CA Montpellier, 2e ch. civ., 6 mars 2025, n° 24/02270
MONTPELLIER
Arrêt
Autre
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 06 MARS 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/02270 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QHCK
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 02 AVRIL 2024
PRESIDENT DU TJ DE NARBONNE
N° RG 24/00109
APPELANT :
Monsieur [J] [G]
de nationalité Française
[Adresse 12]
[Localité 6]
Représenté par Me Francis TOUR de la SCP THEVENET- TOUR, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Monsieur [D] [F]
né le [Date naissance 10] 1963 à [Localité 16]
de nationalité Française
Lieu Dit [Adresse 17]
[Localité 7]
Représenté par Me Marie Eve BANQ, avocat au barreau de MONTPELLIER
ONIAM OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX
[Adresse 11]
[Localité 13]
Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
CPAM DE L'AUDE
[Adresse 8]
[Localité 5]
Assignée le 17 mai 2024 à personne habilitée
Ordonnance de clôture du 06 Janvier 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 janvier 2025, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, présidente de chambre
Mme Nelly CARLIER, conseillère
Mme Anne-Claire BOURDON, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Hélène ALBESA
ARRET :
- Réputé-contradictoire;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, greffier.
FAITS ET PROCÉDURE
M. [D] [F], salarié intérimaire de la société GS Perpignan, a été victime d'un accident de travail survenu le 26 mai 2021, pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.
Il a été admis dans le service des urgences de la Polyclinique [18] à [Localité 14]. Un arrêt de travail initial a été prescrit jusqu'au 31 mai 2021. Suite à une prise en charge médicale, l'acte chirurgical, préconisé pour « tendinopathie rompue de la coiffe des rotateurs épaule droite résistant au traitement médical », a été réalisé le 4 janvier 2022 par le docteur [G].
Une échographie réalisée le 24 mars 2022 a révélé une déformation du tendon long biceps et la rupture du tendon biceps. En juin 2022, le professeur [Z] a confirmé « une rupture de la longue portion du biceps avec une rétractation du muscle biceps à la partie basse du bras » et « un syndrome algodystrophique ». Il notait également des «dysesthésies du patient depuis la chirurgie dans le territoire du nerf ulnaire » confirmées par un électromyogramme réalisé le 27 mars 2023 concluant à un
« syndrome compressif du nerf ulnaire droit dans sa traversée du coude avec conséquence essentiellement sensitives ».
Saisi par acte de commissaire de justice en date du 9 février 2024 délivré par M. [F] aux fins de voir ordonner une mesure d'expertise, le président du tribunal judiciaire de Narbonne, statuant en référé a, par ordonnance du 2 avril 2024 :
- ordonné une expertise médicale de [D] [F] selon modalités de la nomenclature DINTHILLAC, et plus précisément en matière de responsabilité médicale et évaluation du préjudice corporel.
Le 24 avril 2024, Monsieur [J] [G] a interjeté appel de cette ordonnance, appel limité aux chefs de l'ordonnance expressément critiquées en ce que le juge des référés a : « Ordonnons l'expertise médicale de [D] [F] selon modalités de la nomenclature DINTHILLAC et plus précisément en matière de responsabilité médicale et évaluation du préjudice corporel ; Commettons pour y procéder un expert spécialisé en chirurgie orthopédique et réparation du dommage corporel inscrit sur la liste de la cour d'appel de TOULOUSE, en la personne de : [M][B] Hôpital [21] [Adresse 20] Tél : [XXXXXXXX01] Port.:[XXXXXXXX04]
Mèl :[Courriel 15]
A défaut,en cas d'empêchement, [E] [S] [W]
[Adresse 9] Tel : [XXXXXXXX02]
Port. : [XXXXXXXX03] Mèl : [Courriel 19]
Lequel aura pour mission de :
- Préalablement à la mission d'expertise, recueillir dans la mesure du possible, les convenances des parties et de leurs représentants avant de fixer une date pour le déroulement des opérations d'expertise ; Leur rappeler qu'elles peuvent se faire assister d'un médecin conseil et toute personne de leur choix ; Dans le respect des textes en vigueur et notamment du principe du contradictoire, après s'être assuré de l'absence d'un éventuel conflit d'intérêt;
- Entendre contradictoirement les parties, leurs conseils convoqués et entendus ainsi que tout sachant (ceci dans le respect des règles déontologiques médicales ou relatives au secret professionnel) ; Sans que le secret médical ou professionnel puisse être opposé,
Se faire communiquer par le demandeur ou son représentant légal ou par un tiers avec l'accord de l'intéressé ou de ses ayants-droits, auprès de tous médecins et établissement de soins, tous documents utiles à sa mission et prendre connaissance de tous documents médicaux relatifs à l'intervention chirurgicale subie le 4 janvier 2022 et de leurs suites, et notamment les documents remis relatifs aux examens, soins, traitements, administration de produit ou interventions de toutes sortes dont le patient a pu être l'objet au sein du système de santé, en en ce que le juge des référés n'a pas du tout répondu à l'argumentation développée par le docteur [G].
Selon avis du 10 mai 2024, l'affaire a été fixée à l'audience du 13 janvier 2025 en application des dispositions de l'article 905 ancien du code de procédure civile.
La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées 17 mai 2024 à la CPAM de l'Aude qui n'a pas constitué avocat par acte remis à personne habilitée.
Vu les conclusions notifiées le 27 juin 2024 par Monsieur [J] [G] ;
Vu les conclusions notifiées le 13 juin 2024 par Monsieur [D] [F] ;
Vu les conclusions notifiées le13 juin 2024 par l'ONIAM ;
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 6 janvier 2025 ;
PRETENTIONS DES PARTIES
M. [G] demande à la cour au visa des articles 490 du code de procédure civile et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de :
- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par le docteur [G],
- réformer l'ordonnance du 2 avril 2024,
- statuant à nouveau, juger que la mission de l'expert précisera que ce dernier peut se faire communiquer toutes pièces et tout élément médical en possession de l'une ou l'autre des parties afin d'établir un rapport objectif et respectant les principes du contradictoire et du respect des droits de la défense,
- laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens.
Au soutien de son appel, il fait essentiellement valoir que :
- le droit au procès équitable, prévue par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme des libertés fondamentales prévoit le principe d'égalité des armes entre les parties, il implique l'obligation de permettre aux parties d'avoir la possibilité de présenter sa cause dans des conditions également avantageuses,
- la mission confiée à l'expert prévoyant l'accord préalable constitue une atteinte excessive et disproportionnée au regard des intérêts protégés par le secret médical ce que l'une des parties au litige empêché par l'autre de produire spontanément les pièces qu'il estime utiles au bon déroulement des opérations d'expertise nécessaires à sa défense,
- le caractère absolu du secret médical, consacré par la Cour de cassation, qui a pour conséquence l'accord préalable obligatoire du patient à la communication de pièces médicales, présente une exception, lorsqu'une expertise judiciaire est ordonnée,
- les parties doivent bénéficier d'une discussion contradictoire et aucune condition préalable ne doit entraver l'accès à des pièces de procédure utiles aux droits de la défense, - les décisions produites sont inapplicables au cas d'espèce ne s'agissant pas de transmettre un rapport d'expertise amiable d'un médecin-conseil ou d'un assureur à l'expert judiciaire mais de lui fournir les pièces nécessaires à la réalisation de sa mission qui doit se dérouler de façon contradictoire,
- l'expert judiciaire est une personne impartiale.
Monsieur [D] [F] demande à la cour au visa des articles 145 du code de procédure civile, L1110-4 et R4127-4 du code de la santé publique, 226-13 du code pénal de:
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné une expertise médicale et fixé la mission de l'expert,
- condamner le Dr [G] à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le Dr [G] aux entiers dépens,
- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à l'ONIAM et à la CPAM de l'Aude.
Il expose en substance que :
- il a intérêt à ce que le dossier médical relatif à l'intervention du 4 janvier 2022 que détient le docteur [G] soit communiqué ; il est donc hautement probable que le recueil de son consentement ne pose pas de difficultés,
- le secret professionnel (article L 110-4 du code de la santé publique) est absolu (article 226- 13 du code pénal), il existe une atténuation concernant le partage d'informations entre professionnels de santé appartenant à la même équipe de soins (article L 110-12 du code de la santé publique ),
- selon la Cour de cassation et le Conseil d'État, la qualité de médecin et la bonne administration de la justice ne sont pas de nature à justifier à elles seules l'échange d'informations protégées par le secret médical, à ce titre, la communication par le médecin-conseil de la société d'assurances du rapport d'expertise amiable à l'expert judiciaire nécessite l'accord de l'assuré.
Par conclusions du 13 juin 2024, l'ONIAM demande à la cour de :
- le recevoir dans ses écritures et de les dire bien fondées,
- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a subordonné la production de pièces par les parties à l'autorisation de M. [F] ou de son représentant,
- statuant de nouveau, juger que les parties défenderesses pourront communiquer toutes pièces médicales relatives à l'accident et nécessaires à leur défense,
- condamner tout succombant à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Il expose en substance que la subordination de la production du dossier médical de M. [F] à l'autorisation de ce dernier met en péril le droit à un procès équitable.
Par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la Cour entend se référer aux dernières écritures des parties ci dessus visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions qu'elles ont développés.
DISCUSSION
Si le secret médical, institué dans l'intérêt des patients, s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi et lui fait obligation de protéger contre toute indiscrétion les documents médicaux concernant les personnes qu'il a soignées ou examinées, une expertise médicale qui, en ce qu'elle ressortit à un domaine technique échappant à la connaissance des juges, est susceptible d'influencer leur appréciation des faits, constitue un élément de preuve essentiel qui doit pouvoir être débattu par les parties (Cass. 1ére Civ, 7 décembre 2004, n° 02-12.539).
Cependant, le juge civil ne peut, en l'absence de disposition législative spécifique l'y autorisant, ordonner une expertise judiciaire en impartissant à l'expert une mission qui porte atteinte au secret médical sans subordonner l'exécution de cette mission à l'autorisation préalable du patient concerné, sauf à tirer toutes conséquences d'un refus illégitime. (Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 juin 2009 - n° 08-12.742).
Le premier juge a ainsi fixé la mission de l'expert :
' (...)
- Sans que le secret médical ou professionnel puisse être opposé,
- Se faire communiquer par le demandeur ou son représentant légal ou par un tiers avec l'accord de l'intéressé ou de ses ayants-droits, auprès de tous médecins et établissement de soins, tous documents utiles à sa mission et prendre connaissance de tous documents médicaux relatifs à l'intervention chirurgicale subie le 4 janvier 2022 et de leurs suites, et notamment les documents remis relatifs aux examens, soins, traitements, administration de produit ou interventions de toutes sortes dont le patient a pu être l'objet au sein du système de santé, (...) »
Ce faisant, le juge des référés, saisi d'une demande de mesure d'instruction avant tout procès par application des dispositions de l'article 145 du Code de procédure civile, n'a fait que rappeler les règles protectrices applicables au secret médical dans le procès civil, en invitant chacune des parties à produire les pièces en relation et utiles à la solution du litige.
Si une mise en balance des droits de la défense et du secret médical devait être rendue nécessaire par un refus des demandeurs à la soumission au contradictoire d'une pièce couverte par le secret médical, il appartiendra au juge chargé du contrôle de l'expertise dans une certaine mesure, si les parties jugent utile de le saisir concernant une difficulté de communication de pièces, et en tout état de cause à la juridiction du fond qui pourrait être ultérieurement saisie, de décider du caractère légitime du refus et de la nécessité de porter atteinte au secret médical en fonction des intérêts concrets en présence.
Il n'appartient pas au juge des référés d'effectuer a priori et abstraitement ce contrôle de proportionnalité.
En conséquence, la décision sera confirmée en ses dispositions soumises à la Cour.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Monsieur [J] [G] qui succombe sera condamné aux dépens d'appel et à payer Monsieur [D] [F] une somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
La demande de l'ONIAM fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ne sera pas accueillie en raison de l'équité.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme la décision en ses dispositions soumises à la Cour.
Condamne Monsieur [J] [G] aux entiers dépens d'appel et à payer Monsieur [D] [F] la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Déboute l'ONIAM de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le greffier La présidente
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre civile
ARRET DU 06 MARS 2025
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 24/02270 - N° Portalis DBVK-V-B7I-QHCK
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 02 AVRIL 2024
PRESIDENT DU TJ DE NARBONNE
N° RG 24/00109
APPELANT :
Monsieur [J] [G]
de nationalité Française
[Adresse 12]
[Localité 6]
Représenté par Me Francis TOUR de la SCP THEVENET- TOUR, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMES :
Monsieur [D] [F]
né le [Date naissance 10] 1963 à [Localité 16]
de nationalité Française
Lieu Dit [Adresse 17]
[Localité 7]
Représenté par Me Marie Eve BANQ, avocat au barreau de MONTPELLIER
ONIAM OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX
[Adresse 11]
[Localité 13]
Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LX MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
CPAM DE L'AUDE
[Adresse 8]
[Localité 5]
Assignée le 17 mai 2024 à personne habilitée
Ordonnance de clôture du 06 Janvier 2025
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 janvier 2025, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Mme Michelle TORRECILLAS, présidente de chambre
Mme Nelly CARLIER, conseillère
Mme Anne-Claire BOURDON, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Hélène ALBESA
ARRET :
- Réputé-contradictoire;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Michelle TORRECILLAS, présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, greffier.
FAITS ET PROCÉDURE
M. [D] [F], salarié intérimaire de la société GS Perpignan, a été victime d'un accident de travail survenu le 26 mai 2021, pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.
Il a été admis dans le service des urgences de la Polyclinique [18] à [Localité 14]. Un arrêt de travail initial a été prescrit jusqu'au 31 mai 2021. Suite à une prise en charge médicale, l'acte chirurgical, préconisé pour « tendinopathie rompue de la coiffe des rotateurs épaule droite résistant au traitement médical », a été réalisé le 4 janvier 2022 par le docteur [G].
Une échographie réalisée le 24 mars 2022 a révélé une déformation du tendon long biceps et la rupture du tendon biceps. En juin 2022, le professeur [Z] a confirmé « une rupture de la longue portion du biceps avec une rétractation du muscle biceps à la partie basse du bras » et « un syndrome algodystrophique ». Il notait également des «dysesthésies du patient depuis la chirurgie dans le territoire du nerf ulnaire » confirmées par un électromyogramme réalisé le 27 mars 2023 concluant à un
« syndrome compressif du nerf ulnaire droit dans sa traversée du coude avec conséquence essentiellement sensitives ».
Saisi par acte de commissaire de justice en date du 9 février 2024 délivré par M. [F] aux fins de voir ordonner une mesure d'expertise, le président du tribunal judiciaire de Narbonne, statuant en référé a, par ordonnance du 2 avril 2024 :
- ordonné une expertise médicale de [D] [F] selon modalités de la nomenclature DINTHILLAC, et plus précisément en matière de responsabilité médicale et évaluation du préjudice corporel.
Le 24 avril 2024, Monsieur [J] [G] a interjeté appel de cette ordonnance, appel limité aux chefs de l'ordonnance expressément critiquées en ce que le juge des référés a : « Ordonnons l'expertise médicale de [D] [F] selon modalités de la nomenclature DINTHILLAC et plus précisément en matière de responsabilité médicale et évaluation du préjudice corporel ; Commettons pour y procéder un expert spécialisé en chirurgie orthopédique et réparation du dommage corporel inscrit sur la liste de la cour d'appel de TOULOUSE, en la personne de : [M][B] Hôpital [21] [Adresse 20] Tél : [XXXXXXXX01] Port.:[XXXXXXXX04]
Mèl :[Courriel 15]
A défaut,en cas d'empêchement, [E] [S] [W]
[Adresse 9] Tel : [XXXXXXXX02]
Port. : [XXXXXXXX03] Mèl : [Courriel 19]
Lequel aura pour mission de :
- Préalablement à la mission d'expertise, recueillir dans la mesure du possible, les convenances des parties et de leurs représentants avant de fixer une date pour le déroulement des opérations d'expertise ; Leur rappeler qu'elles peuvent se faire assister d'un médecin conseil et toute personne de leur choix ; Dans le respect des textes en vigueur et notamment du principe du contradictoire, après s'être assuré de l'absence d'un éventuel conflit d'intérêt;
- Entendre contradictoirement les parties, leurs conseils convoqués et entendus ainsi que tout sachant (ceci dans le respect des règles déontologiques médicales ou relatives au secret professionnel) ; Sans que le secret médical ou professionnel puisse être opposé,
Se faire communiquer par le demandeur ou son représentant légal ou par un tiers avec l'accord de l'intéressé ou de ses ayants-droits, auprès de tous médecins et établissement de soins, tous documents utiles à sa mission et prendre connaissance de tous documents médicaux relatifs à l'intervention chirurgicale subie le 4 janvier 2022 et de leurs suites, et notamment les documents remis relatifs aux examens, soins, traitements, administration de produit ou interventions de toutes sortes dont le patient a pu être l'objet au sein du système de santé, en en ce que le juge des référés n'a pas du tout répondu à l'argumentation développée par le docteur [G].
Selon avis du 10 mai 2024, l'affaire a été fixée à l'audience du 13 janvier 2025 en application des dispositions de l'article 905 ancien du code de procédure civile.
La déclaration d'appel et les conclusions ont été signifiées 17 mai 2024 à la CPAM de l'Aude qui n'a pas constitué avocat par acte remis à personne habilitée.
Vu les conclusions notifiées le 27 juin 2024 par Monsieur [J] [G] ;
Vu les conclusions notifiées le 13 juin 2024 par Monsieur [D] [F] ;
Vu les conclusions notifiées le13 juin 2024 par l'ONIAM ;
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 6 janvier 2025 ;
PRETENTIONS DES PARTIES
M. [G] demande à la cour au visa des articles 490 du code de procédure civile et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de :
- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par le docteur [G],
- réformer l'ordonnance du 2 avril 2024,
- statuant à nouveau, juger que la mission de l'expert précisera que ce dernier peut se faire communiquer toutes pièces et tout élément médical en possession de l'une ou l'autre des parties afin d'établir un rapport objectif et respectant les principes du contradictoire et du respect des droits de la défense,
- laisser à chaque partie la charge de ses propres dépens.
Au soutien de son appel, il fait essentiellement valoir que :
- le droit au procès équitable, prévue par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme des libertés fondamentales prévoit le principe d'égalité des armes entre les parties, il implique l'obligation de permettre aux parties d'avoir la possibilité de présenter sa cause dans des conditions également avantageuses,
- la mission confiée à l'expert prévoyant l'accord préalable constitue une atteinte excessive et disproportionnée au regard des intérêts protégés par le secret médical ce que l'une des parties au litige empêché par l'autre de produire spontanément les pièces qu'il estime utiles au bon déroulement des opérations d'expertise nécessaires à sa défense,
- le caractère absolu du secret médical, consacré par la Cour de cassation, qui a pour conséquence l'accord préalable obligatoire du patient à la communication de pièces médicales, présente une exception, lorsqu'une expertise judiciaire est ordonnée,
- les parties doivent bénéficier d'une discussion contradictoire et aucune condition préalable ne doit entraver l'accès à des pièces de procédure utiles aux droits de la défense, - les décisions produites sont inapplicables au cas d'espèce ne s'agissant pas de transmettre un rapport d'expertise amiable d'un médecin-conseil ou d'un assureur à l'expert judiciaire mais de lui fournir les pièces nécessaires à la réalisation de sa mission qui doit se dérouler de façon contradictoire,
- l'expert judiciaire est une personne impartiale.
Monsieur [D] [F] demande à la cour au visa des articles 145 du code de procédure civile, L1110-4 et R4127-4 du code de la santé publique, 226-13 du code pénal de:
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné une expertise médicale et fixé la mission de l'expert,
- condamner le Dr [G] à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le Dr [G] aux entiers dépens,
- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à l'ONIAM et à la CPAM de l'Aude.
Il expose en substance que :
- il a intérêt à ce que le dossier médical relatif à l'intervention du 4 janvier 2022 que détient le docteur [G] soit communiqué ; il est donc hautement probable que le recueil de son consentement ne pose pas de difficultés,
- le secret professionnel (article L 110-4 du code de la santé publique) est absolu (article 226- 13 du code pénal), il existe une atténuation concernant le partage d'informations entre professionnels de santé appartenant à la même équipe de soins (article L 110-12 du code de la santé publique ),
- selon la Cour de cassation et le Conseil d'État, la qualité de médecin et la bonne administration de la justice ne sont pas de nature à justifier à elles seules l'échange d'informations protégées par le secret médical, à ce titre, la communication par le médecin-conseil de la société d'assurances du rapport d'expertise amiable à l'expert judiciaire nécessite l'accord de l'assuré.
Par conclusions du 13 juin 2024, l'ONIAM demande à la cour de :
- le recevoir dans ses écritures et de les dire bien fondées,
- infirmer l'ordonnance en ce qu'elle a subordonné la production de pièces par les parties à l'autorisation de M. [F] ou de son représentant,
- statuant de nouveau, juger que les parties défenderesses pourront communiquer toutes pièces médicales relatives à l'accident et nécessaires à leur défense,
- condamner tout succombant à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Il expose en substance que la subordination de la production du dossier médical de M. [F] à l'autorisation de ce dernier met en péril le droit à un procès équitable.
Par application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, la Cour entend se référer aux dernières écritures des parties ci dessus visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions qu'elles ont développés.
DISCUSSION
Si le secret médical, institué dans l'intérêt des patients, s'impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi et lui fait obligation de protéger contre toute indiscrétion les documents médicaux concernant les personnes qu'il a soignées ou examinées, une expertise médicale qui, en ce qu'elle ressortit à un domaine technique échappant à la connaissance des juges, est susceptible d'influencer leur appréciation des faits, constitue un élément de preuve essentiel qui doit pouvoir être débattu par les parties (Cass. 1ére Civ, 7 décembre 2004, n° 02-12.539).
Cependant, le juge civil ne peut, en l'absence de disposition législative spécifique l'y autorisant, ordonner une expertise judiciaire en impartissant à l'expert une mission qui porte atteinte au secret médical sans subordonner l'exécution de cette mission à l'autorisation préalable du patient concerné, sauf à tirer toutes conséquences d'un refus illégitime. (Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 juin 2009 - n° 08-12.742).
Le premier juge a ainsi fixé la mission de l'expert :
' (...)
- Sans que le secret médical ou professionnel puisse être opposé,
- Se faire communiquer par le demandeur ou son représentant légal ou par un tiers avec l'accord de l'intéressé ou de ses ayants-droits, auprès de tous médecins et établissement de soins, tous documents utiles à sa mission et prendre connaissance de tous documents médicaux relatifs à l'intervention chirurgicale subie le 4 janvier 2022 et de leurs suites, et notamment les documents remis relatifs aux examens, soins, traitements, administration de produit ou interventions de toutes sortes dont le patient a pu être l'objet au sein du système de santé, (...) »
Ce faisant, le juge des référés, saisi d'une demande de mesure d'instruction avant tout procès par application des dispositions de l'article 145 du Code de procédure civile, n'a fait que rappeler les règles protectrices applicables au secret médical dans le procès civil, en invitant chacune des parties à produire les pièces en relation et utiles à la solution du litige.
Si une mise en balance des droits de la défense et du secret médical devait être rendue nécessaire par un refus des demandeurs à la soumission au contradictoire d'une pièce couverte par le secret médical, il appartiendra au juge chargé du contrôle de l'expertise dans une certaine mesure, si les parties jugent utile de le saisir concernant une difficulté de communication de pièces, et en tout état de cause à la juridiction du fond qui pourrait être ultérieurement saisie, de décider du caractère légitime du refus et de la nécessité de porter atteinte au secret médical en fonction des intérêts concrets en présence.
Il n'appartient pas au juge des référés d'effectuer a priori et abstraitement ce contrôle de proportionnalité.
En conséquence, la décision sera confirmée en ses dispositions soumises à la Cour.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Monsieur [J] [G] qui succombe sera condamné aux dépens d'appel et à payer Monsieur [D] [F] une somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
La demande de l'ONIAM fondée sur les dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ne sera pas accueillie en raison de l'équité.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme la décision en ses dispositions soumises à la Cour.
Condamne Monsieur [J] [G] aux entiers dépens d'appel et à payer Monsieur [D] [F] la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Déboute l'ONIAM de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le greffier La présidente