CA Lyon, 1re ch. civ. B, 11 mars 2025, n° 23/06894
LYON
Arrêt
Infirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Gonzalez
Conseillers :
Mme Lemoîne, Mme Lecharny
Avocats :
Me Pinet, Me Lemeunier des Graviers, Me Duchez
EXPOSE DU LITIGE
Le 23 mai 2020, Mme [M] [E] et M. [T] [S] ont acquis un véhicule d'occasion de marque Jeep modèle grand Cherokee, moyennant la somme de 6.400 euros auprès de M. [Z] [I].
Au mois de juillet 2020, après avoir parcouru 4.319 kilomètres, le moteur s'est bloqué, immobilisant définitivement le véhicule.
Par lettre recommandée avec accusé de réception signé le 5 août 2020, M. [S] a dénoncé cette panne auprès du vendeur et a sollicité l'annulation de la vente ainsi que le remboursement de la somme versée.
Une expertise amiable contradictoire du véhicule a ensuite été réalisée les 21 octobre et 21 décembre 2020 par la société Expertises Loire Atlantique, mandatée par l'assureur de protection juridique de Mme [E] et M. [S].
L'expert a rendu son rapport le 10 avril 2021.
M. [I] ayant refusé l'annulation de la vente sur la base de ce rapport d'expertise, Mme [E] et M. [S] ont saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Saint Nazaire, afin de solliciter une expertise judiciaire et il y a été fait droit par ordonnance du 21 décembre 2021, M. [N] [L] a étant désigné pour y procéder.
L'expert a rendu son rapport le 28 mai 2022.
Les parties n'étant pas parvenu à une résolution amiable de leur litige, M. [S] et Mme [E] ont par acte du 27 septembre 2022, fait assigner M. [I] devant le tribunal judiciaire de Villefranche-sur-Saône aux fins d'obtenir la résolution judiciaire de la vente litigieuse, la restitution du prix de vente ainsi que l'indemnisation de leur préjudice.
Par jugement contradictoire du 27 juin 2023, le tribunal judiciaire de Villefranche-sur-Saône a :
- rejeté la demande de Mme [E] et M. [S] de résolution du contrat de vente portant sur le véhicule d'occasion de marque Jeep, modèle grand Cherokee, immatriculé [Immatriculation 5], conclu le 23 mai 2020 avec M. [I],
- débouté en conséquence Mme [E] et M. [S] de leurs demandes indemnitaires formées à ce titre,
- condamné Mme [E] et M. [S] à verser à M. [I] la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [E] et M. [S] aux entiers dépens de l'instance, qui comprendront le coût de l'expertise judiciaire,
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.
Par déclaration du 5 septembre 2023, M. [S] et Mme [E] ont interjeté appel.
* * *
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 4 décembre 2024, M. [S] et Mme [E] demandent à la cour de :
- les dire et juger recevables et bien fondés en leurs présentes écritures,
Par conséquent,
- infirmer purement et simplement le jugement rendu le 27 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Villefranche sur Saône en ce que le tribunal :
- a rejeté leur demande de résolution du contrat de vente portant sur le véhicule de marque Jeep, de modèle grand Cherokee, immatriculé [Immatriculation 5], conclu le 23 mai 2020 avec M. [I],
- les a déboutés en conséquence de leurs demandes visant à s'entendre :
- condamner M. [I] à leur verser la somme de 6.400 euros au titre du prix de vente du véhicule,
- condamner M. [I] à leur verser la somme à parfaire de 802,37 euros, au titre du préjudice matériel,
- dire qu'ils mettront le véhicule à disposition, sous huitaine, à compter du règlement des sommes précitées, à charge pour M. [I] de venir reprendre le véhicule où il sera stationné au jour de la résiliation,
- condamner M. [I] à leur verser la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles,
- condamner M. [I] aux entiers dépens, compris les frais d'expertise,
- a ordonné l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- les a condamnés à verser à M. [I] la somme de 800 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- les a condamnés aux entiers dépens de l'instance, qui comprendront le coût de l'expertise judiciaire.
Statuant de nouveau,
- ordonner la résolution judiciaire de la vente du véhicule d'occasion de marque Jeep, de modèle Cherokee, immatriculé [Immatriculation 5], intervenue le 23 mai 2020 entre les concluants et M. [I],
- condamner M. [I] à leur verser la somme de 6.400 euros au titre du prix de vente du véhicule,
- condamner M. [I] à leur verser la somme à parfaire de 802,37 euros, au titre du préjudice matériel,
- dire qu'ils mettront le véhicule à disposition, sous huitaine, à compter du règlement des sommes précitées, à charge pour M. [I] de venir reprendre le véhicule où il sera stationné au jour de la résiliation,
En tout état de cause,
- débouter purement et simplement M. [I] de ses demandes incidentes, plus amples et contraires,
- condamner M. [I] à leur verser la somme de 8.000 euros titre des frais irrépétibles,
- condamner M. [I] aux entiers dépens, compris les frais d'expertise,
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir.
***
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 19 novembre 2024, M. [I] demande à la cour de :
- dire et juger qu'il est recevable en ses écritures,
A titre principal :
- débouter Mme [E] et M. [S] de leur appel et de l'ensemble de leurs demandes,
En conséquence,
- confirmer le jugement entrepris et y ajoutant,
- condamner Mme [E] et M. [S] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles,
- condamner Mme [E] et M. [S] au paiement de la somme de 432 euros au titre du constat du commissaire de justice,
- condamner Mme [E] et M. [S] au paiement des entiers dépens dont frais d'expertise judiciaire et d'immobilisation du véhicule (gardiennage), remorquage,
A titre subsidiaire :
Si la cour d'appel fait droit à la demande de résolution judiciaire du contrat de vente du 23 mai 2020 pour non-conformité de la chose vendue,
- infirmer le jugement entrepris disant n'y avoir lieu à statuer sur la demande formée à titre reconventionnelle par le concluant,
et statuant à nouveau
- juger la négligence fautive de Mme [E] et de M. [S] pour défaut d'entretien du véhicule ayant causé la casse moteur du véhicule, irréparable,
En conséquence,
- condamner Mme [E] et M. [S] au paiement de la somme de 6.400 euros à titre de dommages intérêts à titre de réparation du préjudice subi du fait de l'avarie moteur rendant irréparable le véhicule et le rendant impropre à la circulation,
- juger n'y avoir lieu à application de l'article 1231-1 du code civil tant à l'égard du concluant qu'à l'égard des consorts [E] et [S],
- condamner Mme [E] et M. [S] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles,
- condamner Mme [E] et M. [S] au paiement de la somme de 432 euros au titre du constat du commissaire de justice,
- condamner Mme [E] et M. [S] au paiement des entiers dépens dont frais d'expertise judiciaire et d'immobilisation du véhicule (gardiennage), frais de remorquage.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 décembre 2024.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'action en garantie des vices cachés
Les consorts [S] [E] soutiennent que :
- selon l'expert, les dommages affectant le véhicule sont antérieurs à la vente (consommation anormale d'huile) ; le tribunal l'a retenu de même que le vice non apparent pour un acheteur néophyte, mais il a cependant jugé que les conditions de la garantie des vices cachés n'était pas établie en faisant une mauvaise appréciation des éléments soumis à son examen et n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations,
- les écritures de M. [I] établissent qu'il connaissait incontestablement ce vice, puisqu'il affirme avoir invité M. [S] à rajouter de l'huile au départ du véhicule pour tenter de se disculper, alors que les niveaux avaient été vérifiés avant le départ de M. [S] pour effectuer 748 km des dires des deux parties,
- il ne peut être soutenu qu'il est d'usage de vérifier le niveau d'huile moteur après avoir seulement parcouru 748 kilomètres, sauf consommation anormale,
- le vendeur lui-même n'a pas pris la précaution de vérifier le niveau d'huile avant utilisation selon les vidéos produites tardivement, l'exploitation des vidéos litigieuses non remises à l'expert ne permettent nullement de s'assurer de ce que « le baromètre de pression d'huile fonctionnait correctement ».
- à défaut d'avoir été dûment informé du vice affectant ledit véhicule, M. [S] en a fait un usage normal.
- il s'agit d'un désordre particulièrement important qui rend le véhicule impropre à l'usage auquel il était destiné dès lors qu'il aboutit à terme à la casse du moteur, ou à tout le moins qui en diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquis, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus alors qu'aucune réparation n'est envisageable, le constructeur ne fournissant plus de moteur ; le rapport du cabinet ELA le confirme,
- il ne peut être dit qu'il appartenait à l'utilisateur de vérifier les niveaux avant chaque utilisation, de faire réviser son véhicule compte tenu du délai important écoulé depuis la dernière révision, et surtout de stopper son moteur à l'apparition du bruit anormal de claquement et il appert que M. [I] s'est bien privé d'indiquer que le véhicule avait été immobilisé pendant deux années, durant la panne de boîte de vitesse,
- avant la panne, aucun témoin lumineux, ou même sonore, ne s'est allumé, ce qui n'est d'ailleurs pas contredit par l'expert.
M. [I] affirme que :
- le véhicule fonctionnait parfaitement avant la vente,
- selon l'expertise, une carence de deux ans et demi est constatée entre la dernière vidange et l'apparition de l'avarie moteur, alors que le constructeur préconise une vidange par an,
- selon les parties, au moment de la vente, le niveau d'huile était correct,
- selon l'expert, il appartenait à M. [S] de vérifier fréquemment les niveaux avant utilisation et 4.319 km ont été parcourus après l'achat, par ailleurs, M. [S] devait stopper immédiatement le véhicule à l'apparition du bruit moteur, ce qui aurait limité considérablement les conséquences de l'avarie moteur,
- l'huile était ancienne et n'a pas fait l'objet d'ajouts,
- lui-même après une panne de la boîte de vitesse automatique et après immobilisation n'a eu qu'un usage de loisirs du véhicule, il a parcouru 4.000 km en plus de deux ans,
- avant la vente, il a longuement échangé avec les acquéreurs à qui il a adressé des vidéos, il a remis tous les éléments relatifs à l'entretien du véhicule, une révision à venir était nécessaire, la niveau d'huile a été vu,
- le niveau insuffisant a nécessairement entraîné l'allumage d'un voyant lumineux et l'expertise a révélé le bon fonctionnement des indicateurs, et la négligence de M. [S], d'où des dommages irrémédiables,
- les conditions de la garantie des vices cachés ne sont pas réunies, la consommation d'huile peut s'expliquer par une usure générale interne du moteur, il avait avisé l'acquéreur d l'absence de vidange,
- la consommation importante d'huile ne constitue pas nécessairement un vice caché.
Sur ce,
L'article 1641 du Code Civil dispose que « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. »
Le tribunal a retenu que ce n'est pas la seule consommation importante d'huile moteur qui a causé l'avarie du moteur mais surtout le manque de diligences des acheteurs dans l'usage normal du véhicule et que ces derniers ne démontrent aucunement qu'ils n'auraient acquis le véhicule s'ils avaient eu connaissance de sa consommation importante d'huile moteur.
Il résulte du rapport que l'expert judiciaire a relevé les désordres suivants :
- la rupture de la bielle du cylindre n°3 a provoqué le bris de la partie inférieure de la jupe du cylindre correspondant,
- la bielle rompue se trouve sur la cylindrée la plus éloignée de l'emplacement de la pompe à huile, confirmant ainsi la baisse de pression d'huile dans le circuit de lubrification, avec pour conséquence la rupture du film d'huile au niveau des coussinets de bielle, puis du grippage de ceux-ci jusqu'à la rupture de la bielle,
Il a estimé que :
- l'avarie rencontrée trouve son origine dans une carence de lubrification de l'ensemble bielle vilebrequin du moteur et cette carence est la résultante d'un niveau d'huile moteur bien en dessous du niveau minimum à la jauge (constaté lors des expertises amiables et contradictoires) conjugué à une dégradation de la qualité de l'huile moteur dans le temps par la perte de ses caractéristiques lubrifiant ; en effet, une carence de deux ans et demi de délai est constatée entre la dernière vidange et l'apparition de l'avarie moteur,
- il a ainsi déterminé que 'par conséquent, nous confirmons qu'une consommation d'huile moteur anormale existait au moment de la vente, sachant qu'aucune fuite d'huile moteur extérieur n'a été constatée lors de l'expertise. Ce phénomène de consommation d'huile moteur peut s'expliquer par une usure générale interne du moteur'.
En réponse aux dires, il a précisé que : « l'expertise judiciaire a mis en évidence que la consommation anormale d'huile moteur était présente au moment de la vente (usure interne du moteur dans le temps et non soudaine) ».
Il a enfin estimé que de par son avarie moteur, le véhicule était impropre à sa destination.
Il découle incontestablement de ces constations d'expert que le vice affectant le moteur est établi puisque l'expert mentionne une consommation anormale d'huile moteur, que l'antériorité du vice à la vente litigieuse est également établie ainsi que l'impropriété à destination du véhicule.
S'agissant de la connaissance que les acquéreurs pouvaient avoir du vice, l'expert a clairement estimé que la consommation anormale d'huile moteur à l'origine de l'avarie n'était pas décelable par un acheteur néophyte au moment de la vente.
Certes, le vendeur prétend qu'il a invité l'acquéreur à rajouter de l'huile au départ du véhicule alors que selon ses dires 'la question de l'huile a été vue avant le départ de M. [S] pour [Localité 7]' et affirme avoir proposé l'ajout d'huile. M. [S] affirme au contraire qu'après un essai sur route, les niveaux ont été vérifiés avant d'effectuer la distance de 748 km, n'était pas contesté par le vendeur que le niveau d'huile était 'acceptable'.
Cependant, M. [I] qui a la charge de la preuve ne justifie cependant par aucun élément avoir avisé l'acquéreur au moment de la vente de la consommation importante d'huile alors qu'il était supposé remettre un véhicule en bon état de fonctionnement. Son affirmation selon laquelle il aurait avisé l'acquéreur du vice affectant le véhicule s'agissant de la consommation anormale d'huile sans offre de preuve intervient manifestement pour les besoins de la cause pour faire échec aux dispositions de l'article 1642 du code civil. De même, il ne démontre pas plus avoir signalé que le véhicule avait été immobilisé pendant deux ans et demi avant la vente pour la réparation de la boîte de vitesse et d'étriers, ni de la nécessité de faire réviser son véhicule, ce qui aurait sans nul doute été de nature à remettre en cause la vente. Il résulte de messages échangés par les parties le jour de la vente que M. [I] a au contraire affirmé que le moteur et la boîte était révisé.
S'agissant de la connaissance par le vendeur du vice affectant le véhicule, elle est certaine puisqu'elle résulte des déclarations mêmes de ce dernier dans le cadre de la présente instance.
Par ailleurs, il ne peut être sérieusement soutenu que l'acquéreur, après le trajet retour, a fait un usage anormal du véhicule ayant provoqué le sinistre.
S'agissant en effet de l'absence de diligences imputées à l'acquéreur dans l'usage normal du véhicule, il ne peut sérieusement être affirmé que ce dernier aurait dû faire vérifier le niveau d'huile en considération d'une consommation anormale, faire réviser son véhicule, et stopper son moteur à l'apparition du bruit anormal de claquement. Il est rappelé qu'il n'est nullement établi que le vendeur ait avisé l'acquéreur de l'anomalie d'huile ou de l'absence d'utilisation du véhicule sur une longue période. Il n'est pas non plus démontré concrètement que le véhicule a émis des signaux (témoin lumineux, signal sonore) avant la panne et que celle-ci ne peut relever d'un événement soudain, alors que le moteur s'est bloqué. Il ne peut donc être reproché au conducteur de ne pas avoir stoppé le véhicule plus tôt en raison d'un bruit de claquement afin d'éviter le sinistre.
Il apparaît enfin indéniable que si l'acquéreur avait été informé du vice affectant le véhicule engendrant une impropriété à destination, il ne l'aurait pas acquis, étant relevé qu'aucune réparation n'était envisageable puisque le constructeur ne fournit plus de moteur.
Les conditions d'application de l'article 1641 du code civil étant réunies, infirmant le jugement déféré, la cour prononce la résolution de la vente du véhicule sur le fondement des vices cachés.
Sur l'obligation de délivrance conforme
Les appelants font valoir que l'anomalie de kilométrage est indiscutable (baisse du kilométrage en un an et demi), que l'indication du kilométrage est donc erronée et que si l'expert émet deux hypothèses, soit l'erreur de saisie informatique et la manipulation, la première semble inconcevable. Ils ajoutent que le kilométrage réellement parcouru est évidemment un des éléments essentiels du véhicule objet de la cession et qu'ils sont également fondés à invoquer le moyen tiré du défaut de délivrance
Le vendeur réplique que l'erreur de kilométrage peut relever d'une mauvaise saisie informatique, et ne rend pas non conforme ce véhicule ancien de 19 ans.
SUR CE,
L'article 1603 du Code Civil dispose que « Il a (le vendeur) deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend. L'article 1604 du Code Civil dispose que :
« La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et possession de l'acheteur.»
En l'espèce, la résolution de la vente sur le fondement de l'article 1641 du code civil étant ordonnée, la demande des appelants fondée sur l'absence de conformité est dès lors sans objet et ne sera pas examinée.
Sur les demande de résolution de la vente et les demandes indemnitaires
Selon l'article 1644 du code civil, 'Dans le cas des articles 1641 et 1643, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix'.
Selon l'article 1645 du même code, 'Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur'.
* la restitution du prix de vente
La résolution de la vente étant prononcée, les acquéreurs qui en font le choix ont droit à la restitution du prix de vente et en l'espèce, les acquéreurs sont ainsi fondés à obtenir la restitution de la somme de 6.400 euros en restitution du prix de vente,
* les frais annexes (remorquage, assurance, trouble de jouissance)
Les acquéreurs ont en outre droit en application de l'article 1645 du code civil au remboursement des frais exposés du fait du vendeur en raison de la connaissance du vice par ce dernier lors de la vente.
Les acquéreurs justifient par leurs productions des frais de remorquage (160 €) et de vaines cotisations d'assurance (342,37 €). Par ailleurs, justifiant de l'acquisition d'un nouveau véhicule le 28 août 2020, ils ont subi un préjudice de jouissance dans l'intervalle qui doit être justement indemnisé à hauteur de 300 €.
En conséquence, leur préjudice supplémentaire s'élève à 802,37 euros et M. [I] devra également leur rembourser ce montant.
Les acquéreurs devront enfin mettre le véhicule à disposition du vendeur après paiement des sommes susmentionnées selon les modalités précisées au dispositif du présent arrêt.
Sur l'appel incident
M. [I] soutient que les appelants doivent être condamnés à lui verser 6.400 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice causé par la casse du moteur sur le fondement de l'article 1240 du code civil, en invoquant :
- le fait ne pas avoir vérifié le niveau d'huile moteur après un premier long trajet de retour au domicile ensuite de la vente,
- le fait d'avoir continué à utiliser le véhicule ensuite pour parcourir 4.319 kms jusqu'à l'avarie sans vérification du niveau d'huile de ce véhicule ancien de 19 ans,
- le fait d'avoir continué à circuler avec le véhicule en dépit des voyants lumineux
fonctionnels qui se sont nécessairement déclenchés indiquant soit une insuffisance d'huile, soit une baisse de pression de l'huile moteur qui auraient dû alerter suffisamment en amont,
- le fait d' avoir encore persisté à conduire le véhicule en dépit du bruit important, qu'il a pris cependant le temps d'enregistrer,
- l'absence de révision qui était à effectuer selon les recommandations constructeurs sur un véhicule que l'acquéreur savait qu'il avait été non révisé depuis 2017.
Les consorts [S] [E] soutiennent qu'ils n'ont commis aucune des fautes alléguées, que le vendeur a faussement indiqué à l'acquéreur que le véhicule avait été révisé, et n'a pas mentionné la consommation anormale d'huile moteur, que la casse mécanique ayant mené à l'immobilisation immédiate du véhicule est survenue soudainement.
SUR CE,
Les désordres affectant le véhicule litigieux et consécutifs à l'avarie survenue en juillet 2020 ont pour origine le vice caché dont ce véhicule était affecté.
Ensuite, il a été vu supra que le vendeur ne procède que par affirmation lorsqu'il prétend que les acquéreurs auraient nécessairement dû être alertés par les signaux internes du véhicule et le bruit de celui-ci et ne pas persister à conduire, qu'il a vainement prétendu avoir avisé l'acquéreur de l'état réel du véhicule et de son historique (longue immobilisation).
En conséquence, l'intimé est mal fondé à se prévaloir du comportement fautif et préjudiciable des acquéreurs et sa demande en paiement de dommages intérêts équivalente au prix de vente du véhicule ne peut qu'être rejetée.
Par ailleurs, le constat d'huissier diligenté à l'initiative du vendeur et qui n'a pas permis à l'intimé de démontrer la pertinence de ses prétentions ne doit pas donner lieu à remboursement.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Compte tenu de l'infirmation du jugement de première instance, M. [I] a la charge des dépens de première instance et d'appel comprenant le coût de l'expertise judiciaire et l'équité commande de le condamner à payer à ses adversaires la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement querellé du 27 juin 2023 dans toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Ordonne la résolution de la vente du véhicule Jeep Cherokee immatriculé le [Immatriculation 6] intervenue le 23 mai 2020 entre les consorts [T] [S] [M] [E] et M. [Z] [I].
Condamne M. [Z] [I] à payer aux consorts [T] [S] [M] [E] :
- la somme de 6.400 euros en restitution du prix de vente,
- la somme de 802,37 euros au titre du préjudice matériel,
Dit que les consorts [T] [S] [M] [E] devront mette le véhicule Jeep Cherokee immatriculé le [Immatriculation 6] à disposition de M. [Z] [I] dans un délai de 8 jours maximum à compter du paiement total des condamnations mises à sa charge ci-dessus à charge pour M. [I] de venir reprendre le véhicule au lieu de son stationnement au jour de la résolution, selon l'indication donnée par les consorts [S] [E].
Déboute M. [Z] [I] de sa demande en paiement de dommages intérêts,
Condamne M. [Z] [I] aux dépens de première instance et d'appel comprenant le coût de l'expertise judiciaire,
Condamne M. [Z] [I] à payer aux consorts [T] [S]-[M] [E] la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.