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Décisions

CA Bordeaux, 3e ch. famille, 11 mars 2025, n° 22/00572

BORDEAUX

Arrêt

Autre

CA Bordeaux n° 22/00572

11 mars 2025

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

3ème CHAMBRE FAMILLE

--------------------------

ARRÊT DU : 11 MARS 2025

N° RG 22/00572 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MQ53

[L] [C]

c/

[X] [P] [Z]

Nature de la décision : AU FOND

28A

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 décembre 2021 par le Juge aux affaires familiales de BORDEAUX (RG n° 21/03850) suivant déclaration d'appel du 03 février 2022

APPELANT :

[L] [C]

né le [Date naissance 6] 1982 à [Localité 12]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 7] - [Localité 11]

Représenté par Me Fabrice PASTOR-BRUNET de la SELARL PASTOR-BRUNET FABRICE, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

[X] [P] [Z]

agissant en son nom personnel et en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs :

- [A] [Y] [G] [C] née le [Date naissance 4]/2013 à [Localité 10] (Gironde)

- [U] [E] [F] [C] né le [Date naissance 3]/2016 à [Localité 10] (Gironde)

né le [Date naissance 2] 1983 à [Localité 13]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1] - [Localité 13]

Représenté par Me Camille BAILLOT, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 janvier 2025 en audience publique, devant la Cour composée de :

Présidente : Hélène MORNET

Conseillère : Danièle PUYDEBAT

Conseillère : Isabelle DELAQUYS

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Véronique DUPHIL

Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE

Mme [X] [Z] et M. [L] [C] ont conclu un pacte civil de solidarité le [Date mariage 8] 2011 qu'ils ont fait enregistrer au tribunal d'instance de Vanves le 20 juillet 2011.

Aucune clause particulière n'a été conclue à cette occasion entre les partenaires s'agissant de leurs biens, ni aucune convention modificative passée par la suite. Le pacte est resté soumis au régime légal de la séparation de biens régi par les articles 515-1 et suivants du code civil.

Deux enfants sont issus de cette union :

- [A], née le [Date naissance 4] 2013.

- [U], né le [Date naissance 3] 2016.

Par acte authentique reçu le 29 novembre 2013 par Maître [M] [D], notaire à [Localité 10] (33), les partenaires ont acquis en indivision, à hauteur de 50 % chacun, un bien immeuble situé [Adresse 9] à [Localité 11] (33), pour un prix de 275.000 euros et financé au moyen d'un emprunt immobilier.

Les partenaires ont également souscrit en juin 2016 un emprunt pour acquérir un véhicule Renault Scenic.

Par acte authentique reçu le 10 octobre 2018 par Maître [D], l'immeuble de [Localité 11] a été vendu pour un prix de 380.000 euros. Après le remboursement du solde du crédit immobilier, le boni de la vente s'est élevé à la somme de 127.736,88 euros.

Le pacte civil de solidarité a été rompu le 6 janvier 2019.

Maître [N], notaire à [Localité 11], a tenté une conciliation des parties en son étude le 15 octobre 2019 et constaté leur désaccord persistant sur la répartition amiable du prix de vente entre elles.

Le 26 février 2021, le conseil de Mme [Z] a fait une proposition du partage concernant :

- le boni de vente du bien immobilier.

- les biens meubles à savoir les deux véhicules des anciens partenaires.

- les comptes bancaires.

M. [C] n'a pas donné suite au courrier officiel du conseil de Mme [Z], ni par l'intermédiaire de son conseil qui a indiqué être sans nouvelles de son client, ni en répondant au courrier recommandé du 12 mars 2021 (qu'il n'a pas retiré).

Par exploit d'huissier du 12 mai 2021, Mme [Z] a dès lors assigné M. [C] auprès du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins pour l'essentiel d'ordonner la liquidation-partage de leurs intérêts patrimoniaux et commettre pour y procéder Maître [H] [N], de constater qu'elle bénéficie d'une créance à l'encontre de M. [C] correspondant à sa participation à l'acquisition du véhicule et de le condamner à lui restituer une somme indûment prélevée sur les livrets A ouverts au nom des enfants communs.

Par jugement réputé contradictoire du 2 décembre 2021, le juge aux affaires familiales saisi a :

- ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision entre les parties de M. [C] et de Mme [Z] ;

- désigné Maître [H] [N], notaire à [Localité 11] aux fins de procéder aux opérations de liquidation et partage de l'indivision,

- renvoyé les parties devant Maître [H] [N], notaire à [Localité 11] pour y procéder et établir l'acte de partage,

- dit que le notaire désigné devra tenir compte pour ses opérations :

* de la créance de Mme [Z] à hauteur de 3.877,17 euros,

* de la somme détenue par M. [C] et à restituer à hauteur de 40.000 euros, sauf à démontrer l'origine personnelle de ces fonds,

- commis le juge du cabinet 9 du tribunal judiciaire de Bordeaux pour en surveiller le déroulement et dresser rapport en cas de difficultés,

- dit que le notaire devra dresser un projet d'acte liquidatif, un procès-verbal de dires et d'éventuels désaccords subsistants des parties,

- dit que le notaire devra, dans le délai d'un an suivant sa désignation, dresser un état liquidatif qui établira les comptes entre indivisaires, la masse partageable, les droits des parties et la composition des lots à répartir,

- dit que dans ce cadre, il pourra constater l'accord des parties,

- dit qu'en cas d'empêchement, le notaire et le juge commis pourront être remplacés par simple ordonnance rendue sur requête,

- débouté en l'état les parties du surplus de leur demandes,

- ordonné l'exécution provisoire de la décision,

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de compte, liquidation et partage et supportés par les parties,

- condamné M. [C] à verser à Mme [Z] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Procédure d'appel :

Par déclaration au greffe du 3 février 2022, M. [C] a formé appel du jugement de première instance en toutes ses dispositions.

Selon dernières conclusions du 23 janvier 2023, il demande à la cour de :

- déclarer irrecevable comme étant nouvelle, la demande de Mme [Z] tendant à faire fixer une créance complémentaire à son bénéfice à hauteur de 66.836,59 euros,

- déclarer irrecevable comme étant nouvelle, la demande de Mme [Z] visant à obtenir la somme de 174.582,22 euros et la remise de la totalité du boni de vente à hauteur de 127.736,88 euros,

- déclarer irrecevable comme étant nouvelle, la demande de Mme [Z] visant à obtenir la condamnation de M. [C] à lui verser la somme de 46.845,34 euros pour parvenir au montant de ses droits,

- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par M. [C],

- réformer la décision du 2 décembre 2021 en ce qu'elle a :

* désigné Maître [H] [N], notaire à [Localité 11] aux fins de procéder aux opérations de liquidation et partage de l'indivision et renvoyé les parties devant ce notaire pour y procéder et établir l'acte de partage,

* dit que le notaire désigné devra tenir compte pour ses opérations :

** de la créance de Mme [Z] à hauteur de 3.877,17 euros,

** de la somme détenue par M. [C] et à restituer à hauteur de 40.000 euros, sauf à démontrer l'origine personnelle de ces fonds,

* condamné M. [C] à verser à Mme [Z] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau,

- juger que Mme [Z] ne détient aucune créance concernant le véhicule Renault Scenic d'un montant de 3.877,17 euros,

- juger que M. [C] n'a pas à restituer la somme de 40.000 euros prise sur les livrets A des enfants communs en accord avec son ex-partenaire, Mme [Z],

- désigner M. le président de la chambre départementale des notaires de la Gironde, afin que ce dernier nomme tel notaire qu'il plaira, pour procéder à la liquidation de l'indivision ayant existé M. [C] et Mme [Z],

- débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions au titre de son appel incident,

- la condamner à lui verser la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Selon dernières conclusions du 7 décembre 2022, Mme [Z], agissant en son nom personnel et es qualité de représentante légale des enfants mineurs [A] et [U], demandent à la cour de :

- déclarer irrecevables car nouvelles, l'ensemble des demandes formulées par M. [C] pour la première fois en cause d'appel,

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

* ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de l'indivision entre les parties de M. [C] et de Mme [Z],

* désigné Maître [H] [N], notaire à [Localité 11] aux fins de procéder aux opérations de liquidation et partage de l'indivision,

* dit que le notaire désigné devra tenir compte pour ses opérations :

** de la créance de Mme [Z] à hauteur de 3.877,17 euros,

** de la somme détenue par M. [C] et à restituer à hauteur de 40.000 euros, sauf à démontrer l'origine personnelle de ces fonds,

* ainsi que pour toutes les dispositions qui suivent sur la surveillance et le déroulement mais aussi l'établissement des opérations liquidatives,

* ainsi que sur la somme allouée à Mme au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- réformer le jugement et y ajoutant :

- juger recevable et bien fondé l'appel incident formé par Mme [Z] à l'encontre du jugement rendu le 2 décembre 2021 en ce qu'il a limité sa créance à la somme de 3.877,17 euros,

- augmenter la créance de Mme [Z] à l'encontre de M. [C] au titre des fonds personnels qu'elle a injectés pour valoriser le bien immobilier indivis et la fixer à la somme de 66.836,59 euros,

- condamner M. [C] à restituer la somme de 40.000 euros qu'il a indument prélevée sur les livrets A ouverts au nom des enfants communs afin que ces sommes puissent être placées dans le strict intérêt de ces derniers,

- valider la proposition de Mme [Z] en vue de la liquidation des intérêts des ex-partenaires,

- juger que le partage des intérêts patrimoniaux des ex-partenaires interviendra de la manière suivante :

- droits de Monsieur : - 46.845,32 euros

- droits de Madame : 174.582,22 euros

- attribuer à Mme [Z] la somme de 174.582,22 euros égale au montant de ses droits dans le cadre des opérations de liquidation des intérêts patrimoniaux des anciens partenaires,

- ordonner la remise de la totalité du boni de vente de 127.736,88 euros séquestré chez Maître [N] à Mme [Z],

- condamner M. [C] à verser à Mme [Z] une somme de 46.845,34 euros pour parvenir au montant de ses droits.

En tout état de cause,

- débouter M. [C] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [C] à verser à Mme [Z] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Pour un plus ample exposé des moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 janvier 2025.

L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 21 janvier 2025 et mise en délibéré au 4 mars 2025, prorogé au 11 mars 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour une meilleure compréhension du litige, la cour entend rappeler au préalable les dispositions légales régissant le fonctionnement puis la liquidation d'un pacte civil de solidarité (PACS).

L'article 515- 4 du Code civil dispose que "Les partenaires liés par un pacte civil de solidarité s'engagent à une vie commune, ainsi qu'à une aide matérielle et une assistance réciproques. Si les partenaires n'en disposent autrement, l'aide matérielle est proportionnelle à leurs facultés respectives."

De jurisprudence constante, aucune disposition légale ne réglant la contribution de concubins aux charges de la vie commune, chacun d'eux doit en l'absence de volonté exprimée à cet égard supporter les dépenses de la vie courante qu'il a exposées.

Aux termes de l'article 515- 5 du Code civil : «Sauf dispositions contraires de la convention visée au troisième alinéa de l'article 515-3, chacun des partenaires conserve l'administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens personnels. Chacun d'eux reste seul tenu des dettes personnelles nées avant ou pendant le pacte, hors le cas du dernier alinéa de l'article 515-4.

Chacun des partenaires peut prouver par tous les moyens, tant à l'égard de son partenaire que des tiers, qu'il a la propriété exclusive d'un bien. Les biens sur lesquels aucun des partenaires ne peut justifier d'une propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément, à chacun pour moitié.

Le partenaire qui détient individuellement un bien meuble est réputé, à l'égard des tiers de bonne foi, avoir le pouvoir de faire seul sur ce bien tout acte d'administration, de jouissance ou de disposition.»

En vertu de l'article 515'5-1 du code civil, "Les partenaires peuvent, dans la convention initiale ou dans une convention modificative, choisir de soumettre au régime de l'indivision les biens qu'ils acquièrent, ensemble ou séparément, à compter de l'enregistrement de ces conventions. Ces biens sont alors réputés indivis par moitié, sans recours de l'un des partenaires contre l'autre au titre d'une contribution inégale."

L'article 515- 5-2 du Code civil dispose que demeurent la propriété exclusive de chaque partenaire :

1° Les deniers perçus par chacun des partenaires, à quelque titre que ce soit, postérieurement à la conclusion du pacte et non employés à l'acquisition d'un bien ;

2° Les biens créés et leurs accessoires ;

3° Les biens à caractère personnel ;

4° Les biens ou portions de biens acquis au moyen de deniers appartenant à un partenaire antérieurement à l'enregistrement de la convention initiale ou modificative aux termes de laquelle ce régime a été choisi ;

5° Les biens ou portions de biens acquis au moyen de deniers reçus par donation ou succession ;

6° Les portions de biens acquises à titre de licitation de tout ou partie d'un bien dont l'un des partenaires était propriétaire au sein d'une indivision successorale ou par suite d'une donation.

L'emploi de deniers tels que définis aux 4° et 5° fait l'objet d'une mention dans l'acte d'acquisition. A défaut, le bien est réputé indivis par moitié et ne donne lieu qu'à une créance entre partenaires.

Sont en revanche des biens indivis, ceux :

- acquis volontairement en indivision par les partenaires dans les proportions fixées dans l'acte d'acquisition et à défaut de précision pour moitié chacun,

- les biens dont aucun des partenaires ne peut prouver qu'il a la propriété exclusive lesquels sont réputés appartenir pour moitié à chacun.

L'article 515- 7 dernier alinéa du Code civil dispose que :

«Sauf convention contraire, les créances dont les partenaires sont titulaires l'un envers l'autre sont évaluées selon les règles prévues à l'article 1469. Ces créances peuvent être compensées avec les avantages que leur titulaire a pu retirer de la vie commune, notamment en ne contribuant pas à hauteur de ses facultés aux dettes contractées pour les besoins de la vie courante.»

- Sur l'ouverture des opérations de liquidation-partage :

Mme [Z] demande que l'ouverture des opérations de liquidation-partage soit confirmée en relevant que :

- M. [C] a interjeté appel de ce chef de jugement mais sans conclure sur les motifs de son recours dans ses écritures

- qu'en dépit des démarches ainsi accomplies et des propositions amiables faites à M. [C], celui-ci persiste encore à ce jour à s'opposer au partage et à faire état de créances qui n'ont pas lieu d'être, bloquant toute évolution de la situation d'abord par son silence puis par son absence de comparution en première instance et enfin par son appel interjeté le dernier jour du délai.

En réplique, aux termes de ses dernières conclusions, M. [C] ne s'oppose plus à l'ouverture des opérations de liquidation-partage mais entend que le président de la chambre départementale des notaires soit désigné pour qu'il nomme le notaire de son choix, considérant que la notaire désignée, [H] [N] a fait de preuve de partialité lors des réunions de travail.

Sur ce,

Aux termes de l'article 1364 du code civil, si la complexité des opérations le justifie, le tribunal désigne un notaire pour procéder aux opérations de partage et commet un juge pour surveiller ces opérations.

Le notaire est choisi par les copartageants et, à défaut d'accord, par le tribunal.

Le choix du notaire incombant à la juridiction, celle-ci ne peut donc déléguer ce pouvoir. Par suite le président de la chambre départementale des notaires ne peut être désigné avec faculté pour lui de nommer le notaire liquidateur.

En l'espèce, s'agissant du désaccord sur le choix de Me [N], dès lors que M. [C] ne démontre par aucune pièce probante un manque objectif de distance ou un parti pris exprimé par cet officier ministériel lors des rencontres ayant déjà eu lieu avec les indivisaires, dans la mesure où le prix de vente de l'ancien domicile familial a été consigné dans l'étude de celui-ci, il convient dans un souci d'efficacité de confirmer la décision ayant procédé à sa désignation pour opérer les opérations de liquidation et partage des intérêts des parties.

- Sur la créance invoquée par Mme [Z] au titre de l'achat du véhicule Renault Scenic

Mme [Z] indique détenir une créance à l'encontre M. [C] de 3.877,17 euros correspondant à sa part de remboursement du crédit automobile souscrit pour l'achat du véhicule Renault Scenic, appartenant en propre à celui-ci. Elle précise que les mensualités de ce prêt de 36 mois ont été prélevées sur le compte joint mais que le caractère propre à son ex partenaire de ce véhicule est démontré par la carte grise qui est à son seul nom.

M. [C] expose en réplique que les mensualités ont effectivement été prélevées sur le compte joint puisque ce bien devait, à l'origine, être commun aux partenaires. Le couple a par la suite convenu que le véhicule lui appartiendrait en propre et par suite il affirme avoir versé à Mme [Z] la somme de 5.000 euros pour rembourser les mensualités de l'emprunt payées par elle, ce remboursement ayant pu être possible grâce à un don reçu de sa mère. Il considère en conséquence ne rien devoir à son ex partenaire.

Sur ce,

Des dires des parties il se révèle constant que le véhicule en litige revêt la qualité de propre pour M. [C] et il n'est pas contesté par ce dernier que Mme [Z] a remboursé au moins pour partie le crédit contracté pour son achat jusqu'en janvier 2019.

Mais s'il soutient avoir remboursé son ex partenaire, il ne fournit cependant aucun élément probant sur le versement affirmé.

Il indique avoir en réalité effectué sur le compte joint un virement d'une somme de 7.000 euros, dont une partie aurait profité à l'intimée, mais sans qu'on ne sache selon quelles modalités.

Par ailleurs, la seule attestation produite sur ce sujet, établie par sa propre mère, Mme [S], est inopérante car celle-ci affirme avoir donné à son fils la somme de 5.000 euros pour le rachat de la part de Mme [Z] mais parle de l'année 2016, alors que l'emprunt a continué à être payé jusqu'en 2019.

C'est donc à bon droit que l'intimée entend voir confirmer le principe de sa créance.

Il sera juste relevé que le jugement entrepris a considéré dans sa motivation que cette créance était à l'égard de l'indivision tout en disant que c'était une créance entre partenaires. Dans le dispositif, il ne qualifie cependant pas cette créance comme étant due à l'indivision, à bon droit, car faute d'élément démontrant que ce véhicule avait été acquis de manière indivise, cette créance doit être considérée comme étant personnelle à Mme [Z] à l'égard de M. [C].

La décision est donc au final confirmée.

- Sur la somme de 40.000 euros prélevée sur des comptes épargne au nom des enfants

M. [C] ne nie pas avoir prélevé en septembre 2017 la somme de 40.000 euros sur les comptes ouverts au nom des enfants [A] et [U], des livrets A, affirmant cependant que cette somme provenait du compte joint du couple mais avait été placée temporairement sur le compte des mineurs pour la faire fructifier, en accord avec Mme [Z].

Il prétend donc qu'une grande partie de cette somme concernait l'épargne du couple et non celle des enfants.

Il affirme que cette somme a permis de le rémunérer pour les nombreux travaux qu'il a effectués et supervisés seul sur le bien indivis, lesquels travaux lui ont apporté une forte plus-value dont a profité Mme [Z] au moment de la vente. Il estime donc pouvoir faire valoir sa qualité de créancier pour une somme de 40.000 euros sur le fondement de l'article 815-12 du code civil qui dispose que "l'indivisaire qui gère un ou plusieurs biens indivis est redevable des produits nets de sa gestion. Il a droit à la rémunération de son activité dans les conditions fixées à l'amiable ou, à défaut, par décision de justice."

Il soutient par ailleurs qu'il pouvait prélever cette somme sans même demander l'avis à l'autre parent conformément à l'article 382 du code civil selon lequel l'administration légale appartient aux parents. Si l'autorité parentale est exercée en commun par les deux parents, chacun d'entre eux est administrateur légal.

Mme [Z] oppose l'irrecevabilité des demandes formulées par M. [C] comme étant nouvelles en cause d'appel en faisant valoir que :

- s'il peut interjeter appel de la décision réputée contradictoire puisqu'il n'avait pas constitué avocat, il ne peut pour autant pas formuler de prétentions devant la cour

- la jurisprudence considère comme nouvelle donc irrecevable une prétention formulée par l'appelant à l'encontre de parties contre lesquelles il n'avait pas conclu en première instance ou une prétention formulée par l'appelant dès lors qu'il n'avait pas comparu en première instance.

Sur le fond elle expose que les fonds détenus sur les livrets A par chacun des enfants provenaient à l'origine de la succession de son père, qui souhaitait la transmettre à ses petits enfants et que M. [C] les a indûment prélevés sur ces comptes épargne au moment de leur séparation, alors même que :

- ce prélèvement viole l'intérêt des enfants et l'article 385 du code civil selon lequel l'administrateur légal est tenu d'apporter dans la gestion des biens du mineur des soins prudents, diligents et avisés, dans le seul intérêt du mineur

- M. [C] n'a aucune créance à faire valoir à l'encontre de l'indivision au titre des travaux d'amélioration et d'embellissement du bien indivis, puisqu'elle a aussi participé aux travaux d'amélioration du bien tant par ses apports en industrie (contribution physique aux travaux) que par ses apports financiers excédentaires aux charges de la vie commune (injection de 66.836,59€ de fonds personnels en provenance de la succession de son père)

- cette prétendue créance a été en tout état de cause neutralisée en raison de la compensation avec les avantages tirés de la vie commune

- les frais exposés d'une volonté commune par l'un ou l'autre pour la construction et le financement de l'immeuble ayant constitué le logement de la famille relèvent des dépenses de la vie courante et ne donnent pas lieu à des créances entre partenaires.

Sur ce,

Si l'article 564 du code de procédure civile prévoit qu'une irrecevabilité relevée d'office doit être opposée aux demandes présentées pour la première fois en appel, elle admet une exception lorsqu'il s'agit de répondre à une prétention adverse.

S'agissant de la recevabilité des prétentions de M. [C] formées pour la première fois en cause d'appel, dès lors que celui-ci entend faire valoir une créance au titre de travaux effectués sur le bien indivis pour expliquer le retrait des sommes sur les comptes épargne des enfants, ses demandes sont recevables car elles sont en réponse à la demande de l'intimée relative à la restitution des sommes prélevées.

Sur le fond, le premier juge a à bon droit ordonné que ces sommes soient restituées par M. [C] aux enfants dans le cadre des opérations de partage car dés lors que ces sommes ont été versées sur des comptes au nom des mineurs, ces sommes leur ont immédiatement appartenu.

Il n'y a donc pas lieu de s'attarder sur les motifs de ces prélèvements, et en particulier sur le bien fondé de la demande en rémunération de travaux par M. [C] que celui-ci prétend avoir réalisés au profit de l'indivision. Il suffit de relever que de l'aveu même de l'appelant ces prélèvements ont été effectués au détriment des mineurs pour faire droit à la demande de restitution exprimée par Mme [Z].

La décision sera confirmée sauf à dire qu'elle n'avait pas à ajouter que cette restitution se ferait sauf preuve d'une origine personnelle de ces fonds car par le transfert de fonds sur les comptes épargne des mineurs, s'est opéré un transfert définitif de propriété au profit des mineurs sur lequel les parties ne sauraient revenir.

La décision sera réformée en ce sens.

- Sur la créance de 66.836,59 euros invoquée par Mme [Z] au titre des travaux de rénovation du bien indivis et la fixation des droits des parties

Mme [Z] prétend qu'elle est créancière à hauteur de 66.836,56 euros au titre de sa participation personnelle aux travaux de rénovation du bien indivis acquis à [Localité 11], lesquels ont permis d'apporter une plus value à l'immeuble. Elle affirme qu'il ressort incontestablement des attestations versées aux débats que les travaux d'amélioration sont le fruit des deux partenaires et qu'ils s'inscrivent dans leur participation aux charges communes de l'immeuble. Mais elle soutient également avoir largement contribué au financement de l'immeuble commun et aux charges de la vie courante et ce de façon excédentaire par rapport à M. [C] grâce à des fonds personnels en provenance de la succession de son père décédé le [Date décès 5] 2016. Elle soutient avoir versé sur le compte joint une somme de 164 418 euros entre juillet 2016 et octobre 2018, alors que son partenaire n'a versé que 85.000 euros. La créance réclamée correspond à la différence des deux sommes versées, pondérée toutefois par quelques dépenses restées à charge de l'appelant.

M. [C] oppose in limine litis sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile l'irrecevabilité de la demande de créance complémentaire formulée par Mme [Z] dans ses conclusions en raison de leur nouveauté en cause d'appel.

Sur le fond, il s'y oppose en faisant valoir qu'il n'est pas démontré que cette somme ait été effectivement affectée au bien indivis ni qu'elle correspondait à une sur participation aux dépenses de la vie courante qu'aurait assumée seule Mme [Z].

Sur ce,

Dès lors qu'en matière de liquidation partage les parties sont respectivement demanderesse et défenderesse, toute demande doit être considérée comme une défense à la prétention adverse. Par suite c'est vainement que M. [C] entend opposer à l'intimée une fin de non recevoir à sa demande de créance nouvellement formée en cause d'appel.

Sur le fond,

Les parties se rejoignent pour dire que par leur industrie personnelle, elles ont amélioré le bien, ce qui aurait permis une plus value lors de sa revente cinq ans plus tard.

L'intimée soutient cependant avoir à compter de la perception de l'héritage de son père, soit à l'été 2016, sur contribué pour permettre la valorisation de l'immeuble acquis.

Mais il ressort des pièces produites :

- qu'elle n'a reçu en septembre 2016 que 40 000 euros de l'étude notarié (décompte du notaire pièce 28), qu'elle a manifestement versé sur les comptes épargne des enfants du couple tel que cela ressort des pièces produites relatives à l'ouverture de livrets A au nom des enfants,

- qu'en février 2017, elle a perçu la somme de 133 598 euros de l'étude notarié (relevé de compte personnel pièce 36-2 de l'intimée).

- que si les relevés du compte joint qu'elle produit pour le temps de septembre 2016 à octobre 2018, démontrent qu'elle a alimenté ce compte régulièrement, la lecture des dépenses effectuées durant cette période indique que celles-ci étaient pour l'essentiel constituées d'achats de vêtements, frais de restaurant, voyages, impôts communs, courses alimentaires, paiement de crédits, mais peu d'achats de matériaux ou difficilement individualisés et ce d'autant que Mme [Z] ne verse aucune facture, aucune élément de quelque sorte pour démontrer l'importance des travaux qu'elle aurait financés et qui auraient contribué à la plus value du bien.

En tout état de cause elle ne démontre pas que les frais exposés pour ce bien qui a constitué le logement familial ont dépassé les dépenses de la vie courante. Elle échoue donc à démontrer une sur contribution aux charges de la vie commune pouvant ouvrir droit à créance.

Sa demande est donc rejetée ainsi que celle visant à voir fixer les droits des parties sur la base de cette créance.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a renvoyé les parties devant le notaire pour fixer leurs droits respectifs sur la base des prétentions tranchées par la juridiction.

- Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les dépens seront partagés par moitié, ceux de première instance étant employés en frais de partage tel que l'a décidé le jugement entrepris.

Si celui-ci a justement condamné M. [C] à verser à Mme [Z] une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les parties seront en revanche déboutées de leurs demandes à ce titre en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette les fins de non recevoir opposées par chacune des parties ;

Confirme la décision entreprise sauf en ce qu'elle a dit que la somme détenue par M. [C] sera à restituer à hauteur de 40.000 euros (20.000 euros pour chacun d'eux) sauf à démontrer l'origine personnelle de ces fonds ;

Statuant à nouveau,

Dit que le notaire désigné devra tenir compte pour ses opérations de la somme détenue par M. [C] et à restituer aux enfants à hauteur de 40.000 euros, soit 20.000 euros pour chacun d'eux ;

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Partage par moitié entre les parties les dépens exposés en cause d'appel ;

Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Hélène MORNET, présidente, et par Véronique DUPHIL, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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