CA Paris, Pôle 5 - ch. 6, 12 mars 2025, n° 23/01790
PARIS
Arrêt
Autre
RÉPUBLIQUE FRAN'AISE
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 12 MARS 2025
(n° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/01790 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHAD3
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Décembre 2022 - tribunal de commerce de Bobigny 7ème chambre - RG n°2021F00558
APPELANT
Monsieur [Z] [C] [U]
né le [Date naissance 3] 1987 à [Localité 9]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représenté par Me Maude HUPIN, avocat au barreau de Paris, toque : G0625
INTIMÉS
Monsieur [O] [C]
[Adresse 5]
[Localité 8]
Monsieur [P] [C] [U]
[Adresse 5]
[Localité 8]
Représentés par Me Arnaud MONIN de la SELAS VO DINH - MONIN, avocat au barreau de Seine-Saint-Denis, toque : 197, avocat plaidant
S.A. CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC)
[Adresse 4]
[Localité 6]
N° SIREN : 542 016 381
agissant poursuites et diligences de son dirigeant domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Pauline BINET, avocat au barreau de Paris, toque : G0560, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Janvier 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Marc BAILLY, président de chambre
M. Vincent BRAUD, président de chambre
Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Pascale SAPPEY-GUESDON dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
* * * * *
PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 16 janvier 2023, M. [Z] [C] [U] a interjeté appel du jugement en date du 13 décembre 2022 en ce que le tribunal de commerce de Bobigny saisi par voie d'assignations en date du 1er et du 5 mars 2021 délivrées à la requête de la société Crédit industriel et commercial à l'encontre de MM. [Z] [C] [U], [P] [E] [C] [U] et [O] [C],
'Reçoit le Crédit industriel et commercial en ses demandes ;
- Déboute monsieur [P] [E] [C] [U] et monsieur [O] [C] de leur exception dilatoire et de leur demande de vérification d'écriture ;
- Déboute monsieur [Z] [C] [U] de sa demande de constater la caducité de son engagement de caution et la déchéance du Crédit industriel et commercial de son droit à intérêts ;
- Condamne monsieur [Z] [C] [U], monsieur [P] [E] [C] [U], et monsieur [O] [C] au paiement au Crédit industriel et commercial chacun de la somme de 60 000 euros dans la limite de 80 390,76 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 2 février 2021 et capitalisation des intérêts à compter du 2 avril 2021 dans les conditions de l'article 1154 devenu 1343-2 du Code civil ;
- Déboute M. [Z] [C] [U] de sa demande de délais ;
- Condamne solidairement monsieur [Z] [C] [U], monsieur [P] [E] [C] [U], et monsieur [O] [C] au paiement au Crédit industriel et commercial de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rappelle que l'exécution provisoire est de droit ;
- Condamne solidairement monsieur [Z] [C] [U], monsieur [P] [E] [C] [U] et monsieur [O] [C] aux dépens (...).'
MM. [P] [E] [C] [U] et [O] [C] ont interjeté appel de la même décision, par déclaration reçue au greffe de la cour le 27 janvier 2023, dans deux déclarations identiques, enregistrées sous les numéros de RG 23/2608 et 23/2615, à l'encontre de M. [Z] [C] [U] et de la société Crédit industriel et commercial.
Les trois procédures ont été jointes et pousuivies sous le numéro de RG 23/01790.
***
À l'issue de la procédure d'appel clôturée le 26 novembre 2024 les prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.
Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 6 avril 2023, M. [Z] [C] [U]
présente, en ces termes, ses demandes à la cour :
'Vu les articles 1134 du Code civil,
Vu les articles 1153 et 1154 du Code civil,
Vu l'article 1186 du Code civil,
Vu l'article 378 du Code de procédure civile,
Vu l'article 700 du Code de procédure civile,
Vu l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier,
Vu l'assignation et les conclusions adverses,
Vu les pièces,
Il est demandé à la Cour de :
A titre principal :
DECLARER M. [Z] [C] [U] recevable et bien fondé en son appel, ses demandes, fins et conclusions,
INFIRMER le jugement du Tribunal de commerce de Bobigny du 13 décembre 2022 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande de sursis à statuer et la demande de vérification d'écritures formulées par Messieurs [P] et [O] [C]
DEBOUTER le CIC de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de M. [Z] [C] [U],
DEBOUTER Messieurs [P] et [O] [C] de leurs demandes de sursis à statuer,
ET STATUANT À NOUVEAU
DECLARER caduque le cautionnement donné par M. [Z] [C],
A titre subsidiaire :
DECLARER non opposables à M. [Z] [C] les intérêts découlant de la dette cautionnée eu égard à l'absence de notification à la caution,
PRONONCER la déchéance des intérêts, avec imputation des paiements sur le capital,
ACCORDER les plus larges délais de paiement à M. [Z] [C] soit un report de deux ans,
En tout état de cause,
CONDAMNER le C.I.C. à payer à M. [C] la somme de 2.500 euros au titre de l'article
700 du Code de procédure civile,
CONDAMNER le C.I.C. aux entiers dépens.'
Au dispositif de leurs dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 21 avril 2023, MM. [P] [E] [C] [U] et [O] [C]
présentent, en ces termes, leurs demandes à la cour :
'Il est demandé à la Cour,
D'infirmer la décision entreprise,
Statuant à nouveau,
Vu l'article 299 du Code de Procédure Civile et les articles 287 et suivants du Code de Procédure Civile,
Prendre acte de ce que Messieurs [P] et [O] [C] arguent de faux les actes de cautionnement produits par le CIC,
Procéder à une vérification d'écritures conformément aux dispositions des articles 287 et suivants, et au besoin :
- enjoindre au CIC de produire les originaux des actes de cautionnement,
- enjoindre à Messieurs [P] et [O] [C] de produire tous documents manuscrits que la Cour pourrait estimer utile,
- convoquer Messieurs [P] et [O] [C] en vue de leur faire composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture, et de les entendre,
- désigner tout technicien qu'il lui plaira pour l'assister dans cette procédure de vérification.
En tout état de cause,
Prononcer la nullité du cautionnement,
Débouter le CIC de l'ensemble de ses demandes,
Condamner le CIC au paiement d'une somme de 3.000 € au bénéfice de chacun des concluants sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens de l'instance.'
Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 4 juillet 2023, la société Crédit industriel et commercial
présente, en ces termes, ses demandes à la cour :
'Il est demandé à la Cour de Céans de,
Vu les articles 1134 et suivants du Code Civil,
Vu les articles 1153 et 1154 du Code Civil,
- RECEVOIR le CIC en ses demandes, fins et conclusions et les déclarer recevables et bien
fondées,
- CONFIRMER le jugement du Tribunal de Commerce de BOBIGNY en date du 13 décembre 2022 en toutes ses dispositions,
En conséquence,
- DEBOUTER Monsieur [Z] [C] [U] de l'ensemble de ses demandes,
fins et conclusions,
- DEBOUTER Monsieur [P] [E] [C] [U] et Monsieur [O] [C] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
En tout état de cause,
CONDAMNER solidairement Messieurs [Z] [C] [U], [P] [E]
[C] [U] et [O] [C] [U] à payer au CIC la somme de
3.000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC.
CONDAMNER solidairement Messieurs [Z] [C] [U], [P] [E]
[C] [U] et [O] [C] [U] aux entiers dépens de l'instance et de ses suites.'
Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs conclusions précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
La société Crédit industriel et commercial poursuit le recouvrement de trois créances de 60 000 euros chacune qu'elle dit détenir à l'égard de MM. [Z] [C] [U], [P] [C] [U], et [O] [C], au titre de cautionnements donnés en garantie des engagements de la société ZAS TP, le 14 juin 2019 en ce qui concerne M. [Z] [C] [U], et le 19 juin 2019 s'agissant de MM. [C] [U] et [O] [C].
Le 24 octobre 2020, M. [Z] [C] [U] a dénoncé son cautionnement, au motif qu'il n'exerçait plus de fonctions dans la société. Pour ce faire, il s'est adressé à son agence bancaire, plutôt que d'envoyer son courrier au siège de la banque. À cette date, selon la banque le solde débiteur de la société ZAS TP s'élevait à 101 127,97 euros, ce que conteste M. [Z] [C] [U], selon lequel il n'y avait pas encore eu d'incident auquel la banque aurait réagi, quand il s'est dégagé de son cautionnement.
En suite au jugement rendu le 14 janvier 2021 par le tribunal de commerce de Bobigny prononçant la liquidation judiciaire de la société ZAS TP, la société Crédit industriel et commercial a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur judiciaire, pour un montant de 160 401 euros au titre d'un PGE souscrit le 30 juillet 2020, et pour un montant de 80 390,76 euros au titre du découvert en compte courant professionnel.
Par courriers recommandés avec demande d'avis de réception datés du 9 février 2021, la société Crédit industriel et commercial a mis en demeure chacune des trois cautions de satisfaire à son engagement pris à concurrence de la somme de 60 000 euros.
M. [Z] [C] [U] a alors soutenu que son engagement avait pris fin le 23 octobre 2020, puisqu'il l'avait donné sous condition qu'il soit dirigeant de la société, ce qui n'est plus le cas.
De leur côté, MM. [P] [C] [U] et [O] [C] ont dans un courrier daté du 12 février 2021 prétendu découvrir avec grande stupéfaction être engagés comme cautions, puis ont argué de faux les documents dont se prévaut la banque à leur endroit. Sur ce point la société Crédit industriel et commercial fait observer que MM. [P] [C] [U] et [O] [C], qui ont produit à cette occasion des documents personnels (avis d'imposition sur les trois dernières années, bulletins de paye, relevés bancaires) en vue d'attester de leurs capacités financières, sont manifestement de mauvaise foi en prétendant tout ignorer de leur engagement.
En première instance, in limine litis MM. [O] [C] et [P] [C] [U] ont soulevé avoir déposé plainte pénale le 19 mai 2021 pour faux, usage de faux et escroquerie, affirmant une fois de plus ne pas être les auteurs des mentions manuscrites ni avoir signé les actes de cautionnement dont se prévaut la banque. Pour ce motif ils ont formé à titre principal une demande de sursis à statuer, et subsidiairement, ont sollicité du tribunal qu'il procède à une vérification d'écriture. À hauteur d'appel seule la demande de vérification d'écriture est maintenue.
Quant à M. [Z] [C] [U], qui lui ne dénie pas sa signature, il réitère en cause d'appel l'ensemble des demandes dont les premiers juges l'ont débouté.
****
SUR LE CAUTIONNEMENT DE M. [Z] [C] [U]
Sur la caducité du cautionnement
M. [Z] [C] [U] fait valoir que son cautionnement était uniquement motivé par le fait qu'il présidait la société holding de la société débitrice, et qu'il s'était engagé à la double condition d'être mandataire social et de voir d'autres mandataires sociaux se porter également caution pour la société ZAS TP. Aussi, quittant la présidence de la société, son engagement s'est trouvé privé de cause. Après avoir informé le Crédit industriel et commercial de ce changement de présidence, son cautionnement est devenu caduc, en application des dispositions de l'article 1183 du code civil. Par ailleurs, la société Crédit industriel et commercial n'avait pas mis à jour les garanties du compte courant d'associé, la demande qui a été adressée par la banque aux deux autres cautions n'ayant pas abouti. Dans ces conditions la société Crédit industriel et commercial ne disposait plus de créance contre lui à la date de la demande en paiement.
La société Crédit industriel et commercial fait observer tout d'abord, que M. [Z] [C] [U] ne s'est pas conformé aux formes prévues par les stipulations de l'acte de cautionnement, de sorte que sa résiliation ne le libérait pas de son engagement. En outre, en premier lieu l'acte de cautionnement prévoyait que celui-ci ne serait pas affecté par un changement dans les rapports entre la caution et le cautionné, de sorte que la fin de son mandat social n'avait pas de conséquence sur son engagement. Ensuite, une stipulation de l'acte de cautionnement indiquait que l'existence d'autres cautions n'était pas une condition déterminante du cautionnement, faisant ainsi échec à l'argumentation de M. [Z] [C] [U]. Enfin, pour la société Crédit industriel et commercial le contrat prévoyait que la caution pouvait dénoncer son engagement à tout moment par lettre recommandée, sous réserve de respecter un préavis, cette dénonciation ne prenant alors effet que dans un délai de 90 jours à compter de la réception de la lettre. Or, la société Crédit industriel et commercial a reçu la lettre de M. [Z] [C] le 27 octobre 2020, de sorte que la dénonciation allait prendre effet le 27 janvier 2021. La société ZAS TP ayant été placée en liquidation judiciaire le 14 janvier 2021, la dénonciation ne pouvait donc plus produire d'effet, et l'engagement de M. [Z] [C] couvrait bien le solde du compte courant, débiteur au mois d'octobre 2020.
Sur ce
S'il n'est nullement contesté qu'il n'occupait plus de fonctions dirigeantes au sein de la société ZAS TP depuis plusieurs mois lorsqu'il a été appelé en paiement par la banque, par voie de mise en demeure du 9 février 2021, force est de constater que M. [Z] [C] [U] est totalement défaillant dans l'administration de la preuve de ses affirmations selon lesquelles ce cautionnement aurait été subordonné à l'exercice desdites fonctions ou encore au cautionnement d'autrui, M. [Z] [C] [U] ne produisant pas la moindre pièce en ce sens, allégations au demeurant contredites pas les termes-mêmes de son engagement de caution.
En toute hypothèse et pour l'essentiel, et comme jugé par le tribunal '... aux termes de l'acte de cautionnement la caution reste tenue vis à vis de la banque au remboursement intégral et définitif de tous les engagements du cautionné nés antérieurement à la date de la révocation ce qui est donc le cas de la créance du CIC au titre du solde du compte courant'.
D'ailleurs, M. [Z] [C] [U] lui-même, dans son courrier daté du 24 octobre 2020 adressé à l'agence du Crédit industriel et commercial de [Localité 10] au lendemain de l'assemblée générale extraordinaire actant la fin de son actionnariat et de sa présidence des sociétés ZAS Groupe, ZAS TP et AEVP, courrier par lequel il entendait mettre fin à tous les cautionnements souscrits en garantie desdites sociétés, expose qu'en conséquence il ne pourra plus être tenu responsable des éventuelles dettes contractées par celles-ci à compter du 23 octobre 2020.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce que le tribunal est entré en voie de condamnation à l'encontre de M. [Z] [C] [U] restant tenu des engagements nés antérieurement à sa dénonciation, conformément à l'acte de cautionnement du 14 juin 2019.
Sur le défaut d'information à caution
Sur le défaut d'information annuelle
Le tribunal a écarté la demande de M. [Z] [C] [U] aux motifs que 'le CIC a bien procédé à l'envoi de la lettre d'information des cautions en mars 2020 (le solde du compte courant étant au demeurant créditeur à cette date)' , et que 'le CIC ne demande que les intérêts au taux légal et non les intérêts conventionnels'.
Pour critique de cette décision, M. [Z] [C] [U] fait valoir que les courriers simples fournis par la société Crédit industriel et commercial ne permettent pas de justifier de l'exécution par la banque de son obligation annuelle d'information de la caution conformément aux dispositions des articles 2293 alinéa 2 du code civil et L. 313-22 du code monétaire et financier.
L'article 2293 du code civil dispose : 'Le cautionnement indéfini d'une obligation principale s'étend à tous les accessoires de la dette, même aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. Lorsque ce cautionnement est contracté par une personne physique, celle-ci est informée par le créancier de l'évolution du montant de la créance garantie et de ses accessoires au moins annuellement à la date convenue entre les parties ou, à défaut, à la date anniversaire du contrat, sous peine de déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités'.
Également visé par M. [Z] [C] [U], l'article L. 313-22 du code monétaire et financier disposait : 'Les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.'
Désormais il y a lieu d'appliquer les dispositions nouvelles de l'article 2302 du code civil tel qu'issu de la réforme du droit des sûretés, conformément à l'article 37 de l'ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021 selon lequel les dispositions de l'ordonnance entrent en vigueur le 1er janvier 2022 et en cette matière s'appliquent y compris aux cautionnements constitués antérieurement.
L'article 2302 nouveau du code civil dispose :'Le créancier professionnel est tenu, avant le 31 mars de chaque année et à ses frais, de faire connaître à toute caution personne physique le montant du principal de la dette, des intérêts et autres accessoires restant dus au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, sous peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information et jusqu'à celle de la communication de la nouvelle information'. Cet article se poursuit ainsi : 'Dans les rapports entre le créancier et la caution, les paiements effectués par le débiteur pendant cette période sont imputés prioritairement sur le principal de la dette. Le créancier professionnel est tenu, à ses frais et sous les mêmes sanctions, de rappeler à la personne physique le terme de son engagement ou, si le cautionnement est à durée indéterminée, sa faculté de résiliation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci peut être exercée (...)'.
Le nouvel article du code civil reprend ainsi les prévisions de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier - sur lequel l'appelant fonde sa demande - les principes dégagés jusqu'ici par la jurisprudence restant toutefois applicables.
Ainsi, si aucune forme n'est exigée de la banque pour l'envoi de ces informations, il lui incombe toutefois de prouver qu'elle a satisfait à son obligation d'information annuelle, dont on rappellera qu'elle pèse sur l'établissement bancaire jusqu'à l'extinction de la dette.
La société Crédit industriel et commercial soutient l'avoir respectée, les courriers ayant été expédiés à chacune des cautions - pièce 19. Or, il s'avère que ces lettres d'information annuelle, dont celle de M. [Z] [C] [U] datée du 3 mars 2020, ont fait l'objet d'un envoi par lettre simple. Or, en l'état actuel de la jurisprudence de la Cour de cassation, la seule production par la banque débitrice de cette information, de la copie d'une lettre simple, ne suffit pas à rapporter la preuve de son envoi. Aucun autre élément du dossier n'établit qu'il y aurait été procédé.
Par conséquent, en l'absence de toute information correctement délivrée, il convient de retenir que la banque doit être déchue dans les conditions de l'article 2293 du code civil à partir de la date anniversaire du contrat de cautionnement, soit à compter du 19 juin 2020 le cautionnement dont s'agit étant du 19 juin 2019, s'agissant d'un cautionnement dit omnibus, indéfini au sens dudit article précité pour avoir été consenti pour une durée indéterminée.
M. [Z] [C] [U] estime que la banque se devait de fournir un décompte, à défaut sa créance ne peut être vérifiée et considérée comme certaine. Pourtant, la société Crédit industriel et commercial verse au débat les pièces permettant à la cour de tirer les conséquences de la déchéance présentement prononcée :
* En pièce 19, les lettres d'information à caution datées du 3 mars 2020 auxquelles il est joint un relevé faisant état d'un solde de compte courant créditeur,
* En pièce 14, sa déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire de la société ZAS TP, entre les mains de la Selafa MJA en la personne de Me [B] [F], et dont il ressort que le solde du compte courant n°[XXXXXXXXXX01] est au 14 janvier 2021 de : - 80 390,76 euros,
* En pièce 8, la liste des mouvements avec soldes progressifs du compte n°[XXXXXXXXXX01] faisant état d'un solde de : - 80 201,70 euros au 23 février 2021, relevé à l'examen duquel il apparaît que sur la période courant à partir du 19 juin 2020 (date de point de départ de la déchéance prononcée au profit de M. [Z] [C] [U]) ont été débités du compte, des 'intérêts/frais' pour les montants suivants : 3 411,49 euros le 2 juillet 2020, et 4 760,27 euros le 10 octobre 2020, dont la banque doit être déchue pour avoir manqué à son obligation d'information due à la caution.
La créance de la banque à l'égard de la caution M. [Z] [C] [U] une fois expurgée de ces derniers montants étant supérieure à celle de 60 000 euros qui constitue le maximum de son engagement de caution, M. [Z] [C] [U] ne pourra être condamné en paiement que dans la limite de cette dernière somme, à assortir de l'intérêt légal.
Sur le défaut d'information sur incident de paiement
M. [Z] [C] [U] fait valoir qu'il n'a jamais été informé par la société Crédit industriel et commercial de la défaillance du débiteur, depuis le premier incident de paiement, ce qui constitue un manquement au devoir d'information prévu par l'article L. 333-1 du code de la consommation. Il demande donc que la banque soit déchue de son droit aux intérêts, avec imputation sur le capital restant dû, conformément à l'article L. 343-5 du même code.
L'article 2305 nouveau du code civil désormais applicable dispose que : 'Le créancier professionnel est tenu d'informer toute caution personne physique de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement, à peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus entre la date de cet incident et celle à laquelle elle en a été informée'.
La société Crédit industriel et commercial allègue qu'à compter du placement du débiteur en liquidation judiciaire le 14 janvier 2021, les cautions étaient informées de sa situation exacte, dans la mesure où la société ne pouvait plus réaliser de paiement. De plus, la société Crédit industriel et commercial a adressé ses demandes de paiement consécutives à l'ouverture de la liquidation, par lettres recommandées en date du 2 février 2021. Les cautions ont été informées le 2 février 2021 de la défaillance du débiteur, caractérisée par son placement en liquidation judiciaire.
Sur ce
La déchéance qui résulterait du manquement de la banque à cette obligation d'information, à la supposer fondée porterait sur des intérêts dont la déchéance est prononcée au titre du défaut d'information annuelle à caution. La demande est donc sans objet.
Sur la demande de délais de paiement formulée par M. [Z] [C] [U]
Le premier juge pour rejeter la demande de délai de grâce de M. [Z] [C] [U] demandant subsidiairement au tribunal de lui accorder un délai pour s'acquitter de sa dette dans l'attente des produits devant lui revenir par la liquidation judiciaire de la société ZAS TP, a considéré que rien ne prouve que la liquidation judiciaire de la société ne sera pas impécunieuse, les sommes restant dues au titre d'un PGE de 160 000 euros s'ajoutant au solde débiteur du compte courant.
Demandant l'infirmation du jugement déféré, ce ce chef, M. [Z] [C] [U] fait valoir qu'à l'inverse, aucun élément ne montre que la liquidation judiciaire des sociétés sera impécunieuse et que l'octroi d'un délai comme prévu à l'article 1343-5 du code civil permettra d'attendre la perception des fonds qui en seront issus.
Pour s'opposer à la demande de M. [Z] [C] [U], la société Crédit industriel et commercial fait valoir que ce dernier ne fournit aucun élément sur sa situation financière ou la répartition des fonds au profit de la banque à l'issue de la procédure collective pourtant ouverte depuis plus de deux ans.
Sur ce
En vertu de l'article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Tel aménagement de la dette n'est envisageable que si son montant le permet eu égard aux facultés contributives du débiteur et si les propositions faites pour son apurement permettent à celui-ci de s'en acquitter dans le respect des droits du créancier. En outre, l'octroi d'un délai de paiement qui n'est pas de plein droit ne peut bénéficier qu'au débiteur de bonne foi.
Une demande de report de paiement de la dette pour être reçue doit être appuyée par des éléments suffisamment précis, tangibles, et certains, permettant de croire à un désintéressement du créancier à l'expiration du délai de grâce.
Or à l'appui de sa demande M. [Z] [C] [U] ne propose qu'un élément incertain, tant dans son existence - la réalisation d'actifs dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire - que quant à sa date.
Dans ces conditions sa demande de report du paiement de la dette, en l'état, ne peut qu'être rejetée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
M. [Z] [C] [U], qui échoue dans ses demandes, supportera la charge des dépens le concernant et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de la société Crédit industriel et commercial formulée à son égard sur ce même fondement, à hauteur de la somme de 1 000 euros.
SUR LA VÉRIFICATION D'ÉCRITURE
MM. [P] [C] [U] et [O] [C] soutiennent qu'ils n'ont jamais souscrit d'actes de cautionnement quels qu'ils soient, et qu'ils ont découvert ceux invoqués par la banque après sa demande en paiement, en février 2021. Ils ne sont pas à l'origine des mentions et signatures figurant sur les actes de cautionnement, qui ont été imitées, ce qu'une comparaison rapide permet de constater. Ils demandent donc à la cour, au visa des articles 299, 287 et suivants du code de procédure civile, de procéder à une vérificationd'écriture, qui n'avait pas été réalisée de manière effective par le tribunal, à partir des documents produits par leur conseil.
De fait, le tribunal a écrit :
'Attendu que les signatures portées au pied des actes de cautionnement sont semblables à celles figurant en particulier sur les statuts de la société, ou sur les procès-verbaux d'assemblée générale, pièces produites par le CIC ;
Attendu qu'il est constant que le fait que les mentions manuscrites de l'acte de cautionnement ne soient pas de la main-même du signataire n'entache pas de nullité cet acte, avant même la réforme du cautionnement entrée en vigueur le premier janvier 2022, s'il n'y a pas de doute sur l'identité du signataire'.
La société Crédit industriel et commercial expose que les originaux des actes de cautionnement ont été fournis et examinés par les parties lors de l'audience de plaidoirie tenue devant le tribunal de commerce, et que celles-ci ont reconnu l'existence de similitudes dans les signatures. Elle souligne qu'en outre, les actes ont été écrits par trois personnes différentes, un entretien téléphonique a eu lieu entre chaque caution et un conseiller de la banque, et les cautions ont fourni toutes les trois des actes les concernant au moment de la conclusion des engagements (avis d'imposition, relevés bancaires...).
M. [Z] [C] [U] - même s'il ne dénie pas sa propre signature, fait observer que les documents présentés par MM. [P] [C] [U] et [O] [C] ne sont pas de nature à justifier une expertise en écriture, dans la mesure où il ne s'agit pas de documents officiels mais de mentions sur papier libre, ne permettant pas à la cour de procéder utilement à une comparaison. Il approuve le tribunal en ce qu'il a écrit : 'Attendu que monsieur [P] [E] [C] [U] et monsieur [O] [C] n'expliquent pas comment le CIC pourrait être en possession d'informations financières confidentielles s'ils ne les ont pas eux-mêmes fournies au moment où ils ont pris leur engagement et où le CIC l'a accepté.'
Sur ce
En vertu de l'article 287 du code de procédure civile, si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte.
En l'espèce, la cour n'est pas en possession d'éléments suffisants pour déterminer si M. [O] [C] d'une part, et M. [P] [C] [U] d'autre part, sont bien les auteurs de la mention manuscrite qu'ils contestent, ainsi que de la signature qui s'y rapporte.
Il y a donc lieu, avant dire droit, d'ordonner la réouverture des débats et la comparution personnelle de M. [O] [C] et M. [P] [C] [U] dans les conditions indiquées au dispositif du présent arrêt avant dire droit, aux fins d'audition et en vue de recueillir les échantillons nécessaires de leurs écritures et de leurs signatures.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant dans la limite de l'appel,
1) CONFIRME le jugement déféré en ce que le tribunal a débouté M. [Z] [C] [U], de sa demande de constater la caducité de son engagement de caution et de sa demande de délais de paiement,
Le RÉFORME en ses autres dispositions le concernant,
Et statuant à nouveau,
DÉCHOIT la société Crédit industriel et commercial de son droit aux accessoires de la dette, frais et pénalités dans les conditions de l'article 2293 du code civil ;
Condamne M. [Z] [C] [U] à payer, en sa qualité de caution de la société ZAS TP, à la société Crédit industriel et commercial, la somme de 60 000 euros assortie de l'intérêt au taux légal à compter de la date de la mise en demeure, du 9 février 2021 ;
CONDAMNE M. [Z] [C] [U] aux entiers dépens de l'instance dans la mesure où ils ont été exposés à son égard ;
Le CONDAMNE à payer à la société Crédit industriel et commercial la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
2) INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions concernant M. [O] [C] et M. [P] [C] [U],
Et statuant à nouveau,
Par jugement avant dire droit :
DIT y avoir lieu à vérification d'écriture ;
ORDONNE la réouverture des débats,
ORDONNE la comparution personnelle de M. [O] [C] et M. [P] [C] [U] à l'audience de la Cour d'appel de Paris, Pôle 5 Chambre 6, qui se tiendra en conseiller rapporteur le jeudi 15 mai 2025 à 9 heures, salle Jules Grévy,
DIT que la présente décision tient lieu de convocation à l'égard de M. [O] [C] et de M. [P] [C] [U], et de l'avocat de chacune des parties.
* * * * *
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRÊT DU 12 MARS 2025
(n° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/01790 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHAD3
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Décembre 2022 - tribunal de commerce de Bobigny 7ème chambre - RG n°2021F00558
APPELANT
Monsieur [Z] [C] [U]
né le [Date naissance 3] 1987 à [Localité 9]
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représenté par Me Maude HUPIN, avocat au barreau de Paris, toque : G0625
INTIMÉS
Monsieur [O] [C]
[Adresse 5]
[Localité 8]
Monsieur [P] [C] [U]
[Adresse 5]
[Localité 8]
Représentés par Me Arnaud MONIN de la SELAS VO DINH - MONIN, avocat au barreau de Seine-Saint-Denis, toque : 197, avocat plaidant
S.A. CREDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL (CIC)
[Adresse 4]
[Localité 6]
N° SIREN : 542 016 381
agissant poursuites et diligences de son dirigeant domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Pauline BINET, avocat au barreau de Paris, toque : G0560, avocat plaidant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Janvier 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Marc BAILLY, président de chambre
M. Vincent BRAUD, président de chambre
Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Pascale SAPPEY-GUESDON dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
* * * * *
PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 16 janvier 2023, M. [Z] [C] [U] a interjeté appel du jugement en date du 13 décembre 2022 en ce que le tribunal de commerce de Bobigny saisi par voie d'assignations en date du 1er et du 5 mars 2021 délivrées à la requête de la société Crédit industriel et commercial à l'encontre de MM. [Z] [C] [U], [P] [E] [C] [U] et [O] [C],
'Reçoit le Crédit industriel et commercial en ses demandes ;
- Déboute monsieur [P] [E] [C] [U] et monsieur [O] [C] de leur exception dilatoire et de leur demande de vérification d'écriture ;
- Déboute monsieur [Z] [C] [U] de sa demande de constater la caducité de son engagement de caution et la déchéance du Crédit industriel et commercial de son droit à intérêts ;
- Condamne monsieur [Z] [C] [U], monsieur [P] [E] [C] [U], et monsieur [O] [C] au paiement au Crédit industriel et commercial chacun de la somme de 60 000 euros dans la limite de 80 390,76 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 2 février 2021 et capitalisation des intérêts à compter du 2 avril 2021 dans les conditions de l'article 1154 devenu 1343-2 du Code civil ;
- Déboute M. [Z] [C] [U] de sa demande de délais ;
- Condamne solidairement monsieur [Z] [C] [U], monsieur [P] [E] [C] [U], et monsieur [O] [C] au paiement au Crédit industriel et commercial de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rappelle que l'exécution provisoire est de droit ;
- Condamne solidairement monsieur [Z] [C] [U], monsieur [P] [E] [C] [U] et monsieur [O] [C] aux dépens (...).'
MM. [P] [E] [C] [U] et [O] [C] ont interjeté appel de la même décision, par déclaration reçue au greffe de la cour le 27 janvier 2023, dans deux déclarations identiques, enregistrées sous les numéros de RG 23/2608 et 23/2615, à l'encontre de M. [Z] [C] [U] et de la société Crédit industriel et commercial.
Les trois procédures ont été jointes et pousuivies sous le numéro de RG 23/01790.
***
À l'issue de la procédure d'appel clôturée le 26 novembre 2024 les prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.
Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 6 avril 2023, M. [Z] [C] [U]
présente, en ces termes, ses demandes à la cour :
'Vu les articles 1134 du Code civil,
Vu les articles 1153 et 1154 du Code civil,
Vu l'article 1186 du Code civil,
Vu l'article 378 du Code de procédure civile,
Vu l'article 700 du Code de procédure civile,
Vu l'article L. 313-22 du Code monétaire et financier,
Vu l'assignation et les conclusions adverses,
Vu les pièces,
Il est demandé à la Cour de :
A titre principal :
DECLARER M. [Z] [C] [U] recevable et bien fondé en son appel, ses demandes, fins et conclusions,
INFIRMER le jugement du Tribunal de commerce de Bobigny du 13 décembre 2022 en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a rejeté la demande de sursis à statuer et la demande de vérification d'écritures formulées par Messieurs [P] et [O] [C]
DEBOUTER le CIC de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de M. [Z] [C] [U],
DEBOUTER Messieurs [P] et [O] [C] de leurs demandes de sursis à statuer,
ET STATUANT À NOUVEAU
DECLARER caduque le cautionnement donné par M. [Z] [C],
A titre subsidiaire :
DECLARER non opposables à M. [Z] [C] les intérêts découlant de la dette cautionnée eu égard à l'absence de notification à la caution,
PRONONCER la déchéance des intérêts, avec imputation des paiements sur le capital,
ACCORDER les plus larges délais de paiement à M. [Z] [C] soit un report de deux ans,
En tout état de cause,
CONDAMNER le C.I.C. à payer à M. [C] la somme de 2.500 euros au titre de l'article
700 du Code de procédure civile,
CONDAMNER le C.I.C. aux entiers dépens.'
Au dispositif de leurs dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 21 avril 2023, MM. [P] [E] [C] [U] et [O] [C]
présentent, en ces termes, leurs demandes à la cour :
'Il est demandé à la Cour,
D'infirmer la décision entreprise,
Statuant à nouveau,
Vu l'article 299 du Code de Procédure Civile et les articles 287 et suivants du Code de Procédure Civile,
Prendre acte de ce que Messieurs [P] et [O] [C] arguent de faux les actes de cautionnement produits par le CIC,
Procéder à une vérification d'écritures conformément aux dispositions des articles 287 et suivants, et au besoin :
- enjoindre au CIC de produire les originaux des actes de cautionnement,
- enjoindre à Messieurs [P] et [O] [C] de produire tous documents manuscrits que la Cour pourrait estimer utile,
- convoquer Messieurs [P] et [O] [C] en vue de leur faire composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture, et de les entendre,
- désigner tout technicien qu'il lui plaira pour l'assister dans cette procédure de vérification.
En tout état de cause,
Prononcer la nullité du cautionnement,
Débouter le CIC de l'ensemble de ses demandes,
Condamner le CIC au paiement d'une somme de 3.000 € au bénéfice de chacun des concluants sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile, outre les entiers dépens de l'instance.'
Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 4 juillet 2023, la société Crédit industriel et commercial
présente, en ces termes, ses demandes à la cour :
'Il est demandé à la Cour de Céans de,
Vu les articles 1134 et suivants du Code Civil,
Vu les articles 1153 et 1154 du Code Civil,
- RECEVOIR le CIC en ses demandes, fins et conclusions et les déclarer recevables et bien
fondées,
- CONFIRMER le jugement du Tribunal de Commerce de BOBIGNY en date du 13 décembre 2022 en toutes ses dispositions,
En conséquence,
- DEBOUTER Monsieur [Z] [C] [U] de l'ensemble de ses demandes,
fins et conclusions,
- DEBOUTER Monsieur [P] [E] [C] [U] et Monsieur [O] [C] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
En tout état de cause,
CONDAMNER solidairement Messieurs [Z] [C] [U], [P] [E]
[C] [U] et [O] [C] [U] à payer au CIC la somme de
3.000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC.
CONDAMNER solidairement Messieurs [Z] [C] [U], [P] [E]
[C] [U] et [O] [C] [U] aux entiers dépens de l'instance et de ses suites.'
Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs conclusions précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
La société Crédit industriel et commercial poursuit le recouvrement de trois créances de 60 000 euros chacune qu'elle dit détenir à l'égard de MM. [Z] [C] [U], [P] [C] [U], et [O] [C], au titre de cautionnements donnés en garantie des engagements de la société ZAS TP, le 14 juin 2019 en ce qui concerne M. [Z] [C] [U], et le 19 juin 2019 s'agissant de MM. [C] [U] et [O] [C].
Le 24 octobre 2020, M. [Z] [C] [U] a dénoncé son cautionnement, au motif qu'il n'exerçait plus de fonctions dans la société. Pour ce faire, il s'est adressé à son agence bancaire, plutôt que d'envoyer son courrier au siège de la banque. À cette date, selon la banque le solde débiteur de la société ZAS TP s'élevait à 101 127,97 euros, ce que conteste M. [Z] [C] [U], selon lequel il n'y avait pas encore eu d'incident auquel la banque aurait réagi, quand il s'est dégagé de son cautionnement.
En suite au jugement rendu le 14 janvier 2021 par le tribunal de commerce de Bobigny prononçant la liquidation judiciaire de la société ZAS TP, la société Crédit industriel et commercial a déclaré sa créance entre les mains du liquidateur judiciaire, pour un montant de 160 401 euros au titre d'un PGE souscrit le 30 juillet 2020, et pour un montant de 80 390,76 euros au titre du découvert en compte courant professionnel.
Par courriers recommandés avec demande d'avis de réception datés du 9 février 2021, la société Crédit industriel et commercial a mis en demeure chacune des trois cautions de satisfaire à son engagement pris à concurrence de la somme de 60 000 euros.
M. [Z] [C] [U] a alors soutenu que son engagement avait pris fin le 23 octobre 2020, puisqu'il l'avait donné sous condition qu'il soit dirigeant de la société, ce qui n'est plus le cas.
De leur côté, MM. [P] [C] [U] et [O] [C] ont dans un courrier daté du 12 février 2021 prétendu découvrir avec grande stupéfaction être engagés comme cautions, puis ont argué de faux les documents dont se prévaut la banque à leur endroit. Sur ce point la société Crédit industriel et commercial fait observer que MM. [P] [C] [U] et [O] [C], qui ont produit à cette occasion des documents personnels (avis d'imposition sur les trois dernières années, bulletins de paye, relevés bancaires) en vue d'attester de leurs capacités financières, sont manifestement de mauvaise foi en prétendant tout ignorer de leur engagement.
En première instance, in limine litis MM. [O] [C] et [P] [C] [U] ont soulevé avoir déposé plainte pénale le 19 mai 2021 pour faux, usage de faux et escroquerie, affirmant une fois de plus ne pas être les auteurs des mentions manuscrites ni avoir signé les actes de cautionnement dont se prévaut la banque. Pour ce motif ils ont formé à titre principal une demande de sursis à statuer, et subsidiairement, ont sollicité du tribunal qu'il procède à une vérification d'écriture. À hauteur d'appel seule la demande de vérification d'écriture est maintenue.
Quant à M. [Z] [C] [U], qui lui ne dénie pas sa signature, il réitère en cause d'appel l'ensemble des demandes dont les premiers juges l'ont débouté.
****
SUR LE CAUTIONNEMENT DE M. [Z] [C] [U]
Sur la caducité du cautionnement
M. [Z] [C] [U] fait valoir que son cautionnement était uniquement motivé par le fait qu'il présidait la société holding de la société débitrice, et qu'il s'était engagé à la double condition d'être mandataire social et de voir d'autres mandataires sociaux se porter également caution pour la société ZAS TP. Aussi, quittant la présidence de la société, son engagement s'est trouvé privé de cause. Après avoir informé le Crédit industriel et commercial de ce changement de présidence, son cautionnement est devenu caduc, en application des dispositions de l'article 1183 du code civil. Par ailleurs, la société Crédit industriel et commercial n'avait pas mis à jour les garanties du compte courant d'associé, la demande qui a été adressée par la banque aux deux autres cautions n'ayant pas abouti. Dans ces conditions la société Crédit industriel et commercial ne disposait plus de créance contre lui à la date de la demande en paiement.
La société Crédit industriel et commercial fait observer tout d'abord, que M. [Z] [C] [U] ne s'est pas conformé aux formes prévues par les stipulations de l'acte de cautionnement, de sorte que sa résiliation ne le libérait pas de son engagement. En outre, en premier lieu l'acte de cautionnement prévoyait que celui-ci ne serait pas affecté par un changement dans les rapports entre la caution et le cautionné, de sorte que la fin de son mandat social n'avait pas de conséquence sur son engagement. Ensuite, une stipulation de l'acte de cautionnement indiquait que l'existence d'autres cautions n'était pas une condition déterminante du cautionnement, faisant ainsi échec à l'argumentation de M. [Z] [C] [U]. Enfin, pour la société Crédit industriel et commercial le contrat prévoyait que la caution pouvait dénoncer son engagement à tout moment par lettre recommandée, sous réserve de respecter un préavis, cette dénonciation ne prenant alors effet que dans un délai de 90 jours à compter de la réception de la lettre. Or, la société Crédit industriel et commercial a reçu la lettre de M. [Z] [C] le 27 octobre 2020, de sorte que la dénonciation allait prendre effet le 27 janvier 2021. La société ZAS TP ayant été placée en liquidation judiciaire le 14 janvier 2021, la dénonciation ne pouvait donc plus produire d'effet, et l'engagement de M. [Z] [C] couvrait bien le solde du compte courant, débiteur au mois d'octobre 2020.
Sur ce
S'il n'est nullement contesté qu'il n'occupait plus de fonctions dirigeantes au sein de la société ZAS TP depuis plusieurs mois lorsqu'il a été appelé en paiement par la banque, par voie de mise en demeure du 9 février 2021, force est de constater que M. [Z] [C] [U] est totalement défaillant dans l'administration de la preuve de ses affirmations selon lesquelles ce cautionnement aurait été subordonné à l'exercice desdites fonctions ou encore au cautionnement d'autrui, M. [Z] [C] [U] ne produisant pas la moindre pièce en ce sens, allégations au demeurant contredites pas les termes-mêmes de son engagement de caution.
En toute hypothèse et pour l'essentiel, et comme jugé par le tribunal '... aux termes de l'acte de cautionnement la caution reste tenue vis à vis de la banque au remboursement intégral et définitif de tous les engagements du cautionné nés antérieurement à la date de la révocation ce qui est donc le cas de la créance du CIC au titre du solde du compte courant'.
D'ailleurs, M. [Z] [C] [U] lui-même, dans son courrier daté du 24 octobre 2020 adressé à l'agence du Crédit industriel et commercial de [Localité 10] au lendemain de l'assemblée générale extraordinaire actant la fin de son actionnariat et de sa présidence des sociétés ZAS Groupe, ZAS TP et AEVP, courrier par lequel il entendait mettre fin à tous les cautionnements souscrits en garantie desdites sociétés, expose qu'en conséquence il ne pourra plus être tenu responsable des éventuelles dettes contractées par celles-ci à compter du 23 octobre 2020.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce que le tribunal est entré en voie de condamnation à l'encontre de M. [Z] [C] [U] restant tenu des engagements nés antérieurement à sa dénonciation, conformément à l'acte de cautionnement du 14 juin 2019.
Sur le défaut d'information à caution
Sur le défaut d'information annuelle
Le tribunal a écarté la demande de M. [Z] [C] [U] aux motifs que 'le CIC a bien procédé à l'envoi de la lettre d'information des cautions en mars 2020 (le solde du compte courant étant au demeurant créditeur à cette date)' , et que 'le CIC ne demande que les intérêts au taux légal et non les intérêts conventionnels'.
Pour critique de cette décision, M. [Z] [C] [U] fait valoir que les courriers simples fournis par la société Crédit industriel et commercial ne permettent pas de justifier de l'exécution par la banque de son obligation annuelle d'information de la caution conformément aux dispositions des articles 2293 alinéa 2 du code civil et L. 313-22 du code monétaire et financier.
L'article 2293 du code civil dispose : 'Le cautionnement indéfini d'une obligation principale s'étend à tous les accessoires de la dette, même aux frais de la première demande, et à tous ceux postérieurs à la dénonciation qui en est faite à la caution. Lorsque ce cautionnement est contracté par une personne physique, celle-ci est informée par le créancier de l'évolution du montant de la créance garantie et de ses accessoires au moins annuellement à la date convenue entre les parties ou, à défaut, à la date anniversaire du contrat, sous peine de déchéance de tous les accessoires de la dette, frais et pénalités'.
Également visé par M. [Z] [C] [U], l'article L. 313-22 du code monétaire et financier disposait : 'Les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.'
Désormais il y a lieu d'appliquer les dispositions nouvelles de l'article 2302 du code civil tel qu'issu de la réforme du droit des sûretés, conformément à l'article 37 de l'ordonnance n°2021-1192 du 15 septembre 2021 selon lequel les dispositions de l'ordonnance entrent en vigueur le 1er janvier 2022 et en cette matière s'appliquent y compris aux cautionnements constitués antérieurement.
L'article 2302 nouveau du code civil dispose :'Le créancier professionnel est tenu, avant le 31 mars de chaque année et à ses frais, de faire connaître à toute caution personne physique le montant du principal de la dette, des intérêts et autres accessoires restant dus au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation garantie, sous peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus depuis la date de la précédente information et jusqu'à celle de la communication de la nouvelle information'. Cet article se poursuit ainsi : 'Dans les rapports entre le créancier et la caution, les paiements effectués par le débiteur pendant cette période sont imputés prioritairement sur le principal de la dette. Le créancier professionnel est tenu, à ses frais et sous les mêmes sanctions, de rappeler à la personne physique le terme de son engagement ou, si le cautionnement est à durée indéterminée, sa faculté de résiliation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci peut être exercée (...)'.
Le nouvel article du code civil reprend ainsi les prévisions de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier - sur lequel l'appelant fonde sa demande - les principes dégagés jusqu'ici par la jurisprudence restant toutefois applicables.
Ainsi, si aucune forme n'est exigée de la banque pour l'envoi de ces informations, il lui incombe toutefois de prouver qu'elle a satisfait à son obligation d'information annuelle, dont on rappellera qu'elle pèse sur l'établissement bancaire jusqu'à l'extinction de la dette.
La société Crédit industriel et commercial soutient l'avoir respectée, les courriers ayant été expédiés à chacune des cautions - pièce 19. Or, il s'avère que ces lettres d'information annuelle, dont celle de M. [Z] [C] [U] datée du 3 mars 2020, ont fait l'objet d'un envoi par lettre simple. Or, en l'état actuel de la jurisprudence de la Cour de cassation, la seule production par la banque débitrice de cette information, de la copie d'une lettre simple, ne suffit pas à rapporter la preuve de son envoi. Aucun autre élément du dossier n'établit qu'il y aurait été procédé.
Par conséquent, en l'absence de toute information correctement délivrée, il convient de retenir que la banque doit être déchue dans les conditions de l'article 2293 du code civil à partir de la date anniversaire du contrat de cautionnement, soit à compter du 19 juin 2020 le cautionnement dont s'agit étant du 19 juin 2019, s'agissant d'un cautionnement dit omnibus, indéfini au sens dudit article précité pour avoir été consenti pour une durée indéterminée.
M. [Z] [C] [U] estime que la banque se devait de fournir un décompte, à défaut sa créance ne peut être vérifiée et considérée comme certaine. Pourtant, la société Crédit industriel et commercial verse au débat les pièces permettant à la cour de tirer les conséquences de la déchéance présentement prononcée :
* En pièce 19, les lettres d'information à caution datées du 3 mars 2020 auxquelles il est joint un relevé faisant état d'un solde de compte courant créditeur,
* En pièce 14, sa déclaration de créance au passif de la liquidation judiciaire de la société ZAS TP, entre les mains de la Selafa MJA en la personne de Me [B] [F], et dont il ressort que le solde du compte courant n°[XXXXXXXXXX01] est au 14 janvier 2021 de : - 80 390,76 euros,
* En pièce 8, la liste des mouvements avec soldes progressifs du compte n°[XXXXXXXXXX01] faisant état d'un solde de : - 80 201,70 euros au 23 février 2021, relevé à l'examen duquel il apparaît que sur la période courant à partir du 19 juin 2020 (date de point de départ de la déchéance prononcée au profit de M. [Z] [C] [U]) ont été débités du compte, des 'intérêts/frais' pour les montants suivants : 3 411,49 euros le 2 juillet 2020, et 4 760,27 euros le 10 octobre 2020, dont la banque doit être déchue pour avoir manqué à son obligation d'information due à la caution.
La créance de la banque à l'égard de la caution M. [Z] [C] [U] une fois expurgée de ces derniers montants étant supérieure à celle de 60 000 euros qui constitue le maximum de son engagement de caution, M. [Z] [C] [U] ne pourra être condamné en paiement que dans la limite de cette dernière somme, à assortir de l'intérêt légal.
Sur le défaut d'information sur incident de paiement
M. [Z] [C] [U] fait valoir qu'il n'a jamais été informé par la société Crédit industriel et commercial de la défaillance du débiteur, depuis le premier incident de paiement, ce qui constitue un manquement au devoir d'information prévu par l'article L. 333-1 du code de la consommation. Il demande donc que la banque soit déchue de son droit aux intérêts, avec imputation sur le capital restant dû, conformément à l'article L. 343-5 du même code.
L'article 2305 nouveau du code civil désormais applicable dispose que : 'Le créancier professionnel est tenu d'informer toute caution personne physique de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement, à peine de déchéance de la garantie des intérêts et pénalités échus entre la date de cet incident et celle à laquelle elle en a été informée'.
La société Crédit industriel et commercial allègue qu'à compter du placement du débiteur en liquidation judiciaire le 14 janvier 2021, les cautions étaient informées de sa situation exacte, dans la mesure où la société ne pouvait plus réaliser de paiement. De plus, la société Crédit industriel et commercial a adressé ses demandes de paiement consécutives à l'ouverture de la liquidation, par lettres recommandées en date du 2 février 2021. Les cautions ont été informées le 2 février 2021 de la défaillance du débiteur, caractérisée par son placement en liquidation judiciaire.
Sur ce
La déchéance qui résulterait du manquement de la banque à cette obligation d'information, à la supposer fondée porterait sur des intérêts dont la déchéance est prononcée au titre du défaut d'information annuelle à caution. La demande est donc sans objet.
Sur la demande de délais de paiement formulée par M. [Z] [C] [U]
Le premier juge pour rejeter la demande de délai de grâce de M. [Z] [C] [U] demandant subsidiairement au tribunal de lui accorder un délai pour s'acquitter de sa dette dans l'attente des produits devant lui revenir par la liquidation judiciaire de la société ZAS TP, a considéré que rien ne prouve que la liquidation judiciaire de la société ne sera pas impécunieuse, les sommes restant dues au titre d'un PGE de 160 000 euros s'ajoutant au solde débiteur du compte courant.
Demandant l'infirmation du jugement déféré, ce ce chef, M. [Z] [C] [U] fait valoir qu'à l'inverse, aucun élément ne montre que la liquidation judiciaire des sociétés sera impécunieuse et que l'octroi d'un délai comme prévu à l'article 1343-5 du code civil permettra d'attendre la perception des fonds qui en seront issus.
Pour s'opposer à la demande de M. [Z] [C] [U], la société Crédit industriel et commercial fait valoir que ce dernier ne fournit aucun élément sur sa situation financière ou la répartition des fonds au profit de la banque à l'issue de la procédure collective pourtant ouverte depuis plus de deux ans.
Sur ce
En vertu de l'article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Tel aménagement de la dette n'est envisageable que si son montant le permet eu égard aux facultés contributives du débiteur et si les propositions faites pour son apurement permettent à celui-ci de s'en acquitter dans le respect des droits du créancier. En outre, l'octroi d'un délai de paiement qui n'est pas de plein droit ne peut bénéficier qu'au débiteur de bonne foi.
Une demande de report de paiement de la dette pour être reçue doit être appuyée par des éléments suffisamment précis, tangibles, et certains, permettant de croire à un désintéressement du créancier à l'expiration du délai de grâce.
Or à l'appui de sa demande M. [Z] [C] [U] ne propose qu'un élément incertain, tant dans son existence - la réalisation d'actifs dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire - que quant à sa date.
Dans ces conditions sa demande de report du paiement de la dette, en l'état, ne peut qu'être rejetée.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
M. [Z] [C] [U], qui échoue dans ses demandes, supportera la charge des dépens le concernant et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de la société Crédit industriel et commercial formulée à son égard sur ce même fondement, à hauteur de la somme de 1 000 euros.
SUR LA VÉRIFICATION D'ÉCRITURE
MM. [P] [C] [U] et [O] [C] soutiennent qu'ils n'ont jamais souscrit d'actes de cautionnement quels qu'ils soient, et qu'ils ont découvert ceux invoqués par la banque après sa demande en paiement, en février 2021. Ils ne sont pas à l'origine des mentions et signatures figurant sur les actes de cautionnement, qui ont été imitées, ce qu'une comparaison rapide permet de constater. Ils demandent donc à la cour, au visa des articles 299, 287 et suivants du code de procédure civile, de procéder à une vérificationd'écriture, qui n'avait pas été réalisée de manière effective par le tribunal, à partir des documents produits par leur conseil.
De fait, le tribunal a écrit :
'Attendu que les signatures portées au pied des actes de cautionnement sont semblables à celles figurant en particulier sur les statuts de la société, ou sur les procès-verbaux d'assemblée générale, pièces produites par le CIC ;
Attendu qu'il est constant que le fait que les mentions manuscrites de l'acte de cautionnement ne soient pas de la main-même du signataire n'entache pas de nullité cet acte, avant même la réforme du cautionnement entrée en vigueur le premier janvier 2022, s'il n'y a pas de doute sur l'identité du signataire'.
La société Crédit industriel et commercial expose que les originaux des actes de cautionnement ont été fournis et examinés par les parties lors de l'audience de plaidoirie tenue devant le tribunal de commerce, et que celles-ci ont reconnu l'existence de similitudes dans les signatures. Elle souligne qu'en outre, les actes ont été écrits par trois personnes différentes, un entretien téléphonique a eu lieu entre chaque caution et un conseiller de la banque, et les cautions ont fourni toutes les trois des actes les concernant au moment de la conclusion des engagements (avis d'imposition, relevés bancaires...).
M. [Z] [C] [U] - même s'il ne dénie pas sa propre signature, fait observer que les documents présentés par MM. [P] [C] [U] et [O] [C] ne sont pas de nature à justifier une expertise en écriture, dans la mesure où il ne s'agit pas de documents officiels mais de mentions sur papier libre, ne permettant pas à la cour de procéder utilement à une comparaison. Il approuve le tribunal en ce qu'il a écrit : 'Attendu que monsieur [P] [E] [C] [U] et monsieur [O] [C] n'expliquent pas comment le CIC pourrait être en possession d'informations financières confidentielles s'ils ne les ont pas eux-mêmes fournies au moment où ils ont pris leur engagement et où le CIC l'a accepté.'
Sur ce
En vertu de l'article 287 du code de procédure civile, si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte.
En l'espèce, la cour n'est pas en possession d'éléments suffisants pour déterminer si M. [O] [C] d'une part, et M. [P] [C] [U] d'autre part, sont bien les auteurs de la mention manuscrite qu'ils contestent, ainsi que de la signature qui s'y rapporte.
Il y a donc lieu, avant dire droit, d'ordonner la réouverture des débats et la comparution personnelle de M. [O] [C] et M. [P] [C] [U] dans les conditions indiquées au dispositif du présent arrêt avant dire droit, aux fins d'audition et en vue de recueillir les échantillons nécessaires de leurs écritures et de leurs signatures.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant dans la limite de l'appel,
1) CONFIRME le jugement déféré en ce que le tribunal a débouté M. [Z] [C] [U], de sa demande de constater la caducité de son engagement de caution et de sa demande de délais de paiement,
Le RÉFORME en ses autres dispositions le concernant,
Et statuant à nouveau,
DÉCHOIT la société Crédit industriel et commercial de son droit aux accessoires de la dette, frais et pénalités dans les conditions de l'article 2293 du code civil ;
Condamne M. [Z] [C] [U] à payer, en sa qualité de caution de la société ZAS TP, à la société Crédit industriel et commercial, la somme de 60 000 euros assortie de l'intérêt au taux légal à compter de la date de la mise en demeure, du 9 février 2021 ;
CONDAMNE M. [Z] [C] [U] aux entiers dépens de l'instance dans la mesure où ils ont été exposés à son égard ;
Le CONDAMNE à payer à la société Crédit industriel et commercial la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
2) INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions concernant M. [O] [C] et M. [P] [C] [U],
Et statuant à nouveau,
Par jugement avant dire droit :
DIT y avoir lieu à vérification d'écriture ;
ORDONNE la réouverture des débats,
ORDONNE la comparution personnelle de M. [O] [C] et M. [P] [C] [U] à l'audience de la Cour d'appel de Paris, Pôle 5 Chambre 6, qui se tiendra en conseiller rapporteur le jeudi 15 mai 2025 à 9 heures, salle Jules Grévy,
DIT que la présente décision tient lieu de convocation à l'égard de M. [O] [C] et de M. [P] [C] [U], et de l'avocat de chacune des parties.
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LE GREFFIER LE PRÉSIDENT