CA Toulouse, 2e ch., 18 mars 2025, n° 23/03053
TOULOUSE
Arrêt
Autre
18/03/2025
ARRÊT N°116
N° RG 23/03053
N° Portalis DBVI-V-B7H-PVDJ
MN/ND
Décision déférée du 21 Juillet 2023
TJ de Toulouse
20/02717
MME RUFFAT
[J] [X] [N]
C/
[V] [P]
[B] [M]
CONFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
- Me LELOUVIER
- Me CARA
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU DIX HUIT MARS DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
Madame [J] [X] [N]
[Adresse 1]
[Adresse 1],
[Localité 4]
Représentée par Me Aude LELOUVIER, avocat au barreau de TOULOUSE et par Me Nicolas CHOLEY, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
Madame [V] [P]
domiciliée au CABINET [M] [P] [L]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Aimée CARA de la SELARL CABINET D'AVOCATS MONTAZEAU & CARA, avocat au barreau de TOULOUSE
Madame [B] [M]
domiciliée au CABINET [M] [P] [L]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Aimée CARA de la SELARL CABINET D'AVOCATS MONTAZEAU & CARA, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Décembre 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. NORGUET, conseillère chargée du rapport et V. SALMERON, présidente . Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
M. NORGUET, conseillère
S. MOULAYES, conseillère
Greffier, lors des débats : N.DIABY
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par V. SALMERON, président, et par A. CAVAN, greffier de chambre.
Faits et procédure :
En 2016, [B] [M] et [V] [P] se sont associées avec [T] [L] au sein du cabinet d'infirmières libérales dans laquelle cette dernière exerçait, formant le cabinet [L]-[M]-[P].
Le 16 juin 2016, [T] [L], [B] [M] et [V] [P] ont signé avec [J] [X]-[N], qui travaillait avec ce cabinet depuis 2005 et aux fins de régularisation de sa situation, un contrat de collaboration libérale infirmier à durée indéterminée.
A compter de l'année 2017, [T] [L] s'est trouvée en situation d'arrêt maladie.
Les relations se sont dégradées entre les associées et leur collaboratrice.
Par courrier du 20 novembre 2019, signé des seules [B] [M] et [V] [P], [T] [L], [B] [M] et [V] [P] ont informé [J] [X]-[N] de leur décision de rompre le contrat de collaboration à l'expiration d'un délai de préavis de 3 mois à réception du courrier.
[T] [L] a signalé à ses associées que ce courrier devait, pour être valable, supporter aussi sa signature.
La décision de rompre le contrat de collaboration a été donc réitérée par courrier du 17 février 2020, signée cette fois des 3 associées, précisant que la rupture serait effective à l'expiration d'un nouveau délai de préavis de 3 mois à réception de celui-ci. Le contrat s'est terminé de ce fait le 17 mai 2020.
[J] [X]-[N] a déposé plainte devant le conseil départemental de l'ordre des infirmiers en soutenant que Mesdames [P] et [M] avaient manqué à leurs obligations déontologiques dans le cadre de la rupture de leur relation contractuelle, en l'évinçant volontairement de l'exercice de la profession en commun.
Réunies devant la commission de conciliation de l'ordre, les parties ne se sont pas entendues, ce qui a donné lieu à l'établissement d'un procès-verbal de non-conciliation le 21 juillet 2020 aux termes duquel le litige a été renvoyé devant la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre des infirmiers d'Occitanie. Celle-ci a rejeté la plainte de [J] [X]-[N] par décision du 6 janvier 2022 constatant l'absence de manquements aux obligations déontologiques. [J] [X]-[N] a fait appel en sollicitant l'annulation de la décision. Sa requête a été rejetée le 30 mai 2024 par la Chambre disciplinaire nationale de l'ordre national des infirmiers.
Parallèlement, par acte du 29 juillet 2020, [J] [X]-[N] a assigné [V] [P] et [B] [M] devant le tribunal judiciaire de Toulouse en réparation de préjudices subis du fait de la rupture de leur relation contractuelle.
Par jugement du 21 juillet 2023, le tribunal judiciaire a :
débouté [J] [X]-[N] de sa demande en réparation du préjudice moral,
débouté [J] [X]-[N] de sa demande en réparation du préjudice financier,
condamné [J] [X]-[N] aux dépens de l'instance,
condamné [J] [X]-[N] à payer à [V] [P] et [B] [M] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
rejeté la demande de [J] [X]-[N] au titre des frais irrépétibles,
rejeté toute autre demande plus ample ou contraire formée par les parties.
Par déclaration en date du 22 août 2023, [J] [X]-[N] a relevé appel du jugement du tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de le voir réformé en intégralité.
L'ordonnance de clôture a été rendue en date du 18 novembre 2024 puis, sur demande des intimées, reportée au 9 décembre 2024. L'affaire a été fixée à l'audience du 17 décembre 2024.
Prétentions et moyens des parties :
Vu les conclusions d'appelante récapitulatives et responsives N°2, notifiées le 14 novembre 2024, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles [J] [X]-[N] sollicite, au visa des articles 12 et 700 du Code de procédure civile :
l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté [J] [X]-[N] de sa demande en réparation du préjudice moral,
- débouté [J] [X]-[N] de sa demande en réparation du préjudice financier,
- condamné [J] [X]-[N] aux dépens de l'instance,
- condamné [J] [X]-[N] à payer à Mme [V] [P] et Mme [B] [M] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande de [J] [X]-[N] au titre des frais irrépétibles,
- rejeté toute autre demande plus ample ou contraire formée par les parties,
statuant à nouveau, à titre principal, que soit reconnue l'existence d'une société créée de fait entre [B] [M], [V] [P] et [J] [X]-[N],
que la rupture des relations d'associées entre [B] [M], [V] [P] et [J] [X]-[N] soit reconnue illégale,
à titre subsidiaire, qu'il soit reconnu que [B] [M] et [V] [P] ont rompu les relations contractuelles avec [J] [X]-[N] de manière abusive,
à titre plus subsidiaire, qu'il soit reconnu l'existence d'une indivision sur la patientèle commune de Mesdames [M], [P] et [X]-[N],
en tout état de cause, qu'il soit reconnu que [J] [X]-[N] a subi des préjudices successivement à son évincement du cabinet infirmier,
en conséquence, la condamnation in solidum de [B] [M] et [V] [P] à payer à [J] [X]-[N] la somme de 5 000 euros relativement au préjudice moral souffert,
la condamnation in solidum de [B] [M] et [V] [P] à payer à [J] [X]-[N] la somme de 10 602 euros relativement au préjudice financier souffert,
la condamnation in solidum de [B] [M] et [V] [P] à verser à
[J] [X]-[N] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
leur condamnation in solidum aux entiers dépens.
En réponse, vu les conclusions récapitulatives d'intimées notifiées en date du 6 décembre 2024, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles [V] [P] et [B] [M] demandent :
la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions,
la condamnation de [J] [X]-[N] au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
sa condamnation aux dépens.
MOTIFS
Sur la société de fait
[J] [X]-[N] soutient l'existence d'une société de fait créée entre les intimées et elle en affirmant rapporter la preuve de la réunion des trois critères cumulatifs propres à la caractériser. En conséquence de cette caractérisation, elle soutient que son éviction de la structure ainsi créée est illégale faute de vote et d'accord unanime des associées, notamment le sien, de respect de la procédure statutaire prévue et de matérialisation à son encontre des manquements justifiant cette exclusion.
En réplique, les intimées contestent l'existence d'une société de fait, notamment en raison de la signature du contrat de collaboration excluant tout affectio societatis. Elles soulignent que l'appelante est défaillante à rapporter la preuve de la réunion des trois conditions cumulatives requises puisqu'elle n'a participé ni aux pertes, ni aux bénéfices, percevant seulement sa rémunération contractuelle et participant aux seuls frais généraux.
La cour rappelle qu'après dix ans de participation non encadrée au sein du cabinet libéral en cause, [J] [X]-[N] a accepté de signer le 16 juin 2016 un contrat de collaboration libérale.
Le contrat de collaboration libérale est régi par les dispositions de l'article 18 modifié de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises à laquelle il renvoie expressément.
Il est de jurisprudence constante que pour caractériser une société de fait, celui qui s'en réclame associé doit prouver, par tous moyens, la réunion de trois éléments constitutifs qui doivent exister cumulativement et ne peuvent se déduire les uns des autres et qui sont la preuve d'apports, l'intention commune de participer au résultat de l'entreprise en partageant les bénéfices et en contribuant aux pertes et l'affectio societatis.
En l'espèce, la particularité de l'activité d'infirmière exercée réside dans les dispositions des articles L4312-30, renvoyant à l'article L4312-15, du code de la santé publique, qui prévoit que chaque infirmière perçoit ses propres honoraires sans pouvoir les partager avec une cons'ur.
De ce fait, comme l'avance à juste titre l'appelante, la question du partage éventuel des bénéfices tirés de la structure collective ne se pose pas, chaque infirmière ne pouvant percevoir que ses propres honoraires, pas plus que celle du partage des pertes.
[J] [X]-[N] avance avoir fait un apport en industrie auprès de la structure, dans laquelle elle a travaillé pendant 15 ans. Les intimées indiquent qu'il ne s'agit que de la contrepartie attendue de son contrat de collaboratrice infirmière. La cour rappelle qu'il n'est pas contesté que l'appelante a travaillé dans la structure depuis 2005 alors que le contrat de collaboratrice n'a été signé que le 16 juin 2016, de sorte qu'il peut être retenu un apport en industrie à la structure par [J] [X]-[N] sur les années antérieures à la signature de son contrat.
Néanmoins, comme le soutiennent justement les intimées, la signature de ce contrat de collaboration libérale ayant pour objet, dans son article 1 « de définir les modalités d'une collaboration confraternelle et loyale » et renvoyant aux dispositions de la loi du 2 août 2005 précitée, matérialise une volonté non-équivoque des associées du cabinet de ne pas intégrer [J] [X]-[N] en tant que nouvelle associée mais de lui proposer seulement le statut de simple collaboratrice, ce qui est suffisant pour exclure tout affectio societatis lequel s'entend de la volonté commune de collaborer avec les autres associés sur un pied d'égalité.
Le simple fait que [J] [X]-[N] ait exercé son activité dans les locaux du cabinet, avec les moyens du cabinet et sur la patientèle attachée au cabinet ne caractérise rien d'autre que l'exécution normale du contrat de collaboration libérale que l'appelante a signé et dont la clarté des termes ne nécessite aucune interprétation.
Dès lors, comme l'a justement retenu le premier juge, l'appelante est défaillante à rapporter la preuve de la création entre [V] [P], [B] [M] et elle-même d'une société de fait.
De ce fait, il n'y a donc pas lieu d'examiner les moyens de [J] [X]-[N] au soutien de l'illégalité de son éviction d'une société de fait dont elle ne caractérise pas l'existence.
Le jugement de première instance est confirmé sur ce point.
Sur l'abus dans la rupture des relations contractuelles
Subsidiairement, [J] [X]-[N] soutient l'abus des intimées dans la rupture de leurs relations contractuelles, s'agissant d'un contrat à durée indéterminée, en raison des circonstances ayant entouré son éviction brutale et notamment les mesures prises par les associées pour l'exclure des plannings et lui ôter tout moyen d'exercer au sein du cabinet. Elle souligne que les modalités de rupture prévues à son contrat de collaboration n'ont pas été respectées.
[B] [M] et [V] [P] contestent toute rupture abusive en rappelant que l'appelante a, du fait de leur erreur dans le premier courrier de rupture, bénéficié d'une durée de préavis plus longue que celle contractuellement prévue. Elles nient tout stratagème ayant visé à l'évincer injustement de la structure en indiquant que les obstacles avancés par [J] [X]-[N] ne l'ont aucunement empêché d'exercer.
A l'analyse du contrat de collaboration, produit en pièce 1 par l'appelante, la cour constate qu'il s'agit d'un contrat type dans lequel les mentions relatives tant au contrat à durée déterminé qu'au contrat à durée indéterminée ont été intégralement maintenues. Les parties s'entendent néanmoins sur le fait qu'il s'agisse bien d'un contrat à durée indéterminée.
Dans son article 14, relatif à la rupture en cas de contrat à durée indéterminée, il est noté qu'il peut être mis fin au contrat par l'une quelconque des parties, par lettre recommandée avec accusé de réception, à tout moment, moyennant le respect d'un préavis de 3 mois. Il est ensuite noté qu'en cas de faute grave [...] il peut y être mis fin par l'une ou l'autre des parties, par lettre recommandée sans préavis ou moyennant un préavis de 3 mois, le courrier devant comporter les motifs de la rupture.
C'est donc à tort que [J] [X]-[N] affirme que les courriers recommandés dont elle a été destinataire devaient nécessairement mentionner les motifs de la rupture, cette obligation n'ayant été contractuellement prévue qu'en cas de rupture pour faute grave, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
La cour constate, comme le soutiennent les intimées, que l'appelante a été informée de leur souhait de mettre fin à son contrat de collaboration par une première lettre recommandée du 20 novembre 2019, prévoyant un premier préavis de 3 mois devant donc expirer le 20 février 2020, puis aux fins de régularisation, qu'elle a reçue ensuite une seconde lettre recommandée comportant la signature des 3 associées le 17 février 2020, annonçant un nouveau préavis se terminant au 17 mai 2020.
Elle a donc été informée du souhait de rupture unilatérale du contrat par les intimées, dans les formes prévues par celui-ci, six mois avant que sa cessation ne soit effective. Cela ne constitue pas une rupture brutale des relations contractuelles, le délai contractuel ayant été respecté et un délai plus que raisonnable ayant finalement été laissée à l'appelante avant le terme du contrat.
[J] [X]-[N] soutient ensuite que, malgré le respect du préavis contractuel, les intimées ont engagé leur responsabilité contractuelle à son égard en raison des circonstances ayant entouré la rupture et caractérisant une absence d'exécution de bonne foi de la convention. En l'espèce, l'appelante soutient que les intimées l'ont volontairement privée de ses moyens d'exercice, en lui retirant sa ligne téléphonique professionnelle, son agenda, son planning de tournées et en l'excluant du groupe commun professionnel whatsapp, ce dans le but de l'empêcher de réaliser effectivement le préavis prévu au contrat.
Les intimées contestent tout abus en précisant avoir souhaité mettre fin aux relations contractuelles avec [J] [X]-[N] en raison de retours défavorables qui leur étaient faits par certains patients et affirment ne pas avoir privé l'appelante du moyen d'exercer sa profession mais simplement réorganisé les conditions de travail du cabinet, réorganisation qui n'a donc aucunement empêché l'appelante d'exercer pendant le temps de son préavis.
Il appartient à l'appelante, qui soutient l'abus dans les circonstances entourant la rupture, d'en rapporter la preuve.
A cette fin, [J] [X]-[N] produit 5 attestions de clients satisfaits de ses services pour justifier de ce que le motif de rupture évoqué par les intimées est abusif. La cour constate que les intimées produisent en réponse 5 attestations de clients mécontents des prestations réalisées par [J] [X]-[N], de sorte qu'il ne peut être affirmé, comme le fait l'appelante, que ses prestations donnaient toute satisfaction. Le motif allégué de la rupture ne sera pas reconnu comme abusif.
[J] [X]-[N] produit enfin pour justifier de son éviction de ses moyens d'exercice, 4 captures d'écran de sms adressés par [V] [P] ainsi que 6 captures d'écran d'ordinateur représentant des tableaux ouvert à un onglet « séances » avec des nombres associés, au nom « de [G] [W] », pour les mois de juin et août 2019, février, mars, avril et mai 2020.
La cour ne peut établir avec ces seuls éléments l'éviction abusive de l'appelante de ses moyens d'exercice. Le contenu des sms produit tend à corroborer la version des intimées sur une réorganisation du fonctionnement du cabinet à laquelle au moins une autre de leurs collaboratrices était également soumise. Les tableaux photographiés ne peuvent être rattachés avec certitude à l'activité de l'appelante ou même au cabinet en cause.
[J] [X]-[N] ne rapporte donc pas la preuve d'un abus des intimées dans la rupture du contrat de collaboration.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a débouté [J] [X]-[N] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires formulées à l'encontre des intimées de ce chef après avoir écarté toute caractérisation d'abus dans la rupture du contrat de collaboration libérale.
Sur l'existence d'une indivision sur la patientèle commune
Subsidiairement encore, [J] [X]-[N] soutient l'existence d'une indivision sur la patientèle commune dont la perte lui a causé des préjudices économiques et moraux dont elle demande réparation.
Les intimées lui opposent la signature du contrat de collaboration qui, attribuant une clientèle personnelle au collaborateur, distincte de celles des titulaires, exclut par principe toute possibilité d'indivision sur la clientèle du cabinet.
Il est établi que pour qu'il y ait indivision, les droits en concours sur la même chose doivent être de même nature.
Or, en l'espèce, le statut de collaboratrice de l'appelante, s'il lui conférait le droit à une clientèle personnelle, ne lui donnait pas les mêmes droits sur la patientèle du cabinet que le statut des associées, notamment en termes de présentation future de la clientèle.
Si [J] [X]-[N] affirme que la clientèle n'était en réalité pas individualisée entre les titulaires et elle-même, contrairement aux énonciations de son contrat, elle ne produit aucune pièce à même d'en justifier.
Dès lors, il ne peut être caractérisé au bénéfice de [J] [X]-[N] aucune indivision sur la patientèle du cabinet de [V] [P] et [B] [M].
Le jugement de première instance est confirmé en ce qu'il a débouté [J] [X]-[N] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires formulées à l'encontre des intimées de ce chef après avoir écarté toute indivision sur la clientèle.
Sur les frais irrépétibles,
Confirmé intégralement, le jugement de première instance le sera également sur ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
[J] [X]-[N], partie succombante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Les circonstances de l'espèce justifient que [J] [X]-[N] soit condamnée à verser à [V] [P] et [B] [M] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, elle-même étant déboutée de sa demande formulée sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et, y ajoutant,
Condamne [J] [X]-[N] aux dépens d'appel,
Condamne [J] [X]-[N] à verser à [V] [P] et [B] [M] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute [J] [X]-[N] de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffiere La présidente
.
ARRÊT N°116
N° RG 23/03053
N° Portalis DBVI-V-B7H-PVDJ
MN/ND
Décision déférée du 21 Juillet 2023
TJ de Toulouse
20/02717
MME RUFFAT
[J] [X] [N]
C/
[V] [P]
[B] [M]
CONFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
- Me LELOUVIER
- Me CARA
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU DIX HUIT MARS DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
Madame [J] [X] [N]
[Adresse 1]
[Adresse 1],
[Localité 4]
Représentée par Me Aude LELOUVIER, avocat au barreau de TOULOUSE et par Me Nicolas CHOLEY, avocat au barreau D'AIX-EN-PROVENCE
INTIMEE
Madame [V] [P]
domiciliée au CABINET [M] [P] [L]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Aimée CARA de la SELARL CABINET D'AVOCATS MONTAZEAU & CARA, avocat au barreau de TOULOUSE
Madame [B] [M]
domiciliée au CABINET [M] [P] [L]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Aimée CARA de la SELARL CABINET D'AVOCATS MONTAZEAU & CARA, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Décembre 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. NORGUET, conseillère chargée du rapport et V. SALMERON, présidente . Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
M. NORGUET, conseillère
S. MOULAYES, conseillère
Greffier, lors des débats : N.DIABY
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par V. SALMERON, président, et par A. CAVAN, greffier de chambre.
Faits et procédure :
En 2016, [B] [M] et [V] [P] se sont associées avec [T] [L] au sein du cabinet d'infirmières libérales dans laquelle cette dernière exerçait, formant le cabinet [L]-[M]-[P].
Le 16 juin 2016, [T] [L], [B] [M] et [V] [P] ont signé avec [J] [X]-[N], qui travaillait avec ce cabinet depuis 2005 et aux fins de régularisation de sa situation, un contrat de collaboration libérale infirmier à durée indéterminée.
A compter de l'année 2017, [T] [L] s'est trouvée en situation d'arrêt maladie.
Les relations se sont dégradées entre les associées et leur collaboratrice.
Par courrier du 20 novembre 2019, signé des seules [B] [M] et [V] [P], [T] [L], [B] [M] et [V] [P] ont informé [J] [X]-[N] de leur décision de rompre le contrat de collaboration à l'expiration d'un délai de préavis de 3 mois à réception du courrier.
[T] [L] a signalé à ses associées que ce courrier devait, pour être valable, supporter aussi sa signature.
La décision de rompre le contrat de collaboration a été donc réitérée par courrier du 17 février 2020, signée cette fois des 3 associées, précisant que la rupture serait effective à l'expiration d'un nouveau délai de préavis de 3 mois à réception de celui-ci. Le contrat s'est terminé de ce fait le 17 mai 2020.
[J] [X]-[N] a déposé plainte devant le conseil départemental de l'ordre des infirmiers en soutenant que Mesdames [P] et [M] avaient manqué à leurs obligations déontologiques dans le cadre de la rupture de leur relation contractuelle, en l'évinçant volontairement de l'exercice de la profession en commun.
Réunies devant la commission de conciliation de l'ordre, les parties ne se sont pas entendues, ce qui a donné lieu à l'établissement d'un procès-verbal de non-conciliation le 21 juillet 2020 aux termes duquel le litige a été renvoyé devant la chambre disciplinaire de première instance de l'ordre des infirmiers d'Occitanie. Celle-ci a rejeté la plainte de [J] [X]-[N] par décision du 6 janvier 2022 constatant l'absence de manquements aux obligations déontologiques. [J] [X]-[N] a fait appel en sollicitant l'annulation de la décision. Sa requête a été rejetée le 30 mai 2024 par la Chambre disciplinaire nationale de l'ordre national des infirmiers.
Parallèlement, par acte du 29 juillet 2020, [J] [X]-[N] a assigné [V] [P] et [B] [M] devant le tribunal judiciaire de Toulouse en réparation de préjudices subis du fait de la rupture de leur relation contractuelle.
Par jugement du 21 juillet 2023, le tribunal judiciaire a :
débouté [J] [X]-[N] de sa demande en réparation du préjudice moral,
débouté [J] [X]-[N] de sa demande en réparation du préjudice financier,
condamné [J] [X]-[N] aux dépens de l'instance,
condamné [J] [X]-[N] à payer à [V] [P] et [B] [M] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
rejeté la demande de [J] [X]-[N] au titre des frais irrépétibles,
rejeté toute autre demande plus ample ou contraire formée par les parties.
Par déclaration en date du 22 août 2023, [J] [X]-[N] a relevé appel du jugement du tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de le voir réformé en intégralité.
L'ordonnance de clôture a été rendue en date du 18 novembre 2024 puis, sur demande des intimées, reportée au 9 décembre 2024. L'affaire a été fixée à l'audience du 17 décembre 2024.
Prétentions et moyens des parties :
Vu les conclusions d'appelante récapitulatives et responsives N°2, notifiées le 14 novembre 2024, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles [J] [X]-[N] sollicite, au visa des articles 12 et 700 du Code de procédure civile :
l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté [J] [X]-[N] de sa demande en réparation du préjudice moral,
- débouté [J] [X]-[N] de sa demande en réparation du préjudice financier,
- condamné [J] [X]-[N] aux dépens de l'instance,
- condamné [J] [X]-[N] à payer à Mme [V] [P] et Mme [B] [M] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande de [J] [X]-[N] au titre des frais irrépétibles,
- rejeté toute autre demande plus ample ou contraire formée par les parties,
statuant à nouveau, à titre principal, que soit reconnue l'existence d'une société créée de fait entre [B] [M], [V] [P] et [J] [X]-[N],
que la rupture des relations d'associées entre [B] [M], [V] [P] et [J] [X]-[N] soit reconnue illégale,
à titre subsidiaire, qu'il soit reconnu que [B] [M] et [V] [P] ont rompu les relations contractuelles avec [J] [X]-[N] de manière abusive,
à titre plus subsidiaire, qu'il soit reconnu l'existence d'une indivision sur la patientèle commune de Mesdames [M], [P] et [X]-[N],
en tout état de cause, qu'il soit reconnu que [J] [X]-[N] a subi des préjudices successivement à son évincement du cabinet infirmier,
en conséquence, la condamnation in solidum de [B] [M] et [V] [P] à payer à [J] [X]-[N] la somme de 5 000 euros relativement au préjudice moral souffert,
la condamnation in solidum de [B] [M] et [V] [P] à payer à [J] [X]-[N] la somme de 10 602 euros relativement au préjudice financier souffert,
la condamnation in solidum de [B] [M] et [V] [P] à verser à
[J] [X]-[N] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
leur condamnation in solidum aux entiers dépens.
En réponse, vu les conclusions récapitulatives d'intimées notifiées en date du 6 décembre 2024, auxquelles il est fait expressément référence pour l'énoncé du détail de l'argumentation, et dans lesquelles [V] [P] et [B] [M] demandent :
la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions,
la condamnation de [J] [X]-[N] au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
sa condamnation aux dépens.
MOTIFS
Sur la société de fait
[J] [X]-[N] soutient l'existence d'une société de fait créée entre les intimées et elle en affirmant rapporter la preuve de la réunion des trois critères cumulatifs propres à la caractériser. En conséquence de cette caractérisation, elle soutient que son éviction de la structure ainsi créée est illégale faute de vote et d'accord unanime des associées, notamment le sien, de respect de la procédure statutaire prévue et de matérialisation à son encontre des manquements justifiant cette exclusion.
En réplique, les intimées contestent l'existence d'une société de fait, notamment en raison de la signature du contrat de collaboration excluant tout affectio societatis. Elles soulignent que l'appelante est défaillante à rapporter la preuve de la réunion des trois conditions cumulatives requises puisqu'elle n'a participé ni aux pertes, ni aux bénéfices, percevant seulement sa rémunération contractuelle et participant aux seuls frais généraux.
La cour rappelle qu'après dix ans de participation non encadrée au sein du cabinet libéral en cause, [J] [X]-[N] a accepté de signer le 16 juin 2016 un contrat de collaboration libérale.
Le contrat de collaboration libérale est régi par les dispositions de l'article 18 modifié de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises à laquelle il renvoie expressément.
Il est de jurisprudence constante que pour caractériser une société de fait, celui qui s'en réclame associé doit prouver, par tous moyens, la réunion de trois éléments constitutifs qui doivent exister cumulativement et ne peuvent se déduire les uns des autres et qui sont la preuve d'apports, l'intention commune de participer au résultat de l'entreprise en partageant les bénéfices et en contribuant aux pertes et l'affectio societatis.
En l'espèce, la particularité de l'activité d'infirmière exercée réside dans les dispositions des articles L4312-30, renvoyant à l'article L4312-15, du code de la santé publique, qui prévoit que chaque infirmière perçoit ses propres honoraires sans pouvoir les partager avec une cons'ur.
De ce fait, comme l'avance à juste titre l'appelante, la question du partage éventuel des bénéfices tirés de la structure collective ne se pose pas, chaque infirmière ne pouvant percevoir que ses propres honoraires, pas plus que celle du partage des pertes.
[J] [X]-[N] avance avoir fait un apport en industrie auprès de la structure, dans laquelle elle a travaillé pendant 15 ans. Les intimées indiquent qu'il ne s'agit que de la contrepartie attendue de son contrat de collaboratrice infirmière. La cour rappelle qu'il n'est pas contesté que l'appelante a travaillé dans la structure depuis 2005 alors que le contrat de collaboratrice n'a été signé que le 16 juin 2016, de sorte qu'il peut être retenu un apport en industrie à la structure par [J] [X]-[N] sur les années antérieures à la signature de son contrat.
Néanmoins, comme le soutiennent justement les intimées, la signature de ce contrat de collaboration libérale ayant pour objet, dans son article 1 « de définir les modalités d'une collaboration confraternelle et loyale » et renvoyant aux dispositions de la loi du 2 août 2005 précitée, matérialise une volonté non-équivoque des associées du cabinet de ne pas intégrer [J] [X]-[N] en tant que nouvelle associée mais de lui proposer seulement le statut de simple collaboratrice, ce qui est suffisant pour exclure tout affectio societatis lequel s'entend de la volonté commune de collaborer avec les autres associés sur un pied d'égalité.
Le simple fait que [J] [X]-[N] ait exercé son activité dans les locaux du cabinet, avec les moyens du cabinet et sur la patientèle attachée au cabinet ne caractérise rien d'autre que l'exécution normale du contrat de collaboration libérale que l'appelante a signé et dont la clarté des termes ne nécessite aucune interprétation.
Dès lors, comme l'a justement retenu le premier juge, l'appelante est défaillante à rapporter la preuve de la création entre [V] [P], [B] [M] et elle-même d'une société de fait.
De ce fait, il n'y a donc pas lieu d'examiner les moyens de [J] [X]-[N] au soutien de l'illégalité de son éviction d'une société de fait dont elle ne caractérise pas l'existence.
Le jugement de première instance est confirmé sur ce point.
Sur l'abus dans la rupture des relations contractuelles
Subsidiairement, [J] [X]-[N] soutient l'abus des intimées dans la rupture de leurs relations contractuelles, s'agissant d'un contrat à durée indéterminée, en raison des circonstances ayant entouré son éviction brutale et notamment les mesures prises par les associées pour l'exclure des plannings et lui ôter tout moyen d'exercer au sein du cabinet. Elle souligne que les modalités de rupture prévues à son contrat de collaboration n'ont pas été respectées.
[B] [M] et [V] [P] contestent toute rupture abusive en rappelant que l'appelante a, du fait de leur erreur dans le premier courrier de rupture, bénéficié d'une durée de préavis plus longue que celle contractuellement prévue. Elles nient tout stratagème ayant visé à l'évincer injustement de la structure en indiquant que les obstacles avancés par [J] [X]-[N] ne l'ont aucunement empêché d'exercer.
A l'analyse du contrat de collaboration, produit en pièce 1 par l'appelante, la cour constate qu'il s'agit d'un contrat type dans lequel les mentions relatives tant au contrat à durée déterminé qu'au contrat à durée indéterminée ont été intégralement maintenues. Les parties s'entendent néanmoins sur le fait qu'il s'agisse bien d'un contrat à durée indéterminée.
Dans son article 14, relatif à la rupture en cas de contrat à durée indéterminée, il est noté qu'il peut être mis fin au contrat par l'une quelconque des parties, par lettre recommandée avec accusé de réception, à tout moment, moyennant le respect d'un préavis de 3 mois. Il est ensuite noté qu'en cas de faute grave [...] il peut y être mis fin par l'une ou l'autre des parties, par lettre recommandée sans préavis ou moyennant un préavis de 3 mois, le courrier devant comporter les motifs de la rupture.
C'est donc à tort que [J] [X]-[N] affirme que les courriers recommandés dont elle a été destinataire devaient nécessairement mentionner les motifs de la rupture, cette obligation n'ayant été contractuellement prévue qu'en cas de rupture pour faute grave, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.
La cour constate, comme le soutiennent les intimées, que l'appelante a été informée de leur souhait de mettre fin à son contrat de collaboration par une première lettre recommandée du 20 novembre 2019, prévoyant un premier préavis de 3 mois devant donc expirer le 20 février 2020, puis aux fins de régularisation, qu'elle a reçue ensuite une seconde lettre recommandée comportant la signature des 3 associées le 17 février 2020, annonçant un nouveau préavis se terminant au 17 mai 2020.
Elle a donc été informée du souhait de rupture unilatérale du contrat par les intimées, dans les formes prévues par celui-ci, six mois avant que sa cessation ne soit effective. Cela ne constitue pas une rupture brutale des relations contractuelles, le délai contractuel ayant été respecté et un délai plus que raisonnable ayant finalement été laissée à l'appelante avant le terme du contrat.
[J] [X]-[N] soutient ensuite que, malgré le respect du préavis contractuel, les intimées ont engagé leur responsabilité contractuelle à son égard en raison des circonstances ayant entouré la rupture et caractérisant une absence d'exécution de bonne foi de la convention. En l'espèce, l'appelante soutient que les intimées l'ont volontairement privée de ses moyens d'exercice, en lui retirant sa ligne téléphonique professionnelle, son agenda, son planning de tournées et en l'excluant du groupe commun professionnel whatsapp, ce dans le but de l'empêcher de réaliser effectivement le préavis prévu au contrat.
Les intimées contestent tout abus en précisant avoir souhaité mettre fin aux relations contractuelles avec [J] [X]-[N] en raison de retours défavorables qui leur étaient faits par certains patients et affirment ne pas avoir privé l'appelante du moyen d'exercer sa profession mais simplement réorganisé les conditions de travail du cabinet, réorganisation qui n'a donc aucunement empêché l'appelante d'exercer pendant le temps de son préavis.
Il appartient à l'appelante, qui soutient l'abus dans les circonstances entourant la rupture, d'en rapporter la preuve.
A cette fin, [J] [X]-[N] produit 5 attestions de clients satisfaits de ses services pour justifier de ce que le motif de rupture évoqué par les intimées est abusif. La cour constate que les intimées produisent en réponse 5 attestations de clients mécontents des prestations réalisées par [J] [X]-[N], de sorte qu'il ne peut être affirmé, comme le fait l'appelante, que ses prestations donnaient toute satisfaction. Le motif allégué de la rupture ne sera pas reconnu comme abusif.
[J] [X]-[N] produit enfin pour justifier de son éviction de ses moyens d'exercice, 4 captures d'écran de sms adressés par [V] [P] ainsi que 6 captures d'écran d'ordinateur représentant des tableaux ouvert à un onglet « séances » avec des nombres associés, au nom « de [G] [W] », pour les mois de juin et août 2019, février, mars, avril et mai 2020.
La cour ne peut établir avec ces seuls éléments l'éviction abusive de l'appelante de ses moyens d'exercice. Le contenu des sms produit tend à corroborer la version des intimées sur une réorganisation du fonctionnement du cabinet à laquelle au moins une autre de leurs collaboratrices était également soumise. Les tableaux photographiés ne peuvent être rattachés avec certitude à l'activité de l'appelante ou même au cabinet en cause.
[J] [X]-[N] ne rapporte donc pas la preuve d'un abus des intimées dans la rupture du contrat de collaboration.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a débouté [J] [X]-[N] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires formulées à l'encontre des intimées de ce chef après avoir écarté toute caractérisation d'abus dans la rupture du contrat de collaboration libérale.
Sur l'existence d'une indivision sur la patientèle commune
Subsidiairement encore, [J] [X]-[N] soutient l'existence d'une indivision sur la patientèle commune dont la perte lui a causé des préjudices économiques et moraux dont elle demande réparation.
Les intimées lui opposent la signature du contrat de collaboration qui, attribuant une clientèle personnelle au collaborateur, distincte de celles des titulaires, exclut par principe toute possibilité d'indivision sur la clientèle du cabinet.
Il est établi que pour qu'il y ait indivision, les droits en concours sur la même chose doivent être de même nature.
Or, en l'espèce, le statut de collaboratrice de l'appelante, s'il lui conférait le droit à une clientèle personnelle, ne lui donnait pas les mêmes droits sur la patientèle du cabinet que le statut des associées, notamment en termes de présentation future de la clientèle.
Si [J] [X]-[N] affirme que la clientèle n'était en réalité pas individualisée entre les titulaires et elle-même, contrairement aux énonciations de son contrat, elle ne produit aucune pièce à même d'en justifier.
Dès lors, il ne peut être caractérisé au bénéfice de [J] [X]-[N] aucune indivision sur la patientèle du cabinet de [V] [P] et [B] [M].
Le jugement de première instance est confirmé en ce qu'il a débouté [J] [X]-[N] de l'ensemble de ses demandes indemnitaires formulées à l'encontre des intimées de ce chef après avoir écarté toute indivision sur la clientèle.
Sur les frais irrépétibles,
Confirmé intégralement, le jugement de première instance le sera également sur ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
[J] [X]-[N], partie succombante, sera condamnée aux dépens d'appel.
Les circonstances de l'espèce justifient que [J] [X]-[N] soit condamnée à verser à [V] [P] et [B] [M] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, elle-même étant déboutée de sa demande formulée sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS,
La Cour,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et, y ajoutant,
Condamne [J] [X]-[N] aux dépens d'appel,
Condamne [J] [X]-[N] à verser à [V] [P] et [B] [M] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute [J] [X]-[N] de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffiere La présidente
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