CA Aix-en-Provence, ch. 1-1, 12 mars 2025, n° 21/00514
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
MMA IARD Assurances Mutuelles (SA)
Défendeur :
Frejus Bateaux (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Toulouse
Conseillers :
Mme Allard, Mme de Bechillon
Avocats :
Me Sirounian, Me Evrard, Me Jourdan, Me Guillot, Me Massad
Exposé des faits et de la procédure
Le 31 juillet 2016, Mme [D] [E] a acquis de M. [Z] [L] et Mme [X] [O] épouse [L] (les époux [L]) un navire dénommé Keliria moyennant le prix de 6000euros.
Lors de la vente, une attestation de visite, établie le 29 juillet 2016 par M. [K] [A], expert maritime près la cour d'appel d'Aix en Provence, concluant au bon état d'entretien du navire, lui a été remise par les vendeurs.
Le 5 août 2016, lors de la première sortie en mer de Mme [E] et son compagnon, alors que ce dernier effectuait une manoeuvre pour remonter l'ancre, le guindeau servant à remonter celle-ci a été arraché du pont avant du navire.
Deux expertises officieuses, réalisées à la demande des assureurs de Mme [E], ont conclu que le sinistre était dû à une vétusté du navire, de sorte que Mme [E] a, suivant actes des 24 et 25 juillet 2018, assigné les époux [L] ainsi que M. [A] et son assureur, la SA Mutuelles du Mans assurances IARD assurances mutuelles (la SA MMA), devant le tribunal de grande instance de Grasse en résolution de la vente et en dommages-intérêts.
La SARL Fréjus Bateaux qui a pris en charge le navire à compter du 6 octobre 2017 après l'avoir sorti de l'eau, est intervenue volontairement à l'instance afin de réclamer le paiement des frais de gardiennage.
Par jugement du 8 décembre 2020, le tribunal a :
- déclaré la société Fréjus Bateaux recevable en son intervention volontaire principale ;
- prononcé la résolution de la vente ;
- ordonné qu'il soit procédé aux restitutions réciproques du prix et du bateau ;
- condamné les époux [L] à rembourser à Mme [E] la somme de 6 000euros correspondant au prix de vente ;
- condamné les époux [L] à retirer le bateau vendu, à leurs frais et en l'état où il se trouve au jour de la reprise, du parc de stationnement de la société Fréjus Bateaux, sous astreinte de 100euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'un mois suivant la signification de la
décision ;
- débouté Mme [E] de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre des époux [L] ;
- débouté Mme [E] de sa demande de condamnation de M. [A] et la SA MMA, in solidum avec les époux [L], à lui payer la somme de 6 000euros correspondant au prix de vente ;
- condamné M. [A] et la SA MMA, in solidum, à payer à Mme [E] les sommes de 19 992,02 euros au titre des frais exposés à la suite de la vente et de son préjudice de jouissance, et 2 188,80 euros au titre des frais de remorquage et de stationnement dont elle s'est effectivement acquittée jusqu'à ce jour ;
- condamné M. [A] et la SA MMA, in solidum, à relever et garantir Mme [E] à hauteur de 80 % des condamnations prononcées à son encontre au profit de la société Fréjus bateaux ;
- débouté M. [A] et la SA MMA de leurs demandes tendant à être relevés et garantis par les époux [L] des condamnations prononcées à leur encontre ;
- débouté les époux [L] de leur demande tendant à être relevés et garantis par M. [A] et son assureur de leur condamnation à restituer le prix de vente à Mme [E] et de leur condamnation sous astreinte à retirer le bateau du parc de stationnement de la société Fréjus bateaux ;
- dit que le surplus des demandes des époux [L], tendant à être relevés et garantis par M. [A] et son assureur, est sans objet ;
- prononcé la résolution judiciaire du contrat de stationnement conclu entre la société Fréjus Bateaux et Mme [E] avec effet au 6 avril 2020 ;
- condamné Mme [E] à payer à la société Fréjus bateaux la somme de 7 176euros au titre des sommes restant dues en application de ce contrat ;
- condamné Mme [E] à payer à la société Fréjus bateaux la somme de 2 184euros au titre des indemnités d'occupation dues pour la période du 6 mai 2020 au 8 décembre 2020 ;
- débouté la société Fréjus bateaux de sa demande tendant à voir Mme [E] condamnée sous astreinte à retirer le bateau de son parc de stationnement ;
- débouté les parties du surplus de leurs demandes de condamnations sous astreinte ;
- condamné les époux [L] d'une part, et M. [A] et la SA MMA, d'autre part, in solidum à payer à Mme [E] une somme de 3 500euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné les époux [L] d'une part, et M. [A] et la SA MMA, d'autre part, in solidum à payer à la société Fréjus bateaux une somme de 3 500euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les époux [L] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté M. [A] et son assureur, la SA MMA, de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné les époux [L] d'une part, et M. [A] et la SA MMA, d'autre part, in solidum aux entiers dépens ;
- ordonné l'exécution provisoire de la décision sur le tout ;
- débouté Mme [E] et la société Fréjus bateaux de leurs demandes respectives tendant à voir assortir les condamnations à paiement prononcées à leur profit d'une astreinte.
Pour statuer ainsi, le tribunal a, en substance, considéré que si le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, il ne peut pas refuser d'examiner un rapport établi unilatéralement à la demande d'une partie dès lors qu'il est régulièrement versé aux débats, soumis à la discussion contradictoire et corroboré par d'autres éléments de preuve, qui peuvent consister en un autre rapport d'expertise non judiciaire, dès lors que celui-ci a lui-même été régulièrement versé aux débats et soumis à la libre discussion des parties.
Se fiant aux deux rapports d'expertise, qui, se corroborant mutuellement, concluent que l'état général d'entretien du navire était médiocre et que l'arrachage du guindeau était directement lié au pourrissement du bois qui n'était plus en état de résister à la traction du guindeau, il a retenu un vice, caché lors de la vente, rendant le navire impropre à son usage en ce qu'il affecte des éléments de sécurité, mettant en cause sa navigabilité et justifiant la résolution de la vente avec remise des parties dans l'état où elles se trouvaient avant la vente.
En revanche, il n'a retenu aucune mauvaise foi des époux [L], profanes et propriétaires du bateau depuis cinq ans, en l'absence de pièce démontrant qu'ils avaient connaissance de l'état de pourrissement de la structure du bateau.
S'agissant de l'expert [A], le tribunal a considéré que la lecture de l'attestation remise lors de la vente démontre qu'il ne s'est pas contenté d'estimer la valeur du bateau dans le cadre d'un contrat d'assurance, puisqu'il s'est également prononcé sur l'état du bateau après l'avoir visité, ce, sans effectuer de vérifications approfondies ni procéder aux investigations et contrôles nécessaires pour attester du bon état d'entretien et de la navigabilité du bateau, alors qu'au regard de la teneur des conclusions des deux experts et en sa qualité de professionnel avisé et normalement diligent, il aurait dû être alerté et, a minima, formuler des réserves.
Sur les préjudices, le tribunal a estimé que la restitution du prix de vente ne constitue pas un préjudice indemnisable ; que Mme [E] justifie d'un préjudice de total de 24 990,02 euros dont M. [A] est responsable au titre d'une perte de chance de 80 % et que ce dernier doit également la garantir des condamnations prononcées à son encontre au titre des frais de remorquage et de stationnement dont elle est redevable envers la société Fréjus bateaux.
Il a, enfin, à la demande de la SARL Fréjus bateaux, prononcé la résolution judiciaire du contrat de stationnement conclu avec Mme [E] et condamné celle-ci à lui payer, outre les loyers stipulés au contrat, une indemnité d'occupation à compter de la résolution du contrat, tout en assortissant la condamnation des époux [L] à retirer le navire du parc de stationnement de la SARL Fréjus bateaux, d'une astreinte provisoire afin d'en garantir l'exécution.
Par acte du 13 janvier 2021, dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, M. [A] et la SA MMA IARD ont relevé appel de cette décision en ce qu'elle les a condamnés in solidum à payer à Mme [E] la somme de 19 992,02 euros au titre des frais exposés la suite de la vente et de son préjudice de jouissance, la somme de 2 188,80 euros au titre des frais de remorquage et de stationnement et à la relever et garantir à hauteur de 80% des condamnations prononcées à son encontre au profit de la société Fréjus bateaux, les a déboutés de leurs demandes tendant à être relevés et garantis des condamnations prononcées à leur encontre par les époux [L], et condamnés in solidum avec les époux [L] à payer à Mme [E] et à la société Fréjus bateaux une somme de 3 500euros chacun au titre des frais irrépétibles, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 18 décembre 2024.
Prétentions des parties
Dans leurs dernières conclusions, régulièrement notifiées le 12 mars 2021, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens, M. [A] et la SA MMA IARD demandent à la cour de :
' infirmer le jugement à tout le moins en ses dispositions les condamnant ;
Statuant à nouveau,
' débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées à leur encontre ;
A titre subsidiaire,
' débouter Mme [E] de ses prétentions excédant la réparation d'une perte de chance de renoncer à faire acquisition du bateau litigieux ou d'en solliciter une diminution du prix, soit une part déterminée du prix d'acquisition de 6 000euros ;
' condamner les époux [L] à les relever et garantir de toutes condamnations prononcées à leur encontre ;
En toute hypothèse,
' débouter la société Fréjus bateaux de ses demandes subsidiaires contre « tout succombant » en ce qu'elles sont dirigées à leur encontre ;
' débouter les époux [L] de l'appel en garantie dirigé à leur encontre ;
' condamner Mme [E] ou tout succombant, à leur régler la somme de 5 000euros par application des dispositions de l'article 700 code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel, distraits au profit de leur avocat.
Dans ses dernières conclusions d'intimée et d'appel incident, régulièrement notifiées le 9 septembre 2021, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, Mme [E] demande à la cour de :
' infirmer le jugement en ce qu'il a condamne M. [A] et la SA MMA, in solidum à lui payer a somme de 19 992,02euros au titre des frais qu'elle a exposés à la suite de la vente et de son préjudice de jouissance et 2 188,80euros au titre des frais de remorquage et de stationnement dont elle s'est effectivement acquittée jusqu'à ce jour et à la relever et garantir à hauteur de 80 % des condamnations prononcées à son encontre au profit de la société Fréjus bateaux ;
' le confirmer pour le surplus de ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
' débouter les époux [L] de leurs demandes ;
' subsidiairement, juger que la société Fréjus bateaux est responsable du pourrissement du bateau lors de sa mise en stockage et la condamner à la relever et garantir de toutes les condamnations qui pourraient être ordonnées à son égard au profit des époux [L] ;
' évaluer la perte de chance à 90 % des préjudices subis ;
' condamner M. [U] et la SA MMA in solidum à lui payer la somme de 64 305,91euros correspondant à 90 % de 71 451,02euros au titre son entier préjudice, comprenant le préjudice de jouissance et tous les frais exposés ;
' dire et juger que toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre seront intégralement relevées et garanties en principal, dommages et intérêts, astreintes, frais et accessoires, par M. [A] et la SA MMA, in solidum ;
Dans tous les cas,
' condamner in solidum les époux [L] à lui payer 5 000euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Dans leurs dernières conclusions d'intimés et d'appel incident, régulièrement notifiées le 14 mars 2022, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, les époux [L] demandent à la cour de :
' infirmer le jugement ;
Statuant à nouveau,
' débouter Mme [E] de l'ensemble de ses demandes ;
' remettre les parties en l'état précédant l'exécution du jugement ;
Subsidiairement,
' condamner Mme [E] à leur payer la somme de 6 000euros correspondant au prix de vente du bateau, la somme de 1200 euros correspondant aux frais de gruttage du bateau en vue de sa démolition et la somme de 1 200 euros correspondant au coût de l'intervention de M. [Y], expert ;
A titre plus subsidiaire,
' juger qu'ils ne sont pas de mauvaise foi ;
' condamner M. [A] à les relever et garantir de toutes condamnations prononcées à leur encontre ;
' se déclarer incompétent pour liquider définitivement l'astreinte provisoire ;
En tout état de cause,
' débouter la SARL Fréjus bateaux de toutes demandes à leur encontre ;
' condamner le ou les succombants, en application des dispositions de l'article 700 code de procédure civile à leur payer 4 000euros ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Dans ses dernières conclusions d'intimée, régulièrement notifiées le 17 décembre 2021, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, la SARL Fréjus bateaux demande à la cour de :
A titre principal,
' confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf à transformer l'astreinte provisoire en astreinte définitive ;
' rejeter comme irrecevables les demandes présentées par Mme [E] pour la première fois devant la cour et tendant à faire juger qu'elle est responsable du pourrissement du bateau et à sa condamnation à la relever et garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ;
A titre reconventionnel,
' transformer l'astreinte provisoire en astreinte définitive de 100euros par jour à l'encontre des époux [L] sur la période du 14 février au 19 mars 2021, date de la reprise effective du bateau ;
Subsidiairement :
' condamner tous succombants, in solidum, à lui payer 7 176 euros au titre du contrat de stationnement du 6 octobre 2017 au 6 octobre 2020 ;
' prononcer la résiliation du contrat de location d'un emplacement pour le stationnement du bateau et condamner tout succombant à lui payer 312euros par mois à titre de dommages-intérêts à titre d'indemnité d'occupation du 6 mai 2020 au 8 décembre 2020 ;
' condamner tout succombant à supporter la charge de l'astreinte provisoire fixée par le tribunal et la transformer en astreinte définitive du même montant du 14 février au 19 mars 2021, date de la reprise effective du bateau ;
Dans tous les cas,
' condamner in solidum tous succombants à lui payer 5 000euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Motifs de la décision
1/ Sur la garantie des vices cachés
1.1 Moyens des parties
Mme [E] fait valoir que le navire est affecté de désordres très importants, mis en exergue par deux expertises, qui sont antérieurs à la vente dès lors que le sinistre est intervenu seulement quelques jours après l'achat et lors de la première sortie en mer et qui le rendent impropre à sa destination ; que les deux rapports d'expertise sont unanimes pour constater un pourrissement du bois de la plage avant sur laquelle était accroché le guindeau, ainsi qu'une corrosion importante de celui-ci ; que compte tenu de leur importance, ces défauts ne pouvaient être ignorés des vendeurs les époux [L], qui ne rapportent aucune preuve pertinente du parfait état du bateau et ne peuvent utilement invoquer une manoeuvre inconsidérée de sa part puisque le guindeau s'est brisé d'emblée en raison de la dégradation avancée du bois et de la corrosion, ce que confirme l'expert mandaté par les époux [L] qui relève que la poutre support du guindeau n'avait pas été refaite ; que des expertises non judiciaires suffisent pour rapporter la preuve d'un vice caché dès lors qu'elles ont été soumises à la libre discussion des parties et se corroborent ; qu'aucune preuve n'établit que les désordres ont pour origine une carence de sa part dans l'entretien du navire, étant rappelé que les deux tests destructifs réalisés le 28 Septembre 2016 et le 25 septembre 2017 ont permis de constater l'état de pourrissement du pont avant ; que la clause de l'acte de vente stipulant que le bateau est vendu en l'état ne constitue pas une clause d'exclusion de la garantie des vices cachés et que la demande tendant à voir remettre « les parties en l'état précédant l'exécution du jugement » ne peut pas aboutir puisque le bateau a, depuis , été détruit à l'initiative des époux [L].
Elle ajoute que les époux [L] connaissaient nécessairement, compte tenu de son ampleur, l'état de pourrissement du navire.
Les époux [L] soutiennent qu'ils ont, avant de vendre, fait refaire toute la partie avant du bateau, qui soutenait le guindeau ; que le professionnel italien qui est intervenu a estimé inutile de refaire le carré arrière et le hard top (équivalent au pare-brise) dont l'ancienneté visible à l''il nu, ne nuisait pas, selon lui, à la solidité ou à la fonction du bateau ; que les photographies témoignant de ces travaux, révèlent que les trois couches de bois de la partie avant du bateau, censée supporter le guindeau, ont été refaites à neuf ; qu'ils justifient avoir fait de nombreuses sorties en mer avec leurs petits enfants et produisent le témoignage de M. [V], navigateur averti, qui atteste avoir effectué sur le bateau un séjour d'une semaine loin des côtes ; qu'en tout état de cause, l'avarie n'est pas dûe à un vice caché antérieur à la vente mais à une manoeuvre de Mme [E] ou de son compagnon, puisqu'une remontée électrique trop rapide et en continu, alors que la chaîne du bateau fait cinquante mètres de long et dispose de couleurs permettant des temps d'arrêts, était susceptible, au regard du poids de l'encre, en cas de remontée violente, d'exercer une force dangereuse sur la structure ; que les expertises produites par Mme [E] au soutien de ses prétentions ne sont pas des expertises judiciaires, ont été réalisées hors leur présence et se contredisent entre elles, de sorte qu'elles ne sont pas suffisantes pour étayer la réalité d'un vice caché et, en tout état de cause, ne retiennent pas une impropriété à destination du navire ; qu'ils ont fait réaliser une nouvelle expertise qui retient que le bateau n'a pas été stocké dans de bonnes conditions, ne relève aucune trace de pourrissement et conclut qu'il était réparable au moment de la première expertise.
Ils ajoutent que Mme [E] a déclaré bien connaître le bateau pour l'avoir visité et l'accepter dans l'état où il se trouve, de sorte que le contrat a exclu toute garantie des vices cachés.
Ils considèrent que la perte de la chose vendue est imputable à Mme [E] et qu'en manquant à son obligation de garder la chose en bon père de famille, elle les prive de la possibilité de se prévaloir des dispositions de l'article 1644 du code civil.
M. [A] fait valoir que les conclusions des deux experts amiables n'apportent aucune garantie de neutralité et d'objectivité, dès lors qu'elles émanent de techniciens mandatés par les propres assureurs de la réclamante ; que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence de celles-ci et que Mme [E] ne produit aucun autre élément extérieur à ces deux rapports.
1.2 Réponse de la cour
En application de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus.
Selon l'article 1643 du même code, le vendeur est tenu des vices cachés quand bien même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.
Il résulte du premier de ces textes que le succès d'une action en garantie des vices cachés suppose de la part du demandeur la preuve d'un défaut antérieur à la vente, caché lors de celle-ci et rendant la chose vendue impropre à l'usage auquel on la destine ou en diminuant significativement l'usage.
Le second autorise la stipulation dans l'acte de vente d'une clause d'exclusion de la garantie des vices cachés.
En l'espèce, par contrat conclu le 31 juillet 2016, Mme [E] a acquis des époux [L] un navire dénommé Keliria, moyennant le prix de 6 000 euros.
L'acte de vente contient une clause stipulant que ' l'acheteur déclare bien connaître le navire pour l'avoir visité et l'accepter dans l'état où il se trouve'.
Pour recevoir application, la clause de non-garantie doit avoir été acceptée par l'acquéreur et révéler clairement son objet. Or, les stipulations suivant lesquelles 'le bien est vendu dans l'état où il se trouve' et 'l'acheteur déclare bien le connaître pour l'avoir visité' n'impliquent pas la non-garantie, par le vendeur, des vices cachés.
En conséquence, le contrat de vente conclu entre Mme [E] et les époux [L] ne contient aucune clause excluant ou limitant la garantie légale par ces deniers des vices cachés.
La preuve du défaut affectant la chose vendue doit être rapportée par l'acquéreur. Elle peut être rapportée par tous moyens.
En l'espèce, aucune expertise judiciaire n'a été réalisée sur le navire litigieux.
Mme [E] fonde ses demandes sur deux rapports d'expertise non judiciaires réalisés, pour l'un par M. [C] [I], désigné par la société Axa, assureur du navire, le second par M. [T] [B] à la demande de la société Groupama, assureur protection juridique de Mme [E].
La première expertise a été réalisée en la présence exclusive du compagnon de Mme [E] et la seconde au contradictoire de Mme [E] et son assureur, ainsi que de M. [A], et de son assureur.
Les époux [L] n'ont pas été convoqués aux opérations. Ils n'ont donc pu être présents lors de celles-ci et faire valoir leurs observations, contrairement à Mme [E] qui se prévaut à leur encontre des conclusions issus de ces deux rapports d'expertise.
Le non-respect du principe de la contradiction au cours de son élaboration ne prive pas un rapport d'expertise de toute portée probatoire dès lors qu'il a été soumis à la libre discussion contradictoire des parties.
Pour autant, l'expertise officieuse, diligentée par un tiers pour le compte de l'une des parties, comme telle non soumise aux règles imposées par le code de procédure civile pour l'exécution des mesures d'instruction exécutées par un technicien désigné par le juge, ne peut, à elle-seule, suffire pour constituer la preuve d'un vice caché. Elle doit impérativement être corroborée par d'autres pièces.
Il appartient donc au juge de rechercher si le rapport d'expertise non judiciaire dont les conclusions sont invoqués au soutien de la demande, est corroboré par d'autres éléments de preuve, ceux-ci pouvant résulter d'autres rapport d'expertise non judiciaires dès lorsque l'ensemble des rapports ainsi soumis à la libre discussion des parties se corroborent mutuellement.
En l'espèce, il résulte du rapport d'expertise établi par M. [I] le 17 mai 2017, que l'avarie du 5 août 2016 est due à l'arrachage du guindeau en raison de la pourriture affectant le support en bois, qui n'était pas en mesure, du fait de ce pourrissement, de résister à une traction et que la corrosion 'très importante' du guindeau a conduit à la destruction du bois par délignification.
Ce rapport, bien que déposé en mai 2017, fait suite à des constatations réalisées sur le navire le 28 septembre 2016, soit moins de deux mois après l'avarie.
S'agissant des circonstances de l'avarie, il reprend les explications du compagnon de Mme [E] qui a expliqué qu'il manoeuvrait le bateau au moment de celle-ci, et plus précisément qu'il tentait de remonter l'ancre qui était restée accrochée aux rochers lorsque le guindeau a été arraché.
Selon cet expert, il est exclu que la verge de l'ancre ait pu être tordue pendant la traction exercée sur le guindeau, le bois n'étant pas, compte tenu de son état, en mesure de supporter une telle traction.
Dans son rapport d'expertise, établi le 9 octobre 2017, à la suite d'un examen du navire le 25 septembre 2017, M. [B] constate également, au regard du trou laissé par le guindeau arraché, le pourrissement du bois constituant le pont du navire. Il indique avoir procédé à un test destructif sur le côté du bateau, qui a confirmé la pourriture du bois. S'agissant de l'avarie du 5 août 2016, il considère que le guindeau s'est arraché du pont en raison du mauvais état du support bois constituant la plage avant du bateau et précise, après avoir examiné les photographies prises par le précédent expert, que le jour de son intervention, le bateau était déjà dans un état de vétusté avancé. Ces photographies, reproduites dans son rapport, montrent en effet l'existence d'un pourrissement du bois.
Sur les circonstances de l'avarie, il reprend également les explications du compagnon de Mme [E] selon lesquelles l'arrachage s'est produit alors qu'il tentait de remonter l'ancre qui était restée accrochée aux rochers.
Il résulte de ces deux rapports, qui se corroborent sur ce point, que l'arrachage du guindeau du navire le 5 août 2016, est dû à un pourrissement du bois du plancher du navire et non à la manoeuvre du compagnon de Mme [E] qui n'en a été que le déclencheur.
M. [I] exclut expressément que cette manoeuvre soit la cause exclusive de l'avarie puisqu'il indique que le bois n'était pas, compte tenu de son état de pourriture, en mesure de supporter la traction exercée.
En conséquence, la manoeuvre a seulement révélé le vice affectant le bateau, à savoir l'état de vétusté avancé de la structure même du bateau.
Comme relevé par le premier juge, le premier expert retient que le pourrissement n'affectait pas seulement l'avant du bateau mais également le côte de la coque.
L'avarie est survenue le 5 août 2016 alors que la vente a eu lieu le 31 juillet 2016, soit quelques jours plus tôt.
La date d'apparition du désordre consécutif au pourrissement du bois du plancher du navire quelques jours après la vente, justifie de retenir un vice préexistant à la vente.
Ce vice n'était pas apparent puisqu'il était dissimulé à la vue de l'acheteur par le revêtement du pont et le gelcoat enrobant la coque et que, au surplus, Mme [E] s'est vue remettre, lors de la vente, une attestation d'un expert inscrit sur la liste dressée près la cour d'appel d'Aix en Provence, faisant état du bon état d'entretien du navire. Au regard de cette attestation, un acheteur profane comme Mme [E] n'était pas en mesure de se rendre compte du pourrissement du bois et, partant, du vice affectant la chose vendue.
Enfin, affectant la structure du bateau avec une incidence sur des éléments de sécurité, un tel vice rend le navire impropre à la navigation et donc, à l'usage auquel il est destiné.
En conséquence, il doit en être conclu que Mme [E] n'aurait pas acquis ce bateau si elle avait su, nonobstant son prix, qu'il était impropre à une navigation sécure et, à tout le moins qu'elle n'en aurait donné qu'un moindre prix si elle avait été informée du vice l'affectant.
Les développements des vendeurs concernant leur ignorance de l'existence de ce vice sont inopérants puisque le vendeur est tenu de garantir les vices quand bien même il ne les aurait pas connus et qu'aucune clause d'exclusion de garantie n'a été stipulée à l'acte de vente.
Selon l'article 1644 du code civil, l'acheteur qui a agi en garantie contre son vendeur, en raison des vices cachés de la chose vendue, dispose à son choix de deux actions, rédhibitoire et estimatoire. Il est libre de choisir entre les options qu'offre l'article 1644.
Si la perte de la chose fait obstacle à la résolution de la vente, en l'espèce, les époux [L] ne démontrent par aucune pièce que le navire était détruit lorsque le premier juge a statué, étant observé que sa décision a été assortie de l'exécution provisoire sur le tout.
En application de l'article 1647 du code civil, si la chose qui avait des vices, a péri par suite de sa mauvaise qualité, la perte est pour le vendeur, qui sera tenu envers l'acheteur à la restitution du prix, et aux autres dédommagements expliqués dans les deux articles précédents, mais la perte arrivée par cas fortuit est pour le compte de l'acheteur.
En conséquence, si la chose a subi une dépréciation par le fait de l'acquéreur alors qu'il en était encore propriétaire, le juge peut décider que seule une partie du prix sera restituée.
En l'espèce, il n'est établi par aucune pièce que la perte du navire, depuis survenue, est due à un manquement fautif de Mme [E]. Certes, M. [I] avait préconisé sa mise hors d'eau qui n'a été réalisée qu'en octobre 2015. Cependant, comme le relève à juste titre le tribunal, le fait qu'il n'était plus en état de naviguer et qu'il n'était pas économiquement réparable n'est pas la conséquence d'une absence d'entretien par Mme [E] entre août 2014 et octobre 2015, mais
la conséquence du vice très grave qui affectait le bateau, déjà rongé par la pourriture avant la vente. M. [I] a d'ailleurs indiqué aux deuxième expert que le navire était déjà 'à mettre à la casse' lors de son premier examen en septembre 2014 compte tenu de sa vétusté et du pourrissement du bois. Enfin, c'est bien la destruction du bois par délignification qui est également à l'origine de la voie d'eau relevée par l'expert [B].
L'expertise réalisée par M. [Y] à la demande des époux [L] depuis le jugement, fait ressortir que le navire était à cette date 'ravagé' et ne pouvait plus qu'être détruit. Cet expert indique que 'son stockage en a fait un navire sûrement pas dans le même état que lors de son acquisition et que nos mandants rachètent ainsi un navire complètement différent'. Il ajoute que la partie du pont avant supportant le guindeau pouvait, à l'époque des faits, être réparée mais que le navire a, entre temps, du fait de ses conditions de stockage, sans couverture, sans entretien et sans mesure de préservation, subi les outrages du temps et des conditions météorologiques.
Cet avis expertal non judiciaire n'a pas été réalisé au contradictoire des parties. Il est à lui seul insuffisant pour remettre en cause les conclusions concordantes des deux experts précités, dès lors qu'il n'est corroboré par aucune autre pièce. Par ailleurs, la précaution de langage employée par l'expert ('sûrement pas dans le même état que lors de son acquisition') ne permet pas de tenir pour acquis et démontré qu'au jour où cet homme de l'art a examiné le navire, son état était complètement différent de ce qu'il était au jour de sa vente.
En conséquence, c'est à raison que le premier juge a prononcé la résolution de la vente et ordonné qu'il soit procédé par les parties aux restitutions découlant de cette résolution, à savoir la somme de 6 000euros à restituer à Mme [E] par les époux [L], à charge pour ceux-ci de retirer à leurs frais le navire de son lieu de stationnement, dans les locaux de la société Fréjus Bateaux.
Ces éléments justifient également de rejeter la demande reconventionnelle des époux [L] devant la cour afin que Mme [E] soit condamnée à leur payer les sommes de 6 000euros correspondant au prix de vente du bateau et la somme de 1200euros correspondant aux frais de gruttage du bateau en vue de sa démolition.
S'agissant des dommages-intérêts sollicités par Mme [E] à l'encontre des vendeurs, l'article 1645 du code civil dispose que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.
En conséquence, si l'ignorance du vice par les vendeurs n'influe pas sur le bien fondé de la demande de résolution de la vente, elle leur permet d'échapper à toute demande de dommages-intérêts.
Il résulte des pièces produites aux débats que les époux [L] ont eux-mêmes acquis le navire en 2011 en Italie. S'ils produisent des factures démontrant qu'ils ont entretenu le moteur, en revanche, ils ne démontrent par aucune pièce probante avoir fait procéder à l'entretien de la coque et du pont. Les photographies qu'ils produisent aux débats sont insuffisantes pour établir la réalité et l'étendue d'une réparation du pont avant. En revanche, M. [I] a relevé l'existence de réparations sommaires dans l'intérieur de l'avant du navire, notamment une cale positionnée sous le pont pour le maintenir et une réparation grossière de la serre bauquière, qui démontrent qu'ils ne pouvaient ignorer sa vétusté générale.
Cependant, il appartient à Mme [E] de démontrer que les époux [L] avaient connaissance du vice justifiant la résolution de la vente et non seulement de la vétusté du navire, s'agissant d'un bateau déjà ancien, vendu au prix, somme toute modeste, de 6 000euros.
Or, sur ce point, Mme [E] ne produit aucune pièce démontrant la mauvaise foi des vendeurs.
Aucun élément ne permet en effet d'affirmer que les réparations grossières évoquées ci dessus ont été effectuées après qu'ils ont eux-mêmes acquis le navire. Par ailleurs, les réparations auxquelles ils indiquent avoir fait procéder en Italie ne concernaient que les couches supérieures du bois de placage d'une partie du pont avant située sur la droite du guindeau.
En l'absence de plus amples investigations, réalisées dans le cadre d'une expertise judiciaire, rien ne permet de considérer que ces réparations était destinées à remédier et dissimuler un pourrissement généralisé du bois, et notamment de la poutre supportant le guindeau ou du massif d'étrave.
Aucune pièce n'est produite pour démontrer que les vendeurs étaient eux mêmes des professionnels de la navigation et ceux-ci démontrent qu'ils ont navigué avec le bateau, y compris en famille dans des conditions démontrant qu'ils n'étaient pas au fait de l'existence d'un pourrissement avancé de la structure susceptible de mettre les passagers en danger.
En considération de ces éléments, Mme [E] doit être déboutée de ses demandes indemnitaires à l'encontre des époux [L] dont la mauvaise foi n'est pas démontrée.
2/ Sur la responsabilité de M. [A]
2.1 Moyens des parties
Mme [E] fait valoir que l'expert-maritime chargé d'évaluer la valeur d'un navire et son état d'entretien et de navigabilité est tenu d'effectuer toutes les vérifications approfondies de l'état du navire, notamment par un essai en mer et qu'à défaut il n'exécute pas avec soin la mission qui lui est confiée et engage sa responsabilité ; que si M. [A] s'était contenté de procéder à une expertise pré-assurance, il aurait mentionné expressément dans son rapport que celle-ci n'avait que pour objectif d'indiquer une valeur vénale assurable du navire comme cela est d'usage et dans cette hypothèse, n'aurait fait aucune constatation quant à l'état du navire, alors que, dans le rapport qu'il a établi, il écrit que 'l'unité en bois a été construite « dans les règles de l'art » et présente « un bon «état d'entretien » et en déduit qu'après ses « investigations, contrôle et conclusions » que le « navire, en état de navigation, est assurable », ce qui est faux ; que les conditions générales, dont se prévaut M. [A], n'entrent pas dans le champ contractuel dès lors qu'elles n'ont pas été connues et acceptées des époux [L] au plus tard au moment de la formation du contrat et que si l'expert n'est responsable que d'une perte de chance pour elle de ne pas acquérir le navire, cette perte de chance s'étend également à tous les préjudices qu'elle subit du fait des vices affectant le navire.
M. [A] et son assureur soutiennent que la mission d'expertise amiable, quel qu'en soit le domaine, relève du régime juridique applicable aux contrats « de contrôle technique », de sorte que l'expert amiable n'est tenu que d'une obligation de moyens, n'engageant sa responsabilité qu'autant que l'examen n'a pas été réalisé conformément aux normes édictées et aux règles de l'art ; que la seule constatation de désordres ou anomalies qui n'auraient pas été mis en évidence ne suffit pas à consacrer une faute ; qu'en l'espèce, sa mission, définie oralement, consistait seulement à déterminer la valeur du bateau en vue de l'assurer, et accessoirement, son état d'entretien et il ne lui a pas été indiqué que le bateau expertisé devait être ultérieurement vendu, étant relevé que sa facture n°2016/10, établie le 29 juillet 2016, mentionne exclusivement une « visite, évaluation du navire Partenautica Keliria pour un montant de 420euros soit une somme modeste insusceptible de correspondre à une expertise détaillée et poussée des éléments structurels du bateau et que, de même, l'attestation de visite du 29 juillet 2016 se borne à mentionner en conclusion que le navire est 'en état de navigation et assurable' ; que les conditions générales afférentes à ses prestations rappellent, en leur article 7, que l'examen ne tient pas compte des parties inaccessibles du navire qu'il ne peut pas contrôler et qui pourraient échapper à ses investigations, ni des phénomènes dont l'évolution ne peut être estimée avec précision en l'absence de prélèvements et analyses et que l'expertise et/ou les visites étant de type non destructifs et sans prélèvement, il ne saurait être tenu responsable de la détection ultérieure de vices non inventoriés le jour de l'intervention et de l'évolution ultérieure de ces derniers ; qu'ayant expressément émis les plus expresses réserves d'usage de forme et de fond en matérialisant un acte de déchéance de responsabilité conformément à l'application des conditions générales d'adhésion acceptées par ses mandants, sa responsabilité n'est pas engagée ; que la notion de « bon état d'entretien » doit être distinguée de celle de « navire en bon état », en ce qu'elle se borne à évaluer l'entretien du bateau, sans présager de l'état intrinsèque de ses éléments structurels ou d'anomalies non apparentes ; que les époux [L] ont remis des photographies faisant état d'une réfection totale du pont et si les différents experts d'assurance qui se sont ultérieurement succédé ont pu conclure en ce sens, c'est uniquement à la faveur de la perforation du pont consécutive à la désolidarisation du guindeau et de son support.
Il rappelle que les conclusions des deux experts amiables n'apportent aucune garantie de neutralité et d'objectivité, dès lors qu'elles émanent de techniciens mandatés par les propres assureurs de la réclamante et le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence de celles-ci ; qu'en l'espèce, un des deux rapports n'a pas été établi à son contradictoire ; que l'expertise de M. [I] ne se prononce pas sur les manquements aux règles de l'art qui lui sont imputés et que le deuxième expert a retenu un manquement au seul motif que l'une des photographies produites lors de sa réunion contradictoire auraient révélé un infléchissement du plancher en bois au niveau des rampes d'accès à la cale alors que la photographie, ne laisse apparaître aucun infléchissement, mais au contraire un pont en bois en parfait état et que Mme [E] ne produit aucun autre élément extérieur à ces deux rapports venant en corroborer le contenu.
Les époux [L] font valoir que M. [A] est seul responsable des préjudices subis par Mme [E] puisqu'il avait pour mission d'examiner le bateau à flot, afin de juger de son état et d'évaluer le navire ; qu'il a conclu que l'unité en bois, conçue dans les règles de l'art par un chantier spécifique, présentait un bon état d'entretien et qu'étant eux-mêmes profanes, ils se sont fiés à ses conclusions ; que cette expertise ne concernait pas uniquement l'assurabilité du navire puisque celui-ci était déjà assuré lorsqu'ils ont sollicité M. [A] mais consistait bien en une expertise dans la perspective de la vente du navire et que les documents attestant du simple bon état d'entretien auquel il tente de limiter sa mission, ne lui ont pas été communiqués lors de sa visite, le 29 juillet 2016, mais par courriel le 11 septembre 2017.
2.2 Réponse de la cour
L'expert est un prestataire de services, et comme tel, sa responsabilité peut être recherchée pour toute faute, même légère.
Le tiers au contrat qui lie l'expert et son mandant peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage, s'il établit un lien de causalité entre ce manquement contractuel et le dommage qu'il subit.
Il n'est pas tenu de démontrer une faute délictuelle ou quasi délictuelle distincte de ce manquement.
En revanche, l'expert s'étant engagé en considération de l'économie générale du contrat qu'il a conclu, le tiers à un contrat qui invoque, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel à l'origine d'un dommage, peut se voir opposer les conditions et limites de la responsabilité qui s'appliquent dans les relations entre les contractants.
En l'espèce, M. [A] a été mandaté par les époux [L] en juillet 2016.
Mme [E] est tiers à ce contrat, de sorte qu'à son égard la responsabilité de M. [A] ne peut être fondée que sur l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du code civil depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016, selon lequel tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
L'obligation de l'expert est une obligation de moyens, qui implique de la part de celui qui invoque un manquement fautif d'établir que l'expert n'a pas employé tous les moyens adéquats pour accomplir sa mission avec sérieux.
En l'espèce, le contrat conclu entre M. [A] et les époux [L] n'est pas produit aux débats. M. [A] produit uniquement l'attestation qu'il a rédigée après accomplissement de sa mission et la facture établie à l'issue de celle-ci.
Les conditions générales qu'il produit en pièce trois afin de démontrer l'étendue de ses prestations ne sont pas signées des époux [L] auxquels elles ne peuvent, dès lors, être opposées.
L'attestation de visite, rédigée à l'intention de ses mandants, le 29 juillet 2016, fait état d'une visite et d'un examen à flot du bateau 'afin de juger de son état' et de l'évaluer. Après rappel de ses caractéristiques, M. [A] indique que 'cette unité en bois, construite dans les règles de l'art par un chantier spécifique, présente un bon état d'entretien, son moteur à babord a été remplacé', puis 'de nos investigations, contrôle et conclusions, nous estimons la valeur de ce navire à 8 400euros ', et enfin 'ce navire en état de navigation est assurable'. Cette attestation ne contient aucune réserve expresse quant à l'étendue de la mission confiée à l'expert par ses mandants.
Il résulte des deux expertises non judiciaires, réalisées par M. [I] et M. [B], qu'en réalité, le navire examiné par M. [A] en juillet 2016, soit quelques jours avant sa vente, était affecté d'un vice le rendant impropre à la navigation puisque le bois composant sa structure était déjà cette date dans un état de pourrissement avancé.
Il sera renvoyé à ce qui a été indiqué plus haut concernant la portée de ces deux expertises non judiciaires, qui ont été soumises à la discussion contradictoire des parties et qui, en ce qu'elles se corroborent l'une l'autre, sont suffisantes pour établir la preuve du vice affectant le navire.
Si la responsabilité de M. [A], tenu d'une obligation de moyens, ne peut être engagée au seul motif qu'il n'a pas révélé l'existence du vice, il convient de rechercher s'il a accompli sa mission avec diligence, en effectuant toutes vérifications propres à lui permettre d'affirmer que le navire était effectivement en bon état d'entretien et en état de naviguer et à constituer un conseil avisé en direction de ses mandants.
S'agissant de l'étendue de la mission, M. [A] a été mandaté en juillet 2016 et a réalisé sa prestation le 29 juillet, deux jours avant la vente du navire par les époux [L] à Mme [E].
Aucun élément de l'attestation ne laisse apparaître que cette expertise a été sollicitée par l'assureur des époux [L] ou de Mme [E] afin de déterminer s'ils pouvaient garantir tout sinistre concernant le navire.
Par ailleurs, les termes employés par M. [A] dans l'attestation révèlent que, si cette expertise avait pour objet de déterminer la valeur vénale du navire, son objet ne se limitait pas à cette seule évaluation.
En effet, l'intéressé se prononce sur l'état du bateau en précisant que l'unité en bois présente un bon état d'entretien et que le bateau est en état de naviguer et assurable. Il précise qu'il a non seulement visité mais également examiné le bateau afin de juger de son état. Sa conclusion est formulée au vu 'd'investigations et de contrôles'.
Il lui appartenait, s'il n'était mandaté que pour estimer le valeur vénale de ce navire, de s'en tenir à celle-ci et de ne fournir aucune appréciation quant à son état général et sa capacité à naviguer.
Il ne peut donc utilement exciper de limites à son mandat que la teneur de l'attestation rédigée contredit.
Au regard de ces éléments, la faiblesse des honoraires perçus en contrepartie de l'exécution de sa mission est indifférente, de même que l'absence de toute information donnée par ses mandants quant à la vente à venir du bateau expertisé.
Les conclusions des deux experts [I] et [B] font ressortir que le guindeau était dans un 'très mauvais état de présentation' et que l'ensemble était affecté d'une corrosion importante, M. [I] précisant en outre que la corrosion du guindeau était de nature à conduire à une destruction du bois qui le supportait par délignification.
De même, M. [B] relève l'existence d'une déformation des trois plaques amovibles de la partie centrale du pont avant et l'état de vétusté avancé du navire.
Il en résulte que M. [A] n'a pas pu ne pas constater lui même ce que ces deux experts ont relevé de concert, étant précisé que, si M. [B] a procédé à un sondage destructif, tel n'a pas été le cas de M. [I] et qu'en tout état de cause, ce sondage n'a fait que conforter un avis qu'il était déjà en mesure de donner au regard de l'examen du navire.
Certes, ces deux experts se sont prononcés après l'avarie, mais le pourrissement avancé du bois pouvait et devait être décelé par un professionnel.
Dès lors que M. [A] a estimé devoir donner, et écrire, son avis en qualité de professionnel, inscrit sur une liste d'experts judiciaires, en ce qui concerne l'état du navire et non seulement sa valeur vénale, il lui appartenait d'être prudent et de ne pas attester d'un 'bon état d'entretien' et du caractère navigable de ce bateau, ou, à tout le moins, de formuler des réserves.
Or, il ne résulte de cette attestation l'existence d'aucune réserve telles que celles formulées dans les conditions générales que M. [A] produit aux débats mais qui, n'étant pas signées de ses mandants, ne peuvent utilement délimiter les contours de ses obligations et exclure ou limiter sa responsabilité.
Par ailleurs, il est établi que M. [A] n'a obtenu de ses mandants les justificatifs d'entretien du navire qu'en septembre 2017, soit postérieurement à la remise de son attestation et, en tout état de cause, les trois factures que ceux-ci ont produites, en date des 9 septembre 2014, 10 mai 2016 et 5 juillet 2016, sont afférentes à l'entretien des moteurs. S'il n'est pas contesté que le bateau a été mis hors d'eau à plusieurs reprises au cours des années 2014 et 2015, cette circonstance ne démontre pas que des réparations d'entretien ont été réalisées sur le navire au cours de ces périodes.
M. [A] ne peut davantage se retrancher derrière les photographies attestant de travaux de réfection du pont puisque, d'une part ces photographies ne démontrent pas que le pont aurait été intégralement réhabilité, d'autre part qu'en sa qualité d'expert attestant du bon état d'entretien d'un navire, il ne pouvait se contenter pour une telle conclusion de simples photographies.
L'ensemble de ces éléments établit que M. [A], qui en sa qualité d'expert est également tenu d'un devoir de conseil, a fait preuve de négligence en attestant du bon état d'entretien et du caractère navigable du navire, alors que tel n'était pas le cas et qu'il n'avait pas réalisé les investigations propres à lui permettre de conclure en ce sens.
Ce manquement consacre une faute à l'égard de Mme [E] à qui l'attestation a été remise lors de la vente et qui, étant profane, a pu se reposer sur ses conclusions pour se décider à conclure la vente, étant assurée d'une part de la navigabilité du bateau, d'autre part de la possibilité de l'assurer.
Si elle avait été informée l'état réel du navire, Mme [E] n'aurait pas acquis celui-ci.
En conséquence, cette faute n'est pas à l'origine des préjudices subis par Mme [E] mais seulement de la disparition, actuelle et certaine d'une chance de les éviter.
Cette perte de chance ne peut demeurer sans réparation, de sorte que la responsabilité de M [A] est engagée à l'égard de Mme [E].
La réparation est d'une perte de chance se mesure à la chance perdue sans pouvoir être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.
En conséquence, pour évaluer le préjudice causé par une perte de chance, le juge doit évaluer l'entier dommage, et fixer la fraction de ce dommage qui correspond à la perte de chance.
En l'espèce, en tenant compte du fait qu'il s'agissait d'un bateau déjà ancien d'une valeur vénale peu importante, mais également du fait que Mme [E] était profane en la matière, la cour est en mesure de fixer cette perte de chance à 80 %.
S'agissant de l'assiette du préjudice, elle ne saurait comprendre la restitution du prix de vente.
En effet, l'action en annulation de la vente et en restitution du prix ne peut être exercée contre l'expert qui n'est pas partie à ce contrat, étant rappelé qu'il n'est fait exception à ce principe que lorsque le vendeur, en raison de son insolvabilité, n'est pas en mesure d'assumer seul cette restitution, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
Par ailleurs, la restitution du prix de vente ne constitue pas un préjudice indemnisable ouvrant droit à réparation au profit de l'acheteur. Elle est seulement la conséquence de la résolution du contrat.
En revanche, Mme [E] justifie avoir engagé des frais pour assurer le navire, soit une somme totale de 853,46euros réglée à la société Axa pour la période allant du 31 juillet 2016 au 1er juillet 2018, ainsi que de frais de stationnement du navire à hauteur de 5 604,56euros, de frais de remorquage à hauteur de 2 136euros et d'un droit annuel de francisation et de navigation à hauteur de 1 396euros, qu'elle n'aurait pas exposés si elle n'avait pas acquis ce navire, qui s'est révélé quasiment d'emblée impropre à son usage, soit une somme totale de 9 990,02euros.
Les frais de mouillage en rade d'[Localité 6] à hauteur de 22 euros, 57 euros, 76 euros, 114 euros, et 209 euros, qui figurent dans le tableau récapitulatif établi par Mme [E] ne sont étayés par aucune pièce probante.
Le préjudice de jouissance de Mme [E] ne peut sérieusement être contesté dès lors que l'avarie s'est produite dès sa première sortie en mer et qu'à l'issue, le navire n'était plus en état de naviguer.
Ce préjudice doit être évalué au regard de l'ancienneté du navire et des conditions dans lesquelles il pouvait être utilisé, ce qui implique de tenir compte des conditions météorologiques qui restreignent nécessairement les périodes de navigation ainsi que du fait que Mme [E]'elle ne démontre par aucune pièce qu'elle pratiquait régulièrement le nautisme avant l'acquisition litigieuse ni ne justifie de ses disponibilités pour pratiquer ce loisir.
Au regard de ces éléments, c'est à raison que le premier juge a évalué le préjudice de jouissance de Mme [E] entre le 5 août 2016 et le 8 décembre 2020, date de la décision ordonnant, avec exécution provisoire, la restitution du navire, à la somme de 15 000 euros.
A ces frais s'ajoutent les frais de remorquage et stationnement auxquels Mme [E] a été condamnée au profit de la société Fréjus bateaux, soit 240euros au titre des frais de remorquage, 312 euros à titre de loyer mensuel du 6 octobre 2017 au 6 avril 2020 et 312euros par mois à titre d'indemnité d'occupation jusqu'au 8 décembre 2020, ce qui représente, au total, une somme de 12 408euros puisqu'elle ne sollicite pas l'infirmation du jugement sur ce point.
Etant définitivement condamnée à ce titre, cette somme consacre pour elle un préjudice en lien avec le manquement fautif retenu à l'encontre de M. [A].
Au total, l'assiette du préjudice s'élève donc à 37 398,02 euros dont 80 %, soit 29 918,41 euros à la charge de M. [A] et de son assureur responsabilité civile, la société MMA qui, ne contestant pas sa garantie, doit être condamnée in solidum avec son assuré au paiement de cette somme.
Au regard de cette condamnation, il n'y a pas lieu, par ailleurs, de condamner M. [A] et son assureur à relever et garantir Mme [E] des condamnations prononcées à son encontre au profit de la société Fréjus bateaux.
3/ Sur la demande d'astreinte définitive
3.1 Moyens des parties
La SARL Fréjus bateaux demande que l'astreinte provisoire, fixée par le tribunal, assortissant la condamnation des époux [L] à retirer le bateau vendu, à leurs frais et en l'état où il se trouve au jour de la reprise, de son parc de stationnement, soit transformée en astreinte définitive d'un même montant, sur la période du 14 février 2021 au 19 mars 2021 au motif que les débiteurs ne se sont exécutés qu'à cette date.
Les époux [L] font valoir que cette demande ne relève pas de la compétence de la cour, mais du juge de l'exécution.
3.2 Réponse de la cour
L' astreinte a pour finalité de contraindre la personne qui s'y refuse à exécuter les obligations qu'une décision juridictionnelle lui a imposées et d'assurer le respect du droit à cette exécution.
En l'espèce, le premier juge a assorti la condamnation des époux [L], en suite de la résolution du contrat à venir récupérer le navire, d'une astreinte provisoire.
Il n'est pas contesté que le navire a été enlevé du parc de stationnement de la société Fréjus Bateaux le 19 mars 2021.
La demande de la SARL Fréjus bateaux relève de la compétence de la cour qui a la possibilité d'assortir toute condamnation d'une astreinte et, par conséquent, de modifier la nature de l'astreinte prononcée par le premier juge.
Cependant, dès lors qu'à ce jour l'obligation a été exécutée, aucun motif ne justifie de transformer l'astreinte provisoire en astreinte définitive.
Il appartiendra au juge compétent pour liquider cette astreinte, à savoir le juge de l'exécution dès lors que le premier juge ne s'en est pas réservé la liquidation et qu'aucune demande n'est formulée devant la cour, de déterminer si son taux doit être modifié.
La demande reconventionnelle de la SARL Fréjus bateaux est, en conséquence, rejetée.
4/ Sur les dépens et frais irrépétibles
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles sont confirmées.
M. [A] et la SA MMA d'une part, les époux [L], d'autre part, qui succombent, supporteront la charge des entiers dépens d'appel et ne sont pas fondés à solliciter une indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Il est précisé sur ce point que la somme réclamée au titre du remboursement des frais exposés pour l'expertise de M. [Y] s'analyse en une demande au titre des frais irrépétibles qui, par conséquent, est rejetée.
L'équité justifie d'allouer au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour, une indemnité de 3 000euros à Mme [E] et une indemnité de 2 000 euros à la SARL Fréjus Bateaux.
5/ Sur la demande de M. [A] et la SA MMA tendant à être relevés et garantis par les époux [L] des condamnations prononcées à leur encontre
5.1 Moyens des parties
M. [A] et la SA MMA n'articulent aucun moyen au soutien de leur demande tendant à ce que les époux [L] les relèvent et garantissent des condamnations prononcées à leur encontre.
Les époux [L] soutiennent qu'ils n'ont commis aucune faute s'étant fiés aux conclusions de M. [A] retenant un bon état d'entretien du navire sans formuler la moindre réserve.
5.2 Réponse de la cour
Les époux [L] ont conclu avec M. [A] un contrat dans le cadre duquel ce dernier a rédigé une attestation faisant état du bon état d'entretien du navire et ne relevant aucune difficulté particulière.
Ce faisant, la cour considère que M. [A] a commis une faute engageant sa responsabilité civile à l'égard de Mme [E].
Aucun manquement fautif n'est articulé à l'encontre des époux [L] qui se sont adressés à un homme de l'art, en raison de ses compétences, dans la perspective de la vente de leur bateau.
La cour ne retient d'ailleurs aucune mauvaise foi de leur part dans les rapports de ceux-ci avec Mme [E].
A défaut pour M. [A] de démontrer le manquement fautif qu'il impute aux époux [L], la demande afin qu'ils le relèvent et garantissent, de même que son assureur, de l'ensemble des condamnations prononcées contre eux doit être rejetée.
6/ Sur la demande des époux [L] afin d'être relevés et garantis par M. [A] et son assureur des condamnations à restituer le prix de vente à Mme [E] et à retirer sous astreinte le bateau du parc de stationnement de la société Fréjus bateaux
6.1 Moyen des parties
Les époux [L] font valoir que M. [A] est seul responsable puisqu'il avait pour mission, aux termes du contrat, d'examiner le bateau afin de juger de son état et de l'évaluer et qu'ils se n'avaient aucun motif de ne pas se fier à ses conclusions.
M. [A] et la SA MMA font valoir que la restitution du prix de vente ne fait pas partie des préjudices indemnisables puisqu'elle est la conséquence du principe de remise en état des parties dans l'état où elles se trouvaient après résolution du contrat.
6.2 Réponse de la cour
En application de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Il en résulte que le contractant qui n'a pas respecté ses obligations et a commis une faute est condamné à des dommages-intérêts lorsque son co-contractant démontre que le manquement fautif lui a causé un préjudice.
En l'espèce, les époux [L] ont conclu avec M. [A] un contrat dont l'objet était d'examiner le navire qu'ils étaient sur le point de vendre à Mme [E]. Si le contenu de ce contrat n'est défini dans aucun écrit produit aux débats, la cour retient, au regard des mentions figurant dans l'attestation rédigée par M. [A], que celui-ci a avait été chargé d'attester de l'état et de la valeur du navire.
Or, après avoir examiné celui-ci, il a omis d'attirer leur attention sur sa vétusté, notamment l'état de sa structure en bois.
Cette négligence est fautive en ce qu'elle a conduit les époux [L], dont M. [A] ne démontre pas qu'ils étaient en mesure, par leurs propres connaissances, d'exercer une quelconque critique technique de son attestation, à conclure avec M. [E] un contrat de vente qui est finalement annulé au titre de la garantie des vices cachés.
Pour autant, la restitution par les époux [L] du prix de vente du navire à Mme [E] ne constitue pas un préjudice indemnisable.
Elle procède de la résolution du contrat qui a pour effet de remettre les parties dans l'état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat résolu. Il s'agit du corollaire de la restitution de la chose vendue.
Par conséquent, si M. [A] a commis une faute à l'égard de ses co-contractants, ceux-ci ne démontrent pas que le préjudice allégué à ce titre est en lien de causalité avec ce manquement.
Il en va de même de l'astreinte prononcée à leur encontre au titre de l'obligation de retirer à leurs frais le navire du parc de stationnement de la SARL Fréjus bateaux.
C'est donc à raison que le tribunal les a déboutés de leur demande tendant à être relevés et garantis par M. [A] et la SA MMA de leur condamnation à restituer le prix de vente du bateau et à supporter une astreinte au titre de leur obligation de faire procéder à l'enlèvement du bateau du parc de stationnement de la société Fréjus bateaux.
En revanche, M. [A] et son assureur seront condamnés à relever et garantir les époux [L] des condamnations prononcées à leur encontre au titre des frais irrépétibles et des dépens et à leur payer une indemnité de 1 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais qu'ils ont été contraints d'exposer devant la cour.
Par ces motifs
La cour,
Statuant dans les limites de sa saisine,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions soumises à la cour, sauf à préciser, s'agissant de la condamnation in solidum de M. [A] et la SA MMA au profit de Mme [D] [E], qu'elle porte sur la somme totale de 29 918,41euros à titre de dommages-intérêts, comprenant les sommes dues par cette dernière au profit de la SARL Fréjus bateaux ;
L'infirme en ce qu'il a débouté M. [Z] [L] et Mme [X] [O] épouse [L] de leur demande tendant à être relevés et garantis par M. [K] [A] des condamnations prononcées à leur encontre au titre des dépens et des indemnités de l'article 700 du code de procédure civile mises à leur charge
Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,
Condamne M. [K] [A] et la SA MMA assurances IARD assurances mutuelles, in solidum, à relever et garantir M. [Z] [L] et Mme [X] [O] épouse [L] des condamnations prononcées à leur encontre par le tribunal au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [K] [A], la SA MMA assurances IARD assurances mutuelles, M. [Z] [L] et Mme [X] [O] épouse [L], in solidum, aux entiers dépens d'appel et accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile ;
Déboute M. [K] [A], la SA MMA assurances IARD assurances mutuelles, M. [Z] [L] et Mme [X] [O] épouse [L] de leur demande au titre de ses propres frais irrépétibles exposés devant la cour ;
Condamne M. [K] [A], la SA MMA assurances IARD assurances mutuelles, M. [Z] [L] et Mme [X] [O] épouse [L], in solidum, à payer à Mme [D] [E] une indemnité de 3 000euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel ;
Condamne M. [K] [A], la SA MMA assurances IARD assurances mutuelles, M. [Z] [L] et Mme [X] [O] épouse [L], in solidum, à payer à la SARL Fréjus bateaux une indemnité de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel ;
Condamne M. [K] [A] et la SA MMA assurances IARD assurances mutuelles, in solidum, à relever et garantir M. [Z] [L] et Mme [X] [O] épouse [L], ensemble, des condamnations prononcées à leur encontre au titre des dépens et frais irrépétibles exposés devant la cour ;
Condamne M. [K] [A] et la SA MMA assurances IARD assurances mutuelles, in solidum, à payer à M. [Z] [L] et Mme [X] [O] épouse [L], ensemble, une indemnité de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés devant la cour.