CA Angers, ch. a - com., 4 mars 2025, n° 20/01855
ANGERS
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
D'ANGERS
CHAMBRE A - COMMERCIALE
CC/ILAF
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 20/01855 - N° Portalis DBVP-V-B7E-EX3B
jugement du 16 Novembre 2020
Tribunal de Commerce du MANS
n° d'inscription au RG de première instance 2019008271
ARRET DU 04 MARS 2025
APPELANTE :
SARL LM WEDDING
agissant poursuites et diligences dont son représentant légal, domicilié ès-qualités audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Gérard BERAHYA LAZARUS, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier lmweddin
INTIMES :
Madame [S] [Y] épouse [E]
née le 21 Août 1949 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Monsieur [L] [E]
né le 11 Juillet 1947 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentés par Me Allétia CAVALIER, avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 03 Décembre 2024 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, présidente de chambre qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, présidente de chambre
M. CHAPPERT, conseiller
Mme GANDAIS, conseillère
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 04 mars 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine CORBEL, présidente de chambre et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
~~~~
FAITS ET PROCÉDURE
M. [L] [E] et Mme [S] [Y], son épouse, étaient propriétaires, chacun à hauteur de moitié, des 500 actions composant le capital social de la société MCM ayant pour activité la vente et la retouche de prêt à porter dans le secteur des cérémonies de mariage.
Par acte sous seing privé du 15 mars 2018, M. et Mme'[E] ont conclu avec la société LM Wedding une promesse de cession de l'intégralité des actions de la société MCM, pour une somme totale de 380 000 euros, soit 780 euros par action, en prévoyant un complément de prix lié à l'issue d'un litige prud'homal opposant une ancienne salariée, Mme [T], à la société MCM.
L'acte de cession a été réitéré par acte sous seing privé du 2 mai 2018. Aux termes de l'article 5 de cet acte, les parties ont stipulé, reprenant les termes de la promesse de cession, ce qui suit :
'à titre de complément de prix, le cessionnaire s'engage à régler une somme complémentaire qui sera égale à la différence entre le montant provisionné dans les comptes clos le 31 octobre 2017 au titre d'un litige prud'homal à l'encontre de Mme [T], soit 52 000 euros, et les sommes définitivement mises à la charge de la société MCM à l'issue et au titre de ce litige dans les trois années à venir.
Dans l'hypothèse où aucune somme ne serait mise à la charge de la société MCM au titre de ce litige au 31/12/2018, la somme de ving mille euros (20 000 €) sera définitivement versée aux cédants au prorata de leur participation actuelle au capital de la société MCM, même si le litige susvisé n'est pas clôturé.
Dans l'hypothèse où aucune somme ne serait mise à la charge de la société MCM au titre de ce litige à l'issue d'une période de deux années à compter de la date de la réitération de la présente promesse, la somme de ving mille euros (20 000 €) sera définitivement versée aux cédants au prorata de leur participation actuelle au capital de la société MCM, même si le litige susvisé n'est pas clôturé.
Dans l'hypothèse où aucune somme ne serait mise à la charge de la société MCM au titre de ce litige à l'issue d'une période de trois ans à compter de la date de la réitération de la présente promesse, la somme de douze mille euros (12 000 €) sera définitivement versée aux cédants au prorata de leur participation actuelle au capital de la société MCM.'
L'article 9.8 de l'acte de cession d'actions prévoit que 'tout différend relatif à la conclusion, la validité, l'interprétation ou l'exécution des présentes, que'les parties ne pourraient résoudre à l'amiable (étant à cet égard précisé que les parties s'engagent à une obligation de négociation de bonne foi), sera de la compétence exclusive en premier ressort du tribunal de commerce du Mans'.
Une garantie de passif a été annexée à l'acte de cession.
En vertu de l'article 1.13 de cette garantie de passif, il est spécifié que 'la société ne se trouve pas impliquée, dans une quelconque action judiciaire ou enquête administrative ou dans toute procédure judiciaire, pénale, arbitrale ou administrative concernant la société ou l'un quelconque de ses biens, à'l'exception d'un litige prud'homal contre une ancienne salariée (Madame [T] née [C]) avec un risque provisionné à hauteur de 52 000 € dans les comptes de l'exercice clos le 31 octobre 2017.'
Conformément à l'article 3 II) de la garantie de passif, 'le bénéficiaire avisera les garants de tout autre passif ou préjudice qui viendrait à sa connaissance, par lettre recommandée avec accusé de réception qui sera accompagnée des pièces justifiant de sa réalité, dans un délai de trente jours.'
Selon l'article 9 de la garantie de passif prévue entre les parties, 'les parties s'engagent préalablement à toute instance judiciaire à résoudre leurs différends par une médiation qu'elles organiseront. Si aucune médiation n'intervient dans les deux mois de la demande d'organisation de celle-ci, la partie la plus diligente pourra saisir le tribunal de commerce du Mans'.
Par lettre de leur conseil du 7 janvier 2019, M. et Mme [E] ont vainement sollicité de la SARL LM Wedding le paiement de la somme de 20'000 euros, correspondant à la première tranche du règlement du complément de prix.
Par lettre recommandée avec accusé de réception de leur conseil du 21 février 2019, M. et Mme [E] ont mis en demeure la SARL LM Wedding d'avoir à leur régler la somme de 20 000 euros.
Le 19 juillet 2019, M. et Mme [E] ont fait assigner la SARL'LM Wedding devant le tribunal de commerce du Mans en paiement de la première tranche du complément du prix.
Parallèlement, par arrêt du 20 novembre 2019, sur appel de Mme'[T], suivant déclaration du 20 mai 2016, d'un jugement du conseil de prud'hommes de Rennes du 27 avril 2016, et après audience publique du 23'septembre 2019, la cour d'appel de Rennes a confirmé la condamnation de la SARL MCM à payer à Mme [T] à titre de dommages-intérêts les sommes de 2 198,15 euros pour non-respect de la procédure aux fins de reclassement, 2'198,15 euros pour remise tardive des documents de fin de contrat, ainsi que 250 euros pour défaut d'indication de la portabilité de la prévoyance et des garanties santé afférentes sur le contrat de travail, avec intérêts au taux légal. En'infirmation du jugement, la cour d'appel de Rennes a aussi condamné la SARL'MCM à payer à Mme [T] les sommes de 4 029,47 euros de solde d'indemnité spéciale de licenciement, 4 396,30 euros d'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis, 2 564,70 euros de reliquat d'indemnité compensatrice de congés payés, 26 377,80 euros d'indemnité pour méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte, 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de notification écrite des motifs s'opposant à son reclassement. La cour d'appel de Rennes a dit que les sommes allouées à Mme [K] [C] au titre du solde d'indemnité spéciale de licenciement, de l'indemnité compensatrice équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis, et du reliquat d'indemnité compensatrice de congés payés, sont assorties des intérêts au taux légal partant de la réception par l'employeur de sa convocation en bureau de conciliation, a dit que la somme allouée à Mme [T] à titre de dommages-intérêts pour remise tardive des documents sociaux de fin de contrat et paiement partiel avec retard du solde de tout compte, est assortie des intérêts au taux légal partant du 27 avril 2016, date du prononcé du jugement déféré, et dit que les sommes allouées à Mme [T] à titre de dommages-intérêts pour méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte, et pour défaut de notification écrite des motifs s'opposant à son reclassement sont assorties des intérêts au taux légal partant du présent arrêt. Elle a aussi condamné la SAS'MCM a réglé une somme de 3 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
En l'état de leurs dernières conclusions devant le tribunal de commerce du Mans, M. et Mme [E] ont demandé au tribunal de les déclarer recevables et bien fondés en leurs actions et leurs demandes, de'condamner la société LM Wedding à payer à M. et Mme [E], chacun, la somme de 10 000 euros au titre de la première tranche du complément de prix de cession des actions de la SAS MCM, avec intérêts au taux légal à compter du 21 février 2019, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, ont soulevé l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle, subsidiairement ont conclu à son rejet.
En défense, la société LM Wedding a sollicité du tribunal de commerce qu'il déclare les époux [E] irrecevables et en tout cas mal fondés en leur action ; subsidiairement, qu'il sursoit à statuer et renvoie la cause et les parties devant tel médiateur qu'il lui plaira de désigner : à titre plus subsidiaire encore, qu'il dise que la clause de versement d'un complément de prix est nulle, qu'il déboute les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes. Prétendant avoir découvert, postérieurement à la cession, de nombreuses irrégularités dans la comptabilité de la société MCM (invoquant au titre du passif une régularisation de dépôt de garantie Citya de 41,22 euros, une facture entreprise Ren Elec du 15 mai 2017 de 62,40 euros, une facture de rédaction de bail non justifié Agence Lenoir de 4 055,05 euros, une perte de 4 103,38 euros HT liée au remplacement de la chaudière non entretenue suite à un achat du 3'décembre 2018, une somme de 5 507,75 euros au titre du compte courant débiteur au jour de la cession contrairement au crédit de 11 000 euros indiqué, deux factures d'iPhone du 15 mars 2018 pour 208,25 euros HT et 93,25 euros HT conservé par Mme [E], une absence du matériel informatique facturé le 11 juin 2011et le 20 juin 2016 pour des montants de 548,83 euros et 915,83'euros, des frais non justifiés de restaurants, parking, hôtel du 1er novembre 2017 au 30 avril 2018 pour environ 6 000 euros avec absence de récupération de la TVA, des pénalités et majorations de retard au titre de la taxe d'apprentissage et assimilée pour 3 839 euros, de CDD pour 597 euros, de'formation continue pour 3 105 euros), la société Wedding a demandé au tribunal qu'il la déclare recevable et bien fondée en sa demande reconventionnelle, qu'il condamne les demandeurs à lui régler la somme de 29'076,94 euros au titre de la garantie du passif et la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral prétendument subi ; s'il était fait droit à la demande des époux [E], qu'il dise que les créances respectives des parties se compenseront.
Par jugement du 16 novembre 2020, le tribunal de commerce du Mans a :
- déclaré M. et Mme [E] recevables et bien fondés en leur action et leurs demandes,
- dit et jugé que la condition suspensive relative au versement de la première échéance du complément de prix de cession des actions de la SAS'MCM est valable, levée et exigible,
- condamné la SARL LM Wedding à payer aux époux [E], la somme de 20 000 euros soit : 10 000 euros à Mme [E] et 10'000'euros à M. [E], avec intérêts au taux légal à compter du 21'février 2019,
- dit et jugé la SARL LM Wedding mal fondée en ses demandes reconventionnelles,
- condamné la SARL LM Wedding à verser la somme de 1'000'euros au terme de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Par déclaration du 23 décembre 2020, la SARL LM Wedding a interjeté appel de ce jugement en attaquant chacune de ses dispositions ; intimant M. et Mme [E].
Les parties ont conclu.
Selon lettre du 3 juin 2021 adressée à leurs conseils, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel d'Angers a invité les parties à s'interroger sur l'opportunité d'instaurer une mesure de médiation judiciaire pour trouver une solution à leur différend. Cette proposition n'a pas été accueillie.
Une ordonnance du 18 novembre 2024 a clôturé l'instruction de l'affaire.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La société LM Wedding demande à la cour de :
vu l'article 56 du code de procédure civile,
- la déclarer recevable et en tout cas bien fondée en son appel,
en conséquence,
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
et, statuant à nouveau,
- déclarer irrecevable l'action des époux [E] engagée avant toute saisine d'un médiateur,
en conséquence,
- surseoir à statuer et renvoyer la cause et les parties devant tel médiateur qu'il plaira au tribunal de commerce de désigner,
à titre subsidiaire,
- dire que la clause de versement d'un complément de prix est nulle,
- débouter les époux [E] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- à titre infiniment subsidiaire, dire qu'elle versera la somme de 5'315,87 euros à chacun des époux [E] en complément du prix,
en tout état de cause,
- la déclarer recevable et bien fondée en sa demande reconventionnelle,
- condamner les époux [E] à lui régler la somme de 29'076,94 euros au titre de la garantie de passif à laquelle s'ajoute la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle subit,
dans cette hypothèse et si par impossible il était fait droit à la demande des époux [E],
- dire que les créances respectives des parties se compenseront,
en tout état de cause,
- condamner les époux [E] à lui verser la somme de 6'000'euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner aux entiers dépens.
M. et Mme [E] demandent à la cour de :
vu les articles 1103 et suivants et 1304 et suivants du code civil,
vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,
à titre principal,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- déclarer la SARL LM Wedding irrecevable et mal fondée en son appel,
à titre subsidiaire,
sur la fin de non-recevoir,
- les déclarer recevables en leur action et leurs demandes,
- juger que la clause de médiation est contenue dans l'acte de garantie de passif et qu'ils fondent leur action sur l'acte de cession des actions de la SAS MCM,
- juger que l'acte de cession des actions de la SAS MCM ne comporte pas de clause de négociation ou de médiation préalable,
- juger qu'ils ont fait preuve de bonne foi dans la tentative de règlement amiable du litige,
- juger en conséquence que leur action est recevable,
sur le fond,
- les déclarer recevables et bien fondés en leur action et leurs demandes,
- juger que la condition suspensive relative au versement de la première échéance du complément de prix de cession des actions de la SAS'MCM est levée,
- juger que la levée de la condition suspensive rend l'obligation exigible,
- juger que la clause de complément de prix est valable,
- juger que la SARL LM Wedding est en mesure d'identifier le litige contre Mme [T],
- juger que la SAS MCM a poursuivi le litige contre Mme [T] devant la cour d'appel de Rennes, de sorte que la SARL LM Wedding ne peut prétendre l'ignorer,
- condamner la SARL LM Wedding à payer à Mme [E] la somme de 10 000 euros au titre de la première échéance du complément de prix de cession des actions de la SAS MCM, avec intérêts au taux légal à compter du 21 février 2019, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
- condamner la SARL LM Wedding à payer à M. [E] la somme de 10 000 euros au titre de la première échéance du complément de prix de cession des actions de la SAS MCM, avec intérêts au taux légal à compter du 21 février 2019, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
sur la demande reconventionnelle,
à titre principal,
- juger que la SARL LM Wedding n'a pas respecté la clause de médiation préalable figurant dans la convention de garantie de passif,
- déclarer l'action de la SARL LM Wedding irrecevable,
à titre subsidiaire,
- juger que la SARL LM Wedding n'a pas respecté la procédure de mise en oeuvre de la garantie de passif,
- juger en conséquence qu'ils ne peuvent être tenus à garantie,
- débouter la SARL LM Wedding de toutes ses demandes, fins et conclusions,
à titre infiniment subsidiaire,
- juger la SARL LM Wedding mal fondée en ses demandes reconventionnelles,
- débouter la SARL LM Wedding de toutes ses demandes, fins et conclusions,
en tout état de cause,
- débouter la SARL LM Wedding de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la SARL LM Wedding à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SARL LM Wedding aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Pour un plus ample exposé des prétentions au soutien des moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :
- le 19 février 2021 pour la société LM Wedding,
- le 14 novembre 2024 pour M. et Mme [E].
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la demande en paiement au titre du complément du prix de cession
Sur la recevabilité de cette demande
La société LM Wedding soutient qu'en présence d'une divergence d'interprétation sur la clause relative au complément du prix, les époux [E] ne sont pas recevables en leur action faute d'avoir préalablement à l'instance initié une négociation et d'avoir saisi un médiateur. Elle fait valoir qu'ils auraient dû respecter la clause de négociation présente dans l'acte de cession d'actions et se soumettre ainsi préalablement à l'introduction de la procédure contentieuse à une négociation de bonne foi et que l'esprit comme l'obligation résultant de l'acte se retrouve dans la convention de garantie signée des parties et annexée à l'acte de cession, qui prévoit en son article 9, en des termes suffisamment larges pour couvrir l'ensemble des différends qui pourraient survenir entre les parties, une clause obligeant les parties à se soumettre à un préalable de médiation. Elle en déduit que les conventions liant les parties, qui constituaient un ensemble contractuel, visaient l'exigence d'une mise en place d'un mode de règlement amiable du différend bien plus important qu'une simple mise ne demeure et appelait une négociation de bonne foi qui n'a jamais été permise.
Mais c'est exactement que les premiers juges ont retenu que la convention de cession des actions ne comporte pas de clause de médiation préalable, laquelle ne figure que dans l'acte de garantie d'actif et de passif, qui est distinct de la convention de cession des actifs, qui en est une annexe, et qui est soumise à des conditions et modalités propres. Or, l'action en paiement du complément de prix n'est pas engagée sur le fondement de la convention de garantie de passif.
L'article 9.8 de l'acte de cession d'actions ne soumet les parties pour résoudre leur différend relatif à la validité, l'interprétation ou l'exécution de la convention de cession des actions à aucune phase spécifique obligatoire de résolution du litige préalable à la saisine du juge, se limitant à reprendre l'engagement des parties de négocier de bonne foi pour tenter de résoudre à l'amiable leur litige.
Sur le bien fondé de la demande
Les cédants font valoir que le règlement du complément de prix est prévu de manière échelonnée, que le premier versement de 20 000 euros n'était soumis qu'à la réalisation de la condition suspensive tenant à ce qu'aucune somme ne soit mise à la charge de la société MCM au titre du litige prud'homal à la date du 31décembre 2018, même'si'le'litige'n'était'pas'clôturé, comme cela est expressément stipulé, de sorte qu'au 31 décembre 2018, la société MCM n'ayant justifié d'aucune somme qui aurait été mise à sa charge dans le cadre du litige prud'homal l'opposant à Mme [T], ils s'estiment fondés à réclamer le paiement de la somme de 20'000 euros.
La cessionnaire expose que par le complément de prix, les cédants ont entendu 'récupérer' les sommes provisionnées en trop dans le cas où la condamnation prononcée contre la société MCM à l'issue de la procédure prud'homale serait d'un montant inférieur à la provision passée dans les comptes de la société et que son montant étant conséquent, ils ont accepté un échelonnement de son versement. Elle estime que 'les dates fixées au 31'décembre 2018, 2 mai 2020, 2 mai 2021 pour déterminer s'il y a eu ou non condamnation de la société MCM ne sont pas des échéances mais des dates à prendre en compte pour apprécier la réalisation ou non de la condition suspensive'. Elle fait valoir que dès lors que l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, rendu le 20 novembre 2019, a condamné la société MCM à payer à son ancienne salariée la somme globale de 41 368,27 euros outre intérêts, pour partie à compter de la saisine du bureau de conciliation et pour partie à compter de la date de l'arrêt, les cédants pouvaient exiger le versement de la somme de 10 631,73 euros correspondant à l'excédent provisionné et non pas les 20 000 euros qu'ils réclament au motif qu'aucune décision n'était intervenue au 31 décembre 2018. Elle affirme qu'elle n'a pu donner un consentement éclairé à cette clause telle qu'interprétée par les parties adverses, d'autant moins qu'elle ne disposait pas d'éléments d'information suffisants sur le litige prud'homal, et demande à la cour de déclarer cette clause nulle sur le fondement des dispositions de l'article 1188 du code civil ou d'interpréter les termes de la convention dans le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation, en déclarant que personne ne peut imaginer qu'elle ait pu entendre régler à la fois le montant des condamnations définitives prononcées dans le cadre du litige prud'homal et un complément de prix équivalent et que suivre les cédants en ce sens revient à faire une interprétation absurde de la clause. Elle reproche donc aux premiers juges d'avoir fait une mauvaise application de la clause.
Sur ce,
La cessionnaire entend demander le prononcé de l'annulation de la clause de complément de prix sur le fondement de l'article 1188 du code civil en invoquant un consentement insuffisamment éclairé ou parce qu'elle n'aurait pas consenti à la clause dans le cas où l'interprétation qui en serait retenue ne serait pas celle qu'elle estime devoir être. Ce faisant, elle n'invoque pas un vice du consentement, seul susceptible d'entraîner la nullité de l'acte, sanction à laquelle ne conduit pas le texte invoqué relatif à l'interprétation des contrats.
Les parties ont entendu échelonner le règlement du complément de prix. A chaque échéance fixée, le versement du complément de prix est soumis à la condition suspensive qu'aucune somme ne soit mise à la charge de la société MCM dans le cadre du litige prud'homal avec Mme [T].
A la date du 31 décembre 2018, l'arrêt la cour d'appel de Rennes n'ayant été rendu que le 20 novembre 2019, il est constant qu'aucune somme n'avait été mise à la charge de la société MCM.
La stipulation selon laquelle la somme revenant aux cédants à chacune des échéances leur est définitivement acquise alors même que litige'n'était'pas''clôturé', c'est-à-dire alors même que la décision judiciaire attendue n'était pas rendue et que la créance de la salariée sur la société MCM n'était pas définitivement déterminée, est dénuée d'ambiguïté. Elle n'est pas en contradiction avec la stipulation qui précède selon laquelle 'la cessionnaire s'engage à régler une somme complémentaire qui sera égale à la différence entre le montant provisionné dans les comptes clos le 31 octobre 2017 au titre d'un litige prud'homal à l'encontre de Mme [T], soit 52 000 euros, et les sommes définitivement mises à la charge de la société MCM à l'issue et au titre de ce litige dans les trois années à venir', qui prévoit que le complément de prix est calculé en déduisant de la somme provisionnée, soit 52 000 euros, non pas les sommes finalement mises à la charge de la société MCM mais celles qui le sont dans le délai de trois ans à compter de la réitération de la cession.
Il n'y a pas à interpréter un acte qui est clair. Le contrat ne prévoit pas que le complément de prix dépende exclusivement du résultat de l'arrêt d'appel. Les cédants font justement valoir que si tel avait été le cas, il aurait été prévu un remboursement des premières échéances de complément de prix en cas de condamnation de la société MCM survenue après les échéances.
La condition suspensive au versement de la première tranche du complément de prix étant levée, le jugement ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a condamné la cessionnaire à payer à chacun des cédants la somme de 10'000'euros, en application de l'article 1304-6 du code civil aux termes duquel l'obligation devient pure et simple à compter de l'accomplissement de la condition suspensive, et ce, y compris en ce qu'il a dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte.
Sur la demande reconventionnelle en paiement au titre de la garantie d'actif et de passif
Sur la recevabilité de cette demande
La garantie d'actif et de passif comporte une clause contractuelle de médiation préalable.
Il résulte des articles 122 et 124 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées et que, licite, la clause d'un contrat instituant une procédure de médiation obligatoire et préalable à la saisine du juge constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent.
Aucune médiation n'a été mise en oeuvre préalablement à la demande formée par la bénéficiaire de la garantie contre le garant devant le tribunal de commerce en exécution de la convention de garantie de passif et d'actif et ce, en violation de la clause imposant ce préalable, de sorte que les prétentions émises à ce titre sont irrecevables, ce qui conduit à une confirmation du jugement sauf à déclarer irrecevable et non pas mal fondée la demande reconventionnelle.
Sur les frais et dépens
La société LM Wedding, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à M. et Mme [E] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
la cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris sauf à déclarer irrecevable et non pas mal fondée la demande reconventionnelle de la société LM Wedding.
Y ajoutant,
Condamne la société LM Wedding à payer à M. et Mme'[E] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société LM Wedding aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,
D'ANGERS
CHAMBRE A - COMMERCIALE
CC/ILAF
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 20/01855 - N° Portalis DBVP-V-B7E-EX3B
jugement du 16 Novembre 2020
Tribunal de Commerce du MANS
n° d'inscription au RG de première instance 2019008271
ARRET DU 04 MARS 2025
APPELANTE :
SARL LM WEDDING
agissant poursuites et diligences dont son représentant légal, domicilié ès-qualités audit siège
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Gérard BERAHYA LAZARUS, avocat au barreau d'ANGERS - N° du dossier lmweddin
INTIMES :
Madame [S] [Y] épouse [E]
née le 21 Août 1949 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Monsieur [L] [E]
né le 11 Juillet 1947 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentés par Me Allétia CAVALIER, avocat au barreau du MANS
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue publiquement à l'audience du 03 Décembre 2024 à 14 H 00, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CORBEL, présidente de chambre qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, présidente de chambre
M. CHAPPERT, conseiller
Mme GANDAIS, conseillère
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 04 mars 2025 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l'article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine CORBEL, présidente de chambre et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE
M. [L] [E] et Mme [S] [Y], son épouse, étaient propriétaires, chacun à hauteur de moitié, des 500 actions composant le capital social de la société MCM ayant pour activité la vente et la retouche de prêt à porter dans le secteur des cérémonies de mariage.
Par acte sous seing privé du 15 mars 2018, M. et Mme'[E] ont conclu avec la société LM Wedding une promesse de cession de l'intégralité des actions de la société MCM, pour une somme totale de 380 000 euros, soit 780 euros par action, en prévoyant un complément de prix lié à l'issue d'un litige prud'homal opposant une ancienne salariée, Mme [T], à la société MCM.
L'acte de cession a été réitéré par acte sous seing privé du 2 mai 2018. Aux termes de l'article 5 de cet acte, les parties ont stipulé, reprenant les termes de la promesse de cession, ce qui suit :
'à titre de complément de prix, le cessionnaire s'engage à régler une somme complémentaire qui sera égale à la différence entre le montant provisionné dans les comptes clos le 31 octobre 2017 au titre d'un litige prud'homal à l'encontre de Mme [T], soit 52 000 euros, et les sommes définitivement mises à la charge de la société MCM à l'issue et au titre de ce litige dans les trois années à venir.
Dans l'hypothèse où aucune somme ne serait mise à la charge de la société MCM au titre de ce litige au 31/12/2018, la somme de ving mille euros (20 000 €) sera définitivement versée aux cédants au prorata de leur participation actuelle au capital de la société MCM, même si le litige susvisé n'est pas clôturé.
Dans l'hypothèse où aucune somme ne serait mise à la charge de la société MCM au titre de ce litige à l'issue d'une période de deux années à compter de la date de la réitération de la présente promesse, la somme de ving mille euros (20 000 €) sera définitivement versée aux cédants au prorata de leur participation actuelle au capital de la société MCM, même si le litige susvisé n'est pas clôturé.
Dans l'hypothèse où aucune somme ne serait mise à la charge de la société MCM au titre de ce litige à l'issue d'une période de trois ans à compter de la date de la réitération de la présente promesse, la somme de douze mille euros (12 000 €) sera définitivement versée aux cédants au prorata de leur participation actuelle au capital de la société MCM.'
L'article 9.8 de l'acte de cession d'actions prévoit que 'tout différend relatif à la conclusion, la validité, l'interprétation ou l'exécution des présentes, que'les parties ne pourraient résoudre à l'amiable (étant à cet égard précisé que les parties s'engagent à une obligation de négociation de bonne foi), sera de la compétence exclusive en premier ressort du tribunal de commerce du Mans'.
Une garantie de passif a été annexée à l'acte de cession.
En vertu de l'article 1.13 de cette garantie de passif, il est spécifié que 'la société ne se trouve pas impliquée, dans une quelconque action judiciaire ou enquête administrative ou dans toute procédure judiciaire, pénale, arbitrale ou administrative concernant la société ou l'un quelconque de ses biens, à'l'exception d'un litige prud'homal contre une ancienne salariée (Madame [T] née [C]) avec un risque provisionné à hauteur de 52 000 € dans les comptes de l'exercice clos le 31 octobre 2017.'
Conformément à l'article 3 II) de la garantie de passif, 'le bénéficiaire avisera les garants de tout autre passif ou préjudice qui viendrait à sa connaissance, par lettre recommandée avec accusé de réception qui sera accompagnée des pièces justifiant de sa réalité, dans un délai de trente jours.'
Selon l'article 9 de la garantie de passif prévue entre les parties, 'les parties s'engagent préalablement à toute instance judiciaire à résoudre leurs différends par une médiation qu'elles organiseront. Si aucune médiation n'intervient dans les deux mois de la demande d'organisation de celle-ci, la partie la plus diligente pourra saisir le tribunal de commerce du Mans'.
Par lettre de leur conseil du 7 janvier 2019, M. et Mme [E] ont vainement sollicité de la SARL LM Wedding le paiement de la somme de 20'000 euros, correspondant à la première tranche du règlement du complément de prix.
Par lettre recommandée avec accusé de réception de leur conseil du 21 février 2019, M. et Mme [E] ont mis en demeure la SARL LM Wedding d'avoir à leur régler la somme de 20 000 euros.
Le 19 juillet 2019, M. et Mme [E] ont fait assigner la SARL'LM Wedding devant le tribunal de commerce du Mans en paiement de la première tranche du complément du prix.
Parallèlement, par arrêt du 20 novembre 2019, sur appel de Mme'[T], suivant déclaration du 20 mai 2016, d'un jugement du conseil de prud'hommes de Rennes du 27 avril 2016, et après audience publique du 23'septembre 2019, la cour d'appel de Rennes a confirmé la condamnation de la SARL MCM à payer à Mme [T] à titre de dommages-intérêts les sommes de 2 198,15 euros pour non-respect de la procédure aux fins de reclassement, 2'198,15 euros pour remise tardive des documents de fin de contrat, ainsi que 250 euros pour défaut d'indication de la portabilité de la prévoyance et des garanties santé afférentes sur le contrat de travail, avec intérêts au taux légal. En'infirmation du jugement, la cour d'appel de Rennes a aussi condamné la SARL'MCM à payer à Mme [T] les sommes de 4 029,47 euros de solde d'indemnité spéciale de licenciement, 4 396,30 euros d'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis, 2 564,70 euros de reliquat d'indemnité compensatrice de congés payés, 26 377,80 euros d'indemnité pour méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte, 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de notification écrite des motifs s'opposant à son reclassement. La cour d'appel de Rennes a dit que les sommes allouées à Mme [K] [C] au titre du solde d'indemnité spéciale de licenciement, de l'indemnité compensatrice équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis, et du reliquat d'indemnité compensatrice de congés payés, sont assorties des intérêts au taux légal partant de la réception par l'employeur de sa convocation en bureau de conciliation, a dit que la somme allouée à Mme [T] à titre de dommages-intérêts pour remise tardive des documents sociaux de fin de contrat et paiement partiel avec retard du solde de tout compte, est assortie des intérêts au taux légal partant du 27 avril 2016, date du prononcé du jugement déféré, et dit que les sommes allouées à Mme [T] à titre de dommages-intérêts pour méconnaissance des dispositions relatives au reclassement du salarié déclaré inapte, et pour défaut de notification écrite des motifs s'opposant à son reclassement sont assorties des intérêts au taux légal partant du présent arrêt. Elle a aussi condamné la SAS'MCM a réglé une somme de 3 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
En l'état de leurs dernières conclusions devant le tribunal de commerce du Mans, M. et Mme [E] ont demandé au tribunal de les déclarer recevables et bien fondés en leurs actions et leurs demandes, de'condamner la société LM Wedding à payer à M. et Mme [E], chacun, la somme de 10 000 euros au titre de la première tranche du complément de prix de cession des actions de la SAS MCM, avec intérêts au taux légal à compter du 21 février 2019, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, ont soulevé l'irrecevabilité de la demande reconventionnelle, subsidiairement ont conclu à son rejet.
En défense, la société LM Wedding a sollicité du tribunal de commerce qu'il déclare les époux [E] irrecevables et en tout cas mal fondés en leur action ; subsidiairement, qu'il sursoit à statuer et renvoie la cause et les parties devant tel médiateur qu'il lui plaira de désigner : à titre plus subsidiaire encore, qu'il dise que la clause de versement d'un complément de prix est nulle, qu'il déboute les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes. Prétendant avoir découvert, postérieurement à la cession, de nombreuses irrégularités dans la comptabilité de la société MCM (invoquant au titre du passif une régularisation de dépôt de garantie Citya de 41,22 euros, une facture entreprise Ren Elec du 15 mai 2017 de 62,40 euros, une facture de rédaction de bail non justifié Agence Lenoir de 4 055,05 euros, une perte de 4 103,38 euros HT liée au remplacement de la chaudière non entretenue suite à un achat du 3'décembre 2018, une somme de 5 507,75 euros au titre du compte courant débiteur au jour de la cession contrairement au crédit de 11 000 euros indiqué, deux factures d'iPhone du 15 mars 2018 pour 208,25 euros HT et 93,25 euros HT conservé par Mme [E], une absence du matériel informatique facturé le 11 juin 2011et le 20 juin 2016 pour des montants de 548,83 euros et 915,83'euros, des frais non justifiés de restaurants, parking, hôtel du 1er novembre 2017 au 30 avril 2018 pour environ 6 000 euros avec absence de récupération de la TVA, des pénalités et majorations de retard au titre de la taxe d'apprentissage et assimilée pour 3 839 euros, de CDD pour 597 euros, de'formation continue pour 3 105 euros), la société Wedding a demandé au tribunal qu'il la déclare recevable et bien fondée en sa demande reconventionnelle, qu'il condamne les demandeurs à lui régler la somme de 29'076,94 euros au titre de la garantie du passif et la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral prétendument subi ; s'il était fait droit à la demande des époux [E], qu'il dise que les créances respectives des parties se compenseront.
Par jugement du 16 novembre 2020, le tribunal de commerce du Mans a :
- déclaré M. et Mme [E] recevables et bien fondés en leur action et leurs demandes,
- dit et jugé que la condition suspensive relative au versement de la première échéance du complément de prix de cession des actions de la SAS'MCM est valable, levée et exigible,
- condamné la SARL LM Wedding à payer aux époux [E], la somme de 20 000 euros soit : 10 000 euros à Mme [E] et 10'000'euros à M. [E], avec intérêts au taux légal à compter du 21'février 2019,
- dit et jugé la SARL LM Wedding mal fondée en ses demandes reconventionnelles,
- condamné la SARL LM Wedding à verser la somme de 1'000'euros au terme de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Par déclaration du 23 décembre 2020, la SARL LM Wedding a interjeté appel de ce jugement en attaquant chacune de ses dispositions ; intimant M. et Mme [E].
Les parties ont conclu.
Selon lettre du 3 juin 2021 adressée à leurs conseils, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel d'Angers a invité les parties à s'interroger sur l'opportunité d'instaurer une mesure de médiation judiciaire pour trouver une solution à leur différend. Cette proposition n'a pas été accueillie.
Une ordonnance du 18 novembre 2024 a clôturé l'instruction de l'affaire.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La société LM Wedding demande à la cour de :
vu l'article 56 du code de procédure civile,
- la déclarer recevable et en tout cas bien fondée en son appel,
en conséquence,
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
et, statuant à nouveau,
- déclarer irrecevable l'action des époux [E] engagée avant toute saisine d'un médiateur,
en conséquence,
- surseoir à statuer et renvoyer la cause et les parties devant tel médiateur qu'il plaira au tribunal de commerce de désigner,
à titre subsidiaire,
- dire que la clause de versement d'un complément de prix est nulle,
- débouter les époux [E] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
- à titre infiniment subsidiaire, dire qu'elle versera la somme de 5'315,87 euros à chacun des époux [E] en complément du prix,
en tout état de cause,
- la déclarer recevable et bien fondée en sa demande reconventionnelle,
- condamner les époux [E] à lui régler la somme de 29'076,94 euros au titre de la garantie de passif à laquelle s'ajoute la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice moral qu'elle subit,
dans cette hypothèse et si par impossible il était fait droit à la demande des époux [E],
- dire que les créances respectives des parties se compenseront,
en tout état de cause,
- condamner les époux [E] à lui verser la somme de 6'000'euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- les condamner aux entiers dépens.
M. et Mme [E] demandent à la cour de :
vu les articles 1103 et suivants et 1304 et suivants du code civil,
vu les articles 122 et suivants du code de procédure civile,
à titre principal,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- déclarer la SARL LM Wedding irrecevable et mal fondée en son appel,
à titre subsidiaire,
sur la fin de non-recevoir,
- les déclarer recevables en leur action et leurs demandes,
- juger que la clause de médiation est contenue dans l'acte de garantie de passif et qu'ils fondent leur action sur l'acte de cession des actions de la SAS MCM,
- juger que l'acte de cession des actions de la SAS MCM ne comporte pas de clause de négociation ou de médiation préalable,
- juger qu'ils ont fait preuve de bonne foi dans la tentative de règlement amiable du litige,
- juger en conséquence que leur action est recevable,
sur le fond,
- les déclarer recevables et bien fondés en leur action et leurs demandes,
- juger que la condition suspensive relative au versement de la première échéance du complément de prix de cession des actions de la SAS'MCM est levée,
- juger que la levée de la condition suspensive rend l'obligation exigible,
- juger que la clause de complément de prix est valable,
- juger que la SARL LM Wedding est en mesure d'identifier le litige contre Mme [T],
- juger que la SAS MCM a poursuivi le litige contre Mme [T] devant la cour d'appel de Rennes, de sorte que la SARL LM Wedding ne peut prétendre l'ignorer,
- condamner la SARL LM Wedding à payer à Mme [E] la somme de 10 000 euros au titre de la première échéance du complément de prix de cession des actions de la SAS MCM, avec intérêts au taux légal à compter du 21 février 2019, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
- condamner la SARL LM Wedding à payer à M. [E] la somme de 10 000 euros au titre de la première échéance du complément de prix de cession des actions de la SAS MCM, avec intérêts au taux légal à compter du 21 février 2019, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
sur la demande reconventionnelle,
à titre principal,
- juger que la SARL LM Wedding n'a pas respecté la clause de médiation préalable figurant dans la convention de garantie de passif,
- déclarer l'action de la SARL LM Wedding irrecevable,
à titre subsidiaire,
- juger que la SARL LM Wedding n'a pas respecté la procédure de mise en oeuvre de la garantie de passif,
- juger en conséquence qu'ils ne peuvent être tenus à garantie,
- débouter la SARL LM Wedding de toutes ses demandes, fins et conclusions,
à titre infiniment subsidiaire,
- juger la SARL LM Wedding mal fondée en ses demandes reconventionnelles,
- débouter la SARL LM Wedding de toutes ses demandes, fins et conclusions,
en tout état de cause,
- débouter la SARL LM Wedding de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la SARL LM Wedding à leur payer la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SARL LM Wedding aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Pour un plus ample exposé des prétentions au soutien des moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :
- le 19 février 2021 pour la société LM Wedding,
- le 14 novembre 2024 pour M. et Mme [E].
MOTIFS DE LA DECISION :
Sur la demande en paiement au titre du complément du prix de cession
Sur la recevabilité de cette demande
La société LM Wedding soutient qu'en présence d'une divergence d'interprétation sur la clause relative au complément du prix, les époux [E] ne sont pas recevables en leur action faute d'avoir préalablement à l'instance initié une négociation et d'avoir saisi un médiateur. Elle fait valoir qu'ils auraient dû respecter la clause de négociation présente dans l'acte de cession d'actions et se soumettre ainsi préalablement à l'introduction de la procédure contentieuse à une négociation de bonne foi et que l'esprit comme l'obligation résultant de l'acte se retrouve dans la convention de garantie signée des parties et annexée à l'acte de cession, qui prévoit en son article 9, en des termes suffisamment larges pour couvrir l'ensemble des différends qui pourraient survenir entre les parties, une clause obligeant les parties à se soumettre à un préalable de médiation. Elle en déduit que les conventions liant les parties, qui constituaient un ensemble contractuel, visaient l'exigence d'une mise en place d'un mode de règlement amiable du différend bien plus important qu'une simple mise ne demeure et appelait une négociation de bonne foi qui n'a jamais été permise.
Mais c'est exactement que les premiers juges ont retenu que la convention de cession des actions ne comporte pas de clause de médiation préalable, laquelle ne figure que dans l'acte de garantie d'actif et de passif, qui est distinct de la convention de cession des actifs, qui en est une annexe, et qui est soumise à des conditions et modalités propres. Or, l'action en paiement du complément de prix n'est pas engagée sur le fondement de la convention de garantie de passif.
L'article 9.8 de l'acte de cession d'actions ne soumet les parties pour résoudre leur différend relatif à la validité, l'interprétation ou l'exécution de la convention de cession des actions à aucune phase spécifique obligatoire de résolution du litige préalable à la saisine du juge, se limitant à reprendre l'engagement des parties de négocier de bonne foi pour tenter de résoudre à l'amiable leur litige.
Sur le bien fondé de la demande
Les cédants font valoir que le règlement du complément de prix est prévu de manière échelonnée, que le premier versement de 20 000 euros n'était soumis qu'à la réalisation de la condition suspensive tenant à ce qu'aucune somme ne soit mise à la charge de la société MCM au titre du litige prud'homal à la date du 31décembre 2018, même'si'le'litige'n'était'pas'clôturé, comme cela est expressément stipulé, de sorte qu'au 31 décembre 2018, la société MCM n'ayant justifié d'aucune somme qui aurait été mise à sa charge dans le cadre du litige prud'homal l'opposant à Mme [T], ils s'estiment fondés à réclamer le paiement de la somme de 20'000 euros.
La cessionnaire expose que par le complément de prix, les cédants ont entendu 'récupérer' les sommes provisionnées en trop dans le cas où la condamnation prononcée contre la société MCM à l'issue de la procédure prud'homale serait d'un montant inférieur à la provision passée dans les comptes de la société et que son montant étant conséquent, ils ont accepté un échelonnement de son versement. Elle estime que 'les dates fixées au 31'décembre 2018, 2 mai 2020, 2 mai 2021 pour déterminer s'il y a eu ou non condamnation de la société MCM ne sont pas des échéances mais des dates à prendre en compte pour apprécier la réalisation ou non de la condition suspensive'. Elle fait valoir que dès lors que l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, rendu le 20 novembre 2019, a condamné la société MCM à payer à son ancienne salariée la somme globale de 41 368,27 euros outre intérêts, pour partie à compter de la saisine du bureau de conciliation et pour partie à compter de la date de l'arrêt, les cédants pouvaient exiger le versement de la somme de 10 631,73 euros correspondant à l'excédent provisionné et non pas les 20 000 euros qu'ils réclament au motif qu'aucune décision n'était intervenue au 31 décembre 2018. Elle affirme qu'elle n'a pu donner un consentement éclairé à cette clause telle qu'interprétée par les parties adverses, d'autant moins qu'elle ne disposait pas d'éléments d'information suffisants sur le litige prud'homal, et demande à la cour de déclarer cette clause nulle sur le fondement des dispositions de l'article 1188 du code civil ou d'interpréter les termes de la convention dans le sens que lui donnerait une personne raisonnable placée dans la même situation, en déclarant que personne ne peut imaginer qu'elle ait pu entendre régler à la fois le montant des condamnations définitives prononcées dans le cadre du litige prud'homal et un complément de prix équivalent et que suivre les cédants en ce sens revient à faire une interprétation absurde de la clause. Elle reproche donc aux premiers juges d'avoir fait une mauvaise application de la clause.
Sur ce,
La cessionnaire entend demander le prononcé de l'annulation de la clause de complément de prix sur le fondement de l'article 1188 du code civil en invoquant un consentement insuffisamment éclairé ou parce qu'elle n'aurait pas consenti à la clause dans le cas où l'interprétation qui en serait retenue ne serait pas celle qu'elle estime devoir être. Ce faisant, elle n'invoque pas un vice du consentement, seul susceptible d'entraîner la nullité de l'acte, sanction à laquelle ne conduit pas le texte invoqué relatif à l'interprétation des contrats.
Les parties ont entendu échelonner le règlement du complément de prix. A chaque échéance fixée, le versement du complément de prix est soumis à la condition suspensive qu'aucune somme ne soit mise à la charge de la société MCM dans le cadre du litige prud'homal avec Mme [T].
A la date du 31 décembre 2018, l'arrêt la cour d'appel de Rennes n'ayant été rendu que le 20 novembre 2019, il est constant qu'aucune somme n'avait été mise à la charge de la société MCM.
La stipulation selon laquelle la somme revenant aux cédants à chacune des échéances leur est définitivement acquise alors même que litige'n'était'pas''clôturé', c'est-à-dire alors même que la décision judiciaire attendue n'était pas rendue et que la créance de la salariée sur la société MCM n'était pas définitivement déterminée, est dénuée d'ambiguïté. Elle n'est pas en contradiction avec la stipulation qui précède selon laquelle 'la cessionnaire s'engage à régler une somme complémentaire qui sera égale à la différence entre le montant provisionné dans les comptes clos le 31 octobre 2017 au titre d'un litige prud'homal à l'encontre de Mme [T], soit 52 000 euros, et les sommes définitivement mises à la charge de la société MCM à l'issue et au titre de ce litige dans les trois années à venir', qui prévoit que le complément de prix est calculé en déduisant de la somme provisionnée, soit 52 000 euros, non pas les sommes finalement mises à la charge de la société MCM mais celles qui le sont dans le délai de trois ans à compter de la réitération de la cession.
Il n'y a pas à interpréter un acte qui est clair. Le contrat ne prévoit pas que le complément de prix dépende exclusivement du résultat de l'arrêt d'appel. Les cédants font justement valoir que si tel avait été le cas, il aurait été prévu un remboursement des premières échéances de complément de prix en cas de condamnation de la société MCM survenue après les échéances.
La condition suspensive au versement de la première tranche du complément de prix étant levée, le jugement ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a condamné la cessionnaire à payer à chacun des cédants la somme de 10'000'euros, en application de l'article 1304-6 du code civil aux termes duquel l'obligation devient pure et simple à compter de l'accomplissement de la condition suspensive, et ce, y compris en ce qu'il a dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte.
Sur la demande reconventionnelle en paiement au titre de la garantie d'actif et de passif
Sur la recevabilité de cette demande
La garantie d'actif et de passif comporte une clause contractuelle de médiation préalable.
Il résulte des articles 122 et 124 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir ne sont pas limitativement énumérées et que, licite, la clause d'un contrat instituant une procédure de médiation obligatoire et préalable à la saisine du juge constitue une fin de non-recevoir qui s'impose au juge si les parties l'invoquent.
Aucune médiation n'a été mise en oeuvre préalablement à la demande formée par la bénéficiaire de la garantie contre le garant devant le tribunal de commerce en exécution de la convention de garantie de passif et d'actif et ce, en violation de la clause imposant ce préalable, de sorte que les prétentions émises à ce titre sont irrecevables, ce qui conduit à une confirmation du jugement sauf à déclarer irrecevable et non pas mal fondée la demande reconventionnelle.
Sur les frais et dépens
La société LM Wedding, partie perdante, sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à M. et Mme [E] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
la cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris sauf à déclarer irrecevable et non pas mal fondée la demande reconventionnelle de la société LM Wedding.
Y ajoutant,
Condamne la société LM Wedding à payer à M. et Mme'[E] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société LM Wedding aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,