CA Lyon, jurid. premier président, 11 mars 2025, n° 23/08217
LYON
Ordonnance
Autre
N° R.G. Cour : N° RG 23/08217 - N° Portalis DBVX-V-B7H-PIUU
COUR D'APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DU 11 Mars 2025
contestations
d'honoraires
DEMANDERESSE :
Mme [N] [L]
[Adresse 1]
[Localité 4]
non comparante (dispense de comparution)
DEFENDEUR :
Me [M] [T]
[Adresse 6]
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparante
Audience de plaidoiries du 12 Novembre 2024
DEBATS : audience publique du 12 Novembre 2024 tenue par Marianne LA MESTA, Conseillère à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 septembre 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée le 11 Mars 2025 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;
signée par Marianne LA MESTA, Conseillère et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
''''
EXPOSE DU LITIGE
Mme [N] [L] a pris attache avec Me [M] [T] afin d'assurer la défense de ses intérêts dans le cadre d'une procédure de divorce.
Une convention a été régularisée entre les parties le 6 mars 2021.
Suivant déclaration enregistrée le 16 août 2023, Me [T] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Saint-Etienne d'une demande en fixation d'honoraires
Celui-ci, par décision du 25 septembre 2023 ordonnant l'exécution provisoire, a notamment :
- fixé à la somme de 3.000 € TTC le montant total des frais et honoraires de Me [M] [T],
- condamné Mme [N] [L] au paiement de la somme de 1.050 € TTC au titre des honoraires restant dus, outre 50 € au titre des frais de taxe et d'exécution de la présente décision,
Par courrier recommandé envoyé le 23 octobre 2023 et reçu le 26 octobre 2023 au greffe, Mme [L] a formé un recours contre cette décision qui lui avait été notifiée par lettre recommandée, dont l'avis de réception a été signé le 5 octobre 2023.
Initialement appelée à l'audience du 20 février 2024, l'affaire a été renvoyée à celle du 11 juin 2024 devant le délégué de la première présidente à la demande de Me [T] qui avait préalablement transmis un courrier pour faire part de son indisponibilité à cette date en raison d'un impératif professionnel lui imposant d'être à [Localité 5] au même moment.
Me [T] n'était ni présente ni représentée à l'audience du 11 juin 2024.
Mme [L], qui a comparu, s'en est remise à ses écritures qu'elle a développées oralement.
L'affaire a été mise en délibéré au 24 septembre 2024.
Après l'audience, le 11 juin 2024 à 11 heures 26, le secrétariat général de la première présidente a transmis au greffe un courriel lui ayant été adressé par Me [T] le 10 juin 2024 à 22 heures 56 auquel était joint un courrier de cette dernière daté du même jour au terme duquel elle sollicite que l'examen du recours de Mme [L], prévu à l'audience du 20 juin 2024, soit reporté car elle se trouve actuellement dans sa famille aux Etats-Unis pour un événement familial qui ne se produit qu'une fois dans l'existence (remise de diplôme). Elle joint une copie de la réservation de ses billets d'avion mentionnant un départ le 30 mai 2024 et un retour le 23 juin 2024. Elle ajoute qu'elle a averti Mme [L] par mail et qu'elle se tient à disposition pour toute autre audience qui sera fixée, sauf à préciser qu'elle est d'ores et déjà indisponible à certaines dates dont elle donne la liste.
Par décision du 24 septembre 2024, le conseiller délégué, après avoir relevé que la recevabilité du recours de Mme [L] n'est ni contestée ni contestable, a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 12 novembre 2024 à 9 heures, afin de donner une ultime possibilité à Me [T] d'être présente ou représentée à l'audience pour lui permettre de s'exprimer sur les honoraires dont elle réclame le paiement et produire, en temps utile, tous justificatifs sur le bien-fondé de sa créance, ce dans le respect du contradictoire .
La décision relève ainsi que faute de pouvoir s'assurer que Me [T] a bien été informée que l'affaire était de nouveau appelée le 11 juin 2024 et non le 20 juin comme elle le mentionne dans son courrier, il ne peut être considéré que cette seconde demande de renvoi est trop tardive.
Dans ses dernières écritures transmises le 7 novembre 2024, Mme [L] sollicite une dispense de comparution, au motif qu'elle s'est déjà déplacée pour deux audiences avec un coût financier important à chaque fois entre le déplacement en train, ainsi que la cantine et les frais de garde de son fils, alors qu'elle n'est qu'à mi-temps et donc à demi-traitement, ainsi qu'il ressort de l'arrêté de temps partiel sur autorisation qu'elle produit.
Elle précise par ailleurs qu'elle n'a pas d'éléments supplémentaires à apporter au débat par rapport à ceux déjà évoqués lors de la dernière audience à laquelle elle s'est présentée.
A cette audience du 11 juin 2024, Mme [L] avait indiqué reprendre les termes de son courrier de recours du 23 octobre 2023, complété par un mémoire reçu le 2 février 2024, dans lesquels elle demandait l'infirmation de la décision du bâtonnier, en ce qu'elle a mis à sa charge le paiement d'un solde d'honoraires à Me [T].
Elle considère en effet que cette somme est exorbitante au regard du niveau d'investissement manifestement insuffisant de Me [T] dans la gestion de son dossier.
Elle estime ainsi qu'elle s'est trouvée confrontée à un manque flagrant de soutien comme d'assistance de la part de cette dernière qui ne l'a pas aidée dans ses démarches, a montré un désintérêt manifeste pour ses problèmes, lui a répondu de manière désinvolte et fait part de son indisponibilité, voire de son agacement lors de leurs échanges téléphoniques, allant même jusqu'à minimiser ses difficultés, alors qu'elle se trouvait dans une situation extrêmement délicate par rapport à son futur ex-époux, qui non seulement exerçait des violences psychologiques à son encontre, mais faisait également subir du chantage et du harcèlement à leurs enfants.
Elle fait encore valoir que si les paroles rassurantes et compatissantes de Me [T] durant son unique entretien avec elle l'ont convaincue de signer la convention d'honoraires, elle n'a bénéficié d'aucun conseil concret, ni d'aucune représentation devant les instances judiciaires malgré le paiement d'une première facture.
Dans ces circonstances, lorsqu'elle a reçu une seconde demande de paiement exigeant une somme supplémentaire de 1.800 €, alors même que Me [T] commençait à peine à s'occuper de son affaire et qu'aucune audience n'avait encore eu lieu, elle est entrée en contact avec un autre avocat qui a repris son dossier. Dès lors, si Me [T] a peut-être rédigé un projet d'assignation, elle n'a pas signé cet acte et l'avocate ne l'a pas assistée lors de la première audience du 9 décembre 2021 devant le juge aux affaires familiales qui a eu lieu en présence de son nouveau conseil.
Me [T], qui a comparu à l'audience du 12 novembre 2024, réclame la confirmation de la décision du bâtonnier.
Elle expose que Mme [L] a signé une convention d'honoraires et qu'elle a accompli des diligences avant que cette dernière ne la dessaisisse au profit d'un autre avocat. Elle a en effet répondu à des interrogations de sa cliente dans un mail du 23 avril 2021 et rédigé un projet d'assignation en divorce qu'elle a envoyé à cette dernière le 24 avril 2021 avant de procéder à des rectifications à sa demande.
Elle précise que Mme [L] n'a jamais réglé la seconde facture d'honoraires pourtant établie conformément aux termes de la convention d'honoraires.
Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux mémoires et conclusions régulièrement déposés ci-dessus visés.
MOTIFS
Par application des dispositions des articles 446-1 du code de procédure civile et 946, ainsi que de l'article 277 du décret du 27 novembre 1991, Mme [L] a été dispensée de comparaître.
Conformément à l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, sauf urgence ou force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat doit conclure par écrit avec son client une convention d'honoraires.
Si la loi précitée du 6 août 2015 a prévu, en modifiant ce texte, l'obligation de soumettre à la signature du client une convention d'honoraires sauf urgence ou force majeure, cette convention ne constitue pas une condition de validité de la demande d'honoraires mais seulement un mode de preuve de l'accord des parties sur les modalités de rémunération de l'avocat.
En l'espèce, la convention d'honoraires régularisée le 6 mars 2021 entre Mme [L] et Me [T] stipule, en son article 2, que :
- Le montant des honoraires ne peut être fixé forfaitairement en raison des incertitudes liées à la nature de la procédure et aux incidents susceptibles d'intervenir,
- Me [T] s'engage à facturer toutes ses diligences au moins une fois par trimestre, si elles existent, au fur et à mesure de leur état d'avancement au taux horaire de 250 € HT (TVA au taux de 20%),
- Toutefois certains actes seront chiffrés forfaitairement :
- les frais d'ouverture de dossier : 375 € HT
- les frais forfaitaires de secrétariat : 125 € HT
- la rédaction de l'assignation initiale : 2.000 € HT
- les audiences : 1.000 € HT.
- Les dépens (frais de procédure en dehors des honoraires d'avocat) seront facturés en sus ainsi que les frais d'huissier,
- Les honoraires précités s'entendent hors taxe (TVA au taux de 20%).
Il convient cependant de relever que cette clause relative aux honoraires n'est pas applicable dans le cas présent du fait de la caducité de la convention à raison du dessaisissement précoce de Me [T] par sa cliente, puisqu'il n'est pas discuté par cette dernière que Mme [L] a rapidement souhaité mettre un terme à leurs relations contractuelles pour se tourner vers un autre conseil, ce plusieurs mois avant la tenue de la première audience devant le juge aux affaires familiales prévue le 27 septembre 2021.
L'avocate produit d'ailleurs elle-même le courrier lui ayant été adressé le 3 mai 2021, soit tout juste 2 mois après la signature de la convention, par Me Houda Abada, avocate au barreau de Saint-Etienne, pour lui indiquer qu'elle a été mandatée par Mme [L] pour lui succéder dans la défense de ses intérêts dans le cadre de la procédure de divorce qui l'oppose à M. [D].
La caducité de la clause d'honoraires précitée, tout comme le constat de ce que la convention ne comporte pas de clause de dessaisissement, n'ont cependant pas pour effet de priver Me [T] de son droit à à la couverture des diligences qu'elle a effectuées avant la fin de son mandat, les honoraires devant alors être fixés en application de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 selon les critères définis par ce texte, à savoir les usages, la situation de fortune du client, les difficultés de l'affaire, les frais exposés par l'avocat, sa notoriété et les diligences accomplies.
A cet égard, il ressort de l'examen des pièces versées aux débats par Me [T] que celle-ci justifie avoir réalisé les prestations suivantes pendant les 2 mois au cours desquels elle a assuré la prise en charge du dossier de Mme [L] :
- un rendez-vous avec cette dernière le 24 février 2021,
- l'ouverture et l'étude du dossier avec les documents d'état-civil fournis par Mme [L],
- l'élaboration d'un projet d'assignation en divorce devant le tribunal judiciaire de Saint-Etienne d'une longueur de 19 pages,
- la demande d'inscription au rôle de cette assignation via le RPVA le 23 avril 2021,
- la lecture du courriel d'observations et des pièces jointes envoyés par Mme [L] le 23 avril 2021 suite à la transmission du projet d'assignation, ainsi que la prise en compte de ces éléments,
- un message électronique adressé à Mme [L] le 26 avril 2021 pour lui demander de la recontacter au plus vite.
Il est à noter que Mme [L] ne conteste pas l'existence des diligences décrites ci-dessus, ses récriminations portant en effet exclusivement sur les carences de Me [T] dans l'exercice de sa mission de son conseil, ainsi que sur son comportement général à son endroit, marqué par une insuffisance manifeste d'écoute et de soutien.
Il doit toutefois être rappelé que dans le cadre limité de leur intervention en matière de fixation d'honoraires d'avocats, le bâtonnier et, sur recours, le premier président (ou son délégué) n'ont pas le pouvoir de statuer, même à titre incident, sur les fautes professionnelles susceptibles d'avoir été commises par l'avocat dans l'exécution de son mandat ou sur les éventuels manquements à ses obligations déontologiques.
Il s'ensuit que les reproches formulés par Mme [L] à l'encontre de Me [T] ne peuvent être examinés dans le cadre de la présente procédure et servir de fondement à une réduction des honoraires dus.
La lecture des documents comptables fournis par Me [T] fait apparaître que Mme [L] lui a déjà réglé une somme globale de 1.950 € pour la couverture des diligences dont la liste a été dressée supra.
En considération du nombre limité des tâches exécutées par Me [T] dans le dossier de Mme [L] en raison de son dessaisissement dans les suites immédiates de l'établissement du projet d'assignation après un seul rendez-vous en cabinet avec sa cliente et sans élément de nature à établir que des échanges nourris par téléphone ou par mail auraient eu lieu dans l'intervalle, mais également du fait que le projet d'assignation a été élaboré sur la base d'un document type dont le contenu n'a été complété que sur quelques pages par Me [T] pour l'adapter à la situation personnelle de sa cliente en fonction de ses déclarations et des pièces transmises, il y a lieu de retenir que le montant déjà versé par Mme [L] à son avocate constitue une juste rétribution du travail réalisé par cette dernière à l'aune des critères énoncés par l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, étant souligné que de son côté, Me [T] n'a pas communiqué de relevé détaillé du temps consacré à chacune des prestations effectuées.
Il en découle que Mme [L] n'est pas redevable d'un solde d'honoraires à Me [T], de sorte qu'il est fait droit à son recours.
Me [T], qui succombe, est condamnée aux dépens de l'instance.
PAR CES MOTIFS
Le délégué de la première présidente, statuant publiquement et par ordonnance contradictoire :
Faisant droit au recours formé par Mme [N] [L] sur la fixation des honoraires de Me [M] [T], et statuant à nouveau comme y ajoutant :
Fixes les honoraires dus Mme [N] [L] par à Me [M] [T] à la somme de 1.950 € TTC,
Dit que compte tenu des sommes déjà versées par Mme [N] [L] à hauteur de 1.950 € TTC, aucun solde d'honoraires n'est dû à Me [M] [T] ,
Condamne Me [M] [T] aux dépens de la présente instance.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE
COUR D'APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DU 11 Mars 2025
contestations
d'honoraires
DEMANDERESSE :
Mme [N] [L]
[Adresse 1]
[Localité 4]
non comparante (dispense de comparution)
DEFENDEUR :
Me [M] [T]
[Adresse 6]
[Adresse 2]
[Localité 3]
comparante
Audience de plaidoiries du 12 Novembre 2024
DEBATS : audience publique du 12 Novembre 2024 tenue par Marianne LA MESTA, Conseillère à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 septembre 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée le 11 Mars 2025 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;
signée par Marianne LA MESTA, Conseillère et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
''''
EXPOSE DU LITIGE
Mme [N] [L] a pris attache avec Me [M] [T] afin d'assurer la défense de ses intérêts dans le cadre d'une procédure de divorce.
Une convention a été régularisée entre les parties le 6 mars 2021.
Suivant déclaration enregistrée le 16 août 2023, Me [T] a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Saint-Etienne d'une demande en fixation d'honoraires
Celui-ci, par décision du 25 septembre 2023 ordonnant l'exécution provisoire, a notamment :
- fixé à la somme de 3.000 € TTC le montant total des frais et honoraires de Me [M] [T],
- condamné Mme [N] [L] au paiement de la somme de 1.050 € TTC au titre des honoraires restant dus, outre 50 € au titre des frais de taxe et d'exécution de la présente décision,
Par courrier recommandé envoyé le 23 octobre 2023 et reçu le 26 octobre 2023 au greffe, Mme [L] a formé un recours contre cette décision qui lui avait été notifiée par lettre recommandée, dont l'avis de réception a été signé le 5 octobre 2023.
Initialement appelée à l'audience du 20 février 2024, l'affaire a été renvoyée à celle du 11 juin 2024 devant le délégué de la première présidente à la demande de Me [T] qui avait préalablement transmis un courrier pour faire part de son indisponibilité à cette date en raison d'un impératif professionnel lui imposant d'être à [Localité 5] au même moment.
Me [T] n'était ni présente ni représentée à l'audience du 11 juin 2024.
Mme [L], qui a comparu, s'en est remise à ses écritures qu'elle a développées oralement.
L'affaire a été mise en délibéré au 24 septembre 2024.
Après l'audience, le 11 juin 2024 à 11 heures 26, le secrétariat général de la première présidente a transmis au greffe un courriel lui ayant été adressé par Me [T] le 10 juin 2024 à 22 heures 56 auquel était joint un courrier de cette dernière daté du même jour au terme duquel elle sollicite que l'examen du recours de Mme [L], prévu à l'audience du 20 juin 2024, soit reporté car elle se trouve actuellement dans sa famille aux Etats-Unis pour un événement familial qui ne se produit qu'une fois dans l'existence (remise de diplôme). Elle joint une copie de la réservation de ses billets d'avion mentionnant un départ le 30 mai 2024 et un retour le 23 juin 2024. Elle ajoute qu'elle a averti Mme [L] par mail et qu'elle se tient à disposition pour toute autre audience qui sera fixée, sauf à préciser qu'elle est d'ores et déjà indisponible à certaines dates dont elle donne la liste.
Par décision du 24 septembre 2024, le conseiller délégué, après avoir relevé que la recevabilité du recours de Mme [L] n'est ni contestée ni contestable, a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 12 novembre 2024 à 9 heures, afin de donner une ultime possibilité à Me [T] d'être présente ou représentée à l'audience pour lui permettre de s'exprimer sur les honoraires dont elle réclame le paiement et produire, en temps utile, tous justificatifs sur le bien-fondé de sa créance, ce dans le respect du contradictoire .
La décision relève ainsi que faute de pouvoir s'assurer que Me [T] a bien été informée que l'affaire était de nouveau appelée le 11 juin 2024 et non le 20 juin comme elle le mentionne dans son courrier, il ne peut être considéré que cette seconde demande de renvoi est trop tardive.
Dans ses dernières écritures transmises le 7 novembre 2024, Mme [L] sollicite une dispense de comparution, au motif qu'elle s'est déjà déplacée pour deux audiences avec un coût financier important à chaque fois entre le déplacement en train, ainsi que la cantine et les frais de garde de son fils, alors qu'elle n'est qu'à mi-temps et donc à demi-traitement, ainsi qu'il ressort de l'arrêté de temps partiel sur autorisation qu'elle produit.
Elle précise par ailleurs qu'elle n'a pas d'éléments supplémentaires à apporter au débat par rapport à ceux déjà évoqués lors de la dernière audience à laquelle elle s'est présentée.
A cette audience du 11 juin 2024, Mme [L] avait indiqué reprendre les termes de son courrier de recours du 23 octobre 2023, complété par un mémoire reçu le 2 février 2024, dans lesquels elle demandait l'infirmation de la décision du bâtonnier, en ce qu'elle a mis à sa charge le paiement d'un solde d'honoraires à Me [T].
Elle considère en effet que cette somme est exorbitante au regard du niveau d'investissement manifestement insuffisant de Me [T] dans la gestion de son dossier.
Elle estime ainsi qu'elle s'est trouvée confrontée à un manque flagrant de soutien comme d'assistance de la part de cette dernière qui ne l'a pas aidée dans ses démarches, a montré un désintérêt manifeste pour ses problèmes, lui a répondu de manière désinvolte et fait part de son indisponibilité, voire de son agacement lors de leurs échanges téléphoniques, allant même jusqu'à minimiser ses difficultés, alors qu'elle se trouvait dans une situation extrêmement délicate par rapport à son futur ex-époux, qui non seulement exerçait des violences psychologiques à son encontre, mais faisait également subir du chantage et du harcèlement à leurs enfants.
Elle fait encore valoir que si les paroles rassurantes et compatissantes de Me [T] durant son unique entretien avec elle l'ont convaincue de signer la convention d'honoraires, elle n'a bénéficié d'aucun conseil concret, ni d'aucune représentation devant les instances judiciaires malgré le paiement d'une première facture.
Dans ces circonstances, lorsqu'elle a reçu une seconde demande de paiement exigeant une somme supplémentaire de 1.800 €, alors même que Me [T] commençait à peine à s'occuper de son affaire et qu'aucune audience n'avait encore eu lieu, elle est entrée en contact avec un autre avocat qui a repris son dossier. Dès lors, si Me [T] a peut-être rédigé un projet d'assignation, elle n'a pas signé cet acte et l'avocate ne l'a pas assistée lors de la première audience du 9 décembre 2021 devant le juge aux affaires familiales qui a eu lieu en présence de son nouveau conseil.
Me [T], qui a comparu à l'audience du 12 novembre 2024, réclame la confirmation de la décision du bâtonnier.
Elle expose que Mme [L] a signé une convention d'honoraires et qu'elle a accompli des diligences avant que cette dernière ne la dessaisisse au profit d'un autre avocat. Elle a en effet répondu à des interrogations de sa cliente dans un mail du 23 avril 2021 et rédigé un projet d'assignation en divorce qu'elle a envoyé à cette dernière le 24 avril 2021 avant de procéder à des rectifications à sa demande.
Elle précise que Mme [L] n'a jamais réglé la seconde facture d'honoraires pourtant établie conformément aux termes de la convention d'honoraires.
Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux mémoires et conclusions régulièrement déposés ci-dessus visés.
MOTIFS
Par application des dispositions des articles 446-1 du code de procédure civile et 946, ainsi que de l'article 277 du décret du 27 novembre 1991, Mme [L] a été dispensée de comparaître.
Conformément à l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, sauf urgence ou force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat doit conclure par écrit avec son client une convention d'honoraires.
Si la loi précitée du 6 août 2015 a prévu, en modifiant ce texte, l'obligation de soumettre à la signature du client une convention d'honoraires sauf urgence ou force majeure, cette convention ne constitue pas une condition de validité de la demande d'honoraires mais seulement un mode de preuve de l'accord des parties sur les modalités de rémunération de l'avocat.
En l'espèce, la convention d'honoraires régularisée le 6 mars 2021 entre Mme [L] et Me [T] stipule, en son article 2, que :
- Le montant des honoraires ne peut être fixé forfaitairement en raison des incertitudes liées à la nature de la procédure et aux incidents susceptibles d'intervenir,
- Me [T] s'engage à facturer toutes ses diligences au moins une fois par trimestre, si elles existent, au fur et à mesure de leur état d'avancement au taux horaire de 250 € HT (TVA au taux de 20%),
- Toutefois certains actes seront chiffrés forfaitairement :
- les frais d'ouverture de dossier : 375 € HT
- les frais forfaitaires de secrétariat : 125 € HT
- la rédaction de l'assignation initiale : 2.000 € HT
- les audiences : 1.000 € HT.
- Les dépens (frais de procédure en dehors des honoraires d'avocat) seront facturés en sus ainsi que les frais d'huissier,
- Les honoraires précités s'entendent hors taxe (TVA au taux de 20%).
Il convient cependant de relever que cette clause relative aux honoraires n'est pas applicable dans le cas présent du fait de la caducité de la convention à raison du dessaisissement précoce de Me [T] par sa cliente, puisqu'il n'est pas discuté par cette dernière que Mme [L] a rapidement souhaité mettre un terme à leurs relations contractuelles pour se tourner vers un autre conseil, ce plusieurs mois avant la tenue de la première audience devant le juge aux affaires familiales prévue le 27 septembre 2021.
L'avocate produit d'ailleurs elle-même le courrier lui ayant été adressé le 3 mai 2021, soit tout juste 2 mois après la signature de la convention, par Me Houda Abada, avocate au barreau de Saint-Etienne, pour lui indiquer qu'elle a été mandatée par Mme [L] pour lui succéder dans la défense de ses intérêts dans le cadre de la procédure de divorce qui l'oppose à M. [D].
La caducité de la clause d'honoraires précitée, tout comme le constat de ce que la convention ne comporte pas de clause de dessaisissement, n'ont cependant pas pour effet de priver Me [T] de son droit à à la couverture des diligences qu'elle a effectuées avant la fin de son mandat, les honoraires devant alors être fixés en application de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 selon les critères définis par ce texte, à savoir les usages, la situation de fortune du client, les difficultés de l'affaire, les frais exposés par l'avocat, sa notoriété et les diligences accomplies.
A cet égard, il ressort de l'examen des pièces versées aux débats par Me [T] que celle-ci justifie avoir réalisé les prestations suivantes pendant les 2 mois au cours desquels elle a assuré la prise en charge du dossier de Mme [L] :
- un rendez-vous avec cette dernière le 24 février 2021,
- l'ouverture et l'étude du dossier avec les documents d'état-civil fournis par Mme [L],
- l'élaboration d'un projet d'assignation en divorce devant le tribunal judiciaire de Saint-Etienne d'une longueur de 19 pages,
- la demande d'inscription au rôle de cette assignation via le RPVA le 23 avril 2021,
- la lecture du courriel d'observations et des pièces jointes envoyés par Mme [L] le 23 avril 2021 suite à la transmission du projet d'assignation, ainsi que la prise en compte de ces éléments,
- un message électronique adressé à Mme [L] le 26 avril 2021 pour lui demander de la recontacter au plus vite.
Il est à noter que Mme [L] ne conteste pas l'existence des diligences décrites ci-dessus, ses récriminations portant en effet exclusivement sur les carences de Me [T] dans l'exercice de sa mission de son conseil, ainsi que sur son comportement général à son endroit, marqué par une insuffisance manifeste d'écoute et de soutien.
Il doit toutefois être rappelé que dans le cadre limité de leur intervention en matière de fixation d'honoraires d'avocats, le bâtonnier et, sur recours, le premier président (ou son délégué) n'ont pas le pouvoir de statuer, même à titre incident, sur les fautes professionnelles susceptibles d'avoir été commises par l'avocat dans l'exécution de son mandat ou sur les éventuels manquements à ses obligations déontologiques.
Il s'ensuit que les reproches formulés par Mme [L] à l'encontre de Me [T] ne peuvent être examinés dans le cadre de la présente procédure et servir de fondement à une réduction des honoraires dus.
La lecture des documents comptables fournis par Me [T] fait apparaître que Mme [L] lui a déjà réglé une somme globale de 1.950 € pour la couverture des diligences dont la liste a été dressée supra.
En considération du nombre limité des tâches exécutées par Me [T] dans le dossier de Mme [L] en raison de son dessaisissement dans les suites immédiates de l'établissement du projet d'assignation après un seul rendez-vous en cabinet avec sa cliente et sans élément de nature à établir que des échanges nourris par téléphone ou par mail auraient eu lieu dans l'intervalle, mais également du fait que le projet d'assignation a été élaboré sur la base d'un document type dont le contenu n'a été complété que sur quelques pages par Me [T] pour l'adapter à la situation personnelle de sa cliente en fonction de ses déclarations et des pièces transmises, il y a lieu de retenir que le montant déjà versé par Mme [L] à son avocate constitue une juste rétribution du travail réalisé par cette dernière à l'aune des critères énoncés par l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, étant souligné que de son côté, Me [T] n'a pas communiqué de relevé détaillé du temps consacré à chacune des prestations effectuées.
Il en découle que Mme [L] n'est pas redevable d'un solde d'honoraires à Me [T], de sorte qu'il est fait droit à son recours.
Me [T], qui succombe, est condamnée aux dépens de l'instance.
PAR CES MOTIFS
Le délégué de la première présidente, statuant publiquement et par ordonnance contradictoire :
Faisant droit au recours formé par Mme [N] [L] sur la fixation des honoraires de Me [M] [T], et statuant à nouveau comme y ajoutant :
Fixes les honoraires dus Mme [N] [L] par à Me [M] [T] à la somme de 1.950 € TTC,
Dit que compte tenu des sommes déjà versées par Mme [N] [L] à hauteur de 1.950 € TTC, aucun solde d'honoraires n'est dû à Me [M] [T] ,
Condamne Me [M] [T] aux dépens de la présente instance.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE