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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-11 op, 7 mars 2025, n° 22/03437

AIX-EN-PROVENCE

Ordonnance

Autre

CA Aix-en-Provence n° 22/03437

7 mars 2025

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-11 OP

ORDONNANCE SUR CONTESTATION

D'HONORAIRES D'AVOCATS

DU 07 MARS 2025

N°2025/ 033

Rôle N° RG 22/03437 - N° Portalis DBVB-V-B7G-BI74C

[C] [S]

C/

[O] [W]

Copie exécutoire délivrée

le : 07 mars 2025

à :

Me Agnès STALLA

Décision déférée au Premier Président de la Cour d'Appel:

Décision rendue le 01 Février 2022 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de [Localité 3].

DEMANDEUR

Monsieur [C] [S],

demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Camille VICENTE, avocat au barreau de Marseille, avocat ayant plaidé

DEFENDEUR

Maître [O] [W],

demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Agnès STALLA, avocat au barreau de Marseille, avocat ayant plaidé

*-*-*-*-*

DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ

L'affaire a été débattue le 22 Janvier 2025 en audience publique devant

Monsieur Pierre LAROQUE, Président,

délégué par ordonnance du Premier Président .

Greffier lors des débats : Mme Anne-Marie BLANCO.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Mars 2025.

ORDONNANCE

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Mars 2025

Signée par Monsieur Pierre LAROQUE, Président et Mme Anne-Marie BLANCO, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Au cours du mois de novembre 2020, M. [C] [S] a confié la défense de ses intérêts à Me [O] [W] dans le cadre d'une procédure devant le juge aux affaires familiales près le tribunal judiciaire de Marseille.

Aucune convention d'honoraires n'a été signée.

Dans le cadre des diligences effectuées par Me [W], M. [S] et la société CHROMA, dont il était le dirigeant et l'associé unique, ont acquitté des honoraires pour un montant global de 10 080 € TTC jusqu'à ce que M. [S] informe Me [W], par un courriel du 16 mai 2021, qu'il mettait fin à son mandat en lui indiquant qu'il avait apprécié la qualité de son travail mais que le montant de ses factures à hauteur de 14 760 € TTC lui paraissait décorrélé de la réalité et de la technicité de la mission qu'il lui avait confiée, sollicitant un avoir de sa part d'un montant de 9 760 € TTC portant ses honoraires à la somme de 5 000 €.

Les opérations de liquidation amiable de la société CHROMA ont été clôturées le 31 juillet 2021.

Par ailleurs, M. [S] et la société CHROMA ont saisi M. le Bâtonnier de l'ordre des Avocats au Barreau de Marseille d'une contestation des honoraires facturés par Me [W] le 21 juin 2021.

Par une décision du 1er février 2022, M. le Bâtonnier a :

- Fixé à la somme de 7 800 € TTC (sept mille huit cents euros) le montant des honoraires dus par M. [C] [S] à Me [O] [W];

- Constaté que M. [C] [S] a réglé une somme de 7 800 € TTC (sept mille huit cents euros) à titre d'honoraires à Me [O] [W],

- Dit qu'aucun solde n'était dû par M. [C] [S],

- Fixé à la somme de 2 160 € TTC (deux mille cent soixante euros) le montant des honoraires dû par la société CHROMA à Me [O] [W],

- Constaté que la société CHROMA a réglé une somme de 2 160 € TTC (deux mille cent soixante euros) à titre d'honoraires à Me [W],

- Dit qu'aucun solde n'est dû par la société CHROMA.

Par une lettre recommandé du 25 février 2022, M. [S] a saisi le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence d'un recours contre la décision rendue par le M. le Bâtonnier.

Aux termes de ses dernières conclusions, numérotées 3, M. [S] demande à la juridiction de :

In limine litis,

- Juger qu'il a pouvoir et qualité pour agir en son nom personnel ainsi qu'en sa qualité de propriétaire des éléments de l'actif social de la société CHROMA liquidée, en contestation des honoraires de Me [W] pour l'ensemble des sommes facturées incluant celles libellées au nom de la société CHROMA qu'il a dû supporter personnellement ;

- Inviter les parties à saisir la juridiction compétente pour trancher la question préalable du mandat, de la détermination du débiteur des honoraires et de la réalité de la transmission des feuilles de temps et factures litigieuses au fur et à mesure et avant paiement par lui,

- Surseoir à statuer dans l'attente de la décision qui sera rendue par la juridiction compétente pour trancher la question préalable, conformément à l'article 277 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, ensemble les articles 49 et 378 du code de procédure civile;

Sur le fond ;

- Réformer la décision du Bâtonnier de l'ordre des Avocats de [Localité 3] du 1er février 2022 en ce qu'il a fixé le montant des honoraires dus par lui à celui qu'il avait payé, soit 7 800 € TTC et celui des honoraires dus par la société CHROMA à celui qu'elle avait payé, soit 2 160 € TTC ;

- Fixer les honoraires de Me [O] [W] à 3 200 € HT, soit 3 840 € TTC pour les diligences réalisées dans le cadre de la moitié de la mission confiée concernant la procédure devant le juge aux affaires familiales ;

- Condamner Me [O] [W] à lui restituer la somme de 2 160 € TTC (1 200 + 960 €) qu'il a dû supporter en qualité de débiteur final, au titre des factures libellées injustement au nom de la société CHROMA ;

- Condamner Me [O] [W] à lui restituer la somme de 4 080 € TTC sur les 7 920 € TTC déjà versés à titre personnel ;

- Condamner Me [O] [W] à lui payer la somme de 1 500 € au titre de ses frais irrépétibles, outre les entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, il expose que Me [W] est intervenue exclusivement dans le cadre de la procédure introduite par son ex-compagne devant le juge aux affaires familiales et qu'aucun mandat ne lui a été donné par la société CHROMA ; que les sommes objets des paiements effectués par cette dernière ont été portées au débit de son compte courant d'associé puisqu'ils ne se rapportaient pas à l'objet social de la société et qu'après la radiation de celle-ci, il est fondé à agir tant en son nom personnel qu'en qualité de propriétaire des éléments de l'actif social de la société CHROMA liquidée, indiquant que la société CHROMA ne figure pas comme partie dans la décision du bâtonnier.

Il indique que la société CHROMA qui disposait déjà de son propre conseil, le cabinet JURISGLOBAL, dans le cadre de la cession de son droit au bail, ainsi que des conseils prodigués par son expert-comptable, n'avait aucune raison de recourir aux services de Me [W] ; que la contestation d'un mandat donné par la société CHROMA à Me [W] ne peut être tranchée par le premier président de la cour d'appel qui doit donc surseoir à statuer sur la fixation des honoraires dus à Me [W].

Sur le fond, il indique avoir acquitté les honoraires appelés par Me [W] par la remise anticipée de plusieurs chèques, sans véritablement y avoir consenti, sans facturation préalable ni feuilles de temps établies, et que les factures correspondantes ont été établies postérieurement, soit le 5 mai 2021, après qu'il en a demandé la communication, ce qui a été fait par un courriel du même jour.

Il rappelle qu'en l'absence de convention d'honoraires, ceux-ci doivent être fixés en tenant compte de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire et des diligences réalisées par l'avocat et fait valoir à cet égard que sa situation financière était des plus modestes lorsqu'il a recouru aux services de Me [W] ; que l'affaire ne relevait pas d'une difficulté particulière ; que le temps de travail facturé pour la finalisation d'un seul jeu de conclusions, de même que le taux horaire appliqué pour de multiples tâches qui relevaient d'un travail de secrétariat ou le temps d'attente à l'audience du 2 février 2021, ont été largement excessifs ; que notamment la facturation des diligences effectuées au cours de la journée du 23 janvier 2021 est excessive ; qu'un rendez-vous et certaines diligences ont été facturées deux fois ; que des appels téléphoniques passés à sa mère sans son autorisation l'ont été aussi, de même que des temps d'échanges amicaux sans aucun lien avec le dossier. Il précise que Me [W] ne l'a pas assisté pendant l'intégralité de la procédure qui a perduré pendant six mois après son dessaisissement et relève, à titre de comparaison, que Me [Z], le conseil de son ex-compagne, lui a facturé la somme de 1 600 €TTC pour l'intégralité de la procédure.

Il ajoute que Me [W] n'a jamais conseillé la société CHROMA qui disposait déjà de ses propres conseils, soit le cabinet JURISGLOBAL où exerçait sa soeur, ainsi que son expert-comptable, et lui a facturé de fausses diligences en lui expliquant qu'il paierait moins cher à titre personnel ; que les quelques documents de la société CHROMA remis à celle-ci n'avaient pour objet que de permettre de justifier de sa situation financière dans le cadre de la procédure devant le juge aux affaires familiales et que Me [W] ne justifie aucunement des diligences qu'elle prétend avoir accomplies pour la société CHROMA ni de s'être vue remettre des documents à cet effet.

Il objecte enfin que contrairement à ce que soutient Me [W], les honoraires n'ont pas été payés en contrepartie de services rendus puisqu'il n'a pas donné son accord sur le montant des honoraires fixé in fine ; qu'il n'est pas démontré par celle-ci que les prestations correspondantes ont été effectuées avant les paiements ni que ceux-ci ont été effectués au vu d'un décompte détaillé des prestations réalisées.

En défense et aux termes de ses dernières conclusions, numérotées 1, Me [O] [W] demande au premier président de :

In limine litis ;

- Déclarer irrecevable l'appel interjeté par M. [C] [S] en sa qualité de propriétaire unique des éléments de l'actif social de la société CHROMA, liquidée et radiée du RCS ;

- Juger définitive la décision entreprise de M. le Bâtonnier de l'ordre des Avocats du barreau de Marseille du 1er février 2022 en ce qu'elle a fixé les honoraires dus par la société CHROMA à la somme de 2 160 € TTC à titre d'honoraires à Me [O] [W] et constaté que ces sommes avaient été librement réglées par la SASU CHROMA;

- Déclarer irrecevable la demande de remboursement des honoraires réglés par la société CHROMA à Me [W], formée par M. [C] [S] en sa qualité de propriétaire des éléments de l'actif social de la société CHROMA;

Sur le fond ;

A titre pricipal,

- Confirmer la décision de M. le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats du Barreau de Marseille du 1er février 2022, en toutes ses dispositions ;

A titre subsidiaire,

- Infirmer partiellement ladite décision et statuant à nouveau :

* Fixer à hauteur de 10 500 € HT le montant total des honoraires et diligence au taux horaire, dû à Me [O] [W] par M. [C] [S] à titre personnel,

* Condamner M. [C] [S] à lui payer le solde de ceux-ci, soit la somme de 4 000 € HT majorée de la Tva au taux de 20%, avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision de M. le Bâtonnier du 1er février 2022, outre la capitalisation des intérêts dus dans les conditions de l'article 1342 du code civil ;

En tout état de cause,

- Débouter M. [C] [S], agissant en ses différentes qualités, de l'ensemble de ses demandes;

- Condamner M. [C] [S] la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle indique que dès sa saisine, elle avait informé M. [S] des modalités de détermination de ses honoraires et du taux horaire de 200 € HT qu'elle appliquait, lequel était en adéquation avec les capacités financières de celui-ci, qui étaient plus favorables que celles décrites dans la présente procédure, et celles de la société CHROMA.

Au soutien de la fin de non recevoir opposée au recours formé par M. [S], ès-qualités d'associé unique et propriétaire des éléments de l'actif social de la société CHROMA, elle expose que celui-ci est dépourvu de qualité à agir à la place de cette dernière qui était partie au litige en première instance et dont la personnalité morale subsiste, y compris postérieurement à la publication de la clôture des opérations de liquidation, aussi longtemps que ses droits et obligations à caractère social, notamment ceux liés à une procédure en cours, ne sont pas liquidés.

Sur le fond, elle fait valoir que les honoraires déjà acquittés par M. [S] à titre personnel et la société CHROMA l'ont été après services rendus et ne peuvent donc être remis en cause, quand bien même elle a été dessaisie de sa mission avant son terme.

Elle indique qu'elle a communiqué les feuilles des diligences accomplies à M. [S] lors de leurs rendez-vous et qu'elle justifie de celles-ci ainsi que des diligences effectuées concernant la SASU CHROMA, qui ont consisté en des conseils délivrés oralement lors d'une consultation et d'entretiens téléphoniques des 5, 6 et 10 novembre 2020 dans la perspective de la cession du droit au bail du local exploité alors qu'il était en négociation avec plusieurs acquéreurs potentiels, du transfert de l'autorisation d'occupation temporaire de sa terrasse, de la mise en conformité des locaux aux normes d'accessibilité, de l'obtention d'un PGE et de la dissolution de la société. Elle précise que les conseils prodigués ont été complémentaires du travail effectué par Me [M], rédacteur de l'acte de cession du bail. Elle mentionne que ses courriels des 8 et 11 mars 2021 font aussi référence à la SASU CHROMA et corroborent la réalité des diligences effectuées au profit de cette dernière.

Concernant, les diligences effectuées pour le compte de M. [S] à titre personnel, elle indique que celles-ci ont excédé le simple cadre de la procédure devant le juge aux affaires familiales et ont débuté dès avant la signification de l'assignation du 24 décembre 2020 concernant plusieurs difficultés relatives à l'exercice de l'autorité parentale à l'égard des enfants, des violences conjugales antérieures à la séparation, la dissolution du PACS en date du 13 décembre 2019, les difficultés liées à l'indivision de l'appartement familial et au paiement du prêt immobilier en cours, outre le paiement des charges du logement familial.

Elle indique qu'elle lui a procuré conseils et assistance dans la perspective puis dans le cadre de la procédure devant le juge aux affaires familiales à compter du rendez-vous du 5 novembre 2020 alors que son ex-compagne sollicitait une restriction importante de l'exercice de ses droits à l'égard des enfants et détaille les diligences effectuées dans ce cadre en soulignant le caractère chronophage des sollicitations de M. [S] qui ont nécessité quatre rendez-vous au cabinet d'une durée totale de 7h20, plus de nombreux entretiens téléphoniques (au nombre de 43), échanges de SMS (au nombre de 35), ou mails (au nombre de 62), notamment pour la transmission des pièces qui s'est avérée désorganisée et laborieuse, ainsi que des modifications successives des conclusions avant leur finalisation du fait de nouvelles instructions de celui-ci ou de l'envoi tardif de nouvelles pièces, rappelant qu'elle avait pondéré la durée du temps passé sur son dossier en déduisant une partie du temps consacré à celui-ci. Elle ajoute que le dossier de M. [S] comportait des particularités procédurales ainsi qu'une spécificité en ce qui concernait les allégations et prétentions des parties, ayant d'ailleurs amené le juge à ordonner une enquête sociale qu'aucune des parties n'avait sollicitée. Elle soutient cependant que le taux horaire de 200 € HT doit aussi s'appliquer à une prestation qui pourrait ne pas être considérée comme un travail intellectuel, telle que le temps d'attente à l'audience du 2 février 2021 ou les diligences assimilables à du travail de secrétariat.

Elle indique que ses factures ont été établies aux dates qu'elles comportent et non pas le 5 mai 2021, correspondant à la date de création du document PDF ; qu'elles suivent l'ordre chronologique de la numérotation du cabinet et ont été remises en format papier à M. [S] au fur et à mesure de leurs émissions; qu'elle a accepté les délais de paiement sollicités par M. [S] en remettant ses chéques à l'encaissement de façon échelonnée. Elle fait valoir que ses diligences sont sans communes mesure avec celles effectuées par Me [Z] qui a oeuvré exclusivement dans la procédure devant le juge aux affaires familiales et dont elle relève qu'il a pu émettre de nouvelles factures après celle du 26 janvier 2021.

Par application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de renvoyer aux écritures respectives de chacune des parties pourv un plus ample exposé des prétentions et moyens soutenus.

L'affaire a été appelée à l'audience du 22 janvier 2025, lors de laquelle les conseils des parties ont développé oralement leurs écritures.

MOTIFS DE LA DECISION :

1/ Sur la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de M. [S], ès qualités de propriétaire unique des éléments de l'actif social de la société CHROMA :

Il est de jurisprudence établie, au visa de l'article L. 237-2 du code de commerce, que la personnalité morale de la société subsiste aussi longtemps que tous les droits et obligations à caractère social n'ont pas été liquidés, sans que la clôture de la liquidation ni la radiation du registre du commerce ne fasse obstacle à cette survie.

En l'espèce, il résulte de la saisine de M. le Bâtonnier le 21 juin 2021 et de la décision rendue par celui-ci le 1er février 2022 que la SASU CHROMA était partie à la contestation des honoraires facturés par Me [W], aux côtés de M. [C] [S].

En vertu de la jurisprudence susvisée et du fait que la contestation des honoraires facturés par Me [W] révèle que les droits et obligations à caractère social de la société CHROMA ne sont pas totalement liquidés, celle-ci conservait sa capacité à ester en justice pour saisir le président de la cour d'appel d'un recours contre la décision rendue par M. le Bâtonnier le 1er février 2022 et ce, en dépit de sa radiation du registre du commerce et des sociétés, à charge pour M. [S] de faire désigner un mandataire ad hoc.

Il s'ensuit que M. [S], ès qualités de propriétaire unique des éléments de l'actif social de la société CHROMA, n'a pas qualité à agir, y compris après la passation des écritures comptables ayant porté le montant des honoraires acquittés par celle-ci au débit de son compte courant, pour former un recours devant le premier président de la cour d'appel concernant la décision rendue le 1er février 2022 en ce qu'elle a fixé le montant des honoraires dus par la société CHROMA à Me [W].

Il convient en conséquence de déclarer irrecevable le recours formé par M [S], agissant en sa qualité de propriétaire unique des éléments de l'actif social de la société CHROMA, à l'encontre de la décision rendue par M. le Bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Marseille le 1er février 2022 ainsi que ses demandes subséquentes relatives à la fixation des honoraires dus par la société CHROMA et notamment sa demande aux fins de sursis à statuer dans l'attente de la décision relative à l'existence d'un mandat donné par la SASU CHROMA à Me [W].

2/ Sur le fond et concernant les honoraires dus par M. [S] à titre personnel :

Aucune convention d'honoraires n'a été conclue entre Me [W] et M [S]. Les honoraires de Me [W] doivent donc être fixés en tenant compte, des usages, de la situation de fortune de sa cliente, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par celui-ci, de sa notoriété et des diligences qu'il a effectuées.

Pour autant, Me [W] soutient que les honoraires acquittés par M. [S] l'ont été après services rendus et ne sont donc pas susceptibles de contestation ou de réduction.

Il est effectivement de jurisprudence établie que le pouvoir modérateur du juge ne se justifie plus lorsque le client a payé les honoraires demandés alors qu'il avait consenti à ceux-ci et était en mesure d'apprécier le travail effectué.

En l'espèce, il sera liminairement constaté que la réponse particulièrement laconique de M. [G] n'est pas probante de ce que les factures produites par Me [W] ont été établies le 5 mai 2021 et non pas à la date mentionnée sur celles-ci, alors qu'il est aussi justifié de la démonstration inverse dans la pièce n°30 de Me [W], concernant la création d'un fichier le 7 mars 2024 relatifs aux statuts de la SASU CHROMA qui ont été établis le 28 octobre 2018.

Il sera donc considéré que les factures établies par Me [W] sont sincères.

Il s'ensuit que le paiement du solde de la facture établie par Me [W] le 6 janvier 2021, qui comporte le détail de ses diligences, par un chèque du 19 janvier 2021 doit s'analyser comme le paiement d'honoraires après services rendus, dont le montant n'est pas susceptible de remise en cause.

Il doit aussi être constaté que les chèques établis par M. [S] ont été émis le lendemain ou le jour même des rendez-vous tenus avec Me [W] qui, de son côté, produit des relevés de temps passé précis et détaillés qui reflètent une actualisation de ceux-ci au fil des diligences effectuées et mentionnent au final le montant des honoraires dus au titre de la période écoulée sur la base d'un taux horaire mentionné à hauteur de 200 € HT.

Il s'ensuit notamment, au vu du SMS adressé par Me [W] le 14 avril 2021, soit postérieurement aux factures établies par celle-ci les 11 et 12 mars 2021, qui est révélateur d'une demande de paiement échelonné formulée par M. [S], et de celui adressé par ce dernier le 20 avril 2021 aux termes duquel il se reconnaît débiteur d'un solde d'honoraires qu'il ne conteste pas, que les trois chèques de 2 000 € chacun émis par M [S] le 28 janvier 2021 sont en adéquation avec le relevé de temps passé au titre de la période écoulée entre les 7 et 23 janvier 2021.

Les paiements effectués par M. [S] peuvent donc s'analyser comme ayant été effectués après services rendus.

Par ailleurs, il ne résulte ni des circonstances de l'espèce, ni des contenus des échanges de mails ou de SMS entre Me [W] et M [S], ni des documents médicaux produits dans le cadre de la procédure devant le juge aux affaires familiales, que celui-ci n'aurait pas été à même de consentir librement aux honoraires facturés par Me [W].

Il sera donc considéré que M. [S] a payé les honoraires de Me [W] en toute connaissance de cause et après services rendus.

Les honoraires ainsi acquittés n'étant pas susceptibles d'être remis en cause, il convient de confirmer la décision rendue par M. le Bâtonnier de l'ordre des Avocats de [Localité 3] le 1er février 2022 en ce qu'il a fixé le montant des honoraires dus par M. [C] [S], à titre personnel, à Me [O] [W] à la somme effectivement acquittée, soit 7 800 € TTC et de débouter celui-ci de l'ensemble de ses demandes subséquentes.

M. [S], qui succombe, sera condamné au paiement des dépens de l'instance.

Il n'apparaît pas équitable de laisser à Me [W] la charge de l'intégralité des frais irrépétibles exposés pour sa défense et il convient en conséquence de condamner M. [S] à lui payer la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement en matière de contestation d'honoraires d'avocat ;

- Déclarons irrecevable le recours formé à l'encontre de la décision rendue par M. le Bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Marseille le 1er février 2022 par M. [C] [S] agissant en sa qualité de propriétaire unique des éléments de l'actif social de la société CHROMA ainsi que ses demandes subséquentes relatives à la fixation des honoraires dus par la société CHROMA ;

- Déclarons irrecevable la demande de M. [C] [S], agissant en sa qualité de propriétaire unique des éléments de l'actif social de la société CHROMA, aux fins de sursis à statuer dans l'attente de la décision relative à l'existence d'un mandat donné par la SASU CHROMA à Me [W];

- Confirmons la décision rendue par M. le Bâtonnier de l'ordre des Avocats de [Localité 3] le 1er février 2022 ayant fixé le montant des honoraires dus par M. [C] [S], à titre personnel, à Me [O] [W] à la somme effectivement acquittée, soit 7 800 € TTC ;

- Déboutons M. [C] [S], agissant à titre personnel, de l'ensemble de ses demandes subséquentes ;

- Condamnons M. [C] [S] au paiement des dépens de l'instance ;

- Condamnons M. [C] [S] à payer à Me [O] [W] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

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