CA Poitiers, 2e ch., 11 mars 2025, n° 23/02504
POITIERS
Arrêt
Autre
ARRET N°107
CL/KP
N° RG 23/02504 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G5JY
S.A.R.L. PORCELAINES APILCO
C/
Société C.S.F
Loi n° 77-1468 du30/12/1977
Copie revêtue de la formule exécutoire
Le à
Le à
Le à
Copie gratuite délivrée
Le à
Le à
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 11 MARS 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/02504 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G5JY
Décision déférée à la Cour : jugement du 16 octobre 2023 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de POITIERS.
APPELANTE :
S.A.R.L. PORCELAINES APILCO
[Adresse 6]
[Localité 2] / FRANCE
Ayant pour avocat plaidant Me Guillaume ALLAIN, avocat au barreau de POITIERS.
INTIMEE :
Société C.S.F pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social.
[Adresse 7]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Ayant pour avocat postulant Me Henri-Noël GALLET de la SCP GALLET-ALLERIT-WAGNER, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Charles BAGHDASARIAN, avocat au barreau de PARIS.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 29 Janvier 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Lydie MARQUER, Présidente
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Madame Lydie MARQUER, Présidente et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
Par jugement en date du 24 juillet 2015, le tribunal de commerce de Poitiers a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société par actions simplifiée Financière Deshoulières.
Le 18 février 2016, la société [Adresse 3] a signé, pour l'ensemble des enseignes du groupe Carrefour, dont la société par actions simplifiée Csf (la société Csf) une convention de partenariat avec son fournisseur, la société par actions simplifiée Financière Deshoulières pour l'ensemble de ses enseignes.
Cette convention de partenariat a défini les tarifications et conditions de fournitures par la société Financière Deshoulières d'articles de type assiettes et plats, aux différents établissements desservis par la société Csf pour toute la durée de l'année 2016.
Par jugement en date du 17 juin 2016, le tribunal de commerce de Poitiers a ordonné la cession des actifs de la société Financière Deshoulières au profit de la société Jannus Cession K&K, prise en la personne des sociétés suivantes : les sociétés Porcelaines Limoges, Porcelaines Apilco et Daralaine.
Entre le 9 juin 2016 et le 5 janvier 2017, la société financière Deshoulières puis la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco (la société Apilco) ont présenté à la société Csf 71 des avoirs et factures.
Le 30 avril 2019, en dernier lieu la société Apilco a mis en demeure la société Csf de régler un certain nombre de ses factures.
Le 28 juin 2021, la société Apilco a attrait la société Csf devant le tribunal de commerce de Poitiers.
Dans le dernier état de ses demandes, la société Apilco a demandé de :
- déclarer ses demandes recevables,
- déclarer sa créance non prescrite,
- condamner la société Csf à lui payer les factures impayées correspondant à la somme totale de 168.991,85 euros hors taxes (ht),
- condamner la société Csf au paiement des intérêts, frais et pénalités détaillés comme suit :
- au titre des intérêts arrêtés au 8 juin 2021, la somme de 104.615,48 euros ht,
- au titre des frais de recouvrement la somme de 2.280 euros ht,
- au titre de l'application de la clause pénale, la somme de 27.498,06 euros ht,
pour un montant total de 134.393,54 euros ht.
Dans le dernier état de ses demandes, la société Csf a demandé de :
- déclarer irrecevable l'ensemble des demandes de la société Apilco, ou à tout le moins, d'en réduire le quantum,
- débouter la société Apilco de l'ensemble de ses demandes.
Par jugement en date du 16 octobre 2023, le tribunal de commerce de Poitiers a :
- déclaré irrecevable l'action de la société Apilco,
- débouté la société Apilco de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- débouté la société Csf de l'ensemble de ses autres demandes, fins et conclusions,
- condamné la société Apilco à verser à la société Csf la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles.
Le 15 novembre 2023, la société Apilco a relevé appel de cette décision en intimant la société Csf.
Le 21 décembre 2024, la société Apilco a demandé :
- d'infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau,
- de déclarer son action recevable,
- de condamner la société Csf à lui payer la somme de 286.045,40 euros, outre les intérêts au taux contractuel, correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal plus 10%, sur la somme de 168 991,85 euros, à compter du 9 juin 2021,
- juger qu'il serait fait application de l'article 1343-2 du code civil en ce qui concernait les intérêts,
- débouter la société Csf de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la société Csf à lui payer la somme de 7.000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Le 14 mai 2024, la société Csf a demandé à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
en tout état de cause,
- débouter la société Porcelaines Apilco de l'ensemble de ses demandes,
à titre subsidiaire,
- réduire à de plus justes proportions le montant de la créance principale et des pénalités sollicitées,
- condamner la société Apilco au paiement d'une somme de 8.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
Le 13 janvier 2025, a été rendue l'ordonnance de clôture de l'instruction de l'affaire.
A l'audience du 29 janvier 2025, les parties ont été invitées à s'exprimer par note en délibéré sous quinzaine sur la présence ou non, dans les pièces de la société Apilco, de sa facture n°127478 du 31 août 2016 conduisant à un avoir de 67,97 euros au profit de la société Csf.
Le 31 janvier 2025, la société Apilco a déposé une note en délibéré.
MOTIVATION
Sur la clause de médiation préalable
Selon l'article 122 du code de procédure civile,
Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel que le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Selon l'article 30 du même code,
L'action est le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.
Pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention.
Selon l'article 31 du même code, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.
Il résulte des articles 30 et 31 du code de procédure civile que le bien-fondé d'une demande n'est pas un motif de recevabilité de celle-ci, mais constitue la condition de son succès.
Une clause de médiation préalable insérée dans un contrat, qui n'a reçu aucune exécution, constitue une fin de non-recevoir (Cass. 1ère civ., 8 avril 2009, n°08-10.866, publié).
Selon l'article L. 631-22 du code de commerce, alinéa 1, concernant le redressement judiciaire,
A la demande de l'administrateur, le tribunal peut ordonner la cession totale ou partielle de l'entreprise civile ou les plans proposés apparaissent manifestement susceptible de permettre le redressement l'entreprise en l'absence de tels plans. Les dispositions de la section 1 du chapitre II du titre IV, à l'exception du I de l'article L. 642-2, et de l'article L. 642-22 sont applicables à cette cession. Le mandataire judiciaire exerce les missions dévolues au liquidateur.
Selon l'article L. 642-7 du même code, relatif à la liquidation judiciaire, en ses deux premiers alinéas,
Le tribunal détermine les contrats de crédit-bail, de location ou de fourniture de biens ou services nécessaires au maintien de l'activité au vu des observations des cocontractants du débiteur transmis au liquidateur ou à l'administrateur lorsqu'il en a été désigné.
Le jugement qui arrête le plan emporte cession de ces contrats, même lorsque la cession est précédée de la location-gérance prévue à l'article L. 642-13.
Seuls les contrats mentionnés dans le plan de cession font l'objet d'une reprise par le cessionnaire (Cass. com., 16 octobre 1990, n°89-13.367, Bull., IV, n°241).
Une novation ne peut se déduire que des actes en exprimant l'intention, de manière claire et non équivoque.
Selon la convention de partenariat susdites, en son article 9. 3,
A défaut d'accord amiable, les parties conviennent de soumettre leur différend sous l'égide du centre de médiation et d'arbitrage de la chambre de commerce et d'industrie de [Localité 4]. Les parties organiseront la médiation selon le règlement de médiation en vigueur. Les parties s'engagent à partager à parts égalent les frais de ladite médiation, tout en conservant à leur charge des frais et des honoraires de leurs avocats respectifs
...
Les parties entendent conférer à cette procédure, prévue aux deux alinéas ci-dessus, une pleine force contractuelle. De commune volonté des parties, l'action en justice engagée par l'une d'elle en inobservation de cette procédure sera irrecevable.
Au visa de cette clause, la société Csf demande de déclarer irrecevables les demandes en paiement exercées à son encontre par la société Apilco.
La société Apilco lui rétorque être tierce à cette convention, qui ne créerait aucune obligation à cet égard, de telle sorte que cette fin de non-recevoir contractuelle ne lui est pas opposable.
Elle rappelle que le jugement du 17 juin 2016 a ordonné la cession des actifs de la société Financière Deshoulières au profit de la société Janus Cession K&K, agissant au nom et pour son compte.
Elle soutient qu'une cession d'actifs n'est pas une cession de l'universalité du patrimoine de la société Financière Deshoulières.
Elle en déduit que le périmètre de cette cession n'incluait pas la convention de partenariat du 16 février 2016, signé entre la société Financière Deshoulières et la société [Adresse 3].
Elle avance que seules les créances clients auraient été cédées à la société Janus Cession K&K.
Elle observe que le jugement du 17 juin 2016 n'a pas mentionné la convention de partenariat au titre des contrats cédés.
Avec l'appelante, il y a lieu d'observer que ce jugement susdit, portant cession d'actifs, ne mentionne pas la convention de partenariat susdite au titre des contrats cédés.
Dès lors, il y aura lieu de retenir que la convention de partenariat ne fait pas partie des contrats transmis à la société Apilco.
Et la circonstance que postérieurement à ce jugement, la société Apilco entretienne des relations contractuelles avec la société Csf, fût-ce aux mêmes conditions que celles prévues dans la convention de partenariat, et portant sur les mêmes références d'articles commandés, et les mêmes prix unitaires, ne permet pas de considérer que les parties auraient entendu soumettre leurs relations à la dite convention de partenariat.
Du tout, il se déduira que la société Apilco n'est pas partie à la convention de partenariat, de telle sorte que la clause de médiation préalable qui y est insérée ne lui est pas opposable.
Sur la qualité de la société Apilco à agir en paiement des factures émises entre le 9 juin 2016 et le 30 juin 2016
Selon l'article 30 du même code,
L'action est le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.
Pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention.
Selon l'article 31 du même code, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.
Selon l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce, entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants, se prescrivent par 5 ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
Selon l'article 2224 du Code civil,
Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant l'exercer.
Le point de départ du délai de prescription quinquennale est l'exigibilité de l'obligation concernée par l'action en cause.
Par conséquent, doit être approuvé l'arrêt qui, après avoir énoncé que selon l'article L. 441-3 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable, la facture mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir et retenu que, la facture litigieuse mentionnant au titre du paiement une certaine date, la créance du vendeur était exigible à compter de celle-ci, fixe le point de départ du délai de prescription à cette date d'exigibilité fixée par le vendeur lui-même (Cass. com., 15 juin 2023, n°14-21.841, publié).
La société Csf soutient en substance que la société Apilco n'a pas qualité à agir pour exercer une action en paiement portant sur les factures émises entre le 9 juin 2016 et le 30 juin 2016, émises par la société Financière Deshoulières.
En rappelant que la société Apilco avait elle-même indiqué ne pas venir aux droits de la société Financière Deshoulières, la société Csf observe cependant que les factures émises pendant la période susdite l'ont été par la société Financière Deshoulières.
Elle en déduit que la demande portant sur le paiement des factures émises pendant cette période est irrecevable.
La société Apilco réplique qu'aucune prescription ne vient grever les factures émises pendant cette période, alors que le point de départ de la prescription de son action se situe à la date de paiement fixé par les factures.
En observant que celles-ci comportent toutes une échéance de paiement fixée à 2 mois de leur émission, que la facture la plus ancienne, émise le 9 juin 2016, comporte une échéance au 9 août 2016, et en rappelant qu'elle a assigné la société Csf le 28 juin 2016, la société Apilco soutient que son action en paiement n'est pas prescrite pour les factures émise pendant la période susdite.
Mais ce moyen tiré de l'absence de prescription de son action, est sans emport, alors que la société Csf ne l'a pas soulevée, mais a soulevé l'absence de qualité à agir de la société Apilco.
Au contraire, la société Apilco estime que les factures émises par la société Financière Deshoulières entre le 8 et le 23 juin 2016 font partie des créances des clients qui lui ont été cédés en vertu du jugement portant cession d'actifs du 17 juin 2016.
Le dispositif de ce jugement (page 21) fait ressortir qu'ont été cédées à la société Apilco l'ensemble des factures clients non mobilisées à recouvrer en l'état, émises par la société Financière Deshoulières, avec obligation pour la société cédante d'interrompre toute facturation clients à compter du 8 juin 2016 ainsi que toute cession de factures clients à cette même date.
Il précise que les commandes clients non exécutées sont prises en charge par l'acquéreur, sous réserve de restitution par la société cédante des éventuels acomptes perçus à ce titre.
Ce jugement fixe au 22 juin 2016 à 0 heure la prise de possession des actifs par la cessionnaire.
Il ressort ainsi des termes du dispositif du jugement portant cession d'actifs, clairs et non équivoques, que seules les factures clients non payées portant une date d'émission antérieure au 8 juin 2016 avaient été cédées à la société Apilco, et que la société Financière Deshoulières avait interdiction de continuer à facturer ces clients à compter du 8 juin 2016.
Du tout, il se déduira que la société Apilco n'a pas qualité à agir en recouvrement des créances issues des factures émises par la cédante à compter du 8 juin 2016.
Or, l'examen des factures émises entre le 8 juin 2016 et le 30 juin 2016 inclus met en évidence qu'elle ont pour auteur la société Financière Deshoulières.
Et en l'absence d'indication, sur celles-ci, d'une quelconque date de livraison, il ne peut se déduire que la date de livraison aurait été postérieure à la date d'entrée en possession des actifs par la cessionnaire, fixée au 22 juin 2016, de sorte que ces factures se rapporteraient à des commandes de clients non exécutées par la cédante, et qui aurait été exécutées par la cessionnaire après son entrée en possession.
Ainsi, il n'est pas possible de considérer que sur les factures émises à compter du 22 juin 2016, la persistance de l'indication de leur émission par la société Financière Deshoulières procéderait d'une simple erreur matérielle.
Il y aura donc lieu de déclarer irrecevable l'action de la société Apilco en paiement des factures émises entre le 8 juin 2016 et le 30 juin 2016 inclus, et le jugement sera confirmé de ce chef.
Son action sera déclarée recevable pour le surplus, et le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur le fond
S'il appartient à celui qui se prévaut d'une obligation d'en rapporter la preuve, c'est corrélativement à celui qui se prétend par son paiement qu'il revient de le démontrer.
C'est à celui qui entend se prévaloir de l'exception d'inexécution qu'il revient de rapporter la preuve que les conditions en sont réunies.
Lorsque deux professionnels sont en relations d'affaires sur une certaine durée, et que celles-ci ont donné lieu à plusieurs facturations, il peut en être déduit non seulement à la fois la connaissance suffisante par la première des conditions générales de vente de la seconde, mais encore l'acceptation, au moins tacite, par la première de ces mêmes conditions générales de vente.
Nul ne peut s'établir de titre à lui-même.
Un fournisseur ne peut pas réclamer paiement en se fondant sur les factures qu'il a lui-même établies (Cass. com., 18 juin 1991, n°88-12.209, Bull. IV, n°224).
Ayant relevé qu'un négociant en porcs, utilisant habituellement les services d'un abattoir, qui avait été informé d'une majoration du prix d'abattage avait fait connaître la direction « qu'il n'était pas disposé » à payer le nouveau tarif, avait continué à utiliser cet établissement pendant plusieurs mois et a réglé, sans réserve, les factures établies selon ce nouveau tarif, la cour d'appel ne fait qu'user de son pouvoir souverain lorsqu'elle déduit de ces circonstances que le négociant avait donné son accord nouveau tarif (Cass. com., 28 janvier 1975, n°73-14.936, Bull. IV, n°22).
Ayant constaté que ni la réalité des livraisons prises en compte, ni le montant des factures correspondantes n'étaient discutés et que seul était en litige le paiement de ces factures, de sorte que la contestation ne contredisait pas l'origine de la créance invoquée, une cour d'appel, dès lors qu'elle retenait que les débiteurs ne justifiaient pas avoir effectué le règlement des factures litigieuses, a pu condamner lesdits débiteurs à payer le montant des livraisons non contestées, sans renverser la charge de la preuve ni violer la règle de l'indivisibilité de l'aveu. (Cass. com., 23 octobre 1984, n°83-15.174, Bull. IV, n°277).
C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation qu'une cour d'appel a condamné une personne morale à régler une facture qu'elle n'avait pas contestée et dont elle s'était bornée à invoquer un prix excessif seulement plusieurs mois après la cessation de ses relations avec son fournisseur (Cass. com., 26 mai 1987, n°85-17.156, Bull. IV, n°128).
Il appartient au vendeur de prouver qu'il a mis la chose vendue à la disposition de l'acheteur dans le délai convenu.
L'acquéreur ne peut pas être tenu d'accepter une chose différente de celle qu'il a commandée.
La preuve de la non-conformité à la commande du matériel livré incombe à l'acquéreur qui soulève cette exception (Cass. com., 3 décembre 1980, n°78-13.305, Bull. IV, n°409).
Il appartient à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver. Dès lors, viole l'article 1315 du Code civil le tribunal qui, pour accueillir l'intégralité de la demande en paiement de marchandises dirigée contre le défendeur qui soutenait n'avoir reçu qu'une partie de sa commande et en avoir payé le prix, retient que cette partie ne rapporte pas la preuve de ce que les marchandises restant dues n'avaient jamais été livrées. (Cass. com., 23 octobre 1990, n°89-11.642, Bull., IV, n°251).
Sur les conditions générales de vente de la société Apilco :
La société Csf dénie que les conditions générales de vente de la société Apilco, figurant au verso de chacune de ses factures, puissent être applicables aux relations contractuelles, en se prévalant de l'existence du contrat de partenariat susdit et des conditions particulières liant les parties qui y avaient été insérées.
Mais il sera rappelé qu'il vient d'être retenu que la convention de partenariat signée par la société Financière Deshoulières ne faisait pas partie des actifs transférés à la société Apilco.
Et il sera observé qu'ayant des relations contractuelles avec la société Apilco du 7 juillet 2016 au 10 janvier 2017, la société Csf a eu nécessairement connaissance des conditions générales de vente de cette dernière figurant au dos de ses factures et y a consenti pour l'essentiel, sauf s'agissant des prix de vente, ainsi qu'il le sera vu plus bas.
Sur le principal des factures :
Pour faire la preuve de l'obligation dont elle se prévaut, la société Apilco se borne à produire ses factures, dont elle argue du non-paiement par la société Csf.
La société Csf lui objecte faire la preuve qu'elle a payé un total de 56 153,73 euros sur la totalité de la créance principale réclamée à hauteur de 168 991,85 euros.
Et elle soutient qu'outre les règlements intervenus, la société Apilco défaille à faire la preuve d'une créance certaine, liquide et exigible, qui dès lors serait infondée.
Par la production des factures dont elle est seule l'auteur, et sans production d'autres éléments émanant de la société Csf, ou même attestant de la livraison des marchandises afférentes à ses factures à la société Csf ou à ses préposés ou mandataires, la société Apilco défaille à faire la preuve de l'obligation dont elle se prévaut.
Et par la production de son extrait de compte client concernant la société Csf, quand bien même serait-il visé par son expert-comptable, la société Csf ne réussit pas plus à en faire la preuve, car ce document ne procède que des informations dont elle est seule à l'origine.
Ainsi, en l'état des éléments de preuve produit par la société Apilco, et de la contestation opposée par la société Csf, il sera retenu que pour l'essentiel, la première défaille à faire la preuve de l'obligation dont elle se prévaut.
* * * * *
En revanche, alors que la société Csf soutient avoir réglé certaines factures pour un principal à hauteur de 56 153,73 euros, il s'en déduira que celle-ci reconnaît ainsi par-là même le bien fondé de la demande de la société Apilco pour un tel montant.
Il pourra même être retenu que cette reconnaissance porte non seulement le montant déclaré payé, mais encore sur le montant total des factures auxquelles ses paiements se rapporte, sauf à examiner les exceptions invoquées à ce titre par l'acquéreur, ainsi qu'il le sera vu plus bas.
Il reste à établir si la société Csf fait la preuve de son paiement à hauteur du montant qu'elle revendique.
Elle produit ainsi la liste des chèques qu'elle prétend avoir payés en exécution des factures, avec leur numéro, leur montant, les numéros de facture auxquelles chacun de ses chèques se rapporterait, ou bien à défaut la référence de certaines notes de débit (ou Doi) correspondant à des débits réalisés sur certaines factures en raison d'anomalies identifiées.
Elle y joint un tableau retraçant les dates d'encaissement des chèques.
Elle verse, pour chaque débit d'office, une fiche faisant état de la facture à laquelle est affecté le débit d'office mais également l'objet pour lequel ce débit est appliqué.
Elle entend voir déduire de ce dernier document que les débits d'office concernent la plupart du temps un écart de quantité par rapport à la commande d'origine, des marchandises non conformes, ou encore des écarts avec le prix de base.
Ainsi, en complément des observations figurant plus haut, il se déduit des notes de débits pratiquées par la société Csf que celle-ci reconnaît avoir commandé les biens objet des factures sur lesquelles elle déclare avoir pratiqué ces débits.
En se bornant à produire la liste des chèques, qu'elle prétend avoir adressé à la société Apilco, ainsi qu'une autre liste afférente à leur date d'encaissement, dont elle est seule l'auteur, la société Csf ne démontre pas s'être acquittée de leur paiement à hauteur du montant qu'elle revendique, soit 56 173,73 euros.
A l'inverse, la société Apilco se borne à reconnaître avoir reçu paiement par la société Csf uniquement de chèques de montant de 7319,10 euros encaissé le 6 novembre 2016 et 3964,94 euros encaissé le 10 novembre 2016.
Et alors que le total des factures dont elle avait réclamé paiement s'élevait à 183 320,40 euros, elle indique, exactement, avoir déduit ces paiements partiels du montant des factures qu'elle a réclamées, outre crédit au profit de son client, le tout pour un montant de 14 328,55 euros, de sorte qu'elle ne lui réclame plus que 168 991,85 euros : et ce montant est précisément celui du principal de sa présente demande en litige.
* * * * *
En ce que les avis de débits d'office font état d'un écart de quantité livrée par rapport à la commande, les questions en résultant se rapportent à la preuve de l'obligation de délivrance.
Or, cette preuve incombe à la société Apilco.
Et, à défaut d'apporter le moindre élément sur les quantités effectivement délivrées, en se bornant à la production de ses seules factures, la société Apilco défaille à démontrer la parfaite exécution de son obligation de délivrance au regard des écarts de quantités ou des non-conformités alléguées par l'acquéreur.
Ainsi, il y aura lieu de retenir comme exactement déduits les débits auxquels l'acquéreur a procédé au visa des écarts de quantités.
- - - - -
En revanche, lorsque ces avis de débits invoquent la non-conformité des marchandises délivrées à la commande, la question en résultant soulève le défaut de conformité.
Or, cette preuve incombe à la société Csf.
Et en se bornant à produire les seuls avis de débits, émis par elle-même, la société Csf défaille à faire la preuve des non-conformités qu'elle allègue.
Ainsi, il y aura lieu de retenir comme inexactement déduits les débits auxquels l'acquéreur a procédé au visa des non-conformités à la commande.
- - - - -
Lorsque ces avis de débits font état d'un écart de prix de base, cette question convoque la charge preuve de la rencontre des parties sur la chose et sur le prix.
D'un côté, la société Csf soutient que les relations contractuelles se sont poursuivies avec la société Apilco dans des conditions identiques à celles de la convention de partenariat du 17 juin 2016 avec la société Financière Deshoulières (qui, en son article 1er et en son annexe 6, contractualise les prix bruts pour l'année 2016).
De l'autre, la société Apilco a soutenu ne pas être partie à cette convention de partenariat qui ne lui est pas opposable.
Mais il vient d'être retenu que la convention de partenariat susdite n'est pas applicable aux relations entre parties.
Ainsi, la société Apilco ne peut donc pas se prévaloir de ses prix unitaires figurant dans cette convention antérieure à l'appui de ses facturations postérieures, et il lui appartient donc, pour chaque facture produite, de rapporter la preuve de l'accord de l'acquéreur sur la chose et sur le prix.
Certes, il sera relevé qu'au verso de ses factures, la société Apilco a fait figurer ses conditions générales, et ainsi qu'il sera détaillé plus bas, et au regard du caractère continu du flux d'affaires entre parties, il sera retenu que la société Csf avait nécessairement connaissance de ses conditions générales et y a acquiescé pour l'essentiel
Mais ses conditions générales, ainsi produites par la société Apilco, ne font aucunement référence à ses prix unitaires, article par article.
A tout le moins, eu égard à la circonstance que l'acquéreur a procédé à des débits d'office en raison d'un écart sur le prix de base, ainsi qu'il le sera vu plus bas, tout en poursuivant les relations contractuelles, il se déduira que celui-ci n'a pas entièrement consenti aux conditions générales, à supposer même que celles-ci fassent, au moins implicitement, référence aux prix unitaires pratiqués par le vendeur.
Ainsi, en se bornant à produire ses seules factures, comportant des prix dont le montant est contesté par l'acquéreur, le vendeur ne prouve pas avoir préalablement recueilli l'accord de celui-ci sur le prix que ce dernier a consenti.
Il y aura donc lieu de retenir comme exactement déduits les débits auxquels l'acquéreur a procédé au visa des écarts sur le prix de base.
* * * * *
Les factures présentées par la société Apilco comportent de manière systématique une numérotation par ordre croissant en fonction de leur date, étant observé que :
- les factures réputées émises par la société Financière Deshoulières, exclues du périmètre de ce litige par suite de l'irrecevabilité retenue, portent des numéros allant de 127015 pour la première facture de 1277,57 euros émise le 9 juin 2016 à 127191 pour la dernière facture de 1894,12 euros émise le 30 juin 2016 ;
- les factures objet du débat au fond, réputées émises par la société Apilco, portent des numéros allant de 127256 pour la facture de 2245,10 euros émise le 7 juillet 2016 à 128406 de 1631,23 euros le 10 janvier 2017.
Or, il sera observé, à deux exceptions près, que les avis de débits présentés par la société Csf portent :
- soit sur des factures dont la société Apilco ne réclame pas le paiement, et qui se rapportent selon toute vraisemblance à des factures antérieures émises par la société Financière Deshoulières, eu égard à leur numération (comme faisant référence à des factures portant les numéros 126780,126796) ;
- soit à des factures dont la société Apilco réclame paiement, mais qui ont été émises entre le 8 et le 30 juin 2016, et dont il vient d'être retenu que les demandes y afférentes sont irrecevables
(comme faisant référence aux factures portant les numéros 127015, 127017, 127018,127065,127149, 127150, 127192, 127194).
La société Csf a pratiqué un avis de débit portant sur la facture 127478 (émise le 2 septembre 2016 et aboutissant à un avoir de 67,97 euros émis par le vendeur au profit de l'acquéreur), pour un écart de prix de base (non prouvé par le vendeur) pour un montant de 4543,60 euros ttc.
Mais il sera observé que cet avis de débit, même s'il est rattaché à la facture 127478 ayant conduit à un avoir en sa faveur de 67,97 euros, se rapporte en réalité à des écarts de prix de base afférents à la facture n°127192 du 30 juin 2016 d'un montant de 18 287,71 euros.
Mais la cour a retenu que la société Apilco n'était pas recevable à réclamer paiement des factures émises jusqu'au 30 juin 2016 inclus.
Il s'en déduira donc que la société Csf n'est pas plus recevable à invoquer une exception portant sur une facture exclue du périmètre des prétentions admissibles de la société Apilco.
Ainsi, il n'y aura pas lieu de tenir compte de ce premier avis de débit pratiqué par la société Csf, et de déduire son montant des prétentions de la société Apilco.
Deuxièmement, l'avis de débit portant sur la facture 127484 émise le 2 septembre 2016 pour un montant de 3220,37 euros ttc, pour un écart de quantité (non prouvé par le vendeur) et des marchandises non conforme (non-conformité non prouvée par l'acquéreur), sera retenu pour la moitié de son montant de 47,90 euros ttc, soit de 23,95 euros ttc.
Ainsi, il y aura lieu de déduire du montant réclamé par la société Apilco un total de 23,95 euros ttc.
Il y donc lieu de condamner la société Csf, pour le principal des factures, à payer à la société Apilco la somme de 56 129,78 euros [(56 153,73 euros (paiement allégué mais non justifié par l'acquéreur) - 23,95 euros (montant des exceptions retenues au profit de l'acquéreur)].
Et la dite somme portera intérêt au taux contractuel de trois fois l'intérêt au taux légal majoré de 10 %, à compter du 9 juin 2021, en vertu des stipulations analysées plus bas.
Sur les accessoires :
- Pénalités et frais de recouvrement :
Il résulte de l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa version applicable au litige, la faculté pour tout prestataire de service, à l'égard de tout demandeur de ses prestations pour son activité professionnelle, d'établir des conditions générales de vente précisant les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture.
Selon ce texte, les professionnels d'un secteur, clients et fournisseurs, peuvent décider conjointement de réduire le délai maximum de paiement fixé à l'alinéa précédent. Ils peuvent également proposer de retenir la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation de services demandée comme point de départ de ce délai. Des accords peuvent être conclus à cet effet par leurs organisations professionnelles. Un décret peut étendre le nouveau délai maximum de paiement à tous les opérateurs du secteur ou, le cas échéant, valider le nouveau mode de computation et l'étendre à ces mêmes opérateurs.
En outre, les pénalités de retard pour non-paiement des factures sont dues de plein droit, sans rappel et sans avoir à être indiquées dans les conditions générales des contrats.
Selon ce texte, les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture, ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement dus au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date.
Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque Centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l'année en question.
Les pénalités de retard sont exigibles sans qu'un rappel soit nécessaire.
Le taux d'intérêt des pénalités de retard de la banque centrale européenne est applicable de plein droit, quant bien même il n'aurait pas indiqué dans le contrat.
Les pénalités de retard pour non-paiement des factures sont dues de plein droit, sans rappel, et sans avoir à être indiquées dans les conditions générales des contrats. La créance afférente naît donc automatiquement à l'échéance légale, soit le lendemain de la date à laquelle le paiement était prévu, sans qu'il y ait lieu à mise en demeure préalable.
La pénalité prévue par l'article L. 441-6 constitue un intérêt moratoire, de sorte qu'il est possible de l'assortir de la capitalisation prévue par l'article 1154, devenu 1343-2 du code civil.
Selon l'article 6 des conditions générales de la société Apilco, figurant au verso de ses factures, le taux des pénalités de retard s'élève à trois fois le taux d'intérêt légal plus 10 %, mais les pénalités sont exigibles sans qu'aucun rappel ne soit nécessaire, elles courent de plein droit à compter du jour suivant la date de règlement porté sur la facture, et en outre, l'acheteur devra, de plein droit une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 € au vendeur, pour chaque facture payée en retard, dès le lendemain de la date d'échéance, sans qu'un rappel soit nécessaire cette indemnité forfaitaire n'étant pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée (article D. 441-5 du code de commerce).
Il sera rappelé que la société Csf sera réputée avoir accepté les conditions générales de vente de la société Apilco, au moins s'agissant des modalités de paiement et des sanctions qui y sont attachées.
Au regard du montant et du nombre des factures retenues figurant plus haut, il y aura donc lieu de condamner la société Csf à payer à la société Apilco les sommes de :
- 29 816,14 euros au titre des frais de recouvrement des factures impayées aux échéances prévues, arrêté au 8 juin 2021, en prenant en compte la variation du taux légal entre le second semestre 2016 et le premier semestre 2021,
- 600 euros au titre des frais de recouvrement des factures impayés aux échéances prévues ;
soit 30 416,14 euros au total.
Il y aura lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts.
- Sur la clause pénale :
Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Lorsque l'engagement est exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.
Toute stipulation contraire de l'alinéa précédent sera réputée non écrite.
Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure
Constitue une clause pénale la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée.
Une clause pénale revêt un caractère comminatoire, comme ayant pour objet de faire assurer par l'une des parties l'exécution de son obligation.
Selon l'article 7 des conditions générales de la société Apilco,
Après mise en demeure restée infructueuse, le recouvrement contentieux des sommes dues au vendeur entraînera l'exigibilité, à titre de clause pénale, d'une indemnité égale à 15 % des sommes dues, en sus des acomptes perçus par le vendeur et les frais judiciaires éventuels.
Par la production de l'accusé de réception y afférent, portant la signature et le cachet de la société Csf à la date du 2 mai 2019, la société Apilco a justifié de sa mise en demeure en date du 30 avril 2019.
En vertu de cet article, la société Apilco demande la condamnation de la société Csf à lui payer une indemnité égale à 15 % du montant des factures impayées.
En application de cette clause, l'indemnité y afférente serait d'un montant de 8419,47 euros (56 129,78 euros impayés retenus x 15%).
La société Csf demande le rejet ou à tout le moins la réduction de cette clause pénale, en la considérant comme excessive, au regard des pénalités de retard et indemnité pour frais de recouvrement légaux, sus examinés.
Mais au regard de l'importance des délais d'impayés apprécié au jour de l'exigibilité de cette pénalité, le 30 avril 2019, et nonobstant les indemnités légales supplétives sus allouées, tout en tenant compte de l'érosion monétaire advenu pendant cette période, et tout en considérant l'importance des conséquences de ces impayés dans la trésorerie d'une entreprise de petite taille, il n'apparaît pas en quoi cette clause pénale présenterait un caractère manifestement excessif par rapport au préjudice effectivement souffert par la société Apilco.
Il n'y aura donc pas lieu de supprimer ou réduire la clause pénale.
La société Csf sera donc condamnée à payer à la société Apilco la somme de 7737,92 euros à ce dernier titre.
Il y aura donc lieu de :
- condamner la société Csf à payer à la société Apilco la somme de 94 965,39 euros (56 129,78 euros + 30 416,14 euros + 8419,47 euros), avec intérêts correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 56 129,78 euros à compter du 9 juin 2021 ;
- ordonner la capitalisation des intérêts, dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,
et le jugement sera infirmé de ces chefs.
* * * * *
Il sera rappelé que le présent arrêt vaut titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté la société Apilco de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance, et l'a condamnée aux dépens de première instance et à payer à la société Csf la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles.
La société Csf sera déboutée de ses demandes au titre des frais irrépétibles des deux instances, et sera condamnée aux dépens des deux instances et à payer à la société Apilco la somme de 7000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.
PAR CES MOTIFS
La cour,
statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco en paiement des factures émises entre le 9 juin 2016 et le 30 juin 2016 inclus ;
Confirme le jugement déféré de ce seul chef ;
Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :
Déclare recevable l'action de la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco en paiement des factures émises après le 30 juin 2016 ;
Condamne la société par actions simplifiée Csf à payer la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco la somme de 94 965,39 euros, avec intérêts correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 56 129,78 euros à compter du 9 juin 2021 ;
Ordonne la capitalisation des intérêts, dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
Rappelle que le présent arrêt vaut titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré ;
Condamne la société par actions simplifiée Csf aux entiers dépens de première instance et d'appel et à payer à la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco la somme de 7000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
CL/KP
N° RG 23/02504 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G5JY
S.A.R.L. PORCELAINES APILCO
C/
Société C.S.F
Loi n° 77-1468 du30/12/1977
Copie revêtue de la formule exécutoire
Le à
Le à
Le à
Copie gratuite délivrée
Le à
Le à
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 11 MARS 2025
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/02504 - N° Portalis DBV5-V-B7H-G5JY
Décision déférée à la Cour : jugement du 16 octobre 2023 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de POITIERS.
APPELANTE :
S.A.R.L. PORCELAINES APILCO
[Adresse 6]
[Localité 2] / FRANCE
Ayant pour avocat plaidant Me Guillaume ALLAIN, avocat au barreau de POITIERS.
INTIMEE :
Société C.S.F pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social.
[Adresse 7]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Ayant pour avocat postulant Me Henri-Noël GALLET de la SCP GALLET-ALLERIT-WAGNER, avocat au barreau de POITIERS
Ayant pour avocat plaidant Me Charles BAGHDASARIAN, avocat au barreau de PARIS.
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 29 Janvier 2025, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Lydie MARQUER, Présidente
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- Signé par Madame Lydie MARQUER, Présidente et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*******
Par jugement en date du 24 juillet 2015, le tribunal de commerce de Poitiers a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société par actions simplifiée Financière Deshoulières.
Le 18 février 2016, la société [Adresse 3] a signé, pour l'ensemble des enseignes du groupe Carrefour, dont la société par actions simplifiée Csf (la société Csf) une convention de partenariat avec son fournisseur, la société par actions simplifiée Financière Deshoulières pour l'ensemble de ses enseignes.
Cette convention de partenariat a défini les tarifications et conditions de fournitures par la société Financière Deshoulières d'articles de type assiettes et plats, aux différents établissements desservis par la société Csf pour toute la durée de l'année 2016.
Par jugement en date du 17 juin 2016, le tribunal de commerce de Poitiers a ordonné la cession des actifs de la société Financière Deshoulières au profit de la société Jannus Cession K&K, prise en la personne des sociétés suivantes : les sociétés Porcelaines Limoges, Porcelaines Apilco et Daralaine.
Entre le 9 juin 2016 et le 5 janvier 2017, la société financière Deshoulières puis la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco (la société Apilco) ont présenté à la société Csf 71 des avoirs et factures.
Le 30 avril 2019, en dernier lieu la société Apilco a mis en demeure la société Csf de régler un certain nombre de ses factures.
Le 28 juin 2021, la société Apilco a attrait la société Csf devant le tribunal de commerce de Poitiers.
Dans le dernier état de ses demandes, la société Apilco a demandé de :
- déclarer ses demandes recevables,
- déclarer sa créance non prescrite,
- condamner la société Csf à lui payer les factures impayées correspondant à la somme totale de 168.991,85 euros hors taxes (ht),
- condamner la société Csf au paiement des intérêts, frais et pénalités détaillés comme suit :
- au titre des intérêts arrêtés au 8 juin 2021, la somme de 104.615,48 euros ht,
- au titre des frais de recouvrement la somme de 2.280 euros ht,
- au titre de l'application de la clause pénale, la somme de 27.498,06 euros ht,
pour un montant total de 134.393,54 euros ht.
Dans le dernier état de ses demandes, la société Csf a demandé de :
- déclarer irrecevable l'ensemble des demandes de la société Apilco, ou à tout le moins, d'en réduire le quantum,
- débouter la société Apilco de l'ensemble de ses demandes.
Par jugement en date du 16 octobre 2023, le tribunal de commerce de Poitiers a :
- déclaré irrecevable l'action de la société Apilco,
- débouté la société Apilco de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- débouté la société Csf de l'ensemble de ses autres demandes, fins et conclusions,
- condamné la société Apilco à verser à la société Csf la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles.
Le 15 novembre 2023, la société Apilco a relevé appel de cette décision en intimant la société Csf.
Le 21 décembre 2024, la société Apilco a demandé :
- d'infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau,
- de déclarer son action recevable,
- de condamner la société Csf à lui payer la somme de 286.045,40 euros, outre les intérêts au taux contractuel, correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal plus 10%, sur la somme de 168 991,85 euros, à compter du 9 juin 2021,
- juger qu'il serait fait application de l'article 1343-2 du code civil en ce qui concernait les intérêts,
- débouter la société Csf de l'ensemble de ses demandes,
- condamner la société Csf à lui payer la somme de 7.000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Le 14 mai 2024, la société Csf a demandé à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
en tout état de cause,
- débouter la société Porcelaines Apilco de l'ensemble de ses demandes,
à titre subsidiaire,
- réduire à de plus justes proportions le montant de la créance principale et des pénalités sollicitées,
- condamner la société Apilco au paiement d'une somme de 8.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
Le 13 janvier 2025, a été rendue l'ordonnance de clôture de l'instruction de l'affaire.
A l'audience du 29 janvier 2025, les parties ont été invitées à s'exprimer par note en délibéré sous quinzaine sur la présence ou non, dans les pièces de la société Apilco, de sa facture n°127478 du 31 août 2016 conduisant à un avoir de 67,97 euros au profit de la société Csf.
Le 31 janvier 2025, la société Apilco a déposé une note en délibéré.
MOTIVATION
Sur la clause de médiation préalable
Selon l'article 122 du code de procédure civile,
Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel que le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
Selon l'article 30 du même code,
L'action est le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.
Pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention.
Selon l'article 31 du même code, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.
Il résulte des articles 30 et 31 du code de procédure civile que le bien-fondé d'une demande n'est pas un motif de recevabilité de celle-ci, mais constitue la condition de son succès.
Une clause de médiation préalable insérée dans un contrat, qui n'a reçu aucune exécution, constitue une fin de non-recevoir (Cass. 1ère civ., 8 avril 2009, n°08-10.866, publié).
Selon l'article L. 631-22 du code de commerce, alinéa 1, concernant le redressement judiciaire,
A la demande de l'administrateur, le tribunal peut ordonner la cession totale ou partielle de l'entreprise civile ou les plans proposés apparaissent manifestement susceptible de permettre le redressement l'entreprise en l'absence de tels plans. Les dispositions de la section 1 du chapitre II du titre IV, à l'exception du I de l'article L. 642-2, et de l'article L. 642-22 sont applicables à cette cession. Le mandataire judiciaire exerce les missions dévolues au liquidateur.
Selon l'article L. 642-7 du même code, relatif à la liquidation judiciaire, en ses deux premiers alinéas,
Le tribunal détermine les contrats de crédit-bail, de location ou de fourniture de biens ou services nécessaires au maintien de l'activité au vu des observations des cocontractants du débiteur transmis au liquidateur ou à l'administrateur lorsqu'il en a été désigné.
Le jugement qui arrête le plan emporte cession de ces contrats, même lorsque la cession est précédée de la location-gérance prévue à l'article L. 642-13.
Seuls les contrats mentionnés dans le plan de cession font l'objet d'une reprise par le cessionnaire (Cass. com., 16 octobre 1990, n°89-13.367, Bull., IV, n°241).
Une novation ne peut se déduire que des actes en exprimant l'intention, de manière claire et non équivoque.
Selon la convention de partenariat susdites, en son article 9. 3,
A défaut d'accord amiable, les parties conviennent de soumettre leur différend sous l'égide du centre de médiation et d'arbitrage de la chambre de commerce et d'industrie de [Localité 4]. Les parties organiseront la médiation selon le règlement de médiation en vigueur. Les parties s'engagent à partager à parts égalent les frais de ladite médiation, tout en conservant à leur charge des frais et des honoraires de leurs avocats respectifs
...
Les parties entendent conférer à cette procédure, prévue aux deux alinéas ci-dessus, une pleine force contractuelle. De commune volonté des parties, l'action en justice engagée par l'une d'elle en inobservation de cette procédure sera irrecevable.
Au visa de cette clause, la société Csf demande de déclarer irrecevables les demandes en paiement exercées à son encontre par la société Apilco.
La société Apilco lui rétorque être tierce à cette convention, qui ne créerait aucune obligation à cet égard, de telle sorte que cette fin de non-recevoir contractuelle ne lui est pas opposable.
Elle rappelle que le jugement du 17 juin 2016 a ordonné la cession des actifs de la société Financière Deshoulières au profit de la société Janus Cession K&K, agissant au nom et pour son compte.
Elle soutient qu'une cession d'actifs n'est pas une cession de l'universalité du patrimoine de la société Financière Deshoulières.
Elle en déduit que le périmètre de cette cession n'incluait pas la convention de partenariat du 16 février 2016, signé entre la société Financière Deshoulières et la société [Adresse 3].
Elle avance que seules les créances clients auraient été cédées à la société Janus Cession K&K.
Elle observe que le jugement du 17 juin 2016 n'a pas mentionné la convention de partenariat au titre des contrats cédés.
Avec l'appelante, il y a lieu d'observer que ce jugement susdit, portant cession d'actifs, ne mentionne pas la convention de partenariat susdite au titre des contrats cédés.
Dès lors, il y aura lieu de retenir que la convention de partenariat ne fait pas partie des contrats transmis à la société Apilco.
Et la circonstance que postérieurement à ce jugement, la société Apilco entretienne des relations contractuelles avec la société Csf, fût-ce aux mêmes conditions que celles prévues dans la convention de partenariat, et portant sur les mêmes références d'articles commandés, et les mêmes prix unitaires, ne permet pas de considérer que les parties auraient entendu soumettre leurs relations à la dite convention de partenariat.
Du tout, il se déduira que la société Apilco n'est pas partie à la convention de partenariat, de telle sorte que la clause de médiation préalable qui y est insérée ne lui est pas opposable.
Sur la qualité de la société Apilco à agir en paiement des factures émises entre le 9 juin 2016 et le 30 juin 2016
Selon l'article 30 du même code,
L'action est le droit, pour l'auteur d'une prétention, d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou mal fondée.
Pour l'adversaire, l'action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention.
Selon l'article 31 du même code, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.
Selon l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce, entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants, se prescrivent par 5 ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.
Selon l'article 2224 du Code civil,
Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant l'exercer.
Le point de départ du délai de prescription quinquennale est l'exigibilité de l'obligation concernée par l'action en cause.
Par conséquent, doit être approuvé l'arrêt qui, après avoir énoncé que selon l'article L. 441-3 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable, la facture mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir et retenu que, la facture litigieuse mentionnant au titre du paiement une certaine date, la créance du vendeur était exigible à compter de celle-ci, fixe le point de départ du délai de prescription à cette date d'exigibilité fixée par le vendeur lui-même (Cass. com., 15 juin 2023, n°14-21.841, publié).
La société Csf soutient en substance que la société Apilco n'a pas qualité à agir pour exercer une action en paiement portant sur les factures émises entre le 9 juin 2016 et le 30 juin 2016, émises par la société Financière Deshoulières.
En rappelant que la société Apilco avait elle-même indiqué ne pas venir aux droits de la société Financière Deshoulières, la société Csf observe cependant que les factures émises pendant la période susdite l'ont été par la société Financière Deshoulières.
Elle en déduit que la demande portant sur le paiement des factures émises pendant cette période est irrecevable.
La société Apilco réplique qu'aucune prescription ne vient grever les factures émises pendant cette période, alors que le point de départ de la prescription de son action se situe à la date de paiement fixé par les factures.
En observant que celles-ci comportent toutes une échéance de paiement fixée à 2 mois de leur émission, que la facture la plus ancienne, émise le 9 juin 2016, comporte une échéance au 9 août 2016, et en rappelant qu'elle a assigné la société Csf le 28 juin 2016, la société Apilco soutient que son action en paiement n'est pas prescrite pour les factures émise pendant la période susdite.
Mais ce moyen tiré de l'absence de prescription de son action, est sans emport, alors que la société Csf ne l'a pas soulevée, mais a soulevé l'absence de qualité à agir de la société Apilco.
Au contraire, la société Apilco estime que les factures émises par la société Financière Deshoulières entre le 8 et le 23 juin 2016 font partie des créances des clients qui lui ont été cédés en vertu du jugement portant cession d'actifs du 17 juin 2016.
Le dispositif de ce jugement (page 21) fait ressortir qu'ont été cédées à la société Apilco l'ensemble des factures clients non mobilisées à recouvrer en l'état, émises par la société Financière Deshoulières, avec obligation pour la société cédante d'interrompre toute facturation clients à compter du 8 juin 2016 ainsi que toute cession de factures clients à cette même date.
Il précise que les commandes clients non exécutées sont prises en charge par l'acquéreur, sous réserve de restitution par la société cédante des éventuels acomptes perçus à ce titre.
Ce jugement fixe au 22 juin 2016 à 0 heure la prise de possession des actifs par la cessionnaire.
Il ressort ainsi des termes du dispositif du jugement portant cession d'actifs, clairs et non équivoques, que seules les factures clients non payées portant une date d'émission antérieure au 8 juin 2016 avaient été cédées à la société Apilco, et que la société Financière Deshoulières avait interdiction de continuer à facturer ces clients à compter du 8 juin 2016.
Du tout, il se déduira que la société Apilco n'a pas qualité à agir en recouvrement des créances issues des factures émises par la cédante à compter du 8 juin 2016.
Or, l'examen des factures émises entre le 8 juin 2016 et le 30 juin 2016 inclus met en évidence qu'elle ont pour auteur la société Financière Deshoulières.
Et en l'absence d'indication, sur celles-ci, d'une quelconque date de livraison, il ne peut se déduire que la date de livraison aurait été postérieure à la date d'entrée en possession des actifs par la cessionnaire, fixée au 22 juin 2016, de sorte que ces factures se rapporteraient à des commandes de clients non exécutées par la cédante, et qui aurait été exécutées par la cessionnaire après son entrée en possession.
Ainsi, il n'est pas possible de considérer que sur les factures émises à compter du 22 juin 2016, la persistance de l'indication de leur émission par la société Financière Deshoulières procéderait d'une simple erreur matérielle.
Il y aura donc lieu de déclarer irrecevable l'action de la société Apilco en paiement des factures émises entre le 8 juin 2016 et le 30 juin 2016 inclus, et le jugement sera confirmé de ce chef.
Son action sera déclarée recevable pour le surplus, et le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur le fond
S'il appartient à celui qui se prévaut d'une obligation d'en rapporter la preuve, c'est corrélativement à celui qui se prétend par son paiement qu'il revient de le démontrer.
C'est à celui qui entend se prévaloir de l'exception d'inexécution qu'il revient de rapporter la preuve que les conditions en sont réunies.
Lorsque deux professionnels sont en relations d'affaires sur une certaine durée, et que celles-ci ont donné lieu à plusieurs facturations, il peut en être déduit non seulement à la fois la connaissance suffisante par la première des conditions générales de vente de la seconde, mais encore l'acceptation, au moins tacite, par la première de ces mêmes conditions générales de vente.
Nul ne peut s'établir de titre à lui-même.
Un fournisseur ne peut pas réclamer paiement en se fondant sur les factures qu'il a lui-même établies (Cass. com., 18 juin 1991, n°88-12.209, Bull. IV, n°224).
Ayant relevé qu'un négociant en porcs, utilisant habituellement les services d'un abattoir, qui avait été informé d'une majoration du prix d'abattage avait fait connaître la direction « qu'il n'était pas disposé » à payer le nouveau tarif, avait continué à utiliser cet établissement pendant plusieurs mois et a réglé, sans réserve, les factures établies selon ce nouveau tarif, la cour d'appel ne fait qu'user de son pouvoir souverain lorsqu'elle déduit de ces circonstances que le négociant avait donné son accord nouveau tarif (Cass. com., 28 janvier 1975, n°73-14.936, Bull. IV, n°22).
Ayant constaté que ni la réalité des livraisons prises en compte, ni le montant des factures correspondantes n'étaient discutés et que seul était en litige le paiement de ces factures, de sorte que la contestation ne contredisait pas l'origine de la créance invoquée, une cour d'appel, dès lors qu'elle retenait que les débiteurs ne justifiaient pas avoir effectué le règlement des factures litigieuses, a pu condamner lesdits débiteurs à payer le montant des livraisons non contestées, sans renverser la charge de la preuve ni violer la règle de l'indivisibilité de l'aveu. (Cass. com., 23 octobre 1984, n°83-15.174, Bull. IV, n°277).
C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation qu'une cour d'appel a condamné une personne morale à régler une facture qu'elle n'avait pas contestée et dont elle s'était bornée à invoquer un prix excessif seulement plusieurs mois après la cessation de ses relations avec son fournisseur (Cass. com., 26 mai 1987, n°85-17.156, Bull. IV, n°128).
Il appartient au vendeur de prouver qu'il a mis la chose vendue à la disposition de l'acheteur dans le délai convenu.
L'acquéreur ne peut pas être tenu d'accepter une chose différente de celle qu'il a commandée.
La preuve de la non-conformité à la commande du matériel livré incombe à l'acquéreur qui soulève cette exception (Cass. com., 3 décembre 1980, n°78-13.305, Bull. IV, n°409).
Il appartient à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver. Dès lors, viole l'article 1315 du Code civil le tribunal qui, pour accueillir l'intégralité de la demande en paiement de marchandises dirigée contre le défendeur qui soutenait n'avoir reçu qu'une partie de sa commande et en avoir payé le prix, retient que cette partie ne rapporte pas la preuve de ce que les marchandises restant dues n'avaient jamais été livrées. (Cass. com., 23 octobre 1990, n°89-11.642, Bull., IV, n°251).
Sur les conditions générales de vente de la société Apilco :
La société Csf dénie que les conditions générales de vente de la société Apilco, figurant au verso de chacune de ses factures, puissent être applicables aux relations contractuelles, en se prévalant de l'existence du contrat de partenariat susdit et des conditions particulières liant les parties qui y avaient été insérées.
Mais il sera rappelé qu'il vient d'être retenu que la convention de partenariat signée par la société Financière Deshoulières ne faisait pas partie des actifs transférés à la société Apilco.
Et il sera observé qu'ayant des relations contractuelles avec la société Apilco du 7 juillet 2016 au 10 janvier 2017, la société Csf a eu nécessairement connaissance des conditions générales de vente de cette dernière figurant au dos de ses factures et y a consenti pour l'essentiel, sauf s'agissant des prix de vente, ainsi qu'il le sera vu plus bas.
Sur le principal des factures :
Pour faire la preuve de l'obligation dont elle se prévaut, la société Apilco se borne à produire ses factures, dont elle argue du non-paiement par la société Csf.
La société Csf lui objecte faire la preuve qu'elle a payé un total de 56 153,73 euros sur la totalité de la créance principale réclamée à hauteur de 168 991,85 euros.
Et elle soutient qu'outre les règlements intervenus, la société Apilco défaille à faire la preuve d'une créance certaine, liquide et exigible, qui dès lors serait infondée.
Par la production des factures dont elle est seule l'auteur, et sans production d'autres éléments émanant de la société Csf, ou même attestant de la livraison des marchandises afférentes à ses factures à la société Csf ou à ses préposés ou mandataires, la société Apilco défaille à faire la preuve de l'obligation dont elle se prévaut.
Et par la production de son extrait de compte client concernant la société Csf, quand bien même serait-il visé par son expert-comptable, la société Csf ne réussit pas plus à en faire la preuve, car ce document ne procède que des informations dont elle est seule à l'origine.
Ainsi, en l'état des éléments de preuve produit par la société Apilco, et de la contestation opposée par la société Csf, il sera retenu que pour l'essentiel, la première défaille à faire la preuve de l'obligation dont elle se prévaut.
* * * * *
En revanche, alors que la société Csf soutient avoir réglé certaines factures pour un principal à hauteur de 56 153,73 euros, il s'en déduira que celle-ci reconnaît ainsi par-là même le bien fondé de la demande de la société Apilco pour un tel montant.
Il pourra même être retenu que cette reconnaissance porte non seulement le montant déclaré payé, mais encore sur le montant total des factures auxquelles ses paiements se rapporte, sauf à examiner les exceptions invoquées à ce titre par l'acquéreur, ainsi qu'il le sera vu plus bas.
Il reste à établir si la société Csf fait la preuve de son paiement à hauteur du montant qu'elle revendique.
Elle produit ainsi la liste des chèques qu'elle prétend avoir payés en exécution des factures, avec leur numéro, leur montant, les numéros de facture auxquelles chacun de ses chèques se rapporterait, ou bien à défaut la référence de certaines notes de débit (ou Doi) correspondant à des débits réalisés sur certaines factures en raison d'anomalies identifiées.
Elle y joint un tableau retraçant les dates d'encaissement des chèques.
Elle verse, pour chaque débit d'office, une fiche faisant état de la facture à laquelle est affecté le débit d'office mais également l'objet pour lequel ce débit est appliqué.
Elle entend voir déduire de ce dernier document que les débits d'office concernent la plupart du temps un écart de quantité par rapport à la commande d'origine, des marchandises non conformes, ou encore des écarts avec le prix de base.
Ainsi, en complément des observations figurant plus haut, il se déduit des notes de débits pratiquées par la société Csf que celle-ci reconnaît avoir commandé les biens objet des factures sur lesquelles elle déclare avoir pratiqué ces débits.
En se bornant à produire la liste des chèques, qu'elle prétend avoir adressé à la société Apilco, ainsi qu'une autre liste afférente à leur date d'encaissement, dont elle est seule l'auteur, la société Csf ne démontre pas s'être acquittée de leur paiement à hauteur du montant qu'elle revendique, soit 56 173,73 euros.
A l'inverse, la société Apilco se borne à reconnaître avoir reçu paiement par la société Csf uniquement de chèques de montant de 7319,10 euros encaissé le 6 novembre 2016 et 3964,94 euros encaissé le 10 novembre 2016.
Et alors que le total des factures dont elle avait réclamé paiement s'élevait à 183 320,40 euros, elle indique, exactement, avoir déduit ces paiements partiels du montant des factures qu'elle a réclamées, outre crédit au profit de son client, le tout pour un montant de 14 328,55 euros, de sorte qu'elle ne lui réclame plus que 168 991,85 euros : et ce montant est précisément celui du principal de sa présente demande en litige.
* * * * *
En ce que les avis de débits d'office font état d'un écart de quantité livrée par rapport à la commande, les questions en résultant se rapportent à la preuve de l'obligation de délivrance.
Or, cette preuve incombe à la société Apilco.
Et, à défaut d'apporter le moindre élément sur les quantités effectivement délivrées, en se bornant à la production de ses seules factures, la société Apilco défaille à démontrer la parfaite exécution de son obligation de délivrance au regard des écarts de quantités ou des non-conformités alléguées par l'acquéreur.
Ainsi, il y aura lieu de retenir comme exactement déduits les débits auxquels l'acquéreur a procédé au visa des écarts de quantités.
- - - - -
En revanche, lorsque ces avis de débits invoquent la non-conformité des marchandises délivrées à la commande, la question en résultant soulève le défaut de conformité.
Or, cette preuve incombe à la société Csf.
Et en se bornant à produire les seuls avis de débits, émis par elle-même, la société Csf défaille à faire la preuve des non-conformités qu'elle allègue.
Ainsi, il y aura lieu de retenir comme inexactement déduits les débits auxquels l'acquéreur a procédé au visa des non-conformités à la commande.
- - - - -
Lorsque ces avis de débits font état d'un écart de prix de base, cette question convoque la charge preuve de la rencontre des parties sur la chose et sur le prix.
D'un côté, la société Csf soutient que les relations contractuelles se sont poursuivies avec la société Apilco dans des conditions identiques à celles de la convention de partenariat du 17 juin 2016 avec la société Financière Deshoulières (qui, en son article 1er et en son annexe 6, contractualise les prix bruts pour l'année 2016).
De l'autre, la société Apilco a soutenu ne pas être partie à cette convention de partenariat qui ne lui est pas opposable.
Mais il vient d'être retenu que la convention de partenariat susdite n'est pas applicable aux relations entre parties.
Ainsi, la société Apilco ne peut donc pas se prévaloir de ses prix unitaires figurant dans cette convention antérieure à l'appui de ses facturations postérieures, et il lui appartient donc, pour chaque facture produite, de rapporter la preuve de l'accord de l'acquéreur sur la chose et sur le prix.
Certes, il sera relevé qu'au verso de ses factures, la société Apilco a fait figurer ses conditions générales, et ainsi qu'il sera détaillé plus bas, et au regard du caractère continu du flux d'affaires entre parties, il sera retenu que la société Csf avait nécessairement connaissance de ses conditions générales et y a acquiescé pour l'essentiel
Mais ses conditions générales, ainsi produites par la société Apilco, ne font aucunement référence à ses prix unitaires, article par article.
A tout le moins, eu égard à la circonstance que l'acquéreur a procédé à des débits d'office en raison d'un écart sur le prix de base, ainsi qu'il le sera vu plus bas, tout en poursuivant les relations contractuelles, il se déduira que celui-ci n'a pas entièrement consenti aux conditions générales, à supposer même que celles-ci fassent, au moins implicitement, référence aux prix unitaires pratiqués par le vendeur.
Ainsi, en se bornant à produire ses seules factures, comportant des prix dont le montant est contesté par l'acquéreur, le vendeur ne prouve pas avoir préalablement recueilli l'accord de celui-ci sur le prix que ce dernier a consenti.
Il y aura donc lieu de retenir comme exactement déduits les débits auxquels l'acquéreur a procédé au visa des écarts sur le prix de base.
* * * * *
Les factures présentées par la société Apilco comportent de manière systématique une numérotation par ordre croissant en fonction de leur date, étant observé que :
- les factures réputées émises par la société Financière Deshoulières, exclues du périmètre de ce litige par suite de l'irrecevabilité retenue, portent des numéros allant de 127015 pour la première facture de 1277,57 euros émise le 9 juin 2016 à 127191 pour la dernière facture de 1894,12 euros émise le 30 juin 2016 ;
- les factures objet du débat au fond, réputées émises par la société Apilco, portent des numéros allant de 127256 pour la facture de 2245,10 euros émise le 7 juillet 2016 à 128406 de 1631,23 euros le 10 janvier 2017.
Or, il sera observé, à deux exceptions près, que les avis de débits présentés par la société Csf portent :
- soit sur des factures dont la société Apilco ne réclame pas le paiement, et qui se rapportent selon toute vraisemblance à des factures antérieures émises par la société Financière Deshoulières, eu égard à leur numération (comme faisant référence à des factures portant les numéros 126780,126796) ;
- soit à des factures dont la société Apilco réclame paiement, mais qui ont été émises entre le 8 et le 30 juin 2016, et dont il vient d'être retenu que les demandes y afférentes sont irrecevables
(comme faisant référence aux factures portant les numéros 127015, 127017, 127018,127065,127149, 127150, 127192, 127194).
La société Csf a pratiqué un avis de débit portant sur la facture 127478 (émise le 2 septembre 2016 et aboutissant à un avoir de 67,97 euros émis par le vendeur au profit de l'acquéreur), pour un écart de prix de base (non prouvé par le vendeur) pour un montant de 4543,60 euros ttc.
Mais il sera observé que cet avis de débit, même s'il est rattaché à la facture 127478 ayant conduit à un avoir en sa faveur de 67,97 euros, se rapporte en réalité à des écarts de prix de base afférents à la facture n°127192 du 30 juin 2016 d'un montant de 18 287,71 euros.
Mais la cour a retenu que la société Apilco n'était pas recevable à réclamer paiement des factures émises jusqu'au 30 juin 2016 inclus.
Il s'en déduira donc que la société Csf n'est pas plus recevable à invoquer une exception portant sur une facture exclue du périmètre des prétentions admissibles de la société Apilco.
Ainsi, il n'y aura pas lieu de tenir compte de ce premier avis de débit pratiqué par la société Csf, et de déduire son montant des prétentions de la société Apilco.
Deuxièmement, l'avis de débit portant sur la facture 127484 émise le 2 septembre 2016 pour un montant de 3220,37 euros ttc, pour un écart de quantité (non prouvé par le vendeur) et des marchandises non conforme (non-conformité non prouvée par l'acquéreur), sera retenu pour la moitié de son montant de 47,90 euros ttc, soit de 23,95 euros ttc.
Ainsi, il y aura lieu de déduire du montant réclamé par la société Apilco un total de 23,95 euros ttc.
Il y donc lieu de condamner la société Csf, pour le principal des factures, à payer à la société Apilco la somme de 56 129,78 euros [(56 153,73 euros (paiement allégué mais non justifié par l'acquéreur) - 23,95 euros (montant des exceptions retenues au profit de l'acquéreur)].
Et la dite somme portera intérêt au taux contractuel de trois fois l'intérêt au taux légal majoré de 10 %, à compter du 9 juin 2021, en vertu des stipulations analysées plus bas.
Sur les accessoires :
- Pénalités et frais de recouvrement :
Il résulte de l'article L. 441-6 du code de commerce, dans sa version applicable au litige, la faculté pour tout prestataire de service, à l'égard de tout demandeur de ses prestations pour son activité professionnelle, d'établir des conditions générales de vente précisant les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture.
Selon ce texte, les professionnels d'un secteur, clients et fournisseurs, peuvent décider conjointement de réduire le délai maximum de paiement fixé à l'alinéa précédent. Ils peuvent également proposer de retenir la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation de services demandée comme point de départ de ce délai. Des accords peuvent être conclus à cet effet par leurs organisations professionnelles. Un décret peut étendre le nouveau délai maximum de paiement à tous les opérateurs du secteur ou, le cas échéant, valider le nouveau mode de computation et l'étendre à ces mêmes opérateurs.
En outre, les pénalités de retard pour non-paiement des factures sont dues de plein droit, sans rappel et sans avoir à être indiquées dans les conditions générales des contrats.
Selon ce texte, les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture, ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement dus au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date.
Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque Centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l'année en question.
Les pénalités de retard sont exigibles sans qu'un rappel soit nécessaire.
Le taux d'intérêt des pénalités de retard de la banque centrale européenne est applicable de plein droit, quant bien même il n'aurait pas indiqué dans le contrat.
Les pénalités de retard pour non-paiement des factures sont dues de plein droit, sans rappel, et sans avoir à être indiquées dans les conditions générales des contrats. La créance afférente naît donc automatiquement à l'échéance légale, soit le lendemain de la date à laquelle le paiement était prévu, sans qu'il y ait lieu à mise en demeure préalable.
La pénalité prévue par l'article L. 441-6 constitue un intérêt moratoire, de sorte qu'il est possible de l'assortir de la capitalisation prévue par l'article 1154, devenu 1343-2 du code civil.
Selon l'article 6 des conditions générales de la société Apilco, figurant au verso de ses factures, le taux des pénalités de retard s'élève à trois fois le taux d'intérêt légal plus 10 %, mais les pénalités sont exigibles sans qu'aucun rappel ne soit nécessaire, elles courent de plein droit à compter du jour suivant la date de règlement porté sur la facture, et en outre, l'acheteur devra, de plein droit une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement de 40 € au vendeur, pour chaque facture payée en retard, dès le lendemain de la date d'échéance, sans qu'un rappel soit nécessaire cette indemnité forfaitaire n'étant pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée (article D. 441-5 du code de commerce).
Il sera rappelé que la société Csf sera réputée avoir accepté les conditions générales de vente de la société Apilco, au moins s'agissant des modalités de paiement et des sanctions qui y sont attachées.
Au regard du montant et du nombre des factures retenues figurant plus haut, il y aura donc lieu de condamner la société Csf à payer à la société Apilco les sommes de :
- 29 816,14 euros au titre des frais de recouvrement des factures impayées aux échéances prévues, arrêté au 8 juin 2021, en prenant en compte la variation du taux légal entre le second semestre 2016 et le premier semestre 2021,
- 600 euros au titre des frais de recouvrement des factures impayés aux échéances prévues ;
soit 30 416,14 euros au total.
Il y aura lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts.
- Sur la clause pénale :
Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Lorsque l'engagement est exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.
Toute stipulation contraire de l'alinéa précédent sera réputée non écrite.
Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure
Constitue une clause pénale la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnera lieu l'inexécution de l'obligation contractée.
Une clause pénale revêt un caractère comminatoire, comme ayant pour objet de faire assurer par l'une des parties l'exécution de son obligation.
Selon l'article 7 des conditions générales de la société Apilco,
Après mise en demeure restée infructueuse, le recouvrement contentieux des sommes dues au vendeur entraînera l'exigibilité, à titre de clause pénale, d'une indemnité égale à 15 % des sommes dues, en sus des acomptes perçus par le vendeur et les frais judiciaires éventuels.
Par la production de l'accusé de réception y afférent, portant la signature et le cachet de la société Csf à la date du 2 mai 2019, la société Apilco a justifié de sa mise en demeure en date du 30 avril 2019.
En vertu de cet article, la société Apilco demande la condamnation de la société Csf à lui payer une indemnité égale à 15 % du montant des factures impayées.
En application de cette clause, l'indemnité y afférente serait d'un montant de 8419,47 euros (56 129,78 euros impayés retenus x 15%).
La société Csf demande le rejet ou à tout le moins la réduction de cette clause pénale, en la considérant comme excessive, au regard des pénalités de retard et indemnité pour frais de recouvrement légaux, sus examinés.
Mais au regard de l'importance des délais d'impayés apprécié au jour de l'exigibilité de cette pénalité, le 30 avril 2019, et nonobstant les indemnités légales supplétives sus allouées, tout en tenant compte de l'érosion monétaire advenu pendant cette période, et tout en considérant l'importance des conséquences de ces impayés dans la trésorerie d'une entreprise de petite taille, il n'apparaît pas en quoi cette clause pénale présenterait un caractère manifestement excessif par rapport au préjudice effectivement souffert par la société Apilco.
Il n'y aura donc pas lieu de supprimer ou réduire la clause pénale.
La société Csf sera donc condamnée à payer à la société Apilco la somme de 7737,92 euros à ce dernier titre.
Il y aura donc lieu de :
- condamner la société Csf à payer à la société Apilco la somme de 94 965,39 euros (56 129,78 euros + 30 416,14 euros + 8419,47 euros), avec intérêts correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 56 129,78 euros à compter du 9 juin 2021 ;
- ordonner la capitalisation des intérêts, dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,
et le jugement sera infirmé de ces chefs.
* * * * *
Il sera rappelé que le présent arrêt vaut titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté la société Apilco de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance, et l'a condamnée aux dépens de première instance et à payer à la société Csf la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles.
La société Csf sera déboutée de ses demandes au titre des frais irrépétibles des deux instances, et sera condamnée aux dépens des deux instances et à payer à la société Apilco la somme de 7000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances.
PAR CES MOTIFS
La cour,
statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco en paiement des factures émises entre le 9 juin 2016 et le 30 juin 2016 inclus ;
Confirme le jugement déféré de ce seul chef ;
Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :
Déclare recevable l'action de la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco en paiement des factures émises après le 30 juin 2016 ;
Condamne la société par actions simplifiée Csf à payer la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco la somme de 94 965,39 euros, avec intérêts correspondant à trois fois le taux d'intérêt légal sur la somme de 56 129,78 euros à compter du 9 juin 2021 ;
Ordonne la capitalisation des intérêts, dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;
Rappelle que le présent arrêt vaut titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré ;
Condamne la société par actions simplifiée Csf aux entiers dépens de première instance et d'appel et à payer à la société à responsabilité limitée Porcelaines Apilco la somme de 7000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,