CA Toulouse, 4e ch. sect. 3, 13 mars 2025, n° 21/01995
TOULOUSE
Arrêt
Autre
13/03/2025
ARRÊT N° 95/25
N° RG 21/01995 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OELN
NP/RL
Décision déférée du 19 Février 2021 - Pole social du TJ de TOULOUSE - 19/10389
JM.GAUCI
[7] venant aux droits de
[6]
C/
URSSAF MIDI-PYRENEES
CONFIRMATION
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème chambre sociale - section 3
***
ARRÊT DU TREIZE MARS DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
[7] venant aux droits de [6]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Me Bénédicte GIARD-RENAULT TEZENAS DU MONTC de la SELARL ENOR AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
URSSAF MIDI-PYRENEES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Elisabeth LAJARTHE de la SELARL DBA, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 16 janvier 2025 en audience publique, devant la cour composée de :
N. PICCO, conseiller faisant fonction de président
M. SEVILLA, conseillère
C. HERENGUEL, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière : lors des débats E. BERTRAND
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par N. PICCO, conseiller faisant fonction de président et par E. BERTRAND, greffière de chambre
EXPOSE DU LITIGE
La société [7] a fait l'objet d'un contrôle diligenté par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Midi-Pyrénées (l'URSSAF) portant sur l'application des législations de sécurité sociale, de l'assurance maladie et de la garantie des salaires AGS pour la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012.
Ce contrôle a donné lieu à une lettre d'observations du 21 octobre 2013 établie par l'inspecteur du recouvrement qui a évalué le rappel de cotisations et contributions à la somme de 64 461 euros, hors majorations de retard pour l'exercice 2010.
Après échanges entre les parties, l'URSSAF a adressé à la société une mise du 26 décembre 2013 pour un montant de 69 247 euros, dont 11 056 euros au titre des majorations de retard.
La société [7] a formé un recours devant la commission de recours amiable de l'URSSAF.
La commission de recours amiable a rejeté le recours de la [7] par décision du 25 février 2016.
Par courrier du 18 avril 2016, la [7] a porté sa contestation devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Garonne.
Par jugement du 19 février 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Toulouse a :
- dit que le jugement concerne la société [6] dont le n° Siren est le [N° SIREN/SIRET 4],
- déclaré recevable le recours introduit par la société [6],
- annulé le redressement opéré par l'URSSAF Midi-Pyrénées au titre de l'assiette minimum des cotisations-indemnité compensatrice de congés payés pour la somme de 1930 euros au titre de l'exercice 2010,
- débouté la société [6] de l'ensemble de ses autres prétentions,
- validé le surplus des redressements,
- validé l'observation pour l'avenir s'agissant de l'indemnité de salissure,
- rejeté toute autre demande,
- condamné la société [6] aux dépens de l'instance.
La société [6] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 23 avril 2021.
La société [7] demande à la cour de déclarer le recours de la société [7] venant aux droits de la société [6] recevable et bien fondé, d'infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 19 février 2021 sauf en ce qu'il a annulé le chef de redressement au fond relatif à l'assiette minimum des cotisations - indemnités compensatrice de congés payés pour la somme de 1930 euros au titre de l'exercice 2010. A titre principal, elle demande à la cour de dire que l'URSSAF a mis en oeuvre la méthode de vérification par échantillonnage et extrapolation sans lui avoir préalablement communiqué le descriptif de la méthode dérogatoire et conséquence d'annuler les opérations de contrôle et la décision de redressement que constitue la mise en demeure. A titre subsidiaire, elle demande à la cour de déclarer les chefs de redressement suivants non fondés :
- frais professionnels : prime d'outillage,
- frais professionnels : indemnités de salissure (observation pour l'avenir),
- comité d'entreprise : prime de naissance et de mariage,
- versement transport
- frais professionnels : hors indemnité de grand déplacement (dépenses de nourriture et de transport).
En conséquence, elle demande à la cour de les annuler, d'annuler les observations pour l'avenir et de condamner l'URSSAF Midi-Pyrénées au paiement de 3000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux frais d'exécution forcée.
Elle fait valoir que le redressement est irrégulier pour plusieurs raisons. Tout d'abord, elle soutient que la lettre d'observations ne respecte pas les informations obligatoires de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale. Par exemple, dans la lettre d'observations, l'organisme indique que pour le contrôle du personnel permanent, il a consulté les frais intérimaires 2010. Or, la société soutient qu'il ne peut pas avoir consulté pour le contrôle du personnel permanent des documents qui concernent exclusivement le personnel temporaire. En outre, elle indique que l'URSSAF aurait consulté d'autres documents qui ne figurent pas dans la lettre d'observations. Ensuite, elle invoque l'irrégularité de la méthode de contrôle dérogatoire retenue par l'URSSAF. En effet, elle explique d'une part que l'échantillonage est une méthode de contrôle qui doit être utilisée par les inspecteurs en recouvrement en respectant un process formaliste très strict et d'autre part que cette méthode ne peut être mise en oeuvre qu'après communication à l'employeur de l'exposé écrit de son déroulement. En l'espèce, elle indique n'avoir jamais été informé de la documentation avant mise en oeuvre de la méthode de contrôle dérogatoire. Elle soutient également ne pas avoir été associée à toutes les phases de la procédure ainsi qu'à la constitution de la base du sondage (formalités substantielles de l'article R. 243-59-2). Elle précise que ces irrégularités sont sanctionnées par la nullité du redressement. Elle fait également valoir la mauvaise application de la méthode d'échantillonage. Sur ce point, elle indique ne pas avoir été en mesure de présenter les cas qu'elle considérait comme atypiques. A ce titre, elle considère que le manquement au principe du contradictoire est patent.
Sur les chefs de redressement critiqués :
- sur les frais professionnels non justifiés (prime d'outillage) : la société conteste ce chef de redressement dans son principe et dans son montant. En effet, elle indique respecter les conditions de versement de cette prime à savoir que l'entreprise utilisatrice verse cette indemnité à ses salariés permanents et que les salariés qui perçoivent cette prime aient établi l'inventaire de leurs outils.
- sur les frais professionnels non justifiés - indemnité de salissure : elle fait valoir verser cette prime à ses salariés dans la mesure où l'entreprise utilisatrice la verse à ses salariés permanents.
- comité d'entreprise (prime de naissance et de mariage) : elle fait valoir que l'établissement de [Localité 2] (personnel intérimaire) ne peut être tenu responsable des erreurs de son comité d'entreprise. Elle précise que l'employeur n'a pas la maîtrise du budget de fonctionnement qu'il alloue au comité d'entreprise.
- versement transport (assiette) : elle soutient que l'URSSAF ne donne aucune modalité de calcul dans sa lettre d'observations, ce qui n'est pas conforme avec l'article R.243-59 al 5 du CSS.
L'URSSAF Midi-Pyrénées conclut à la confirmation du jugement et demande à la cour de condamner la [7] au paiement de la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Sur l'irrégularité prétendue de la lettre d'observations, l'URSSAF soutient que certaines pièces visées par le cotisant sont sans lien avec l'actuel contentieux et que pour les autres pièces invoquées par le cotisant, elles sont expréssement visées dans la liste des documents contrôlés. En outre, elle soutient que la société [7] n'établit pas que l'inspecteur de recouvrement ait utilisé ces pièces.
Sur la régularité de la méthode de vérification par extrapolation, elle fait valoir que le cotisant n'établit pas que la méthode de l'échantillonage avec extrapolation aurait été mise en oeuvre avant le 17 mai 2013 qui correspond à la date à laquelle le document indiquant les différentes phases de la mise en oeuvre des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation a été remis au cotisant. En outre, elle indique avoir remis au cotisant le 17 mai 2013 le descriptif général décrivant les méthodes de vérification par échantillonage et extrapolation, les formules statiques utilisées par ces techniques et une copie de l'arrêté du 11 avril 2017. En conséquence, elle fait valoir avoir respecté les prescriptions de l'article R. 243-59-2 du CSS. Sur le fait que le représentant de la société n'aurait pas été convié au tirage de l'échantillon, elle indique que le courrier du 2 juillet 2013, paraphé par le cotisant, confirme que l'inspecteur a invité le cotisant à se présenter au tirage. Elle ajoute que l'inspecteur a expréssément informé le cotisant des résultats de la vérification et a sollicité l'accord du cotisant sur le principe de la réintégration par courriel du 26 septembre 2013, ce qui implique par hypothèse que le cotisant ait été informé des résultats de la vérification. Par ailleurs, elle indique que l'inspecteur a adressé un courrier en date du 2 juillet 2013 dans lequel il lui était demandé ses observations. En conséquence, en l'absence de réponse du cotisant, ce dernier ne peut alléguer avoir été privée de la possibilité de discuter la constitution de la base de sondage.
Sur les chefs de redressement :
- sur les frais professionnels non justifiés (prime d'outillage et indemnité de salissure) : elle fait valoir que l'ensemble des sommes versées aux salariés sont assujetties à cotisations. En outre, elle précise que les frais professionnels qui s'entendent des charges à caractère spécial inhérents à la fonction ne sont déductibles de l'assiette des cotisations que, lorsqu'ils prennent la forme d'allocations forfaitaires, lorsque la preuve de leur utilisation conforme à leur objet est rapportée. En l'espèce, elle soutient qu'aucune pièce justificative de l'utilisation conforme de la prime et des indemnités forfaitaires de salissure à son objet n'a été produite.
- comité d'entreprise (prime de naissance et de mariage) : elle fait valoir que si les bons d'achats et les cadeaux peuvent, sous conditions, être versés en franchise de cotisations par le comité d'entreprise, tel n'est pas le cas des sommes d'argent lesquelles ne sont pas visées par les instructions ministérielles des 17 avril 1985, 17 décembre 1988 et 2 juillet 1992.
- versement transport (assiette) : elle soutient qu'aux termes des articles L.2333-64 et L.2531-2 du code général des collectivités territoriales, sont assujettis au versement transport les employeurs occupant plus de 9 salariés dans une zone AOT. En outre, aux termes de l'article L.2531-3 du code susvisé, elle soutient que l'assiette du versement transport est constituée par le montant des salaires payés. En l'espèce, elle fait valoir que l'assiette de la contribution versement transport était inférieure à la totalité des rémunérations déclarées. Si la société [7] a pu justifier en partie cette minoration d'assiette, le solde demeurant non justifié a été réintégré dans l'assiette des cotisations.
MOTIFS
Sur la régularité de la lettre d'observations du 21 octobre 2013 :
La société [7] reproche à l'URSSAF de Midi-Pyrénées de ne pas avoir respecté les dispositions de l'article R 243-59 du Code de la Sécurité, selon lequel « A l'issue du contrôle, les inspecteurs de recouvrement communiquent l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de fin de contrôle ».
L'appelante fait successivement valoir qu'un certain nombre de documents remis aux inspecteurs ne figurent pas sur la liste des pièces consultées, que des documents ont été emportés à l'extérieur de l'entreprise sans décharge ni accord de l'employeur et enfin que des documents de l'entreprise ont été déposés au siège de l'URSSAF de Midi-Pyrénées sans l'accord de l'employeur.
Sur le premier point, la lettre d'observations contestée énumère de la façon suivante les documents consultés :
- Extrait Kbis, Statuts, Procès verbaux d'assemblées, Rapports de gestion, Rapports des Commissaires aux Comptes généraux et spéciaux, Bilans Sociaux
- Accord de participation, avenants et récépissés de dépôt auprès de la [8].
- Balances générales, bilans et comptes annexes
- Comptabilités et pièces justificatives par sondage
- Conventions passées avec les établissements d'enseignement pour les stagiaires en entreprise Dossiers de rupture intervenue en 2010
- DAS2
- Etats de frais et Justificatifs des frais professionnels indemnisés aux salariés permanents Frais intérimaires 2010 : examen de la prime d'outillage
- Livre et Journal annuel de paie par agence et pour la société.
- Etats justificatifs du calcul de la réduction FILLON
et des allégements TEPA.
- DADS 1, Tableaux récapitulatifs annexes à la
- DADS
- Plan Epargne Entreprise et récépissé de dépôt auprès
de la [8]
- Double des déclarations de régularisation annuelle
-(DRA) adressées aux ASSEDIC
- Procès verbaux de réunion et livre de recettes/dépenses du comité d'entreprise
- Double des bulletins de salaire
- Plan Seniors et récépissé de dépôt auprès de la [8] le 17/09/2009.
- Contrats de prévoyance complémentaire pour le personnel permanent et intérimaire.
La société [7] énumère des documents qu'elle estime ne pas figurer dans la lettre d'observations. Or, leur examen (pièces 8, 8-1, 8-2, 8-3, 8-5, 869-4, 9, 9-2, 9-3, 9-4, 9-5, 9-7, 10-3, 10-4, 10-5, 10-6, 10-7, 10-8, 10-9, 10-10, 10-11, 10-12, 10-13, 11) montre qu'ils ne concernent pas le redressement objet du présent litige :
- soit qu'ils soient relatifs à d'autres établissements ;
- soit qu'ils portent sur d'autres années.
Au demeurant, la société [7] n'établit nullement que ces documents non identifiés auraient fondé le redressement, condition exigée par l'article R 243-59 précité de l'obligation d'énumération dans la lettre d'observation.
Sur le deuxième point, la [7] reproche également à l'URSSAF d'avoir emporté des documents hors de l'entreprise, sans accord du président formalisé par un bordereau de remise, alors que l'inspecteur aurait dû les consulter sur place.
L'URSSAF fait cependant valoir à juste titre que seul le fait d'emporter des documents originaux, et non des copies des documents remis, nécessite l'accord de la personne contrôlée. Ce n'est que dans sa rédaction issue du décret du 11 octobre 2019 que l'article R 243-59 le précise expressément, mais la même interprétation doit être retenue pour la période antérieure, en considération du but poursuivi par la règle, visant à garantir la restitution des documents originaux et la possibilité de leur exploitation concomitante par l'employeur, dans le cadre d'un débat contradictoire. C'est également l'interprétation retenue par le conseil d'Etat, en matière fiscale (CE 27 juillet 2005, n°2261111).
Or, la société [7] ne soutient ni ne démontre que des documents originaux aient été emportés par l'inspecteur du recouvrement. Au surplus, ni les mentions de la lettre d'observations ni l'utilisation de la voie dématérialisée pour la transmission de documents n'établissent qu'il se serait agi de documents originaux.
Enfin, la société [7] soutient, sans toutefois le démontrer, que des documents ont été déposés au siège de l'organisme sans l'accord du cotisant. En effet, l'appelante produit à cet effet en pièce 42 une attestation de Mme [H] en date de décembre 2016 affirmant 'avoir remis le 9 janvier 2014 en fin d'après-midi des dossiers complémentaires sur les années 2011 et 2010 (dossier papier) auprès de leur accueil URSSAF (guichet) à la demande pressante des inspecteurs (...)' et 'j'y suis allée toute seule', précisant que les documents concernaient des intérimaires (cartes grises, attestations de domicile, cartes d'identité).
Or, sans être nullement étayée, alors que d'autres éléments de nature à corroborer cette affirmation, telles les demandes formulées par les inspecteurs, cette attestation est insuffisante à prouver que des documents ont été remis à l'URSSAF de Midi-Pyrénées en dehors des locaux de l'entreprise :
- du fait que la salariée a par ailleurs faussement affirmé ne pas avoir été habilitée à suivre le contrôle pour le compte de son employeur, contrairement à l'habilitation expresse dont elle bénéficiait, ainsi que l'établit la pièce 1 de l'appelante portant 'liste des personnes de l'entreprise habilitées pour le contrôle URSSAF' ;
- de la singulière imprécision de l'attestation elle-même relativement au contenu des pièces qui auraient été remises.
Enfin, la société [7] n'établit nullement qu'à considérer qu'ils auraient été remis, ces documents non identifiés auraient fondé le redressement, condition exigée par l'article R 243-59 précité de l'obligation d'énumération dans la lettre d'observations.
Sur la contestation de la méthode de contrôle :
La société [7] soutient que l'organisme de contrôle, qui a choisi de recourir aux méthodes statistiques plutôt qu'à l'examen exhaustif des situations, n'a pas respecté le protocole réglementaire applicable.
Elle précise en premier lieu qu'ayant choisi d'adopter la méthode de vérification par échantillonnage et extrapolation, l'URSSAF de Midi-Pyrénées devait, au moins quinze jours avant le début de la vérification, remettre à l'employeur un document lui indiquant les différentes phases de la mise en oeuvre des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation et les formules statistiques utilisées pour leur application.
L'appelante fait valoir que l'URSSAF de Midi-Pyrénées a en réalité mis en oeuvre cette procédure avant même de l'en avoir avertie par lettre du 17 mai 2013, qu'alors que l'employeur disposait d'un délai de quinze jours pour s'opposer à cette méthode, faculté dont il a de fait été privé.
Au soutien de cette affirmation, la [7] prétend que les inspecteurs ont établi une base de sondage, constitutive de la mise en place de la première phase de la procédure de vérification par échantillonnage et extrapolation, dès le mois de février 2013 et ce sans l'accord de l'employeur. Ainsi, dans un mail du 7 février 2013 à la société, l'inspecteur de recouvrement aurait fait référence à sa demande de « contrat mission sondage frais 2011 ». Puis, dans un courrier envoyé par mail le 7 février 2013 par les inspecteurs à la société, avec comme objet « demande de documents aux. fins de poursuite de vérification », l'Urssaf aurait fait référence à son étude par sondage des frais professionnels. Encore, dans un courriel du 8 avril 2013 à la société, l'inspectrice aurait évoqué l'examen des frais professionnels sur l'exercice 2011 effectué par sondage. De même, dans un mail du 9 avril 2013, l'inspectrice aurait fait référence à l'établissement de [Localité 10] « pour lequel, suite à un sondage effectué, nous vous avons demandé un certain nombre de justificatifs... » et donné une liste de salariés pour lesquels elle rappelle qu'ils ont déjà été répertoriés dans le sondage des frais professionnels concernant l'exercice 2011.
La procédure d'échantillonnage et extrapolation est soumise aux dispositions suivantes.
Selon l'article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au fait de l'espèce : « Les agents chargés du contrôle peuvent proposer à la personne contrôlée d'utiliser les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. Au moins quinze jours avant le début de cette vérification, l'agent chargé du contrôle indique à la personne contrôlée l'adresse électronique à laquelle sont consultables le document lui indiquant les différentes phases de la mise en 'uvre de ces méthodes, les formules statistiques utilisées pour leur application et l'arrêté mentionné au présent alinéa. La personne contrôlée bénéficie de ce délai pour informer par écrit l'agent chargé du contrôle de son opposition à l'utilisation de ces méthodes. Dès lors qu'elle entend s'y opposer, elle en informe l'agent chargé du contrôle, par écrit et dans les quinze jours suivant la remise des documents mentionnés à l'alinéa précédent. Dans ce cas, l'agent chargé du contrôle lui fait connaître le lieu dans lequel les éléments nécessaires au contrôle doivent être réunis. Ce lieu ne peut être extérieur aux locaux de la personne contrôlée qu'avec l'autorisation de cette dernière. L'agent chargé du contrôle fait également connaître les critères, conformes aux nécessités du contrôle, selon lesquels ces éléments doivent être présentés et classés.
La personne contrôlée dispose de quinze jours après notification des informations mentionnées au précédent alinéa pour faire valoir, le cas échéant, ses observations en réponse. A l'issue de ce délai, l'agent chargé du contrôle notifie à la personne contrôlée le lieu et les critères qu'il a définitivement retenus. La mise à disposition des éléments ainsi définis doit se faire dans un délai déterminé d'un commun accord entre l'agent chargé du contrôle et la personne contrôlée, mais qui ne peut être supérieur à soixante jours. Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, l'opposition de la personne contrôlée à l'utilisation des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation ne peut être prise en compte. Lorsque ces méthodes sont mises en oeuvre, l'inspecteur du recouvrement informe la personne contrôlée des critères utilisés pour définir les populations examinées, le mode de tirage des échantillons, leur contenu et la méthode d'extrapolation envisagée pour chacun d'eux. La personne contrôlée peut présenter à l'agent chargé du contrôle ses observations tout au long de la mise en 'uvre des méthodes de vérification par échantillonnage. Elle est invitée à faire part, le cas échéant, de ses observations sur la constitution de la base de sondage, sur l'échantillon obtenu et sur les résultats des vérifications effectuées sur chaque individu composant cet échantillon. Ces échanges peuvent être oraux. Lorsque la personne contrôlée décide d'exprimer un désaccord par écrit, l'agent chargé du contrôle répond de manière motivée par écrit aux observations de l'intéressée. La lettre d'observations mentionnée au III de l'article R. 243-59, précise les populations faisant l'objet des vérifications, les critères retenus pour procéder au tirage des échantillons, leur contenu, les cas atypiques qui en ont été exclus, les résultats obtenus pour chacun des échantillons, la méthode d'extrapolation appliquée et les résultats obtenus par application de cette méthode aux populations ayant servi de base au tirage de chacun des échantillons. Il mentionne la faculté reconnue à la personne contrôlée en vertu du sixième alinéa du présent article. Dans le délai de trente jours à compter de la réception de la lettre d'observations mentionnée à l'alinéa précédent, la personne contrôlée peut informer l'organisme effectuant le contrôle de sa déCision de procéder au calcul des sommes dont elle est redevable ou qu'elle a indûment versées pour la totalité des salariés concernés par chacune des anomalies constatées sur chacun des échantillons utilisés. Lorsque, au terme du délai fixé par l'alinéa précédent, la personne contrôlée n'a pas fait connaître à l'organisme de recouvrement sa décision de procéder au calcul des sommes dont elle est redevable, la mise en recouvrement des cotisations. des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai et avant la réponse de l'inspecteur du recouvrement aux éventuelles observations de l'employeur. Lorsque la personne contrôlée a fait connaître dans le délai imparti sa décision de procéder au calcul des sommes dont elle est redevable, l'engagement de la procédure de recouvrement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de trente jours courant à compter de la réception par l'organisme de recouvrement de la décision de l'employeur. Avant l'expiration de ce délai, cette dernière adresse à l'inspecteur du recouvrement les résultats de ses calculs accompagnés des éléments permettant de s'assurer de leur réalité et de leur exactitude. L'inspecteur du recouvrement peut s'assurer de l'exactitude de ces calculs, notamment en procédant à l'examen d'un nouvel échantillon. La mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai de trente jours et avant la réponse motivée de l'agent chargé du contrôle aux éventuelles observations de la personne contrôlée. La motivation de la réponse est appréciée par observation.L'agent chargé du contrôle transmet à l'organisme chargé de la mise en recouvrement le procès-verbal de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s'il y a lieu, de l'ensemble des courriers et documents transmis par la personne contrôlée et de la réponse de l'agent chargé du contrôle ».
L'arrêté du 11 avril 2007 dispose en son article 1er, notamment, que « La mise en oeuvre, aux fins de régularisation d'un point de législation, des méthodes mentionnées à l'article R. 243-59 suit un protocole composé de quatre phases : la constitution d'une base de sondage, le tirage d'un échantillon, la vérification exhaustive de l'échantillon et l'extrapolation à la population ayant servi de base à l'échantillon. Dans le cadre de la procédure contradictoire, l'employeur est associé à chacune de ces phases ».
La jurisprudence déduit de ces textes que dans le cadre de la procédure contradictoire, l'accord implicite de l'employeur est non seulement nécessaire pour la mise en oeuvre de la méthode du contrôle par sondage mais aussi qu'il doit être associé à chacune des quatre phases de la procédure et ce, à peine de nullité du redressement subséquent.
Le débat qui oppose les parties porte sur l'effectivité de la mise en oeuvre de la procédure avant l'expiration du délai de refus de l'employeur, étant précisé que l'inspecteur du recouvrement a remis au cotisant le 17 mai 2013 le descriptif général décrivant les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation, les formules statistiques utilisées par ces techniques et une copie des textes réglementaires applicables.
Il apparaît de l'examen des échanges antérieurs à cette date et énumérés plus haut que :
- les courriers et courriels des 7 février ainsi que 8 et 9 avril 2013 (pièces 14, 15 et 16 de l'appelante) sont relatifs à d'autres redressements, concernant les établissements de [Localité 10] et [Localité 9], et initiés antérieurement, ainsi que leur contenu l'indique ;
- les autres documents issus de l'appelante elle-même, tel en pièce 12 son courrier du 31 mai 2013 par lequel elle affirme que l'URSSAF de Midi-Pyrénées a mis en oeuvre le contrôle sans son accord, ne sauraient constituer une preuve opposable ;
- enfin, c'est à juste titre que l'intimée soutient que la demande de communication de renseignements, objet des pièces 13 et 13-1, datées du 7 février 2013, ne constitue pas la mise en oeuvre de la procédure de contrôle mais tendait, avant toute mise en oeuvre du contrôle, à connaître le fonctionnement et la pratique de l'entreprise, préalablement à la décision de procéder à un contrôle. L'URSSAF de Midi-Pyrénées apporte la preuve de l'absence de lien entre ces renseignements et le contrôle ultérieurement mis en oeuvre, les salariés dont il a été demandé la communication des contrats de mission ne sont aucun de ceux ayant fait ensuite partie de l'échantillon.
En deuxième lieu, la société [7] soutient ne pas avoir été associée à la constitution de la base de sondage ni conviée au tirage de l'échantillon.
Cependant, au-delà du courrier du 17 mai 2013 évoqué plus haut, présentant le descriptif général décrivant les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation ainsi que les formules statistiques utilisées par ces techniques, un entretien dédié a été organisé le 25 juin 2013 au cours duquel a notamment été discutée la constitution de la base de sondage, ainsi que l'établissent deux courriers paraphés par le cotisant en date du 2 juillet 2013 et du 19 juillet 2013, objets de la pièce 2 de l'intimée, lesquels mentionnent expressément : « Vous trouverez ci-dessous la description de la méthode retenue, qui vous a été présentée lors d'un entretien en date du 25 juin 2013".
Les mêmes courriers du 2 juillet 2013 et du 19 juillet 2013 établissent que l'inspecteur du recouvrement a invité le cotisant à se présenter au tirage de l'échantillon et, ainsi que le rapporte la lettre d'observations en page 7, deux personnes habilitées pour suivre le contrôle, Mmes [P] et [H] étaient présentes lors du tirage des échantillonnages.
Plus largement, ces deux courriers montrent que le cotisant a été associé à la constitution de la base de sondage, ayant été expressément invité à faire des observations, ce dont il s'est abstenu, et a ensuite été informé des résultats de la vérification ainsi que le démontre le courriel du 26 septembre 2013, objet de la pièce 29 de l'appelante. Tel est le cas, en particulier, du moyen tiré de l'assymétrie des strates pour la prime d'outillage, dont au demeurant l'appelante ne démontre pas qu'elle constituerait une incohérence incompatible avec la méthode d'échantillonnage.
Le moyen sera donc rejeté.
Sur les chefs de redressement contestés :
S'agissant du chef n°1, portant sur les frais professionnels, prime d'outillage :
Aux termes de l'article L 242-1 du Code de la Sécurité Sociale, l'ensemble des sommes versées aux salariés sont assujetties à cotisations.
Selon l'article 2 de l'Arrêté du 20 décembre 2002, les frais professionnels qui s'entendent des charges à caractère spécial inhérents à la fonction ne sont déductibles de l'assiette des cotisations que, lorsqu'ils prennent la forme d'allocations forfaitaires, lorsque la preuve de leur utilisation conforme à leur objet est rapportée.
En l'espèce, la [7] verse à ses salariés intérimaires une prime d'outillage d'un montant forfaitaire destinée à compenser la charge de l'achat et de l'entretien des outils leur appartenant utilisés dans leurs fonctions.
L'appelante conteste ce chef de redressement, en indiquant que ses salariés sont propriétaires des outils qu'ils utilisent, et doivent les entretenir et les remplacer. Elle soutient également que les modalités de calcul du redressement ne sont pas indiquées.
L'URSSAF fait cependant valoir à juste titre :
- que la [7], qui ne produit pas de factures d'achat ni d'entretien du matériel réglées par ses salariés, ni d'autres pièces démontrant que les salariés utilisent du matériel leur appartenant, ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'utilisation effective de ces primes conformément à leur objet, au sens de l'article 2 de l'arrêté du 20 décembre 2002 précité ;
- que la lettre d'observations indique clairement l'assiette des cotisations, leur taux et le montant du redressement de cotisation qui en résulte, et comporte en annexe les tableaux détaillant les bases de calcul du redressement, salarié par salarié.
Ce chef de redressement, pour un montant de 26 259 euros, dont le calcul n'est pas contesté en tant que tel, sera donc validé.
S'agissant du chef n°4, portant sur les primes de naissance et de mariage
Par application de l'article l'article L 242-1 précité, selon lequel l'ensemble des sommes versées à, l'occasion du travail ou en considération de l'appartenance du salarié à l'entreprise sont assujetties à cotisations, les sommes ou avantages versés par les comités d'entreprises sur des fonds financés par l'employeur sont par principe assujettissables, sauf à ce que ces sommes ou avantages présentent le caractère de secours, savoir d'une mesure individuelle destinée à pallier une situation de précarité ou de détresse ponctuelle ou exceptionnelle.
Il est de jurisprudence que les dérogations à cette règle sont d'interprétation stricte, constituées, en la matière, des bons d'achat ou cadeaux en nature versés aux salariés ou aux anciens salariés peuvent être exonérés de cotisations lorsqu'ils sont distribués à. l'occasion d'évènements particuliers et à la condition que leur valeur par bénéficiaire n'excède pas 5% du plafond mensuel de la Sécurité Sociale, selon les instructions ministérielles.
Le versement de primes d'argent ne bénéficie pas du régime dérogatoire décrit ci-dessus.
Il est indifférent que les sommes n'aient pas été versées directement par l'employeur mais par l'intermédiaire du comité d'entreprise qu'il préside et finance.
Ce chef de redressement, pour un montant total de 1 086 euros, dont le détail du calcul figure, salarié par salarié et événement par événement, dans la lettre d'observations et ses annexes, sera donc validé.
S'agissant du chef n°5, portant sur le versement transport
Aux termes des articles L 2333-64 et L2531-2 du Code Général des Collectivités Territoriales, sont assujettis au Versement Transport les employeurs occupant plus de neuf salariés dans une zone AOT. L'article L 2531-3 du même code précise que l'assiette du Versement Transport est constituée par le montant des salaires payés.
La société [7] ne formule aucun moyen propre à contester ce redressement, sauf à soutenir qu'aucune modalité de calcul n'est donnée par l'URSSAF dans sa lettre d'observations pour aboutir à un redressement, alors que l'article R. 243-59 alinéa 5 précité oblige l'organisme à mentionner dans sa lettre d'observations le mode de calcul utilisé.
Toutefois, la page 17 de la lettre d'observations décrit la méthode de calcul et présente les différentes valeurs (montant des salaires à considérer, versement transport déclaré) et la correction opérée par l'organisme de contrôle.
Ce chef de redressement, pour un montant de 519 euros, dont le calcul n'est pas contesté en tant que tel, sera donc validé.
S'agissant du chef n°2, portant sur les frais professionnels, indemnité de salissure, constitutif d'une observation pour l'avenir
En application des articles 1 et 2 de l'arrêté du 10 décembre 2002 précité, les frais professionnels constitutifs de charges à caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi sont déductibles de l'assiette des cotisations. Lorsque l'indemnisation de ces frais s'effectue sous forme d'allocations forfaitaires leur déduction est subordonnée à la preuve de leur utilisation conforme à leur objet.
Pour demander la réformation du jugement sur ce point, la [7] fait valoir que ces dépenses sont des frais d'entreprise et à ce titre exonérées de cotisation. Elle soutient à cet effet que les vêtements portés par les salariés intérimaires sur les sites des clients appartiennent à l'employeur. Ils ne sont exclusivement portés que pendant le travail et les dépenses liées à l'entretien de ces vêtements sont prévues par les accords collectifs des entreprises utilisatrices.
Toutefois, c'est à bon droit que le tribunal a relevé qu'en vertu de la circulaire d'application du décret susvisé, les frais d'entreprise correspondent à des charges d'exploitation de l'entreprise et doivent remplir simultanément trois critères :
- présenter un caractère exceptionnel,
- revêtir une intérêt pour l'entreprise,
- s'agir de frais exposés en dehors de l'exercice normal de l'activité du travailleur salarié ou assimilé.
Il est ajouté que ne peuvent être considérées comme des frais d'entreprise, les primes de salissures versées par l'employeur lorsque :
- les primes sont calculées uniformément ou en pourcentage du salaire et sans justification des dépenses réellement engagées,
- les primes sont versées pendant la période de congés payés,
- les primes sont versées à la quasi-totalité du personnel alors qu'il n'est justifié ni de frais anormaux de salissure ni de l'utilisation effective de la prime conformément à son objet et même si le versement est prévu par une convention collective ».
Le redressement contesté a relevé que les primes litigieuses ont été calculées forfaitairement en fonction des jours de travail, sans être justifiées par des factures nominatives susceptibles de rapporter la preuve de l'utilisation effective des indemnité aux fins de nettoyage par les intérimaires qui en bénéficiant.
C'est pourquoi l'observation pour l'avenir formulée de ce chef par l'URSSAF de Midi-Pyrénées sera validée.
Le jugement entrepris sera donc confirmé.
L'équité commande de fixer à la somme de 2 000 euros la participation de la [7] aux frais irrépétibles de l'URSSAF de Midi-Pyrénées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 19 février 2021 en toutes ses dispositions,
Condamne la société [7] à payer la somme de 2 000 euros à l'URSSAF de Midi-Pyrénées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Dit que la société [7] doit supporter les dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par N. PICCO, faisant fonction de président et par E. BERTRAND, greffière
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
E. BERTRAND N. PICCO
.
ARRÊT N° 95/25
N° RG 21/01995 - N° Portalis DBVI-V-B7F-OELN
NP/RL
Décision déférée du 19 Février 2021 - Pole social du TJ de TOULOUSE - 19/10389
JM.GAUCI
[7] venant aux droits de
[6]
C/
URSSAF MIDI-PYRENEES
CONFIRMATION
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème chambre sociale - section 3
***
ARRÊT DU TREIZE MARS DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
[7] venant aux droits de [6]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 3]
représentée par Me Bénédicte GIARD-RENAULT TEZENAS DU MONTC de la SELARL ENOR AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
URSSAF MIDI-PYRENEES
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Elisabeth LAJARTHE de la SELARL DBA, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 16 janvier 2025 en audience publique, devant la cour composée de :
N. PICCO, conseiller faisant fonction de président
M. SEVILLA, conseillère
C. HERENGUEL, conseillère
qui en ont délibéré.
Greffière : lors des débats E. BERTRAND
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par N. PICCO, conseiller faisant fonction de président et par E. BERTRAND, greffière de chambre
EXPOSE DU LITIGE
La société [7] a fait l'objet d'un contrôle diligenté par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Midi-Pyrénées (l'URSSAF) portant sur l'application des législations de sécurité sociale, de l'assurance maladie et de la garantie des salaires AGS pour la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012.
Ce contrôle a donné lieu à une lettre d'observations du 21 octobre 2013 établie par l'inspecteur du recouvrement qui a évalué le rappel de cotisations et contributions à la somme de 64 461 euros, hors majorations de retard pour l'exercice 2010.
Après échanges entre les parties, l'URSSAF a adressé à la société une mise du 26 décembre 2013 pour un montant de 69 247 euros, dont 11 056 euros au titre des majorations de retard.
La société [7] a formé un recours devant la commission de recours amiable de l'URSSAF.
La commission de recours amiable a rejeté le recours de la [7] par décision du 25 février 2016.
Par courrier du 18 avril 2016, la [7] a porté sa contestation devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Garonne.
Par jugement du 19 février 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Toulouse a :
- dit que le jugement concerne la société [6] dont le n° Siren est le [N° SIREN/SIRET 4],
- déclaré recevable le recours introduit par la société [6],
- annulé le redressement opéré par l'URSSAF Midi-Pyrénées au titre de l'assiette minimum des cotisations-indemnité compensatrice de congés payés pour la somme de 1930 euros au titre de l'exercice 2010,
- débouté la société [6] de l'ensemble de ses autres prétentions,
- validé le surplus des redressements,
- validé l'observation pour l'avenir s'agissant de l'indemnité de salissure,
- rejeté toute autre demande,
- condamné la société [6] aux dépens de l'instance.
La société [6] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 23 avril 2021.
La société [7] demande à la cour de déclarer le recours de la société [7] venant aux droits de la société [6] recevable et bien fondé, d'infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 19 février 2021 sauf en ce qu'il a annulé le chef de redressement au fond relatif à l'assiette minimum des cotisations - indemnités compensatrice de congés payés pour la somme de 1930 euros au titre de l'exercice 2010. A titre principal, elle demande à la cour de dire que l'URSSAF a mis en oeuvre la méthode de vérification par échantillonnage et extrapolation sans lui avoir préalablement communiqué le descriptif de la méthode dérogatoire et conséquence d'annuler les opérations de contrôle et la décision de redressement que constitue la mise en demeure. A titre subsidiaire, elle demande à la cour de déclarer les chefs de redressement suivants non fondés :
- frais professionnels : prime d'outillage,
- frais professionnels : indemnités de salissure (observation pour l'avenir),
- comité d'entreprise : prime de naissance et de mariage,
- versement transport
- frais professionnels : hors indemnité de grand déplacement (dépenses de nourriture et de transport).
En conséquence, elle demande à la cour de les annuler, d'annuler les observations pour l'avenir et de condamner l'URSSAF Midi-Pyrénées au paiement de 3000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux frais d'exécution forcée.
Elle fait valoir que le redressement est irrégulier pour plusieurs raisons. Tout d'abord, elle soutient que la lettre d'observations ne respecte pas les informations obligatoires de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale. Par exemple, dans la lettre d'observations, l'organisme indique que pour le contrôle du personnel permanent, il a consulté les frais intérimaires 2010. Or, la société soutient qu'il ne peut pas avoir consulté pour le contrôle du personnel permanent des documents qui concernent exclusivement le personnel temporaire. En outre, elle indique que l'URSSAF aurait consulté d'autres documents qui ne figurent pas dans la lettre d'observations. Ensuite, elle invoque l'irrégularité de la méthode de contrôle dérogatoire retenue par l'URSSAF. En effet, elle explique d'une part que l'échantillonage est une méthode de contrôle qui doit être utilisée par les inspecteurs en recouvrement en respectant un process formaliste très strict et d'autre part que cette méthode ne peut être mise en oeuvre qu'après communication à l'employeur de l'exposé écrit de son déroulement. En l'espèce, elle indique n'avoir jamais été informé de la documentation avant mise en oeuvre de la méthode de contrôle dérogatoire. Elle soutient également ne pas avoir été associée à toutes les phases de la procédure ainsi qu'à la constitution de la base du sondage (formalités substantielles de l'article R. 243-59-2). Elle précise que ces irrégularités sont sanctionnées par la nullité du redressement. Elle fait également valoir la mauvaise application de la méthode d'échantillonage. Sur ce point, elle indique ne pas avoir été en mesure de présenter les cas qu'elle considérait comme atypiques. A ce titre, elle considère que le manquement au principe du contradictoire est patent.
Sur les chefs de redressement critiqués :
- sur les frais professionnels non justifiés (prime d'outillage) : la société conteste ce chef de redressement dans son principe et dans son montant. En effet, elle indique respecter les conditions de versement de cette prime à savoir que l'entreprise utilisatrice verse cette indemnité à ses salariés permanents et que les salariés qui perçoivent cette prime aient établi l'inventaire de leurs outils.
- sur les frais professionnels non justifiés - indemnité de salissure : elle fait valoir verser cette prime à ses salariés dans la mesure où l'entreprise utilisatrice la verse à ses salariés permanents.
- comité d'entreprise (prime de naissance et de mariage) : elle fait valoir que l'établissement de [Localité 2] (personnel intérimaire) ne peut être tenu responsable des erreurs de son comité d'entreprise. Elle précise que l'employeur n'a pas la maîtrise du budget de fonctionnement qu'il alloue au comité d'entreprise.
- versement transport (assiette) : elle soutient que l'URSSAF ne donne aucune modalité de calcul dans sa lettre d'observations, ce qui n'est pas conforme avec l'article R.243-59 al 5 du CSS.
L'URSSAF Midi-Pyrénées conclut à la confirmation du jugement et demande à la cour de condamner la [7] au paiement de la somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Sur l'irrégularité prétendue de la lettre d'observations, l'URSSAF soutient que certaines pièces visées par le cotisant sont sans lien avec l'actuel contentieux et que pour les autres pièces invoquées par le cotisant, elles sont expréssement visées dans la liste des documents contrôlés. En outre, elle soutient que la société [7] n'établit pas que l'inspecteur de recouvrement ait utilisé ces pièces.
Sur la régularité de la méthode de vérification par extrapolation, elle fait valoir que le cotisant n'établit pas que la méthode de l'échantillonage avec extrapolation aurait été mise en oeuvre avant le 17 mai 2013 qui correspond à la date à laquelle le document indiquant les différentes phases de la mise en oeuvre des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation a été remis au cotisant. En outre, elle indique avoir remis au cotisant le 17 mai 2013 le descriptif général décrivant les méthodes de vérification par échantillonage et extrapolation, les formules statiques utilisées par ces techniques et une copie de l'arrêté du 11 avril 2017. En conséquence, elle fait valoir avoir respecté les prescriptions de l'article R. 243-59-2 du CSS. Sur le fait que le représentant de la société n'aurait pas été convié au tirage de l'échantillon, elle indique que le courrier du 2 juillet 2013, paraphé par le cotisant, confirme que l'inspecteur a invité le cotisant à se présenter au tirage. Elle ajoute que l'inspecteur a expréssément informé le cotisant des résultats de la vérification et a sollicité l'accord du cotisant sur le principe de la réintégration par courriel du 26 septembre 2013, ce qui implique par hypothèse que le cotisant ait été informé des résultats de la vérification. Par ailleurs, elle indique que l'inspecteur a adressé un courrier en date du 2 juillet 2013 dans lequel il lui était demandé ses observations. En conséquence, en l'absence de réponse du cotisant, ce dernier ne peut alléguer avoir été privée de la possibilité de discuter la constitution de la base de sondage.
Sur les chefs de redressement :
- sur les frais professionnels non justifiés (prime d'outillage et indemnité de salissure) : elle fait valoir que l'ensemble des sommes versées aux salariés sont assujetties à cotisations. En outre, elle précise que les frais professionnels qui s'entendent des charges à caractère spécial inhérents à la fonction ne sont déductibles de l'assiette des cotisations que, lorsqu'ils prennent la forme d'allocations forfaitaires, lorsque la preuve de leur utilisation conforme à leur objet est rapportée. En l'espèce, elle soutient qu'aucune pièce justificative de l'utilisation conforme de la prime et des indemnités forfaitaires de salissure à son objet n'a été produite.
- comité d'entreprise (prime de naissance et de mariage) : elle fait valoir que si les bons d'achats et les cadeaux peuvent, sous conditions, être versés en franchise de cotisations par le comité d'entreprise, tel n'est pas le cas des sommes d'argent lesquelles ne sont pas visées par les instructions ministérielles des 17 avril 1985, 17 décembre 1988 et 2 juillet 1992.
- versement transport (assiette) : elle soutient qu'aux termes des articles L.2333-64 et L.2531-2 du code général des collectivités territoriales, sont assujettis au versement transport les employeurs occupant plus de 9 salariés dans une zone AOT. En outre, aux termes de l'article L.2531-3 du code susvisé, elle soutient que l'assiette du versement transport est constituée par le montant des salaires payés. En l'espèce, elle fait valoir que l'assiette de la contribution versement transport était inférieure à la totalité des rémunérations déclarées. Si la société [7] a pu justifier en partie cette minoration d'assiette, le solde demeurant non justifié a été réintégré dans l'assiette des cotisations.
MOTIFS
Sur la régularité de la lettre d'observations du 21 octobre 2013 :
La société [7] reproche à l'URSSAF de Midi-Pyrénées de ne pas avoir respecté les dispositions de l'article R 243-59 du Code de la Sécurité, selon lequel « A l'issue du contrôle, les inspecteurs de recouvrement communiquent l'employeur ou au travailleur indépendant un document daté et signé par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de fin de contrôle ».
L'appelante fait successivement valoir qu'un certain nombre de documents remis aux inspecteurs ne figurent pas sur la liste des pièces consultées, que des documents ont été emportés à l'extérieur de l'entreprise sans décharge ni accord de l'employeur et enfin que des documents de l'entreprise ont été déposés au siège de l'URSSAF de Midi-Pyrénées sans l'accord de l'employeur.
Sur le premier point, la lettre d'observations contestée énumère de la façon suivante les documents consultés :
- Extrait Kbis, Statuts, Procès verbaux d'assemblées, Rapports de gestion, Rapports des Commissaires aux Comptes généraux et spéciaux, Bilans Sociaux
- Accord de participation, avenants et récépissés de dépôt auprès de la [8].
- Balances générales, bilans et comptes annexes
- Comptabilités et pièces justificatives par sondage
- Conventions passées avec les établissements d'enseignement pour les stagiaires en entreprise Dossiers de rupture intervenue en 2010
- DAS2
- Etats de frais et Justificatifs des frais professionnels indemnisés aux salariés permanents Frais intérimaires 2010 : examen de la prime d'outillage
- Livre et Journal annuel de paie par agence et pour la société.
- Etats justificatifs du calcul de la réduction FILLON
et des allégements TEPA.
- DADS 1, Tableaux récapitulatifs annexes à la
- DADS
- Plan Epargne Entreprise et récépissé de dépôt auprès
de la [8]
- Double des déclarations de régularisation annuelle
-(DRA) adressées aux ASSEDIC
- Procès verbaux de réunion et livre de recettes/dépenses du comité d'entreprise
- Double des bulletins de salaire
- Plan Seniors et récépissé de dépôt auprès de la [8] le 17/09/2009.
- Contrats de prévoyance complémentaire pour le personnel permanent et intérimaire.
La société [7] énumère des documents qu'elle estime ne pas figurer dans la lettre d'observations. Or, leur examen (pièces 8, 8-1, 8-2, 8-3, 8-5, 869-4, 9, 9-2, 9-3, 9-4, 9-5, 9-7, 10-3, 10-4, 10-5, 10-6, 10-7, 10-8, 10-9, 10-10, 10-11, 10-12, 10-13, 11) montre qu'ils ne concernent pas le redressement objet du présent litige :
- soit qu'ils soient relatifs à d'autres établissements ;
- soit qu'ils portent sur d'autres années.
Au demeurant, la société [7] n'établit nullement que ces documents non identifiés auraient fondé le redressement, condition exigée par l'article R 243-59 précité de l'obligation d'énumération dans la lettre d'observation.
Sur le deuxième point, la [7] reproche également à l'URSSAF d'avoir emporté des documents hors de l'entreprise, sans accord du président formalisé par un bordereau de remise, alors que l'inspecteur aurait dû les consulter sur place.
L'URSSAF fait cependant valoir à juste titre que seul le fait d'emporter des documents originaux, et non des copies des documents remis, nécessite l'accord de la personne contrôlée. Ce n'est que dans sa rédaction issue du décret du 11 octobre 2019 que l'article R 243-59 le précise expressément, mais la même interprétation doit être retenue pour la période antérieure, en considération du but poursuivi par la règle, visant à garantir la restitution des documents originaux et la possibilité de leur exploitation concomitante par l'employeur, dans le cadre d'un débat contradictoire. C'est également l'interprétation retenue par le conseil d'Etat, en matière fiscale (CE 27 juillet 2005, n°2261111).
Or, la société [7] ne soutient ni ne démontre que des documents originaux aient été emportés par l'inspecteur du recouvrement. Au surplus, ni les mentions de la lettre d'observations ni l'utilisation de la voie dématérialisée pour la transmission de documents n'établissent qu'il se serait agi de documents originaux.
Enfin, la société [7] soutient, sans toutefois le démontrer, que des documents ont été déposés au siège de l'organisme sans l'accord du cotisant. En effet, l'appelante produit à cet effet en pièce 42 une attestation de Mme [H] en date de décembre 2016 affirmant 'avoir remis le 9 janvier 2014 en fin d'après-midi des dossiers complémentaires sur les années 2011 et 2010 (dossier papier) auprès de leur accueil URSSAF (guichet) à la demande pressante des inspecteurs (...)' et 'j'y suis allée toute seule', précisant que les documents concernaient des intérimaires (cartes grises, attestations de domicile, cartes d'identité).
Or, sans être nullement étayée, alors que d'autres éléments de nature à corroborer cette affirmation, telles les demandes formulées par les inspecteurs, cette attestation est insuffisante à prouver que des documents ont été remis à l'URSSAF de Midi-Pyrénées en dehors des locaux de l'entreprise :
- du fait que la salariée a par ailleurs faussement affirmé ne pas avoir été habilitée à suivre le contrôle pour le compte de son employeur, contrairement à l'habilitation expresse dont elle bénéficiait, ainsi que l'établit la pièce 1 de l'appelante portant 'liste des personnes de l'entreprise habilitées pour le contrôle URSSAF' ;
- de la singulière imprécision de l'attestation elle-même relativement au contenu des pièces qui auraient été remises.
Enfin, la société [7] n'établit nullement qu'à considérer qu'ils auraient été remis, ces documents non identifiés auraient fondé le redressement, condition exigée par l'article R 243-59 précité de l'obligation d'énumération dans la lettre d'observations.
Sur la contestation de la méthode de contrôle :
La société [7] soutient que l'organisme de contrôle, qui a choisi de recourir aux méthodes statistiques plutôt qu'à l'examen exhaustif des situations, n'a pas respecté le protocole réglementaire applicable.
Elle précise en premier lieu qu'ayant choisi d'adopter la méthode de vérification par échantillonnage et extrapolation, l'URSSAF de Midi-Pyrénées devait, au moins quinze jours avant le début de la vérification, remettre à l'employeur un document lui indiquant les différentes phases de la mise en oeuvre des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation et les formules statistiques utilisées pour leur application.
L'appelante fait valoir que l'URSSAF de Midi-Pyrénées a en réalité mis en oeuvre cette procédure avant même de l'en avoir avertie par lettre du 17 mai 2013, qu'alors que l'employeur disposait d'un délai de quinze jours pour s'opposer à cette méthode, faculté dont il a de fait été privé.
Au soutien de cette affirmation, la [7] prétend que les inspecteurs ont établi une base de sondage, constitutive de la mise en place de la première phase de la procédure de vérification par échantillonnage et extrapolation, dès le mois de février 2013 et ce sans l'accord de l'employeur. Ainsi, dans un mail du 7 février 2013 à la société, l'inspecteur de recouvrement aurait fait référence à sa demande de « contrat mission sondage frais 2011 ». Puis, dans un courrier envoyé par mail le 7 février 2013 par les inspecteurs à la société, avec comme objet « demande de documents aux. fins de poursuite de vérification », l'Urssaf aurait fait référence à son étude par sondage des frais professionnels. Encore, dans un courriel du 8 avril 2013 à la société, l'inspectrice aurait évoqué l'examen des frais professionnels sur l'exercice 2011 effectué par sondage. De même, dans un mail du 9 avril 2013, l'inspectrice aurait fait référence à l'établissement de [Localité 10] « pour lequel, suite à un sondage effectué, nous vous avons demandé un certain nombre de justificatifs... » et donné une liste de salariés pour lesquels elle rappelle qu'ils ont déjà été répertoriés dans le sondage des frais professionnels concernant l'exercice 2011.
La procédure d'échantillonnage et extrapolation est soumise aux dispositions suivantes.
Selon l'article R. 243-59-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au fait de l'espèce : « Les agents chargés du contrôle peuvent proposer à la personne contrôlée d'utiliser les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation définies par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. Au moins quinze jours avant le début de cette vérification, l'agent chargé du contrôle indique à la personne contrôlée l'adresse électronique à laquelle sont consultables le document lui indiquant les différentes phases de la mise en 'uvre de ces méthodes, les formules statistiques utilisées pour leur application et l'arrêté mentionné au présent alinéa. La personne contrôlée bénéficie de ce délai pour informer par écrit l'agent chargé du contrôle de son opposition à l'utilisation de ces méthodes. Dès lors qu'elle entend s'y opposer, elle en informe l'agent chargé du contrôle, par écrit et dans les quinze jours suivant la remise des documents mentionnés à l'alinéa précédent. Dans ce cas, l'agent chargé du contrôle lui fait connaître le lieu dans lequel les éléments nécessaires au contrôle doivent être réunis. Ce lieu ne peut être extérieur aux locaux de la personne contrôlée qu'avec l'autorisation de cette dernière. L'agent chargé du contrôle fait également connaître les critères, conformes aux nécessités du contrôle, selon lesquels ces éléments doivent être présentés et classés.
La personne contrôlée dispose de quinze jours après notification des informations mentionnées au précédent alinéa pour faire valoir, le cas échéant, ses observations en réponse. A l'issue de ce délai, l'agent chargé du contrôle notifie à la personne contrôlée le lieu et les critères qu'il a définitivement retenus. La mise à disposition des éléments ainsi définis doit se faire dans un délai déterminé d'un commun accord entre l'agent chargé du contrôle et la personne contrôlée, mais qui ne peut être supérieur à soixante jours. Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, l'opposition de la personne contrôlée à l'utilisation des méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation ne peut être prise en compte. Lorsque ces méthodes sont mises en oeuvre, l'inspecteur du recouvrement informe la personne contrôlée des critères utilisés pour définir les populations examinées, le mode de tirage des échantillons, leur contenu et la méthode d'extrapolation envisagée pour chacun d'eux. La personne contrôlée peut présenter à l'agent chargé du contrôle ses observations tout au long de la mise en 'uvre des méthodes de vérification par échantillonnage. Elle est invitée à faire part, le cas échéant, de ses observations sur la constitution de la base de sondage, sur l'échantillon obtenu et sur les résultats des vérifications effectuées sur chaque individu composant cet échantillon. Ces échanges peuvent être oraux. Lorsque la personne contrôlée décide d'exprimer un désaccord par écrit, l'agent chargé du contrôle répond de manière motivée par écrit aux observations de l'intéressée. La lettre d'observations mentionnée au III de l'article R. 243-59, précise les populations faisant l'objet des vérifications, les critères retenus pour procéder au tirage des échantillons, leur contenu, les cas atypiques qui en ont été exclus, les résultats obtenus pour chacun des échantillons, la méthode d'extrapolation appliquée et les résultats obtenus par application de cette méthode aux populations ayant servi de base au tirage de chacun des échantillons. Il mentionne la faculté reconnue à la personne contrôlée en vertu du sixième alinéa du présent article. Dans le délai de trente jours à compter de la réception de la lettre d'observations mentionnée à l'alinéa précédent, la personne contrôlée peut informer l'organisme effectuant le contrôle de sa déCision de procéder au calcul des sommes dont elle est redevable ou qu'elle a indûment versées pour la totalité des salariés concernés par chacune des anomalies constatées sur chacun des échantillons utilisés. Lorsque, au terme du délai fixé par l'alinéa précédent, la personne contrôlée n'a pas fait connaître à l'organisme de recouvrement sa décision de procéder au calcul des sommes dont elle est redevable, la mise en recouvrement des cotisations. des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai et avant la réponse de l'inspecteur du recouvrement aux éventuelles observations de l'employeur. Lorsque la personne contrôlée a fait connaître dans le délai imparti sa décision de procéder au calcul des sommes dont elle est redevable, l'engagement de la procédure de recouvrement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de trente jours courant à compter de la réception par l'organisme de recouvrement de la décision de l'employeur. Avant l'expiration de ce délai, cette dernière adresse à l'inspecteur du recouvrement les résultats de ses calculs accompagnés des éléments permettant de s'assurer de leur réalité et de leur exactitude. L'inspecteur du recouvrement peut s'assurer de l'exactitude de ces calculs, notamment en procédant à l'examen d'un nouvel échantillon. La mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement ne peut intervenir avant l'expiration de ce délai de trente jours et avant la réponse motivée de l'agent chargé du contrôle aux éventuelles observations de la personne contrôlée. La motivation de la réponse est appréciée par observation.L'agent chargé du contrôle transmet à l'organisme chargé de la mise en recouvrement le procès-verbal de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s'il y a lieu, de l'ensemble des courriers et documents transmis par la personne contrôlée et de la réponse de l'agent chargé du contrôle ».
L'arrêté du 11 avril 2007 dispose en son article 1er, notamment, que « La mise en oeuvre, aux fins de régularisation d'un point de législation, des méthodes mentionnées à l'article R. 243-59 suit un protocole composé de quatre phases : la constitution d'une base de sondage, le tirage d'un échantillon, la vérification exhaustive de l'échantillon et l'extrapolation à la population ayant servi de base à l'échantillon. Dans le cadre de la procédure contradictoire, l'employeur est associé à chacune de ces phases ».
La jurisprudence déduit de ces textes que dans le cadre de la procédure contradictoire, l'accord implicite de l'employeur est non seulement nécessaire pour la mise en oeuvre de la méthode du contrôle par sondage mais aussi qu'il doit être associé à chacune des quatre phases de la procédure et ce, à peine de nullité du redressement subséquent.
Le débat qui oppose les parties porte sur l'effectivité de la mise en oeuvre de la procédure avant l'expiration du délai de refus de l'employeur, étant précisé que l'inspecteur du recouvrement a remis au cotisant le 17 mai 2013 le descriptif général décrivant les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation, les formules statistiques utilisées par ces techniques et une copie des textes réglementaires applicables.
Il apparaît de l'examen des échanges antérieurs à cette date et énumérés plus haut que :
- les courriers et courriels des 7 février ainsi que 8 et 9 avril 2013 (pièces 14, 15 et 16 de l'appelante) sont relatifs à d'autres redressements, concernant les établissements de [Localité 10] et [Localité 9], et initiés antérieurement, ainsi que leur contenu l'indique ;
- les autres documents issus de l'appelante elle-même, tel en pièce 12 son courrier du 31 mai 2013 par lequel elle affirme que l'URSSAF de Midi-Pyrénées a mis en oeuvre le contrôle sans son accord, ne sauraient constituer une preuve opposable ;
- enfin, c'est à juste titre que l'intimée soutient que la demande de communication de renseignements, objet des pièces 13 et 13-1, datées du 7 février 2013, ne constitue pas la mise en oeuvre de la procédure de contrôle mais tendait, avant toute mise en oeuvre du contrôle, à connaître le fonctionnement et la pratique de l'entreprise, préalablement à la décision de procéder à un contrôle. L'URSSAF de Midi-Pyrénées apporte la preuve de l'absence de lien entre ces renseignements et le contrôle ultérieurement mis en oeuvre, les salariés dont il a été demandé la communication des contrats de mission ne sont aucun de ceux ayant fait ensuite partie de l'échantillon.
En deuxième lieu, la société [7] soutient ne pas avoir été associée à la constitution de la base de sondage ni conviée au tirage de l'échantillon.
Cependant, au-delà du courrier du 17 mai 2013 évoqué plus haut, présentant le descriptif général décrivant les méthodes de vérification par échantillonnage et extrapolation ainsi que les formules statistiques utilisées par ces techniques, un entretien dédié a été organisé le 25 juin 2013 au cours duquel a notamment été discutée la constitution de la base de sondage, ainsi que l'établissent deux courriers paraphés par le cotisant en date du 2 juillet 2013 et du 19 juillet 2013, objets de la pièce 2 de l'intimée, lesquels mentionnent expressément : « Vous trouverez ci-dessous la description de la méthode retenue, qui vous a été présentée lors d'un entretien en date du 25 juin 2013".
Les mêmes courriers du 2 juillet 2013 et du 19 juillet 2013 établissent que l'inspecteur du recouvrement a invité le cotisant à se présenter au tirage de l'échantillon et, ainsi que le rapporte la lettre d'observations en page 7, deux personnes habilitées pour suivre le contrôle, Mmes [P] et [H] étaient présentes lors du tirage des échantillonnages.
Plus largement, ces deux courriers montrent que le cotisant a été associé à la constitution de la base de sondage, ayant été expressément invité à faire des observations, ce dont il s'est abstenu, et a ensuite été informé des résultats de la vérification ainsi que le démontre le courriel du 26 septembre 2013, objet de la pièce 29 de l'appelante. Tel est le cas, en particulier, du moyen tiré de l'assymétrie des strates pour la prime d'outillage, dont au demeurant l'appelante ne démontre pas qu'elle constituerait une incohérence incompatible avec la méthode d'échantillonnage.
Le moyen sera donc rejeté.
Sur les chefs de redressement contestés :
S'agissant du chef n°1, portant sur les frais professionnels, prime d'outillage :
Aux termes de l'article L 242-1 du Code de la Sécurité Sociale, l'ensemble des sommes versées aux salariés sont assujetties à cotisations.
Selon l'article 2 de l'Arrêté du 20 décembre 2002, les frais professionnels qui s'entendent des charges à caractère spécial inhérents à la fonction ne sont déductibles de l'assiette des cotisations que, lorsqu'ils prennent la forme d'allocations forfaitaires, lorsque la preuve de leur utilisation conforme à leur objet est rapportée.
En l'espèce, la [7] verse à ses salariés intérimaires une prime d'outillage d'un montant forfaitaire destinée à compenser la charge de l'achat et de l'entretien des outils leur appartenant utilisés dans leurs fonctions.
L'appelante conteste ce chef de redressement, en indiquant que ses salariés sont propriétaires des outils qu'ils utilisent, et doivent les entretenir et les remplacer. Elle soutient également que les modalités de calcul du redressement ne sont pas indiquées.
L'URSSAF fait cependant valoir à juste titre :
- que la [7], qui ne produit pas de factures d'achat ni d'entretien du matériel réglées par ses salariés, ni d'autres pièces démontrant que les salariés utilisent du matériel leur appartenant, ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'utilisation effective de ces primes conformément à leur objet, au sens de l'article 2 de l'arrêté du 20 décembre 2002 précité ;
- que la lettre d'observations indique clairement l'assiette des cotisations, leur taux et le montant du redressement de cotisation qui en résulte, et comporte en annexe les tableaux détaillant les bases de calcul du redressement, salarié par salarié.
Ce chef de redressement, pour un montant de 26 259 euros, dont le calcul n'est pas contesté en tant que tel, sera donc validé.
S'agissant du chef n°4, portant sur les primes de naissance et de mariage
Par application de l'article l'article L 242-1 précité, selon lequel l'ensemble des sommes versées à, l'occasion du travail ou en considération de l'appartenance du salarié à l'entreprise sont assujetties à cotisations, les sommes ou avantages versés par les comités d'entreprises sur des fonds financés par l'employeur sont par principe assujettissables, sauf à ce que ces sommes ou avantages présentent le caractère de secours, savoir d'une mesure individuelle destinée à pallier une situation de précarité ou de détresse ponctuelle ou exceptionnelle.
Il est de jurisprudence que les dérogations à cette règle sont d'interprétation stricte, constituées, en la matière, des bons d'achat ou cadeaux en nature versés aux salariés ou aux anciens salariés peuvent être exonérés de cotisations lorsqu'ils sont distribués à. l'occasion d'évènements particuliers et à la condition que leur valeur par bénéficiaire n'excède pas 5% du plafond mensuel de la Sécurité Sociale, selon les instructions ministérielles.
Le versement de primes d'argent ne bénéficie pas du régime dérogatoire décrit ci-dessus.
Il est indifférent que les sommes n'aient pas été versées directement par l'employeur mais par l'intermédiaire du comité d'entreprise qu'il préside et finance.
Ce chef de redressement, pour un montant total de 1 086 euros, dont le détail du calcul figure, salarié par salarié et événement par événement, dans la lettre d'observations et ses annexes, sera donc validé.
S'agissant du chef n°5, portant sur le versement transport
Aux termes des articles L 2333-64 et L2531-2 du Code Général des Collectivités Territoriales, sont assujettis au Versement Transport les employeurs occupant plus de neuf salariés dans une zone AOT. L'article L 2531-3 du même code précise que l'assiette du Versement Transport est constituée par le montant des salaires payés.
La société [7] ne formule aucun moyen propre à contester ce redressement, sauf à soutenir qu'aucune modalité de calcul n'est donnée par l'URSSAF dans sa lettre d'observations pour aboutir à un redressement, alors que l'article R. 243-59 alinéa 5 précité oblige l'organisme à mentionner dans sa lettre d'observations le mode de calcul utilisé.
Toutefois, la page 17 de la lettre d'observations décrit la méthode de calcul et présente les différentes valeurs (montant des salaires à considérer, versement transport déclaré) et la correction opérée par l'organisme de contrôle.
Ce chef de redressement, pour un montant de 519 euros, dont le calcul n'est pas contesté en tant que tel, sera donc validé.
S'agissant du chef n°2, portant sur les frais professionnels, indemnité de salissure, constitutif d'une observation pour l'avenir
En application des articles 1 et 2 de l'arrêté du 10 décembre 2002 précité, les frais professionnels constitutifs de charges à caractère spécial inhérentes à la fonction ou à l'emploi sont déductibles de l'assiette des cotisations. Lorsque l'indemnisation de ces frais s'effectue sous forme d'allocations forfaitaires leur déduction est subordonnée à la preuve de leur utilisation conforme à leur objet.
Pour demander la réformation du jugement sur ce point, la [7] fait valoir que ces dépenses sont des frais d'entreprise et à ce titre exonérées de cotisation. Elle soutient à cet effet que les vêtements portés par les salariés intérimaires sur les sites des clients appartiennent à l'employeur. Ils ne sont exclusivement portés que pendant le travail et les dépenses liées à l'entretien de ces vêtements sont prévues par les accords collectifs des entreprises utilisatrices.
Toutefois, c'est à bon droit que le tribunal a relevé qu'en vertu de la circulaire d'application du décret susvisé, les frais d'entreprise correspondent à des charges d'exploitation de l'entreprise et doivent remplir simultanément trois critères :
- présenter un caractère exceptionnel,
- revêtir une intérêt pour l'entreprise,
- s'agir de frais exposés en dehors de l'exercice normal de l'activité du travailleur salarié ou assimilé.
Il est ajouté que ne peuvent être considérées comme des frais d'entreprise, les primes de salissures versées par l'employeur lorsque :
- les primes sont calculées uniformément ou en pourcentage du salaire et sans justification des dépenses réellement engagées,
- les primes sont versées pendant la période de congés payés,
- les primes sont versées à la quasi-totalité du personnel alors qu'il n'est justifié ni de frais anormaux de salissure ni de l'utilisation effective de la prime conformément à son objet et même si le versement est prévu par une convention collective ».
Le redressement contesté a relevé que les primes litigieuses ont été calculées forfaitairement en fonction des jours de travail, sans être justifiées par des factures nominatives susceptibles de rapporter la preuve de l'utilisation effective des indemnité aux fins de nettoyage par les intérimaires qui en bénéficiant.
C'est pourquoi l'observation pour l'avenir formulée de ce chef par l'URSSAF de Midi-Pyrénées sera validée.
Le jugement entrepris sera donc confirmé.
L'équité commande de fixer à la somme de 2 000 euros la participation de la [7] aux frais irrépétibles de l'URSSAF de Midi-Pyrénées.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 19 février 2021 en toutes ses dispositions,
Condamne la société [7] à payer la somme de 2 000 euros à l'URSSAF de Midi-Pyrénées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Dit que la société [7] doit supporter les dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par N. PICCO, faisant fonction de président et par E. BERTRAND, greffière
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
E. BERTRAND N. PICCO
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