CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 7 mars 2025, n° 24/03144
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Souamaa (SARL)
Défendeur :
TRB International (SA), Lobst (SASU), La Prévoyance Foncière (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Renard
Vice-président :
Mme Salord
Conseiller :
M. Buffet
Avocats :
Me Abello, SCP Regnier, Me Remy, Me Perrin, Me Domain, Me Mellet
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente de chambre, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
Vu l'ordonnance réputée contradictoire rendue le 8 janvier 2024 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris qui a :
- rejeté la demande de la société Souamaa en nullité de l'assignation en référé,
- constaté l'existence d'atteintes vraisemblables aux droits des marques de l'Union européenne n°1 770 529, UE n° 002 391 167 et internationale n°1 237 277 désignant l'Union européenne, des modèles internationaux n°DM/080 203-0013 et n°DM/216468 004 et des droits d'auteur sur les motifs « Ronde des tortues multicolores » et « Sand Turtles » dont est titulaire la société TRB, commis dans les locaux de la société Souamaa, situés [Adresse 2] à [Localité 7] et dont le propriétaire est la société La Prévoyance Foncière [Localité 6],
- constaté la qualité d'intermédiaire au sens des dispositions de l'article L. 716-4-6 interprété par référence à la directive 2004/48 de la société La Prévoyance Foncière [Localité 6],
- constaté l'existence d'une atteinte manifestement illicite tant à l'enseigne qu'au réseau de distribution résultant d'actes de concurrence déloyale au préjudice des sociétés TRB International et Lobst,
- dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes des sociétés TRB International et Lobst fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme,
- enjoint à la société Souamaa de communiquer à la société TRB International les noms et adresses des producteurs, fabricants, distributeurs, fournisseurs des maillots de bain contrefaisants les marques et/ou motifs « Ronde des Tortues Multicolores » et « Sand Turtles», les quantités de maillots de bain contrefaisants qui ont été commercialisés, livrées, reçues ou commandées, ainsi que le prix obtenu pour ces contrefaçons, sur les 5 dernières années, attestés par son expert-comptable et les bons de commande, bons de livraison, documents d'importation et factures relatives aux maillots de bain contrefaisants, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à exécuter la décision courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification de la décision et pendant 180 jours,
- réservé la liquidation des astreintes prononcées,
- condamné la société Souamaa à payer à la société TRB International la somme provisionnelle de 960 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice économique résultant des actes de contrefaçon de ses marques n°1 779 529, 002 391 167 et 1 237 277,
- condamné la société Souamaa à payer à la société TRB International la somme provisionnelle de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice moral résultant de l'avilissement et la banalisation des marques n°1 779 529, 002 391 167 et 1 237 277 du fait des actes de contrefaçon,
- condamné la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice économique résultant des actes de contrefaçon de ses droits d'auteur protégeant les motifs « Ronde des Tortues Multicolores » et « Sand Turtles » et de ses modèles internationaux DM/216468-004 et DM/080 203-0013 désignant l'Union européenne,
- condamné la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice moral résultant de la banalisation de ses motifs originaux « Ronde des Tortues Multicolores » et « Sand Turtles » du fait des actes de contrefaçon,
- condamné la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice moral résultant de l'avilissement et de la vulgarisation de ses modèles internationaux DM/216468-004 et DM/080 203-0013 désignant l'Union européenne du fait des actes de contrefaçon,
- condamné la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts au titre son préjudice d'image,
- fait interdiction à la société Souamaa de commander ou de faire commander, d'importer ou de faire importer, d'exporter ou de faire exporter, de détenir, de fabriquer ou de faire fabriquer, de proposer à la vente et de vendre des articles reproduisant ou imitant les marques n°1 779 529, 002 391 167 et 1 237 277 ainsi que les motifs « Ronde des Tortues Multicolores » et « Sand Turtles » et les modèles DM/216468-004 et DM/080 203-0013, et ce, sous astreinte de 500 euros par infraction constatée courant à l'expiration d'un délai de 15 jours suivant la signification de la présente ordonnance et pendant 6 mois,
- réservé la liquidation des astreintes prononcées,
- ordonné à la société Souamaa de faire établir et de communiquer l'inventaire précis et détaillé, établi sous contrôle du commissaire de justice qui sera désigné par le Juge des référés, des produits contrefaisant restant en stock, et de détruire à ses frais tous les produits contrefaisants restant en stock sous contrôle d'un commissaire de justice, et qu'il en soit justifié à la société TRB International, et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, courant à l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la signification de l'ordonnance,
- réservé la liquidation des astreintes prononcées,
- ordonné la publication de l'ordonnance à intervenir, en intégralité ou par extraits, dans deux journaux (y compris électroniques), au choix de la société TRB International, et aux frais avancés par la société Souamaa sur simple présentation des devis, dans la limite de 4 000 euros HT par insertion,
- ordonné à la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] de procéder à la résiliation du contrat de bail la liant à la société Souamaa et/ou à son gérant, et à son éviction du local commercial ainsi que de tous occupants de son chef, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir, et pendant 6 mois,
- réservé le droit de liquider les astreintes directement,
- condamné in solidum la société Souamaa et la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] à verser la somme de 8 000 euros à chacune des sociétés TRB International et Lobst en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société Souamaa et la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] aux entiers dépens en ce compris les frais afférents au procès-verbal de constat d'achat du 30 juin 2023 et au procès-verbal de saisie-contrefaçon du 19 juillet 2023,
- rappelé que la décision est exécutoire de plein droit à titre provisoire,
Vu l'appel interjeté le 6 février 2024 par la société Souamaa (RG 24/03144) et l'appel interjeté le même jour par la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] (RG 24/02671),
Vu l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 25 avril 2024 constatant le désistement d'appel de la société La Prévoyance Foncière [Localité 6], l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour de ce chef,
Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 mars 2024 par la société Souamaa, qui demande à la cour de :
- déclarer que la société Souamaa est recevable et bien fondée en son appel,
- infirmer l'ordonnance de référé en date du 8 janvier 2024 en ce qu'elle a :
- rejeté la demande de la société Souamaa en nullité de l'assignation en référé,
- constaté l'existence d'atteintes vraisemblables aux droits des marques de l'Union européenne n°1 770 529, UE n° 002 391 167 et internationale n°1 237 277 désignant l'Union européenne, des modèles internationaux n° DM/080 203-0013 et n°DM/216468- 004 et des droits d'auteur sur les motifs « Ronde des tortues multicolores » et « Sand Turtles » dont est titulaire la société TRB, commis dans les locaux de la société Souamaa, situés [Adresse 2] à [Localité 7] et dont le propriétaire est la société La Prévoyance Foncière [Localité 6],
- constaté la qualité d'intermédiaire au sens des dispositions de l'article L. 716-4-6 interprété par référence à la directive 2004/48 de la société La Prévoyance Foncière [Localité 6],
- constaté l'existence d'une atteinte manifestement illicite tant à l'enseigne qu'au réseau de distribution résultant d'actes de concurrence déloyale au préjudice des sociétés TRB international et Lobst,
- enjoint à la société Souamaa de communiquer à la société TRB international les noms et adresses des producteurs, fabricants, distributeurs, fournisseurs des maillots de bain contrefaisants les marques et/ou motifs « Ronde des Tortues Multicolores » et « Sand Turtles », les quantités de maillots de bain contrefaisants qui ont été commercialisés, livrées, reçues ou commandées, ainsi que le prix obtenu pour ces contrefaçons, sur les 5 dernières années, attestés par son expert-comptable et les bons de commande, bons de livraison, documents d'importation et factures relatives aux maillots de bain contrefaisants, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à exécuter la présente décision courant à l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la signification de la présente décision et pendant 180 jours,
- réservé la liquidation des astreintes prononcées,
- condamné la société Souamaa à payer à la société TRB International la somme provisionnelle de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice moral résultant de l'avilissement et la banalisation des marques n°1 779 529, 002 391 167 et 1 237 277 du fait des actes de contrefaçon,
- condamné la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice économique résultant des actes de contrefaçon de ses droits d'auteur protégeant les motifs « Ronde des Tortues Multicolores » et « Sand Turtles » et de ses modèles internationaux DM/216468-004 et DM/080 203-0013 désignant l'Union Européenne,
- condamné la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice moral résultant de la banalisation de ses motifs originaux « Ronde des Tortues Multicolores » et « Sand Turtles » du fait des actes de contrefaçon,
- condamné la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice moral résultant de l'avilissement et de la vulgarisation de ses modèles internationaux DM/216468-004 et DM/080 203-0013 désignant l'Union Européenne du fait des actes de contrefaçon,
- condamné la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts au titre son préjudice d'image,
- réservé la liquidation des astreintes prononcées,
- ordonné à la société Souamaa de faire établir et de communiquer l'inventaire précis et détaillé, établi sous contrôle du commissaire de justice qui sera désigné par le Juge des référés, des produits contrefaisant restant en stock, et de détruire à ses frais tous les produits contrefaisants restant en stock sous contrôle d'un commissaire de justice, et qu'il en soit justifié à la société TRB International, et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, courant à l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la signification de présente ordonnance,
- réservé la liquidation des astreintes prononcées,
- ordonné la publication de l'ordonnance à intervenir, en intégralité ou par extraits, dans deux journaux (y compris électroniques), au choix de la société TRB International, et aux frais avancés par la société Souamaa sur simple présentation des devis, dans la limite de 4 000 euros HT par insertion,
- condamné in solidum la société Souamaa et la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] à verser la somme de 8.000 euros à chacune des sociétés TRB International et Lobst en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum la société Souamaa et la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] aux entiers dépens en ce compris les frais afférents au procès-verbal de constat d'achat du 30 juin 2023 et au procès-verbal de saisie-contrefaçon du 19 juillet 2023,
En conséquence,
In limine litis,
- constater l'irrégularité de l'assignation en date du 16 août 2023,
- prononcer la nullité de l'acte introductif d'instance,
A titre principal,
- constater l'absence de dommage imminent,
- constater l'absence de trouble manifestement illicite,
En conséquence,
- constater que les demandes des sociétés TRB International et Lobst se heurtent à une contestation sérieuse,
En conséquence,
- débouter les sociétés TRB International et Lobst de l'intégralité de leurs demandes,
- condamner solidairement les sociétés TRB International et Lobst à payer à la société Souamaa la somme de 2 500 euros pour la première instance et l'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,
A titre subsidiaire
- condamner tout au plus la société Souamaa à verser à la société TRB. International la somme provisionnelle de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice moral,
- débouter les sociétés TRB International et Lobst pour le surplus,
- constater que la société Souamaa est dans l'incapacité de communiquer les pièces sollicitées par les demandeurs,
- juger qu'il n'y a lieu à ordonner la résiliation du contrat de bail la liant à la société Souamaa et/ou à son gérant, et à son éviction du local commercial,
- débouter les sociétés TRB International et Lobst de leurs demandes d'astreintes,
- débouter les sociétés TRB International et Lobst de leur demande de publication de l'ordonnance à intervenir et de leurs autres demandes,
Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 avril 2024 par la société Prévoyance Foncière [Localité 6] (la société PF8), qui demande à la cour de :
- déclarer la société PF8 recevable et bien fondée en ses écritures,
- constater que la société PF8 n'est pas le propriétaire des locaux sis [Adresse 2] à [Localité 7],
- constater le désistement des sociétés TRB et Lobst à l'égard de la société PF8,
- constater que la société PF8 accepte le désistement des sociétés TRB et Lobst,
- constater qu'aucune partie n'émet de demande à l'encontre de la société PF8,
En conséquence,
- juger le désistement des sociétés TRB et Lobst à l'égard de la société PF8 parfait,
- ordonner que la société PF8 soit placée hors de cause,
- juger qu'il n'y a pas lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- juger que chaque partie conservera la charge de ses propres frais et dépens,
Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 mars 2024 par les sociétés TRB International et Lobst, qui demandent à la cour de :
A titre liminaire,
- donner acte aux sociétés TRB International et Lobst de ce qu'elles renoncent au bénéfice de l'ordonnance entreprise à l'égard de la société La Prévoyance Foncière [Localité 6],
- donner acte aux sociétés TRB International et Lobst de ce qu'elles se désistent de leur appel incident et de leurs demandes à l'encontre de la société La Prévoyance Foncière [Localité 6],
A titre principal,
- déclarer la société Souamaa mal fondée en son appel, l'en débouter
- confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes des sociétés TRB International et Lobst fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme, et en ce qu'elle est entrée en voie de condamnation à l'égard de la société la Prévoyance Foncière [Localité 6],
- l'infirmer de ces chefs et statuant à nouveau,
- prononcer la mise hors de cause de la société La Prévoyance Foncière [Localité 6],
- déclarer les sociétés TRB International et Lobst recevables et bien fondées en leur appel incident à l'encontre de la société Souamaa,
Y faisant droit,
- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes des sociétés TRB International et Lobst fondées sur la concurrence déloyale et le parasitisme,
Et statuant à nouveau de ces chefs,
- condamner la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi des faits distincts de concurrence déloyale et de parasitisme,
- condamner la société Souamaa à verser à la société Lobst la somme provisionnelle de 35 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi des faits distincts de concurrence déloyale et de parasitisme,
En tout état de cause,
- condamner la société Souamaa à verser la somme de 30 000 euros à chacune des sociétés TRB International et Lobst en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Souamaa aux entiers dépens en ce compris les frais afférents au procès-verbal de constat d'achat du 30 juin 2023 et au procès-verbal de saisie-contrefaçon dressés le 19 juillet 2023, par la SELARL Actay,
Vu l'ordonnance de clôture du 10 octobre 2024 ;
SUR CE,
Il est expressément renvoyé pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
Il sera simplement rappelé que la société de droit suisse TRB International (ci-après la société TRB) a pour activité la conception et la commercialisation de lignes de produits notamment dans le domaine de la mode et que la société Lobst a notamment une activité d'importation, de négoce et de commercialisation des créations de la société TRB.
La société TRB est titulaire des marques suivantes :
- la marque de l'Union européenne (UE) n°1779 529 déposée en couleur le 13 juillet 2000 et régulièrement renouvelée pour désigner notamment en classes 3, 9, 18, 24, 25 et 38 les « vêtements (habillement) ; maillot de bain, shorts de bain ; caleçons de bain »,
- la marque de l'Union européenne figurative déposée le 19 septembre 2001 sous le n°002 391 167 et régulièrement renouvelée pour désigner notamment en classes 24, 25 et 26 les « tissus à usage textile, maillots de bains, shorts de bain, caleçons de bain,
- la marque verbale internationale Vilebrequin n°1 237 277 désignant l'UE, déposée le 7 janvier 2015 pour désigner notamment en classes 9, 18 et 25 les « vêtements ; tee-shirts, maillots de bain, caleçons de bain, slips de bain, caleçons de type boxer »,
Selon un protocole d'accord du 8 décembre 1997, la société TRB a consenti à la société Lobst une licence non exclusive d'exploitation de la marque figurative « VILEBREQUIN » lui permettant d'utiliser celle-ci à titre d'enseigne de ses fonds de commerce en vue d'y vendre dans les conditions définies au protocole, des maillots de bain pour homme au détail sur le territoire de la France métropolitaine et dans les départements et territoires d'outre-mer (articles 1 .1 et 3 du protocole).
La société TRB revendique des droits d'auteur sur un motif « Ronde des tortues multicolores » créé en 2012 par Mme [S] dans le cadre de ses fonctions de directrice artistique de la société et qui lui a été cédé à titre exclusif par contrat du 13 mars 2014, ainsi représenté :
Elle est également titulaire d'un modèle international n° DM/080 203-0013 protégeant ce motif désignant l'Union européenne, déposé le 21 février 2013, publié le 23 août 2013 et régulièrement renouvelé.
La société TRB revendique aussi des droits d'auteur sur un motif « Sand Turtles» créé par M. [G] et qui lui a été cédé en vertu d'un contrat en 2020, ci-dessus représenté :
Elle est également titulaire d'un modèle international n° DM/216468-004 désignant l'Union européenne déposé et protégeant ce motif, déposé le 15 juin 2021 et publié le 17 décembre 2021.
Par acte de commissaire de justice du 30 juin 2023, la société TRB a fait procéder à un constat d'achat de deux maillots de bain reproduisant les marques et motif Vilebrequin, de qualité médiocre, et à des prix très inférieurs à ceux des produits authentiques, dans une boutique exploitée par la société Souamaa tenue au marché des Puces de [Localité 7].
Par ordonnance du président du tribunal judiciaire de Paris en date du 12 juillet 2023, la société TRB a été autorisée à faire pratiquer une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société Souamaa. Les opérations ont été effectuées le 19 juillet 2023.
Par acte de commissaire de justice du 8 août 2023, les sociétés TRB et Lobst ont fait assigner devant le tribunal judiciaire de Paris la société Souamaa et la société Prévoyance foncière [Localité 6] supposée bailleresse propriétaire des locaux exploités par la société Souamaa en contrefaçon, concurrence déloyale et parasitisme. La procédure est pendante.
Par actes de commissaire de justice du 16 août 2023, les sociétés TRB et Lobst, se prévalant de la vraisemblance de la contrefaçon des marques et modèles susvisés dont la société TRB est titulaire, de l'existence d'une atteinte manifeste aux droits d'auteur de cette dernière et d'un trouble manifestement illicite résultant des actes distincts de concurrence déloyale et de parasitisme, ont fait assigner en référé la société Souamaa et la société Prévoyance foncière [Localité 6] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris auquel elles ont demandé d'ordonner, sous astreinte, la communication de diverses pièces et informations ainsi que diverses mesures d'interdiction et de condamner au paiement d'une provision sur la réparation de leur préjudice.
C'est dans ce contexte qu'est intervenue l'ordonnance dont appel.
Sur le désistement partiel
Les sociétés TRB International et Lobst indiquent renoncer au bénéfice de l'ordonnance dont appel à l'égard de la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] et se désistent de leur appel incident et de leurs demandes à l'encontre de cette société.
La société La Prévoyance Foncière [Localité 6] accepte le désistement des sociétés TRB International et Lobst à son égard.
Le désistement est en conséquence parfait en ce qu'il concerne l'instance opposant les sociétés TRB International et Lobst et la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] et sera constaté au dispositif du présent arrêt. En conséquence il n'y a pas lieu de mettre hors de cause la société La Prévoyance Foncière [Localité 6].
Chaque partie conservera la charge de ses propres frais et dépens de l'instance éteinte conformément à la demande de la société la Prévoyance Foncière [Localité 6].
Sur la nullité de l'assignation
La société Souamaa sollicite l'infirmation de l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a rejeté sa demande en nullité de l'assignation en référé du 16 août 2023 faute de signification régulière.
Il résulte de l'acte de signification versé aux débats par les sociétés intimées qu'après avoir eu la confirmation par une personne rencontrée sur place qui a refusé de recevoir le pli que l'adresse de la société Souamaa était bien [Adresse 2] à [Localité 7], le commissaire de justice a dressé un procès-verbal de remise à son étude de l'acte, laissé un avis de passage et adressé une lettre simple à la société Souamaa comportant les mêmes mentions que l'avis de passage et copie de l'acte de signification.
Les diligences accomplies sont donc conformes aux dispositions des articles 655, 656 et 658 du code de procédure civile.
La société Souamaa soutient que le commissaire de justice n'a pas accompli les diligences suffisantes pour s'assurer de l'identité et de la capacité de la personne rencontrée sur place.
Il a été dit cependant que le commissaire de justice instrumentaire n'a pas remis l'acte à la personne rencontrée sur place qui l'a refusé, cette personne n'ayant fait que confirmer l'adresse de la société Souamaa.
Par ailleurs, le commissaire de justice n'était pas tenu de mentionner dans le procès-verbal de signification, l'identité de la personne auprès de laquelle il s'est assuré de l'adresse de la société Souamaa, étant ajouté que cette adresse résulte en outre en l'espèce des mentions figurant sur le reçu de la transaction faite lors des opérations de constat d'achat dans la boutique de la société Souamaa du 30 juin 2023 (page 8 du procès-verbal), des déclarations du vendeur présent dans la boutique lors des opérations de saisie-contrefaçon du 19 juillet 2023 et de la délivrance de l'assignation au fond le 8 août 2023 à un employé de la société Souamaa qui s'est déclaré habilité à le recevoir.
Les contestations de la société appelante sont donc sans portée, ce d'autant qu'elle ne conteste pas que son adresse est bien celle à laquelle s'est rendu le commissaire de justice afin de délivrer l'assignation en référé soit [Adresse 2] à [Localité 7].
Elle ne conteste pas plus avoir été destinataire de l'avis de passage du commissaire de justice et de la lettre simple comportant les mêmes mentions que l'avis de passage et copie de l'acte de signification qui lui ont été adressés par le commissaire de justice instrumentaire, lequel d'ailleurs a attesté n'avoir pas eu de retour de la copie par voie postale envoyée suite à la signification par dépôt à l'étude.
En tout état de cause, la nullité invoquée relève des vices de forme alors que la société Souamaa était représentée par son conseil devant le juge des référés et a eu tout loisir de défendre ses intérêts de sorte qu'elle ne prouve l'existence d'aucun grief qui aurait pu résulter d'une quelconque irrégularité de l'acte de signification de l'assignation du 16 août 2023 devant le premier juge.
Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a rejeté la demande de la société Souamaa en nullité de l'assignation en référé.
Sur la vraisemblance de la contrefaçon et les atteintes aux droits d'auteur
Aux termes du dispositif de ses écritures qui lie la cour, la société Souamaa sollicite l'infirmation de l'ordonnance dont appel qui a constaté l'existence d'atteintes vraisemblables aux droits des marques de l'Union européenne n°1 770 529, n°002 391 167 et internationale désignant l'Union européenne n°1 237 277, des modèles internationaux n°DM/080 203-0013 et n°DM/216468 004 et des droits d'auteur sur les motifs « Ronde des tortues multicolores » et « Sand Turtles » dont est titulaire la société TRB, constaté l'existence d'une atteinte manifestement illicite tant à l'enseigne qu'au réseau de distribution résultant d'actes de concurrence déloyale au préjudice des sociétés TRB International et Lobst, ordonné la communication de pièces et prononcé des condamnations pécuniaires à son encontre.
Sans contester la matérialité des actes de contrefaçon qui lui sont reprochés, elle conclut, sur le fondement de l'article 809 du code de procédure civile, à l'absence de dommage imminent dès lors que celui-ci a définitivement été écarté par la saisie des pièces litigieuses le 19 juillet 2022, pièces qu'elle a achetées et non pas fabriquées et en tout état de cause, qu'elle a depuis lors quitté les lieux. Elle ajoute qu'il n'existe pas de trouble manifestement illicite pour les mêmes raisons, enfin que les montants indemnitaires réclamés se heurtent à une contestation sérieuse.
L'article 9 du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l'Union européenne dispose que :
1) L'enregistrement d'une marque de l'Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.
2) Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d'une marque de l'Union européenne, le titulaire de cette marque de l'Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe pour des produits ou services lorsque :
a) ce signe est identique à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée
b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l'Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l'Union européenne est enregistrée, s'il existe un risque de confusion dans l'esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d'association entre le signe et la marque ».
Conformément à l'article L. 717-1 du même code, la violation des interdictions prévues par ce texte constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur.
Selon l'article L. 716-4-6 du code de la propriété intellectuelle, 'toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon. ['] Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente (').
L'article 10 alinéa 1 du règlement n° 6/2002 sur les dessins et modèles communautaires prévoit que la protection conférée par le dessin ou modèle communautaire s'étend à tout dessin ou modèle qui ne produit pas sur l'utilisateur averti une impression visuelle globale différente (').
L'article 19, premier alinéa, du même règlement prévoit que « Le dessin ou modèle communautaire enregistré confère à son titulaire le droit exclusif de l'utiliser et d'interdire à tout tiers de l'utiliser sans son consentement. Par utilisation au sens de la présente disposition, on entend en particulier la fabrication, l'offre, la mise sur le marché, l'importation, l'exportation ou l'utilisation d'un produit dans lequel le dessin ou modèle est incorporé ou auquel celui-ci est appliqué, ou le stockage du produit à ces mêmes fins ».
L'article L. 515-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que : « Toute atteinte aux droits définis par l'article 19 du règlement (CE) n° 6/2002 du Conseil, du 12 décembre 2001, sur les dessins ou modèles communautaires constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. »
Selon l'article L. 522-1, « les chapitres Ier et Ier bis du présent titre sont applicables aux atteintes portées aux droits du propriétaire d'un dessin ou modèle communautaire ».
Aux termes de l'article L. 521-6 du code de la propriété intellectuelle « Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon. La juridiction civile compétente peut également ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur. Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente (').
Aux termes de l'article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.
Selon l'article L. 335-2 du même code, « Toute édition d'écrits, de composition musicale, de dessin, de peinture ou de toute autre production, imprimée ou gravée en entier ou en partie, au mépris des lois et règlements relatifs à la propriété des auteurs, est une contrefaçon et toute contrefaçon est un délit ».
Enfin l'article 835 code de procédure civile dispose que : « Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ».
En l'espèce, ni la titularité des droits de marques, de dessins et modèles et de droits d'auteur de la société TRB, ni la validité des marques et dessins et modèles revendiqués, ni l'originalité des motifs revendiqués, ni encore la matérialité des actes de contrefaçon qui sont reprochés à la société Souamaa ne sont contestés.
En tout état de cause, au regard de l'ensemble des pièces versées aux débats et notamment du procès-verbal de constat d'achat du 30 juin 2023 et du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 19 juillet 2023 :
- la vraisemblance de la contrefaçon des marques de l'Union européenne n°1 770 529 et n°002 391 167 et internationale désignant l'Union européenne n°1 237 277 ainsi que des modèles internationaux n°DM/080 203-0013 et n°DM/216468-004 désignant l'Union européenne est caractérisée dès lors que la société Souamaa, d'une part fait usage dans la vie des affaires de signes identiques ou similaires aux marques de l'Union européenne ou internationale désignant l'Union européenne dont est titulaire la société TRB pour désigner des produits identiques à ceux pour lesquels les marques sont enregistrées, ce de nature à créer un risque de confusion dans l'esprit du public lorsque les signes sont similaires, et d'autre part utilise les dessins et modèles en cause sans le consentement de la société TRB,
- l'atteinte aux droits d'auteur sur les motifs « Ronde des tortues multicolores » et « Sand Turtles», est établie de par la reprise de l'ensemble des éléments caractéristiques des 'uvres revendiquées.
L'ordonnance dont appel sera confirmée de ces chefs étant ajouté que la saisie-contrefaçon constitue un moyen de preuve qui ne met pas fin aux atteintes caractérisées et que le fait que la société Souamaa ait quitté les lieux qu'elle occupait est parfaitement inopérant.
Sur la concurrence déloyale et le parasitisme
Les intimées invoquent à ce titre une atteinte portée à l'enseigne de la société Lobst ainsi qu'une atteinte portée au réseau de distribution des produits Vilebrequin.
Aux termes de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile « Le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ».
En l'espèce, la société Souamaa reconnait avoir utilisé le signe Vilebrequin pour proposer et commercialiser des produits qui sont des copies quasi-serviles des produits commercialisés par la société Lobst sous l'enseigne «VILEBREQUIN » tel qu'il résulte de son extrait d'immatriculation au Registre du Commerce et des sociétés de Paris versé aux débats, étant rappelé que les sociétés TRB et Lobst ont signé le 8 décembre 1997 un protocole d'accord aux termes duquel la société Lost bénéficie notamment d'une licence exclusive d'enseigne lui donnant le droit de commercialiser au détail les produits Vilebrequin dans des boutiques situées sur le territoire français et les DOM-TOM.
Par ailleurs, en commercialisant des maillots de bains en dehors du réseau de distribution de la société Lobst, la société Souamaa porte atteinte à ce réseau et engage également de ce chef sa responsabilité au titre de la concurrence déloyale, ce qu'elle ne conteste pas.
Les atteintes manifestement illicites portées tant à l'enseigne qu'au réseau de distribution de la société Lobst sont ainsi caractérisées.
L'ordonnance sera également confirmée de ces chefs.
S'agissant du parasitisme, les sociétés intimées soutiennent que « il ne fait aucun doute que la société Souamaa cherche délibérément à profiter de l'image et du succès rencontré par les créations Vilebrequin » en commercialisant toute une gamme de faux produits, à un prix très inférieur à ceux pratiqués dans les boutiques Vilebrequin, dont la plupart reprennent la représentation stylisée de la tortue qui est l'emblème de la marque, le signe de reconnaissance de ses créations et le signe de ralliement de sa clientèle. Elles produisent à ce titre en pièce 38 un courriel du 31 juillet 2023 nullement certifié par le directeur financier de la société TRB comme elles l'indiquent mais signé « [Z] », soit [Z] [I] Chief Financial Officer, comportant un tableau des dépenses communication et marketing exposées en 2021 et 2022 par la société Lobst, la société TRB et les autre filiales pour environ 4 millions d'euros par an. Toutefois, et ainsi que l'a relevé le premier juge, cette seule pièce ne justifie pas avec l'évidence requise en référé la demande faite au titre du parasitisme de sorte que l'ordonnance sera également confirmée en ce qu'elle a dit n'y a pas lieu à référé sur ce chef de demande.
Sur le droit à l'information et les mesures réparatrices
Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile « le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ».
L'article L. 716-4-6 du code de la propriété intellectuelle dispose que 'toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon. (') Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente. (') Elle peut également accorder au demandeur une provision lorsque l'existence de son préjudice n'est pas sérieusement contestable.'
En application de l'article L. 331-1-2 du code de la propriété intellectuelle, si la demande lui est faite, la juridiction saisie en référé d'une procédure civile prévue aux livres Ier, II et III peut ordonner, au besoin sous astreinte, afin de déterminer l'origine et les réseaux de distribution des marchandises et services qui portent prétendument atteinte aux droits du demandeur, la production de tous documents ou informations détenus par le défendeur ou par toute personne qui a été trouvée en possession de telles marchandises ou fournissant de tels services ou a été signalée comme intervenant dans la production, la fabrication ou la distribution de ces marchandises ou la fourniture de ces services.
La production de documents ou d'informations peut être ordonnée s'il n'existe pas d'empêchement légitime.
L'article L. 716-4-9 du code de la propriété intellectuelle, dont les dispositions sont reprises à l'article L. 521-5 du même code pour les dessins et modèles prévoit au bénéfice du demandeur à l'action en contrefaçon un droit d'information en vertu duquel, s'il n'existe pas d'empêchement légitime, la juridiction peut ordonner, au besoin sous astreinte, afin de déterminer l'origine et les réseaux de distribution des produits argués de contrefaçon qui portent atteinte aux droits du demandeur, la production de tous documents ou informations détenus par le défendeur ou par toute personne qui a été trouvée en possession de produits argués de contrefaçon ou qui fournit des services utilisés dans de prétendues activités de contrefaçon ou encore qui a été signalée comme intervenant dans la production, la fabrication ou la distribution de ces produits ou la fourniture de ces services.
En l'espèce, pour s'opposer à la demande de communication de pièces, la société Souamaa fait valoir que « le marché de la contrefaçon, à l'instar de toute filière clandestine, est un marché opaque dans lequel les noms, la traçabilité, les factures et autres pratiques commerciales usuelles n'ont pas leur place » (sic ) et que dès lors, il convient de constater son impossibilité de communiquer les informations sollicitées, la mise en vente au sein de la boutique des produits incriminés étant par ailleurs récente et le chiffre d'affaires ne pouvant en tout état de cause être communiqué sur la période sollicitée, à savoir 5 ans.
Or, la société Souamaa ne conteste pas les actes de contrefaçon qui lui sont reprochés. Elle produit en pièce n° 2 un bilan comptable dans lequel apparait une ligne « fournisseurs et comptes rattachés». De plus, si aucune facture de vente ou d'achat ni bon de livraison se trouvaient sur place lors des opérations de saisie-contrefaçon du 19 juillet 2023, la personne présente a indiqué au commissaire de justice instrumentaire qu'elle allait demander au gérant de lui remettre les document visés dans l'ordonnance, ce qui n'a pas été fait.
En conséquence, la société Souamaa ne justifie d'aucun empêchement légitime à communiquer les informations sollicitées par les intimées et l'ordonnance sera confirmée en ce qu'elle a fait droit à la demande.
S'agissant des demandes de provisions, l'appelante conclut à l'infirmation de l'ordonnance considérant que les demandes sont disproportionnées, sauf à proposer à titre subsidiaire la somme provisionnelle de 1 000 euros maximum à titre de dommages intérêts en compensation du préjudice moral invoqué.
Les sociétés intimées sollicitent quant à elles la confirmation de l'ordonnance sur les montants qui leur ont été alloués à titre de dommages intérêts provisionnels sauf s'agissant de leurs demande de réparation des actes de concurrence déloyale et de parasitisme.
Un total de 24 maillots de bains contrefaisants ont été achetés ou saisis par le commissaire de justice instrumentaire lors des opérations de constat du 30 juin 2023 ou de saisie-contrefaçon du 19 juillet 2023. Ces produits sont vendus 40 euros pièce. La société Souamaa produit un bilan comptable pour l'année 2002 qui affiche un résultat comptable négatif de 1002 euros. Cet élément n'est cependant pas certifié.
En considération de ces éléments pris distinctement, le premier juge a à juste titre condamné la société Souamaa à indemniser de manière provisionnelle les préjudices économique de la société TRB, s'agissant de la contrefaçon des marques à hauteur de la somme de 960 euros ( soit 24 pièces x 40 euros) et s'agissant de la contrefaçon des droits d'auteur et des droits sur les modèles internationaux, à hauteur de la somme de 1 000 euros, ces sommes n'apparaissant pas disproportionnées aux faits de l'espèce. L'ordonnance sera donc confirmée de ces chefs.
En outre, la société TRB a subi un préjudice moral non sérieusement contestable de par la banalisation des marques, des motifs « Rondes des tortues multicolores » et « Sand turtles » et des dessins et modèles internationaux dont elle est titulaire de par la vente de produits de moindre qualité, dans des conditions éloignées des codes et positionnement des boutiques à l'enseigne Vilebrequin.
C'est donc également à juste titre que le premier juste a condamné la société Souamaa à réparer ce préjudice moral à hauteur de la somme totale de 15 000 euros (soit 5 000 x 3) auquel s'ajoute un préjudice non sérieusement contestable d'atteinte à l'image de la société TRB justement indemnisé à hauteur de la somme de 1 000 euros qui n'apparait pas plus disproportionnée aux faits de l'espèce.
L'ordonnance sera également confirmée de ces chefs.
S'agissant du préjudice résultant des actes de concurrence déloyale commis à l'encontre de la société Lobst, cette dernière justifie exploiter 18 boutiques à l'enseigne Vilebrequin réparties sur le territoire français pour commercialiser des maillots de bain. Il lui sera alloué à ce titre la somme de 2 000 euros à titre de dommages intérêts provisionnel.
L'atteinte au réseau de distribution des produits Vilebrequin sera également réparée par l'octroi à la sociétés TRB de la somme de 3 000 euros à titre de dommages intérêts provisionnel.
Il sera ajouté en ce sens à l'ordonnance dont appel.
L'ordonnance de référé étant par nature provisoire et les préjudices des sociétés TRB et Lobst étant intégralement réparés à titre provisionnel, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de publication judiciaire. L'ordonnance sera en conséquence infirmée de ce chef.
L'ordonnance sera enfin confirmée en ce qu'elle a prononcé des mesures d'interdiction et de destruction des stocks, qui ne font l'objet d'aucune contestation.
Sur les autres demandes
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer les dispositions de l'ordonnance dont appel relatives aux dépens et aux frais irrépétibles sauf celles concernant de ce chef la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] et en ce que les dépens incluent les frais de constat et de saisie-contrefaçon en violation de l'article 695 du code de procédure civile.
Partie perdante, la société Souamaa supportera en outre les dépens d'appel lesquels ne comprennent ni les frais afférents au procès-verbal de constat d'achat du 30 juin 2023 et au procès-verbal de saisie-contrefaçon dressés le 19 juillet 2023 qui seront inclus dans les frais irrépétibles.
Enfin les sociétés intimées ont dû engager des frais non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser en totalité à leur charge. Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS
Constate le désistement des sociétés TRB International et Lobst à l'égard de la société La Prévoyance Foncière [Localité 6].
Dit le désistements parfait.
Constate l'extinction de l'instance en ce qu'elle oppose les sociétés TRB International et Lobst et la société La Prévoyance Foncière [Localité 6] et le dessaisissement de la cour de ce chef.
Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres frais et dépens de l'instance éteinte.
Dit que l'instance se poursuit entre les sociétés TRB International et Lobst d'une part, et la société Souamaa, d'autre part.
Confirme l'ordonnance dont appel en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes des sociétés TRB International et Lobst fondées sur la concurrence déloyale, en ce qu'elle est entrée en voie de condamnation à l'égard de la société la Prévoyance Foncière [Localité 6], en ce qu'elle a fait droit à la demande de publication judiciaire et en ce qu'elle a inclus les frais de constat et de saisie-contrefaçon dans les dépens.
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
Condamne la société Souamaa à verser à la société TRB International la somme provisionnelle de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi des faits de concurrence déloyale commis à son encontre.
Condamne la société Souamaa à verser à la société Lobst la somme provisionnelle de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi des faits de concurrence déloyale commis à son encontre.
Rejette la demande de publication judiciaire.
Condamne la société Souamaa à verser la somme de 5 000 euros à chacune des sociétés TRB International et Lobst en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société Souamaa aux dépens d'appel.