CA Bordeaux, 2e ch. civ., 6 mars 2025, n° 24/02253
BORDEAUX
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Caisse de Credit Mutuel de Boulevards (Sté)
Défendeur :
Caisse de Crédit Mutuel de Boulevards (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Boudy
Conseillers :
M. Figerou, Mme Defoy
Avocats :
Me Lagarde-Coudert, Me Larrat, Me De Brisis, Me Traore, Me Le Barazer, Me Trarieux
FAITS ET PROCÉDURE :
Par acte authentique en date du 30 novembre 2015, Monsieur [N] [E] a donné à bail commercial à la SARL Asie Gourmet un local à usage de restaurant situé à [Localité 15].
Monsieur [C] [J] [B] et Madame [G] [U] sont intervenus à l'acte en indiquant se porter cautions solidaires pour le paiement de toutes sommes dues en vertu de ce bail, en principal et accessoires, et pour l'exécution de toutes les obligations contractées en vertu de l'acte.
Une clause résolutoire a été stipulée dans le contrat de bail commercial.
Le 5 mars 2020, M. [E] a signifié à la SARL Asie Gourmet un commandement de payer visant la clause résolutoire, réclamant en principal des loyers de janvier à mars 2020 pour un montant total de 15 261,28 euros.
Par un jugement du tribunal de commerce de Mont-de-Marsan en date du 13 mars 2020, la SARL Asie Gourmet a été placée en liquidation judiciaire.
M. [E] a déclaré sa créance le 2 juin 2020, et celle-ci a été admise par le juge-commissaire pour un montant de 15 817,21 euros.
Le 30 novembre 2020, M. [E] a publié une hypothèque judiciaire définitive, à titre de sûreté pour la somme de 28 664,88 euros, sur les droits indivis de M. [B] et de Mme [U] sur un immeuble sis à [Localité 16], cadastré section AG n°[Cadastre 3].
Par actes des 13 et 15 mars 2021, M. [E] a signifié à M. [B] et Mme [U] un commandement de payer sous huitaine la somme de 32 970,80 euros, valant saisie de leur immeuble situé [Adresse 8] à [Localité 16] (24), cadastré section AD n°[Cadastre 3] pour 4 a 42 ca.
Ce commandement a été publié le 12 mai 2021 au service de la publicité foncière de [Localité 16], sous les numéros d'archivage provisoires 2404 P01 S27 et S28.
M. [E] est décédé le [Date décès 9] 2021, laissant pour lui succéder ses filles Mesdames [Y] et [V] [E].
Par actes du 9 juillet 2021, Mmes [E] ont assigné M. [B] et Mme [U] devant le tribunal judiciaire de Périgueux aux fins d'obtenir la vente forcée du bien immobilier saisi.
Le même jour, Mmes [E] ont dénoncé le commandement de payer à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 16] Boulevards, créancier inscrit, avec assignation à comparaître à l'audience d'orientation.
Le 31 août 2021, la Caisse de Crédit Mutuel a déclaré les deux créances suivantes :
- 38 164,05 euros au titre d'un prêt de 75 853 euros, dont 37 489,24 euros en principal, 674,81 euros à titre d'indemnité et des intérêts au taux de 3,6%,
- 2 878,72 euros au titre d'un prêt de 6 000 euros, dont 2 843,18 euros en principal,
35,54 euros d'indemnité et des intérêts au taux de 2,5%.
Par jugement du 15 novembre 2022, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Périgueux a constaté la suspension de la procédure de saisie immobilière pour une durée maximale de 2 ans, à compter d'une décision de recevabilité du 26 juillet 2022 rendue par la commission de surendettement des particuliers de la Dordogne.
Par jugement du 2 avril 2024, le même juge a :
- déclaré recevable la demande des consorts [E],
- constaté que le plan de surendettement arrêté au profit des consorts [B]-[U] est devenu caduc de plein droit,
- constaté que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution sont réunies,
- constaté que la créance des consorts [E] à l'égard des consorts [B]-[U] s'élève à 15 817,21 euros, somme arrêtée au 9 février 2021, sans préjudice des intérêts au taux légal majoré de 4 points, frais et accessoires,
- constaté que la créance de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 16] Boulevard à l'égard des consorts [B]-[U] s'élève à :
- 38 164,05 euros au titre d'un prêt de 75 853 euros, dont 37 489,24 euros en principal, 674,81 euros à titre d'indemnité et des intérêts au taux de 3,6%,
- 2 878,72 euros au titre d'un prêt de 6 000 euros, dont 2 843,18 euros en principal, 35,54 euros d'indemnité et des intérêts au taux de 2,5%,
- ordonné la vente forcée, à la requête des consorts [E], de l'ensemble immobilier saisi à l'audience du 2 juillet 2024 à 14h30, selon les modalités et conditions du cahier des conditions de vente dressé par Maître David Larrat, avocat, déposé au greffe le 13 juillet 2021 pour une mise à prix de 35 000 euros,
- dit que les visites de l'immeuble pourront être effectuées par le commissaire de justice ou le mandataire désigné par le créancier poursuivant, deux jours par semaine (hormis les dimanches et jours fériés), à la condition de prévenir les débiteurs par tout moyen probant au moins deux jours avant, ces visites devant se réaliser, à défaut de meilleur accord, aux heures ouvrables,
- rappelé que les formalités de publicité devront être effectuées à la diligence du créancier poursuivant dans un délai compris entre deux et un mois avant l'audience de vente forcée,
- rappelé qu'un aménagement judiciaire de la publicité peut être ordonné sur requête au plus tard deux mois avant l'audience d'adjudication et que la publicité complémentaire est faite aux frais avancés de la partie qui la sollicite,
- rappelé que le report de l'audience d'adjudication ne peut intervenir que pour un cas de force majeure ou sur demande de la commission de surendettement des particuliers compétente territorialement,
- rappelé que le créancier poursuivant devra justifier des frais de poursuites aux fins de taxation, et ce au plus tard 5 jours avant l'audience d'adjudication,
- dit que les dépens seront compris dans les frais de vente soumis à taxe,
- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [B] et Mme [U] ont relevé appel du jugement le 22 avril 2024.
Par ordonnance du 25 avril 2024 rendue dans le dossier n°RG 24/01925, la présidente de chambre désignée par la Première présidente de la cour d'appel de Bordeaux a autorisé les consorts [B]-[U] à assigner les intimés à jour fixe.
Par décision du 10 mai 2024, le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Bordeaux a accordé l'aide juridictionnelle partielle à M. [B].
Par ordonnance sur recours contre une décision du bureau d'aide juridictionnelle de Périgueux, en date du 5 décembre 2024, la cour d'appel de Bordeaux a accordé à Mme [U] l'aide juridictionnelle à 55%.
Par avis du 14 mai 2024, le dossier n°RG 24/01925 a été joint au présent dossier.
Par acte du 3 juin 2024, les consorts [B]-[U] ont assigné à jour fixe les consorts [E] et la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 16] Boulevards devant la cour d'appel de Bordeaux.
Aux termes de l'assignation précitée, les consorts [B]-[U] demandent à la cour, sur le fondement des articles L. 622-24, R. 622-21 et R. 622-24 du code de commerce, R. 732-2 du code de la consommation et L. 111-7 du code des procédures civiles d'exécution, de :
- réformer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
à titre principal,
- constater que les consorts [E] ne remplissent pas les conditions posées par l'article R. 732-2 du code de la consommation relativement à la reprise des poursuites,
- constater que ces dernières ne justifient pas d'un titre exécutoire constatant une créance certaine, liquide et exigible,
- constater l'absence de proportionnalité entre les mesures d'exécution mises en oeuvre par Mmes [E] et le quantum de la créance revendiquée,
en conséquence,
- débouter ces dernières de toutes leurs demandes, fins et prétentions,
à titre subsidiaire,
- constater que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-16 du code des procédures civiles d'exécution ne sont pas réunies,
- constater que Mmes [E] ne justifient pas de leur intérêt et qualité à agir à l'égard des consorts [B]-[U],
- constater que Mmes [E] venant aux droits de M. [E] ne justifient pas d'une créance liquide, certaine et exigible et encore moins de la consistance de ladite créance,
- constater l'existence d'une procédure collective concernant la société Asie Gourmet,
- constater l'absence de preuve quant à la déclaration de créance au passif de la société Asie Gourmet,
- constater l'impossibilité d'appréhender la composition de la créance revendiquée, en l'absence d'éléments sur la résiliation éventuelle du bail commercial en cours de procédure collective et la réduction des pénalités conformément aux dispositions de l'ordonnance n°2020-316 du 25 mars 2020,
en conséquence,
- débouter Mmes [E] de leur demande consistant à voir ordonner la vente forcée de l'immeuble sis Commune de [Localité 16] [Adresse 8] cadastré section AD n°[Cadastre 3],
- les condamner solidairement à payer la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner solidairement aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Aux termes de leurs conclusions notifiées le 15 octobre 2024, Mme [Y] [E] et Mme [V] [E] demandent à la cour de :
- débouter M. [B] et Mme [U] de leurs demandes, fins et conclusions,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du juge de l'exécution de Périgueux en date du 2 avril 2024 sauf en ce qu'il a fixé leur créance à la somme de 15 817, 21euros,
Statuant à nouveau de ce chef,
- juger que leur créance s'élève à la somme de 32 970, 80 euros,
- infirmer la décision déférée en ce qu'elle a fixé la créance à la somme de 15 817, 21euros,
- condamner M. [B] et Mme [U] à leur payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner aux entiers dépens de la procédure.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 5 juin 2024, la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 16] Boulevards demande à la cour, sur le fondement de l'article R. 322-12 du code des procédures civiles d'exécution, de :
- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a constaté que sa créance à l'égard des consorts [B]-[U] s'élève à :
- 38 164,05 euros au titre d'un prêt de 75 853 euros, dont 37 489,24 euros en principal, 674,81 euros à titre d'indemnité et des intérêts au taux de 3,6%,
- 2 878,72 euros au titre d'un prêt de 6 000 euros, dont 2 843,18 euros en principal, 35,54 euros d'indemnité et des intérêts au taux de 2,5%,
- lui donner acte qu'elle s'en remet pour le surplus,
- condamner in solidum les consorts [B]-[U] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux dernières conclusions des parties pour un exposé détaillé des prétentions des parties.
L'affaire a été appelée à l'audience du 22 janvier 2025 et mise en délibéré au 6 mars 2025.
MOTIFS :
Sur la caducité du plan de surtendettement,
L'article L.722-2 du code de la consommation dispose que la recevabilité de la demande emporte suspension et interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur ainsi que des cessions de rémunération consenties par celui-ci et portant sur les dettes autres qu'alimentaires'.
En outre, l'article R.732-2 du même code indique que le plan conventionnel de redressement mentionne qu'il est de plein droit caduc quinze jours après une mise en demeure restée infructueuse adressée au débiteur d'avoir à exécuter ses obligations, sans préjudice de l'exercice des facultés prévues aux articles L.721-1, L.721-4, L.721-6, L.721-7, L.722-3, L.722-4 et L.722-6".
En application des dispositions susvisées, les consorts [B]-[U] rappellent que si le plan de surendettement est considéré comme caduc dès la première inexécution, permettant ainsi au créancier de reprendre la procédure de saisie immobilière, ce n'est toutefois que sous réserve du respect des modalités prévues par le code de la consommation, à savoir notamment une mise en demeure préalable et restée infructueuse pendant 15 jours.
Or, ils considèrent qu'en l'espèce, la mise en demeure précitée n'a pas été effectuée selon les modalités exigées et que le juge de l'exécution a estimé à tort que cette formalité avait été respectée, en procédant par voie de supposition, en considérant que la proximité de la date mentionnée sur l'avis de réception signé le 1er juin 2023 avec la date figurant sur la lettre du 31 mai 'laissait supposer qu'il s'agissait effectivement d'une lettre recommandée'.
A ce titre, il n'est pas sérieusement contestable tout d'abord que les consorts [B]-[U] n'ont pas respecté les termes du plan de surendettement qui leur a été accordé par la commission de surendettement de la Dordogne.
Pour ce qui est de la lettre de mise en demeure, si le courrier produit par les intimées en pièce 13, daté du 19 avril 2023 constitue davantage un rappel des modalités de règlement prévues par le plan de surendettement qu'une mise en demeure explicite, il n'en est pas de même de la lettre datée du 31 mai 2023 transmise par Maître [T], commissaire de justice, de la SELARL C'Just, qui doit être considérée comme une mise en demeure explicite transmise par lettre recommandée et dûment reçue le 1er juin 2023 par les débiteurs comme en attestent les accusés de réception constituant la pièce 15 des intimés.
Au vu des éléments précités, il est patent que le plan de surendettement proposé aux consorts [B]-[U] est devenu caduc et que les conditions propres à la reprise des poursuites sont parfaitement réunies de sorte que le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.
Sur l'existence d'une créance liquide et exigible,
Pour s'opposer à la procédure de saisie immobilière diligentée à leur encontre, les consorts [B]-[U] soutiennent que les intimées ne peuvent se prévaloir d'une créance liquide et exigible à leur encontre, dès lors qu'elles allèguent d'une créance d'un montant d'environ 31 531,37 euros alors que celle qui a été admise dans le cadre de la procédure collective de la société Asie Gourmet s'élève à un montant de 15 817,21 euros. En tout état de cause, ils font valoir que, si la créance litigieuse devait être considérée comme étant certaine, liquide et exigible, elle devrait être ramenée à la somme précitée.
Toutefois, une telle argumentation ne pourra qu'être écartée par la cour, dès lors que feu [N] [E] a procédé à une déclaration de créance pour les loyers antérieurs à l'ouverture de la procédure de liquidation de la société Asie Gourmet intervenue le 13 mars 2020 et que ladite créance a été admise à titre privilégié pour la somme de 15 817, 21 euros par le liquidateur judiciaire. Dès lors que les décisions rendues par le juge de la procédure collective dans les rapports entre le créancier et le débiteur principal s'imposent à la caution, il appert que les consorts [E] peuvent se prévaloir d'une créance certaine, liquide et exigible envers les appelants.
En outre, le fait que le premier juge ait cantonné le montant de la créance à la somme de 15 817,21 euros n'a aucune incidence sur la liquidité et l'exigibilité de cette créance.
Sur l'absence de proportionnalité de la mesure d'exécution engagée,
A ce titre, les appelants rappellent que si en application de l'article L.111-7 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier a le choix des mesures propres à assurer l'exécution ou la conservation de sa créance, la mesure engagée ne doit toutefois pas être disproportionnée pour permettre le recouvrement de sa créance. Or en l'espèce, les consorts [B]-[U] estiment qu'une procédure de saisie immobilière est disproportionnée pour obtenir le recouvrement de la somme de 15 817, 21 euros, qui aurait pu être réglée par exemple sur une simple saisie sur leurs rémunérations.
Toutefois, il convient d'indiquer qu'une telle demande est irrecevable, en application de l'article R.311-5 du code des procédures civiles d'exécution, qui dispose qu'à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune contestation, ni aucune demande incidente ne peut, sauf disposition contraire, être formée après l'audience d'orientation prévue à l'article R.322-15 à moins qu'elle porte sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci. Dans ce cas, la contestation ou la demande incidente est formée dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'acte.
En tout état de cause et surabondamment, une telle mesure n'est pas disproportionnée dès lors que la saisie immobilière est l'unique moyen en réalité de nature à permettre aux consorts [E] de recouvrer leur créance, au regard de l'insolvabilité des débiteurs qui n'ont pas été à même de respecter les termes du plan de surendettement et compte de l'existence d'un créancier inscrit en la personne de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 16] pour la somme de 41 042, 77 euros.
Sur la qualité et l'intérêt à agir des intimées,
Les appelants contestent également le qualité et l'intérêt à agir de Mesdames [E], qui selon eux ne peut résulter de la simple production de l'acte de notoriété du 19 avril 2021, aux termes duquel il appert qu'elles sont héritières réservataires de M. [N] [S] [E], décédé le [Date décès 9] 2021, à l'exception des biens légués à Mme [L] [R].
Ils en déduisent qu'iI appartient aux intimées d'apporter la preuve qu'elles sont bien propriétaires du local objet du bail commercial, à défaut de quoi elles devront être considérées comme étant dépourvues d'intérêt et de qualité à agir.
Toutefois, outre l'acte de notoriété susvisé, les intimées ont versé aux débats une attestation immobilière en date du 10 janvier 2024, prouvant qu'elles sont parfaitement propriétaires du bien situé [Adresse 2] à [Localité 15] et donc qu'elles ont vocation à en percevoir les loyers.
Il en résulte que leur qualité et leur intérêt à agir ne sont pas sérieusement contestables. Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action de Mesdames [E].
Sur le quantum de la créance en fonction de la résiliation du bail,
S'agissant du quantum de la créance, le jugement entrepris l'a fixée à la somme de 15 817, 21 euros, alors que la mesure de saisie immobilière a été diligentée pour une somme de 32 970,80 euros.
Les appelants contestent la somme ainsi réclamée par les consorts [E], faisant valoir que selon eux le mandataire liquidateur de la société Asie Gourmet, placée en liquidation judiciaire le 13 mars 2020, a procédé à la résiliation du bail le 3 juin 2020. Ils considèrent donc que les consorts [E] devront se prononcer sur la décision prise par le mandataire liquidateur concernant la poursuite du contrat de bail commercial dans le cadre de la procédure collective.
A ce titre, il ressort effectivement d'un courrier en date du 3 juin 2020 émanant de la SELAS Guérin, en sa qualité de mandataire liquidateur de la SARL Asie Gourmet, que celui-ci n'a pas entendu poursuivre le contrat de bail au-delà du mois de juin 2020. Les cautions ont été personnellement informées de cette situation suivant courrier en date du 8 juillet 2020.
Le décompte, tel que figurant dans les commandements de payer valant saisie immobilière en date des 13 et 15 mars 2021, à hauteur de 32 970, 80 euros, est donc bien fondé en ce qu'il inclut les loyers de janvier à juin 2020.
Partant, la cour ne pourra qu'infirmer le jugement déféré qui a fixé le montant de la créance des consorts [E] à la somme de 15 817, 21 euros, conformément au certificat d'admission du 9 février 2021 et qui a écarté les loyers d'avril, de mai et juin 2020, postérieurs à l'ouverture de la liquidation judiciaire, en considérant qu'ils n'avaient pas donné lieu à une déclaration de créance complémentaire, alors que pourtant la déclaration de créance n'est pas requise pour les créances postérieures au jugement d'ouverture.
S'agissant de la somme réclamée au titre de la clause pénale dans le décompte à hauteur de 2886, 49 euros, les appelants considèrent qu'elle n'est pas due en se fondant sur les articles 2 et 4 de l'ordonnance 2020-316 du 25 mars 2020 relative au paiement des loyers, des factures d'eau, de gaz et d'électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises dont l'activité est affectée par la propagation de l'épidémie de Covid 19.
S'il est acquis que le bail s'est poursuivi jusqu'en juin 2020, l'exonération du paiement de la clause pénale à compter du mois de mars 2020 est toutefois subordonnée en vertu de l'article 1 de l'ordonnance susvisée à des seuils d'effectifs et de perte de chiffre d'affaires des personnes concernées précisés par décret. Or, en l'espèce, les cautions ne produisent aucun élément pour démontrer que la société Asie Gourmet était eligible à ces exonérations.
Partant, la cour infirmant sur ce point le jugement entrepris fixera la créance des consorts [E] au montant des décomptes figurant dans les commandements de payer valant saisie immobilière à hauteur de 32 970, 80 euros.
Il ne peut lui être opposé qu'en statuant ainsi elle violerait le principe de l'autorité de la chose jugée attachée à la décision du juge commissaire de février 2021 dès lors que l'autorité de la chose jugée est subordonnée à la réunion de trois conditions, à savoir l'identité de parties, d'objet de cause, lesquelles ne sont pas réunies en l'espèce, les parties concernées dans les deux procédures étant différentes.
Sur la créance de la Caisse de Crédit Mutuel,
Il appert par ailleurs que les créances de la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 16] telles que fixées par le jugement entrepris seront confirmées à hauteur des sommes suivantes dès lors qu'elles n'ont fait l'objet d'aucune contestation dans le cadre de l'appel:
- 38 164,05 euros au titre d'un prêt de 75 853 euros, dont 37 489,24 euros en principal, 674,81 euros à titre d'indemnité et des intérêts au taux de 3,6%,
- 2 878,72 euros au titre d'un prêt de 6 000 euros, dont 2 843,18 euros en principal, 35,54 euros d'indemnité et des intérêts au taux de 2,5%,
Sur la vente forcée,
L'ensemble des conditions des articles L.311-2, L.311-4 et L.311-6 du code des procédures civiles d'exécution étant réunies, le principe de la vente forcée sera confirmé dans les mêmes conditions que celles afférentes au jugement entrepris et à une date qu'il appartiendra au juge de l'exécution compétent de fixer.
Sur les autres demandes,
Les consorts [B]-[U], qui succombent en leur appel seront condamnés à payer aux consorts [E] la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et celle de 1500 euros à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 16] au même titre. Ils seront par ailleurs déboutés de leur demande formée à ce titre.
Les appelants seront enfin condamnés aux entiers dépens de la procédure.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par décision mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
Dans les limites de l'appel,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celle ayant fixé la créance de Mme [Y] [E] et de Mme [V] [E] à la somme de 15 817, 21 euros,
Statuant de nouveau de ce chef,
FIXE la créance de Mme [Y] [E] et de Mme [V] [E] à l'égard de M. [C] [J] [B] et de Mme [G] [U] à la somme de 32 970, 80 euros,
Y ajoutant,
DIT que le moyen tendant à voir déclarer la mesure de saisie immobilière disproportionnée est irrecevable en application de l'article R.322-15 du code des procédures civiles d'exécution,
CONDAMNE M. [C] [J] [B] et de Mme [G] [U] à payer à Mme [Y] [E] et à Mme [V] [E] la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et celle de 1500 euros à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 16] au même titre.
CONDAMNE M. [C] [J] [B] et de Mme [G] [U] aux entiers dépens,
DEBOUTE M. [C] [J] [B] et de Mme [G] [U] de leurs demandes formées à ces titres.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Jacques BOUDY, président, et par Madame Marie-Laure MIQUEL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.