner Mme [E] [O] à payer à M. [Y] [T] à titre de dommages et intérêts, en réparation des préjudices de tous ordres subis, de nature économique,financière, juridique, morale, image, réputation et autres, à une somme à parfaire d'un montant de100.000 euros,
- condamner Mme [E] [O] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile a payer à M. [Y] [T] la somme de 25.000 euros en application des
dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
- confirmer pour le surplus le jugement rendu par le tribunal de commerce de Cannes le 3 décembre 2020,
- débouter Mme [E] [O] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions pour le casou il serait admis la recevabilité de ses demandes malgré l'application des règles de la prescription triennale et son défaut de qualité a agir.
- dire et juger que Mme [E] [O] est défaillante à administrer la preuve dont elle à la charge de la commission par M. [Y] [T] d'un ou plusieurs manquements susceptibles de lui être imputés, ainsi que de l'existence d'un dommage réparable et d'un lien de causalité entre les dommages alléguée et les fautes alléguées et ce tant à l'égard de la société [10] qu'a l'égard de Mme [E] [O] a titre personnel.
- dire et juger que Mme [E] [O] est défaillante à administrer la preuve dont elle a la
charge de l'existence d'un dommage direct, certain, personnel et distinct de l'éventuel dommage
susceptible d'être cause à la personne morale.
- débouter en conséquence Mme [E] [O] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions.En toute hypothèse, condamner Mme [E] [O] aux entiers dépens, ceux d'appel distraits au profit de Maître Sandra Juston, membre de la SCP Badie-Simon-Thibaud et Juston, avocat aux offres de droit.
MOTIFS
1-sur la recevabilité en première instance des interventions volontaires de Maître [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] en qualité d'administrateur judiciaire:
Vu l'article L 622-21 I et II du code de commerce dont il résulte que : L'administration de l'entreprise est assurée par son dirigeant et lorsque le tribunal, en application des dispositions de l'article L. 621-4, désigne un ou plusieurs administrateurs, il les charge ensemble ou séparément de surveiller le débiteur dans sa gestion ou de l'assister pour tous les actes de gestion ou pour certains d'entre eux.
Selon l'article 325 du code de procédure civile, l'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.
Vu l'article R 223-32 du code de commerce énonçant :Lorsque l'action sociale est intentée par un ou plusieurs associés, agissant soit individuellement, soit dans les conditions prévues à l'article R. 223-31, le tribunal ne peut statuer que si la société a été régulièrement mise en cause par l'intermédiaire de ses représentants légaux.Le tribunal peut désigner un mandataire ad hoc pour représenter la société dans l'instance, lorsqu'il existe un conflit d'intérêt entre celle-ci et ses représentants légaux.
Au cours de la procédure pendante devant le tribunal de commerce de Cannes, la société [10] faisait l'objet des procédures collectives et jugements suivants :
- par jugement du 29 mai 2018, le tribunal de commerce de Cannes ouvrait une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société [10] et désignait la société [7] en la personne de Maître [W], en qualité d'administrateur judiciaire ainsi que Maître [A] [P] aux fonctions de mandataire judiciaire,
- par jugement du 17 septembre 2019, le tribunal de commerce de Cannes arrêtait le plan de redressement par voie de continuation, nommait pour la durée du plan, Me [A] [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan, maintenait ce dernier comme mandataire judiciaire jusqu'à la fin de la procédure de vérification des créances, mettait fin à la mission de la société [7], prise en la personne de Me [J], fixait la durée du plan à dix années,
L'appelante demande d'abord à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit irrecevables les interventions volontaires de Maître [P] (en qualité de commissaire à l'exécution du plan) et de la SARL [7] en la personne de Maître [W] ( en qualité d'administrateur judiciaire).
En première instance, Mme [E] [O] exerçait l'action sociale ut singuli pour le compte de la société au titre du préjudice subi par cette dernière, en sa qualité d'associée minoritaire. Elle sollicitait également l'annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018.
Mme [E] [O] avait fait assigner, outre M. [Y] [T], également la société [10], tandis que les organes de la procédure de redressement judiciaire intervenaient volontairement à l'instance (Me [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan et Me [W] en qualité d'administrateur judiciaire).
Il est de principe que lorsque l'action sociale est intentée par un associé, le tribunal ne peut statuer que si la société a été régulièrement mise en cause par l'intermédiaire de ses représentants légaux.
S'agissant tout d'abord de l'intervention volontaire de Me [W], en qualité d'administrateur judiciaire, celle-ci doit être déclarée irrecevable, au moment où le jugement a été rendu le 3 décembre 2020, dès lors que, par jugement du 17 septembre 2019, le tribunal de commerce de Cannes arrêtait le plan de redressement et mettait fin à la mission de la société [7]. En tout état de cause, l'intimée ne démontre pas quelle était la mission exacte de l'administrateur judiciaire, étant précisé qu'en cas de redressement judiciaire, l'administration de l'entreprise est assurée par son dirigeant et que l'administrateur n'a qu'une mission de surveillance de la gestion ou d'assistance.
S'agissant ensuite de l'intervention volontaire de Me [A] [P], en qualité de commissaire à l'exécution du plan, celle-ci est recevable, au regard des demandes indemnitaires qui avaient été alors formulées par l'associée minoritaire pour le compte de la société en redressement judiciaire.
L'argumentation de l'associé majoritaire, M. [Y] [T], selon lequel nul ne plaide par procureur, n'est pas pertinent, Mme [E] [O] ayant un intérêt propre à obtenir la recevabilité de l'intervention volontaire du commissaire à l'exécution du plan, celle-ci alléguant que la société [10] devait être représentée à l'instance pour que son action ut singuli prospère.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il déclare irrecevable l'intervention volontaire de la société [7] en qualité d'administrateur judiciaire et infirmé en ce qu'il déclare irrecevable celle de Me [A] [P], en qualité de commissaire à l'exécution du plan.
Statuant à nouveau, la cour déclare recevable l'intervention volontaire de Me [A] [P], en qualité de commissaire à l'exécution du plan, au moment où le juge de première instance a statué.
2-sur la recevabilité de l'action ut singuli de l'associée minoritaire
2-1 sur la recevabilité au regard de la prescription triennale
L'article L223-22 du code de commerce dispose :Les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.Si plusieurs gérants ont coopéré aux mêmes faits, le tribunal détermine la part contributive de chacun dans la réparation du dommage.Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, les associés peuvent, soit individuellement, soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, intenter l'action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société à laquelle, le cas échéant, les dommages-intérêts sont alloués.Est réputée non écrite toute clause des statuts ayant pour effet de subordonner l'exercice de l'action sociale à l'avis préalable ou à l'autorisation de l'assemblée, ou qui comporterait par avance renonciation à l'exercice de cette action.Aucune décision de l'assemblée ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les gérants pour faute commise dans l'accomplissement de leur mandat.
L'article L 223-23 du même code ajoute :Les actions en responsabilité prévues aux articles L. 223-19 et L. 223-22 se prescrivent par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation. Toutefois, lorsque le fait est qualifié crime, l'action se prescrit par dix ans.
Vu les articles 1315, alinéa 2, devenu 1353, alinéa 2,
Il résulte de ce texte que le point de départ du délai de la prescription triennale de l'action
ut singuli correspond à la période où le fait dommageable a pu être constaté ou au jour où il a été révélé en cas de dissimulation.
M. [Y] [T] conclut à l'irrecevabilité de l'action ut singuli de Mme [E] [O] pour cause de prescription triennale. Il précise que les actions en responsabilité prévues à l'article L223-22 se prescrivent par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation, que si des manquements fautifs seraient mis à jour imputables au gérant, le délai de prescription de trois ans court nécessairement à compter du fait dommageable, qu'il appartient à Mme [E] [O] de justifier de manière distincte quels sont véritablement les faits qu'elle prétend lui imputer. Il fait enfin valoir que l'appelante est entrée dans les effectifs de la société le 2 novembre 2010 avant de devenir son associée le 1er septembre 2012 et qu'en outre, elle était en charge de la tenue de la comptabilité, du suivi administratif et juridique et notamment de l'établissement des bulletins de salaire.
Pour s'opposer à l'irrecevabilité de son action ut singuli pour cause de prescription triennale, Mme [E] [O] prétend que le point de départ de la prescription se place à la date de réception du rapport de gestion, soit le 25 octobre 2018, qu'elle pouvait donc engager son action jusqu'au 25 octobre 2021, ce qu'elle a fait, l'assignation introductive d'instance datant du 27 novembre 2017.
En l'espèce, au soutien de son action ut singuli, l'associée minoritaire reproche les fautes suivantes commises par le dirigeant au préjudice de la société :non-recouvrement de factures Millésime, non-règlement de factures et de livraisons de marchandises par la société [11], un don à la compagne du dirigeant social d'un véhicule appartenant à la société la prise en charge de frais et dépenses personnelles du dirigeant social, la livraison de marchandises au profit de tierces entreprises, des rémunérations de gérance injustifiées, des abus de biens sociaux.
Il est de principe que la charge de la preuve du point de départ d'un délai de prescription incombe à celui qui invoque cette fin de non-recevoir.
En l'espèce, M. [Y] [T] se borne à affirmer que l'intimée était en charge de la tenue de la comptabilité, du suivi administratif et juridique et notamment de l'établissement des bulletins de salaire et qu'en conséquence, aucun événement juridique, comptable, financier ou autre,n'était susceptible de lui être caché. En se limitant à affirmer cela, l'appelant ne démontre aucunement à quelle date précise le fait dommageable a pu être constaté ou a été révélé en cas de dissimulation à Mme [E] [O].
La cour ne peut que rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription triennale opposée à l'action ut singuli et confirmer en conséquence le jugement sur ce point.
2-2 sur la recevabilité de l'action ut singuli au regard de la qualité pour agir
Vu l'article L622-20 al 1 du code de commerce selon lequel le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers.
Vu l'article L651-2 du même code selon lequel lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par
certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion.
Selon l'article L 233-22 al 3 du code de commerce que :Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, les associés peuvent, soit individuellement, soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, intenter l'action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société à laquelle, le cas échéant, les dommages-intérêts sont alloués.
Il est de principe que lorsque le redressement ou la liquidation judiciaire d'une société ne fait pas apparaître d'insuffisance d'actif, les actions exercées à l'encontre de son dirigeant sur le fondement des articles L. 223-22, L. 225-251 et L. 225-252 du code de commerce sont recevables.
L'intimé, dirigeant social, oppose à l'appelante, associée minoritaire, une fin de non-recevoir tirée d'un défaut de qualité pour exercer l'action ut singuli, précisant que la société [10] a été placée en redressement judiciaire le 29 mai 2018 et que, conformément à l'article L622-20 du code de commerce (applicable au redressement judiciaire en vertu de l'article L631-14 du même code), seul le mandataire judiciaire a qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers.
L'intimé ajoute que Mme [E] [O] n'a jamais mis en cause les organes de la procédure, que ces derniers sont intervenus volontairement, qu'ils s'en sont rapportés à la justice et n'ont pas exprimé qu'ils entendaient soutenir les prétentions de cette dernière, que le jugement a déclaré irrecevables leurs interventions et que nul ne plaidant par procureur, Mme [E] [O] n'est pas recevable à solliciter l'infirmation du jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables les interventions volontaires.
Cependant, en premier lieu, si le mandataire judiciaire désigné par le tribunal avait seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers,il résulte toutefois de l'articleL 222-23 du code de commerce, précédemment cité, que l'associée minoritaire pouvait, soit individuellement, soit en se groupant, intenter l'action sociale en responsabilité contre le gérant et qu'elle était habilitée à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société à laquelle.
De plus, l'action ut singuli échappe au monopole du commissaire à l'exécution du plan, lequel n'a qualité à agir qu'au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, qui est satisfait par l'adoption du plan.
Mme [E] [O] avait donc bien qualité à agir nonobstant l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire pour la société [10].
Par ailleurs, au jour où cette cour statue, la procédure de redressement judiciaire est désormais terminée, le tribunal de commerce de Cannes ayant, par jugement du 2 avril 2024, prononcé la résolution du plan de redressement et la liquidation judiciaire de la société [10].
Me [A] [P] a été désigné en qualité de liquidateur et mis en cause dans le cadre de cette instance en appel. Il n'a engagé aucune action contre M. [Y] [T] en sa qualité de dirigeant.
Or, une action en responsabilité ut singuli est possible même en cas de liquidation judiciaire dès lors qu'aucune insuffisance d'actif n'est apparue. En l'espèce, non seulement les pièces et les débats ne font pas ressortir une insuffisance d'actif, mais en outre, le liquidateur, n'a pas repris l'action ut singuli initialement exercée par Mme [E] [O].Ainsi, même si, au cours de la procédure, la société [10] s'est retrouvée en liquidation judiciaire, la procédure ne saurait devenir rétroactivement irrecevable, faute d'élément sur une insuffisance d'actifs.Par ailleurs, seule l'absence d'une insuffisance d'actif autorise le liquidateur à poursuivre l'action introduite sur le fondement du droit commun.
La cour, confirmant le jugement, ne peut que rejeter la fin de non-recevoir tiré d'un supposé défaut de qualité de Mme [S] [O] pour exercer l'action ut singuli.
3-sur la demande de Mme [E] [O] d'annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018
3-1sur la recevabilité de la demande d'annulation
Selon l'article 126 du code de procédure civile :Dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.Il en est de même lorsque, avant toute forclusion, la personne ayant qualité pour agir devient partie à l'instance.
Le jugement critiqué a déclaré irrecevable la demande de Mme [E] [O] d'annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018 au motif que la société [10] n'était pas partie à l'instance.
Mme [E] [O] sollicite l'infirmation du jugement sur ce point, soutenant que la société [10] était au contraire présente dans la procédure et régulièrement représentée.
En l'espèce, l'action de Mme [E] [O] en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018 nécessitait effectivement la mise en cause de la société [10], ce qui était bien le cas en première instance, l'assignation introductive d'instance ayant été délivrée tant contre le dirigeant social que contre la société elle-même (signification du 27 novembre 2017 à personne morale). En outre, lorsque Mme [E] [O] a présenté, en première instance, sa demande en annulation de l'assemblée générale, la société [10] était bien représentée par un avocat. Enfin, la société [10] est également une partie à l'instance en appel, celle-ci étant représentée par le même avocat que l'intimé. Enfin, le mandataire liquidateur de ladite société a bien été appelé en la cause selon acte d'huissier de l'appelante du 5 septembre 2024 (signifié à personne morale).
La cour, infirmant le jugement, déclare recevable l'action de Mme [E] [O] en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018.
Le jugement est également infirmé en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de la société [10] au motif que cette dernière n'était pas alors partie à l'instance.
3-2 sur le mal fondé de l'action en annulation de l'assemblée générale
Selon l'article L235-1 du code de commerce :La nullité d'une société ou d'un acte modifiant les statuts ne peut résulter que d'une disposition expresse du présent livre ou des lois qui régissent la nullité des contrats. En ce qui concerne les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions, la nullité de la société ne peut résulter ni d'un vice de consentement ni de l'incapacité, à moins que celle-ci n'atteigne tous les associés fondateurs. La nullité de la société ne peut non plus résulter des clauses prohibées par l'article 1844-1 du code civil.La nullité d'actes ou délibérations autres que ceux prévus à l'alinéa précédent ne peut résulter que de la violation d'une disposition impérative du présent livre, à l'exception de la première phrase du premier alinéa de l'article L. 225-35 et de la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 225-64, ou des lois qui régissent les contrats, à l'exception du dernier alinéa de l'article 1833 du code civil.
Vu l'article 1382 du code civil devenu 1240 du même code,
Vu 'article L 241-3 du code de commerce invoqué par l'appelante,
Est constitutive d'un abus de majorité la décision sociale prise contrairement à l'intérêt général de la société et dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité des associés au détriment de la minorité.
Au soutien de sa demande d'annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018, Mme [S] [O] soutient que :
- l'assemblée générale convoquée le 25 octobre 2018 (et qui s'est tenue le 16 novembre 2018) avait pour objet de permettre au dirigeant de masquer toutes les fautes commises au préjudice de la société, mais également d'entériner des rémunérations de gérance injustifiées,
- la man'uvre est déloyale, et procède d'un abus de majorité,
- le gérant n'a pas respecté les règles comptables légales, puisqu'il a livré des informations insuffisantes et inexactes,
- cette assemblée générale a été tenue dans le seul intérêt personnel de l'actionnaire majoritaire, portant atteinte à l'intérêt social, puisque M. [T] a tenté par ce biais non seulement de faire entériner le bilan de 2017 effaçant ainsi ses fautes de gestion et autres détournements (dépenses faites à caractère personnel), mais également à valider, a posteriori et hors délai, les rémunérations de gérant qu'il s'est affectées indûment,
- s'agissant des rémunérations, M. [Y] [T] a entendu voir fixer rétroactivement la rémunération de la gérance sur l'exercice 2012 à la somme de 27.000 euros, et en 2013 à 45.000 euros, et ce alors même que lors de ces exercices, le capital social appartenait pour partie à M. [U] [L] (qui avait 160 parts) et que l'assemblée générale de 2018 ne peut avoir eu pour vocation de régulariser des rémunérations, qui devaient être validées par les associés qui détenaient alors le capital social.
S'agissant tout d'abord du grief tiré de la régularisation rétroactive de rémunérations irrégulières par la délibération critiquée, il ressort du document intitulé 'rapport de gestion à l'assemblée générale ordinaire du 16 novembre 2018"que le dirigeant social a demandé à l'assemblée générale ordinaire tenue à cette même date d'approuver sa rémunération au titre des exercices 2012 à 2017 à hauteur des montants suivants :
- 27 000 euros pour 2012,
- 45 000 euros pour 2013.
Selon le procès-verbal d'assemblée générale ordinaire du 16 novembre 2018, l'assemblée a voté une résolution fixant effectivement la rémunération de la gérance pour l'exercice 2013 à 45 000 euros, à la majorité des voix, M. [Y] [T] étant alors le seul associé présent, sur les deux associés que comptait alors la société (Mme [E] [O] étant absente). De plus, en 2013, au moment où le dirigeant social a encaissé la rémunération litigieuse il y avait trois actionnaires (Mme [S] [O] et M. [Y] [T],M. [U] [L]) et non pas seulement deux (Mme [S] [O] et M. [Y] [T]).
Cependant, l'article 18 des statuts, intitulé 'rémunération' est très flou et vague concernant les modalités de fixation de la rémunération du gérant, se bornant à prévoir: « Les modalités d'attribution de la rémunération, ainsi que son montant, sont fixés par décision ordinaire des associés ».
Outre le fait que les statuts sont très flous concernant les modalités de fixation de la rémunération du gérant, Mme [E] [O] n'établit pas en quoi les résolutions relatives aux rémunérations sont contraires à l'intérêt général de la société et prises dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des membres de la minorité.
Plus généralement, Mme [E] [O] n'établit pas précisément en quoi les autres résolutions prises lors de l'assemblée générale seraient constitutives d'un abus de majorité et annulables, étant précisé que certaines des résolutions adoptées ont en réalité soit refusé de donner quittus à la gérance, soit refusé d'approuver les comptes de certains exercices clos.
La cour rejette, au fond, l'action en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018.
La cour déboute également Mme [E] [O] de sa demande en inopposabilité des comptes annuels de l'exercice clos le 31 décembre 2017.
4-sur l'action en réparation de l'associé minoritaire pour le compte de la société [10] (action ut singuli)
Selon article L223-22 du code de commerce :Les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion.Si plusieurs gérants ont coopéré aux mêmes faits, le tribunal détermine la part contributive de chacun dans la réparation du dommage.Outre l'action en réparation du préjudice subi personnellement, les associés peuvent, soit individuellement, soit en se groupant dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, intenter l'action sociale en responsabilité contre les gérants. Les demandeurs sont habilités à poursuivre la réparation de l'entier préjudice subi par la société à laquelle, le cas échéant, les dommages-intérêts sont alloués.Est réputée non écrite toute clause des statuts ayant pour effet de subordonner l'exercice de l'action sociale à l'avis préalable ou à l'autorisation de l'assemblée, ou qui comporterait par avance renonciation à l'exercice de cette action.Aucune décision de l'assemblée ne peut avoir pour effet d'éteindre une action en responsabilité contre les gérants pour faute commise dans l'accomplissement de leur mandat
Au soutien de son action en réparation pour le compte de la société [10], Mme [S] [O] invoque différentes fautes du gérant qui doivent être examinées.
- sur la faute de gestion liée à un défaut de paiement de factures par la sociéfé [12]
Au soutien de son action ut singuli et de sa demande en condamnation de M. [Y] [T] à payer une somme de 124.034,96 euros à la société [10], Mme [E] [O] prétend que la cette dernière a régulièrement livré des vins et de l'alcool à une société créée par l'ex-compagne du dirigeant social, la société [12]. L'appelante précise que cette société destinataire des livraisons n'a pas réglé un grand nombre de factures, que M. [Y] [T] était associé au sein de cette société débitrice, qu'il a soit supprimé ces factures, soit ne les a volontairement pas données en saisie à la comptabilité.
Mme [E] [O] estime que M. [Y] [T] a bien commis des fautes de gestion, dès lors qu'il n'y a jamais eu le moindre paiement de ces factures, ni de retour de marchandises s'agissant de ces factures.
Pour s'opposer à toute responsabilité au titre des factures non recouvrées, M. [Y] [T] prétend que la société créancière [10] a retrouvé des documents de retour de marchandises de nature à établir que les comptes sont en réalité soldés. Il prétend aussi que le litige porte éventuellement sur un solde maximum décompte à arrêter de 19.109,99 euros, solde qu'il s'est engagé à prendre en charge avec son ex-compagne, lui par le débit de son compte courant à concurrence de 12.293,39 euros, elle par imputation sur le dividende restant à lui revenir à concurrence de 6816,60 euros.M. [Y] [T] estime qu'en tout état de cause, à supposer que ces allégations soient exactes il n'est pas démontré en quoi cela serait constitutif d'une faute de gestion ou caractéristique d'un délit susceptible de justifier qu'il doive en répondre financièrement a titre personnel.
Il résulte des éléments produits par l'appelante que la société [10] a effectivement livré des produits contenant de l'alcool à la société [12] et que certaines des factures correspondantes n'ont pas été réglées.
Ainsi, dans un courriel du 11 décembre 2014, adressé au dirigeant social de la société [10], l'associée de la société débitrice (et ex-compagne de ce dernier), indique : 'Puisque la [10] a besoin de règlement, ce que je peux comprendre, et bien tu prends un chéquier. Pas celui de [E], ni de [B], mais le tien personnellement et tu établis un chèque à l'ordre de Millesime 85. Mais tu es beaucoup plus doué pour emprunter de l'argent aux autres que de t'investir avec tes propres fonds'.
D'ailleurs, dans le document intitulé 'rapport de gestion à l'assemblée générale ordinaire du 16 novembre 2018", rédigé par le dirigeant social mis en cause, ce dernier reconnaît lui-même, s'agissant de la 'facture millésime 85 pour 36 076,11 euros', que ' des différents éléments en ma possession, il ressort que la dette réelle de Millésime 85 est de 19 109, 99 euros'.
Si le dirigeant social de la société [10] soutient avoir retrouvé des documents de 'retour des marchandises de la société [12] de nature à établir qu'en réalité les comptes seraient soldés', les pièces fournies sont en l'état inexploitables et ne permettent pas d'effectuer un rapprochement entre les factures impayées et les prétendus retours de marchandises.
Dès lors que la société [12] ne s'est pas acquittée de certaines de ses dettes auprès de la société [10], dans des proportions importantes, et que M. M. [Y] [T] n'aurait pas dû l'ignorer (en sa double qualité de dirigeant social de la société créancière et d'associé de la société débitrice), il a commis une faute de gestion en s'abstenant de toute démarche de recouvrement, même la plus minime soit-elle, comme des relances en paiement orales ou écrites. Si M. [Y] [T] prétend s'être engagé à prendre en charge, avec son ex-compagne, la dette de la société [12], il ne s'agit que de modalités de paiement, insusceptibles de neutraliser sa faute de gestion. Au demeurant, le dirigeant social ne démontre pas les paiements allégués, de sorte que le préjudice de la société [10] est encore d'actualité sur ce point.
Au regard des pièces parcellaires produites aux débats de part et d'autre, le préjudice de la société est de 4500 euros à ce titre, somme correspondant au préjudice de la société, constitué par les factures impayées.
Infirmant le jugement, la cour condamne M. [Y] [T] à payer à la société [10] une somme de 4500 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice en lien avec sa faute de gestion.
- sur la faute de gestion liée à un défaut de paiement de factures par la société à l'enseigne [11]
Mme [S] [O] sollicite la condamnation de M. [Y] [T] à payer à la société [10] la somme de 62.234 euros correspondant à l'établissement de factures
et à des livraisons de vin non réglées par la société à l'enseigne [11], lequel est un restaurant ouvert par la compagne de l'intimé et dont l'adresse est celle du domicile de ce dernier.
Pour s'opposer à toute indemnisation de la société [10] à ce titre, M. [Y] [T] indique qu'il ne reconnaît pas l'authenticité et la réalité des pièces produites par l'appelante, ajoutant qu'il n'est en tout état de cause pas établi en quoi ces faits seraient constitutifs d'une faute de gestion ou caractéristiques d'un délit susceptible de justifier qu'il en répondre financièrement a titre personnel.
En l'espèce, pour démontrer la réalité des factures impayées par la société ayant pour enseigne [11], l'appelante se limite à verser aux débats des factures et documents divers, parfois annotés, mais dont il n'est pas possible de tirer de quelconques certitudes.
Le jugement est confirmé en ce qu'il rejette l'action en responsabilité au titre des factures dues par le Club 108.
- sur la faute de gestion reprochée liée au véhicule Smart
Mme [S] [O] sollicite la condamnation de M. [Y] [T] à payer à la socité [10] une indemnité de 7.371,80 euros, indiquant que cette dernière avait conclu un contrat de location avec option d'achat en juin 2011 avec Mercedes Benz portant sur un voiture Smart.
L'appelante ajoute qu'en fin de contrat en juin 2013, la société [10] a acheté le véhicule mais que, finalement, M. [Y] [T] a donné ce dernier à Mme [Z] [N], son-ex compagne. L'appelante ajoute qu'un tel don a entraîné la perte d'un actif pour la société d'un montant de 7.371,80 euros. Mme [S] [O] nie le fait que M. [Y] [T] lui aurait donné des consignes pour que la cession du véhicule soit comptabilisée.
Pour s'opposer à toute condamnation ce titre, l'intimé répond qu'à supposer que ces allégations soient exactes il n'est pas démontré en quoi cela serait constitutif d'une faute de gestion ou caractéristiques d'un délit susceptible de justifier qu'il doive en répondre financièrement a titre personnel. Il ajoute qu'au soutien de ses allégations, l'appelante produit une unique pièce sous le numéro 41 correspondant a l'extrait du compte 615500 intitulé 'entretien bien mobilier » du grand livre de la société [10] de l'année 2013 sur lequel il est mentionne une écriture au débit de 7.371,80 euros.
Il fait enfin valoir que ce véhicule Smart a fait l'objet d'un contrat de location financière avec option d'achat, la valeur initiale au 15 juillet 2013 de 7371.80 euros devant être affectée d'une décote fixée en la matière à 149.10 euros par mois soit sur la durée de location de 23 mois, une décote de 3429.30 euros donnant une valeur résiduelle de 3.942,50 euros à la date de cession au mois de juin 2015 en faveur de Mme [N]. Il affirme enfin avoir pris en charge ledit prix de cession à titre personnel par le débit de son compte courant.
La véracité des faits dénoncés par l'appelante est établie. En effet, dans le rapport de gestion, M. [Y] [T] indique: 'je conteste ladite somme et reconnaît une valeur de 3 942,50 euros après amortissements, qui est affectée à mon compte courant. Je précise que, à l'époque, j'avais donné des instructions pour que ce bien comptabilisé par erreur, par Mme [O], en juillet 2013, dans les charges de l'exercice 2013 soit reclassé en immobilisation, ce qui n'a pas été fait. De ce fait, lors de la cession du véhicule dn juin 2015, il n'a pas été comptabilisé de sortie d'immobilisation'. En outre, dans ses dernières écritures, le dirigeant social réitère son affirmation selon laquelle la valeur résiduelle du véhicule transmis à Mme [N] au est de '3.942,50 euros a la date de cession au mois de juin 2015 en faveur de Mme [N]'.
Par ailleurs, le dirigeant social n'établit nullement qu'il aurait pris en charge le prix de la cession à son ex-compagne, à titre personnel, par le débit de son compte courant, contrairement à ce qu'il affirme.
Il ressort des éléments précédents que la voiture Smart, véhicule de société donné à une tierce personne, a donc initialement coûté 7 371, 80 euros à la société [10] et que cette voiture , élément d'actif, est finalement sorti du patrimoine de cette dernière et ce sans aucune contrepartie. Compte tenu des pièces parcellaires produites par l'appelante sur la valeur de cet actif , au moment où il est sorti du patrimoine social, la cour fixe l'indemnité de réparation à 3000 euros.
Statuant à nouveau, la cour condamne M. [Y] [T] à payer à la société [10] une somme de 3000 euros à titre de dommages-intérêts dans le cadre de l'action ut singuli.
- sur la faute de gestion reprochée tirée de la prise en charge de dépenses personnelles et de frais de réception du dirigeant social
Mme [E] [O] sollicite la condamnation de M. [Y] [T] à payer à la société la somme globale de 10.740,53 euros (2.922,82 euros + 7.817,71 euros) s'agissant de sommes prélevées sur les fonds de la société [10] pour financer des dépenses purement personnelles à son dirigeant. Elle ajoute qu'il ne saurait y avoir une quelconque compensation entre ces dépenses et le compte courant d'associé du dirigeant.
Pour se défendre, M. [Y] [T] répond que ces frais entraient dans l'exécution du mandat social, qu'il ne les a pas dissimulés, qu'il a fourni les pièces justificatives.
Les quelques éléments produits par l'appelante ne permettent pas de caractériser le fait que les dépenses litigieuses correspondent à des frais personnels du gérant et qu'ils sont sans lien avec sa fonction de dirigeant social d'une entreprise ayant pour objet l'import export de vins et spiritueux, de dégustation sur place et de petite restauration.
Le jugement est confirmé en ce qu'il déboute Mme [E] [O] de sa demande d'indemnisation de la société [10] de ce chef.
- sur la faute reprochée liée à la rémunération du gérant
Vu les articles L. 223-18 du code de commerce et 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016,
Il est de principe que la rémunération du gérant d'une société à responsabilité limitée est déterminée soit par les statuts, soit par une décision de la collectivité des associés.
Pour justifier sa demande en indemnisation de la société à hauteur de 45 000 euros, Mme [E] [O] allègue encore qu'en 2013 a été affectée au compte courant de M. [Y] [T] une somme de 45.000 euros au titre de sa rémunération, alors que l'article 18 des statuts de la société imposent la détermination de la rémunération du gérant par une assemblée générale et que, pourtant aucune assemblée n'a voté sa rémunération 2013 ni a priori, ni a posteriori.
Pour s'opposer à toute indemnisation de la société à ce titre, l'intimé répond qu'il n'y a pas lieu d'imputer la somme de 45 000 euros au débit de son compte courant mais que si tel était le cas, son compte courant n'en resterait pas moins créditeur.
Outre le fait que la cour a refusé d'annuler la résolution du 16 novembre 2018 ayant décidé de fixer la rémunération de la gérance pour l'exercice 2013 à la somme de 45 000 euros,
c'est à juste titre que le tribunal a relevé que les statuts prévoyaient, de façon générale, floue et sans plus de détails, que :'les modalités d'attribution de cette rémunération , ainsi que son montant, sont fixés par décision ordinaire des associés'.
Le jugement est confirmé en ce qu'il rejette la demande de l'appelante de condamnation de M. [Y] [T] à rembourser à la société [10] un indu de rémunération.
- sur la faute de gestion en lien avec de fausses écritures
L'appelante sollicite la condamnation de l'intimé à indemniser la société à hauteur de 110.280,03 euros, au titre de sommes affectées à tort sur le compte courant de ce dernier,dont le détail serait le suivant:
- la distribution de dividende 2011
- la rémunération non approuvée de 45.000 euros
- des sommes affectées à tort à ce dernier et qui concernait des clients de l'entreprise
- le remboursement d'un prêt personnel fait par M. [F].
En défense, l'intimé répond que ces prétentions ne sont pas documentées et en toute hypothèse contredites par les pièces versées aux débats. Il ajoute avoir personnellement procédé à remboursement du prêt de M. [F] (dont il avait bénéficié personnellement) par un virement bancaire de son compte personnel [8] du 12 mai 2015 pour un montant de 35.000 euros.
L'appelante ne démontre pas suffisamment la réalité de ses allégations sur les fautes de gestion commises par le dirigeant social, y compris s'agissant des faits liés au prêt personnel de M. [F] pour M. [Y] [T] (prêt personnel qui aurait été remboursé par la société [10], à la place de son dirigeant social, à M. [F]). En effet, s'il résulte des pièces produites par l'intimée que le dirigeant social a émis des chèques d'un montant total de 12 500 euros (10 650 euros selon l'intimée), tirées sur le compte de la société [10], au profit de son créancier et ce à la date du 26 juin 2015, le compte d'achat de marchandises laisse pour autant apparaître que le créancier personnel du dirigeant social était également le créancier de la société [10]. Or, les paiements faits par la société [10] le 26 juin 2015 correspondent à des dettes de celle-ci envers M. [F] au titre de factures dont rien ne permet de dire qu'elles seraient fausses.
Le jugement doit être confirmé en ce qu'il déboute Mme [E] [O] de sa demande à ce titre.
- sur la faute de gestion en lien avec un détournement de recettes
Mme [E] [O] sollicite une indemnité de1.000.252,01 euros au profit de la société [10], au titre de recettes faites par la société détournées par son dirigeant social de 2013 à 2016.
M. [Y] [T] nie tout détournement de recettes et soutient que l'appelante présente des pièces inexploitables, comportant certaines annotations manuscrites n'émanant pas de lui. Il précise que, pour certains salariés, un complément de rémunération leur était versé en espèces, mais qu'il ne s'agit pas d'un détournement de recettes dont il aurait personnellement profité.
En l'espèce, si les documents produits aux débats (et notamment le rapport de Mme [K] [R], commissaire aux comptes) attestent de l'existence d'écarts significatifs démontrant une absence de concordance entre le chiffre d'affaires enregistré en comptabilité contenu dans le bilan déposé au greffe et celui ressortant des tickets Z et déclarés sur les CA3 sur la période du 01/01/2015 au 31/12/2015, il n'est en revanche pas établi, sans nul doute possible, que cet écart résulterait d'un détournement de recettes ou de fautes de gestion commises par le dirigeant social. Les causes de cette absence de concordance demeurent à ce jour obscures, étant précisé que les autres documents produits par l'appelante ne corroborent pas les affirmations de l'intimée sur ce point.
Ainsi, si Mme [E] [O] produit plusieurs attestations concordantes et précises de salariés de la société [10], indiquant que leurs salaires leur étaient régulièrement payés en espèces par M. [Y] [T] (et que les heures supplémentaires n'apparaissaient pas, pour certains, sur leurs bulletins de salaire), ce qui constitue indéniablement une faute de gestion, le préjudice de la société n'est pas pour autant établi à ce jour. En effet, en agissant ainsi, M. [Y] [T] a uniquement payé des dettes sociales et n'a pas détourné, pour son profit personnel, des recettes. Enfin, Mme [E] [O] ne soutient pas que la société aurait subi un redressement fiscal et des pénalités en lien avec les salaires payés en espèces.
En revanche, il résulte de l'attestation précise de M. [H] [M] du 9 novembre 2017, que , le 2 ou 3 novembre 2017, M.[Y] [T] a retiré 100 euros en espèces de la caisse du restaurant 'pour le donner en cadeau à sa fille pour son anniversaire'. Cette attestation est corroborée par les autres attestations de salariés indiquant tous que le dirigeant social les payait régulièrement en espèces et dissimulait certaines heures de travail. En outre, elle démontre bien une faute de gestion du dirigeant social étant à l'origine d'un préjudice pour la société [10].
La cour, infirmant le jugement, condamne M. [Y] [T] à payer à la société [10] une somme de 100 euros au titre d'un détournement de recettes.
Compte tenu du caractère très limité du détournement de recettes prouvé mais également de l'absence de pièces probantes démontrant le lien entre les préjudices suivants et les fautes de gestions du dirigeant social, Mme [E] [O] doit être déboutée de ses demandes en indemnisation supplémentaires suivantes:
- intérêts bancaires supplémentaires 13 351,27 euros
- frais acte et contentieux supplémentaires 5 580,27 euros
- amendes et pénalités supplémentaires 21 184,58 euros
- intérêts débiteurs 26 680,07 euros.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
- sur les dommages-intérêts supplémentaires réclamés par l'associée minoritaire au nom de la société [10]
Mme [E] [O] sollicite, pour le compte de la société [10], des dommages-intérêts supplémentaires à hauteur de 100 000 euros, soutenant l'ampleur des fautes et détournements, ainsi que le fait que les fautes de gestions du dirigeant social ont contribué à la dégradation financière de la société, qui a été placée en redressement judiciaire par jugement
en date du 29 mai 2018.
Cependant, d'une part, le lien entre les fautes du dirigeant social et le redressement judiciaire n'est pas démontré et, d'autre part, il n'est pas établi l'existence d'un préjudice non déjà réparé.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il rejette cette demande indemnitaire supplémentaire de l'appelante à hauteur de 100 000 euros.
5-sur les demandes de l'associé minoritaire en réparation présentées pour son propre compte
Mme [E] [O] sollicite une indemnisation de 200 000 euros de la part du dirigeant social, lequel, selon elle, a commis des fautes ayant créé son préjudice distinct de celui de la société.
Concernant son préjudice personnel distinct de celui de la société [10], l'appelante indique qu'elle a investi 100.000 euros pour l'achat des parts sociales en 2012, qu'elle a contracté un crédit qu'elle continue de régler, qu'elle a apporté des sommes en compte courant, qu'elle a perdu la chance de percevoir des dividendes entre 2012 et 2018, qu'elle n'a pu à ce jour obtenir remboursement de son compte courant, d'autant que M. [Y] [T] a établi des comptes annuels clos le 31.12.2017 donnant une image infidèle des comptes de la société (commettant au passage un délit supplémentaire - celui de présentation de faux bilans), qu'elle donc perdu la chance de rentabiliser son investissement, et a subi un important préjudice financier et moral.
Si certaines fautes sont retenues à l'encontre du dirigeant social, il n'est pour autant pas démontré que les difficultés financières de l'entreprise, placée en redressement puis en liquidation judiciaire, sont imputables à ce dernier, étant précisé que les indemnisations accordées à la société [10] ne sont pas très élevées. De plus, si les fautes retenues ont , dans une certaine mesure, contribué à la dépréciation de la société, le préjudice subi par l'appelante n'est que le corollaire du dommage causé à la société [10] elle-même, et n'a donc pas entièrement un caractère personnel.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il rejette la demande indemnitaire personnelle de l'appelante.
6-sur la demande indemnitaire de M. [Y] [T] contre l'associée minoritaire au titre d'un préjudice moral et en lien avec des propos diffamatoires de cette dernière
Vu les articles 29 et 41 de la loi du 29 juillet 1881 :
Selon les quatrième et cinquième alinéas du second de ces textes, ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux, mais les juges saisis de la cause et statuant sur le fond pourront néanmoins prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants, ou diffamatoires et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts.
En outre, toute expression qui contient l'imputation d'un fait précis et déterminé de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne visée, constitue une diffamation, même si elle est présentée sous une forme déguisée ou dubitative ou par voie d'insinuation.
M. [Y] [T] sollicite la condamnation de l'appelante à lui régler une indemnité de 100 000 euros au titre d'un préjudice moral et d'anxiété, alléguant que Mme [E] [O] a porté atteinte à son honneur et sa réputation en lui imputant des manquements imaginaires. Il ajoute que cette dernière a commis des turpitudes directement a l'origine de la soumission de la société [10] à une procédure de redressement judiciaire.
En l'espèce, si Mme [E] [O] a, en particulier, reproché à M. [Y] [T], au travers de ses écritures développées au cours de cette procédure, d'avoir détourné des recettes et actifs qui appartenaient à la société [10],d'avoir perçu une rémunération indue et fait prendre en charge par la société des dépenses personnelles, il n'en demeure pas moins que la cour a estimé fondée une partie desdits reproches . Il a d'ailleurs été accordé des indemnités à la société victime des agissements de son dirigeant social.
De plus, contrairement à ce que qu'affirme M. [Y] [T], rien ne permet d'affirmer que les turpitudes reprochées à Mme [E] [O], au demeurant non démontrées, seraient à l'origine du redressement judiciaire de la société [10].
Enfin, c'est à juste titre que le jugement, qui sera confirmé sur ce point, a énoncé que le tribunal de commerce était incompétent pour connaître des demandes de M. [Y] [T] à l'encontre de Mme [E] [O], au titre des fautes commises par celle-ci en qualité de salariée.
Infirmant le jugement, la cour rejette la demande de M. [Y] [T] de dommages-intérêts au titre du préjudice moral allégué.
7-sur la suppression de certains discours des conclusions de M. [Y] [T] et de la société [10]
Selon l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 :Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l'identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure.
Selon les alinéas 3, 4, 5, 6 de l 'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 :Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux.Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts.Pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux, et, dans tous les cas, à l'action civile des tiers.
Selon les quatrième et cinquième alinéas du second de ces textes, ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux, mais les juges saisis de la cause et statuant sur le fond pourront néanmoins prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants, ou diffamatoires et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts.
De plus, toute expression qui contient l'imputation d'un fait précis et déterminé de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne visée, constitue une diffamation, même si elle est présentée sous une forme déguisée ou dubitative ou par voie d'insinuation.
Pour M. [Y] [T], le jugement doit être infirmé en ce qu'il a ordonné la suppression de certains termes de ses conclusions prises en première instance.Pour lui, il n'est ni injurieux ni outrageant de dire que Madame [O] a un comportement malhonnête, qu'elle est une tricheuse et que les manquements par elle commis sont susceptibles de recevoir des qualifications pénales.
Pour l'appelante, les propos contenus dans les conclusions de première instance, et désormais d'appel, doivent être supprimés, sur le fondement de l'article 41 alinéa 4 de la loi du 29 juillet 1881. Elle ajoute que le jugement doit également être confirmé en ce qu'il condamne M. [Y] [T] au paiement d'une somme de 1 euro à titre symbolique à titre de dommages et intérêts.
S'agissant tout d'abord des propos dont la suppression a été ordonnée en première instance par le tribunal, il ne s'agit pas de propos déterminés et précisés, le tribunal ayant seulement ordonné la 'cancellation des conclusions de M. [Y] [T] présentées sous la constitution de Maître [D] et le retrait des propos injurieux ou outrageants contenus dans lesdites conclusions'.
Le jugement, en ordonnant, de façon générale et non détaillé, la cancellation des conclusions de M. [Y] [T], présentées sous la constitution de Maître [D],n'a pas caractérisé précisément, comme l'exige la loi, les discours injurieux, outrageants, ou diffamatoires qu'il convenait de supprimer.
Le jugement est donc infirmé en ce qu'il ordonne une cancellation des conclusions de Maître [D] et en ce qu'il condamne M.[Y] [T] à payer à Mme [E] [O] une somme d'un euro a titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral.
Statuant à nouveau, la cour rejette la demande de Mme [E] [O] de cancellation des écritures prises en première instance par M. [Y] [T] et en indemnisation au titre de son préjudice moral.
S'agissant maintenant du discours tenu à hauteur d'appel par M. [Y] [T]; dans ses écritures, celui-ci indique :'il n'est ni injurieux ni outrageant de dire que Mme [O] a un comportement malhonnête, qu'elle est une tricheuse et que les manquements par elle commis sont susceptibles de recevoir des qualifications pénales'.
Ces propos ne constituent pas une expression qui contient l'imputation d'un fait précis et déterminé de nature à porter atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne visée. Il ne s'agit donc pas d'une diffamation au sens de la loi, ni même une injure ou un outrage.
La cour rejette la demande de Mme [E] [O] tendant à ordonner la cancellation des écritures d'appel signifiées le 22 juillet 2021 prises sous la constitution de Me Sandra Juston reprenant les mêmes discours injurieux et /ou outrageants que ceux tenus en première instance.
8-sur les demandes en lien avec le procureur de la république et l'administration fiscale
Selon l'article 40 du code de procédure pénale :Le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner conformément aux dispositions de l'article 40-1.Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.
L'article L101 du livre des procédures fiscales dispose :L'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration des finances toute indication qu'elle recueille, à l'occasion de toute procédure judiciaire, de nature à faire présumer une fraude commise en matière fiscale ou une man'uvre quelconque ayant eu pour objet ou pour résultat de frauder ou de compromettre un impôt.L'administration des finances porte à la connaissance du juge d'instruction ou du procureur de la République, spontanément dans un délai de six mois après leur transmission ou à sa demande, l'état d'avancement des recherches de nature fiscale auxquelles elle a procédé à la suite de la communication des indications effectuée en application du premier alinéa.Le résultat du traitement définitif de ces dossiers par l'administration des finances fait l'objet d'une communication au ministère public.
Mme [E] [O] sollicite qu'il soit ordonné la transmission du présent dossier au procureur de la république du tribunal de grande instance de Grasse en application de l'article 40 alinéa 2 du code de procédure pénale et qu'il soit communiqué à l'administration les éléments du présent dossier en application de l'article L 101 du code des procédures fiscales.
En l'espèce, les éléments produits de part et d'autre ne permettent pas de considérer que les conditions d'une transmission au procureur de la République ou à l'administration fiscale sont réunies.
La cour dit n'y avoir lieu à faire droit à la demande de Mme [E] [O] de transmission du dossier aux autorités judiciaires et fiscales.
9-sur les frais du procès
Compte tenu de la solution apportée au litige, le jugement est infirmé du chef de l'article 700 et des dépens.
Statuant à nouveau, la cour condamne M. [Y] [T] à payer à Mme [E] [O] une somme de 25 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour les frais exposés en première instance qu'en appel.
M. [Y] [T] est également condamné à supporter la charge des entiers dépens exposés par toutes les parties tant en première instance qu'en appel.
M. [Y] [T] est débouté de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire:
- infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a :
- déclaré irrecevable l'intervention volontaire de la société [7] en qualité d'administrateur judiciaire au moment où le juge de première instance statuait,
- rejeté les fins de non-recevoir soulevées par M. [Y] [T] au titre d'un défaut de qualité à agir de Mme [E] [O] et de la prescription triennale,
- débouté Mme [E] [O] de sa demande indemnitaire pour son propre compte au titre des agissements de M. [Y] [T] en qualité de dirigeant social,
- débouté Mme [E] [O] de son action ut singuli au titre des préjudices liés aux factures non réglées Club 108, aux voyages personnels du dirigeant social, aux réception s personnelles de ce dernier, au compte courant débiteur et à la rémunération indue, aux intérêts bancaires, aux frais actes et contentieux supplémentaires, amendes et pénalités supplémentaires, intérêts débiteurs,
- dit le tribunal de commerce incompétent pour connaître des demandes de M. [Y] [T] à l'encontre de Mme [E] [O] au titre des fautes commises par celle-ci en qualité de salariée.
statuant à nouveau et y ajoutant,
- rejette la demande de Mme [E] [O] de cancellation des écritures prises en première instance par M. [Y] [T] et en indemnisation au titre d'un préjudice moral en lien avec les propos contenus dans lesdites écritures,
- rejette la demande de Mme [E] [O] de suppression de propos de conclusions de M. [Y] [T] prises en appel,
- déclare recevable l'intervention volontaire de Me [A] [P], en qualité de commissaire à l'exécution du plan au moment ou le juge de première instance statue,
- déclare recevable l'action de Mme [E] [O] en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018,
- rejette, au fond, l'action de Mme [E] [O] en annulation de l'assemblée générale du 16 novembre 2018,
- déboute Mme [E] [O] de sa demande en inopposabilité des comptes annuels de l'exercice clos le 31 décembre 2017,
- condamne M. [Y] [T] à payer à la société [10] ;
4500 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice en lien avec sa faute de gestion (défaut de paiement par la société [12] de certaines factures),
3000 euros de dommages-intérêts en lien avec le véhicule Smart,
100 euros de dommages-intérêts en lien avec un détournement de recettes sociales,
- rejette la demande de M. [Y] [T] contre Mme [E] [O] de dommages-intérêts au titre du préjudice moral allégué,
- dit n'y avoir lieu à faire droit à la demande de Mme [E] [O] de transmission du dossier aux autorités judiciaires et fiscales,
- déboute M. [Y] [T] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,
- condamne M. [Y] [T] à payer à Mme [E] [O] une somme de 25 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, tant pour les frais exposés en première instance qu'en appel,
- condamne M. [Y] [T] à supporter la charge des entiers dépens exposés par toutes les parties tant en première instance qu'en appel.
Le Greffier, La Présidente,