CA Versailles, ch. com. 3-2, 18 mars 2025, n° 24/00811
VERSAILLES
Arrêt
Autre
COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4IF
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 18 MARS 2025
N° RG 24/00811 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WKVF
AFFAIRE :
SAS LA SEINE ROOF TOP
C/
SELARL [R] [Y]
LE PROCUREUR GENERAL
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Janvier 2024 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° chambre : 8
N° RG : 2023L02118
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU
Me Oriane DONTOT
Me Asma MZE
PG
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX HUIT MARS DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANT :
SAS LA SEINE ROOF TOP
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 005781 -
Plaidant : Me Nicolas MONTADIER de la SELARL MARIGNY AVOCATS & PARTNERS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0170
****************
INTIMES
LE PROCUREUR GENERAL
POLE ECOFI - COUR D'APPEL DE VERSAILLES
[Adresse 4]
[Adresse 4]
S.E.L.A.R.L. SELARL [R] [Y] prise en la personne de me [R] [Y], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société LA SEINE ROFF TOP, désigné à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce Nanterre le 8 février 2024
Ayant son siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20240292
Plaidant : Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0899 -
S.A.S. LE REEF CLUB
N° SIRET : 819 560 061 RCS NANTERRE
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Asma MZE de la SELARL LX PARIS- VERSAILLES- REIMS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 699 - N° du dossier 2473200
Plaidant : Me Jean-françois PUGET de la SELARL CORNET VINCENT SEGUREL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0098
S.E.L.A.R.L. EL BAZE - [K]
prise en la personne de Me [J] [K] en qualité d'administrateur judiciaire de la SAS LA SEINE ROOF TOP
Ayant son siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20240292
Plaidant : Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0899 -
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Janvier 2025, Madame Gwenael COUGARD, conseillère ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,
Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
En la présence du Ministère Public, représenté par Madame Anne CHEVALIER, Avocat Général dont l'avis du 29 novembre 2024 a été transmis le 2 décembre 2024 au greffe par la voie électronique.
EXPOSE DU LITIGE
Depuis 2018, la société La Seine Roof Top est une société qui exploite un fonds de commerce de restauration, bar, et organisation d'évènements. Ce fonds de commerce a été acquis par acte, assorti d'une clause de réserve de propriété, le 9 janvier 2020 auprès de la société Reef Club pour un prix de 400 000 euros payable en cinq versements annuels de 80 000 euros du 9 janvier 2020 au 9 janvier 2024.
Le 1er septembre 2022, un avenant à l'acte de cession du 9 janvier 2020 a été signé, prévoyant un nouvel échéancier portant sur les 4 dernières échéances initiales :
15/09/2022 : 80 000 euros ;
15/01/2023 : 80 000 euros ;
15/01/2024 : 80 000 euros ;
15/01/2025 : 80 000 euros.
Le 7 février 2023, le tribunal de commerce de Nanterre a placé la société La Seine Roof Top en procédure de redressement judiciaire et a désigné la société El Baze ' [K], prise en la personne de Mme [K], en qualité d'administrateur judiciaire et la société C [Y], prise en la personne de M. [Y], en qualité de mandataire judiciaire.
Le 3 avril 2023, la société Reef Club a déclaré sa créance au titre du prix de cession du fonds de commerce entre les mains du mandataire judiciaire de la société La Seine Roof Top, comme suit : 80 000 euros échus, au titre de l'échéance non payée du 15 janvier 2023 ; 160 000 euros à échoir, au titre des échéances du 15 janvier 2024 et du 15 janvier 2025.
Le 3 avril 2023, la société Reef Club a ensuite revendiqué le fonds de commerce à la société La Seine Roof Top, au titre de la clause de réserve de propriété, sur le fondement de l'article L. 624-16 du code de commerce.
Le 19 juillet 2023, par ordonnance, le juge-commissaire a fait droit à la demande de revendication du fonds de commerce par la société Reef Club.
Le 21 juillet 2023, par ordonnance, le juge-commissaire a également rejeté la demande de la société Roof Top tendant à l'autoriser à payer immédiatement la somme de 80 000 euros exigible depuis le 15 janvier 2023 et 160 000 euros suivant l'échéancier convenu dans l'avenant du 1er septembre 2022, à savoir 80 000 euros le 15 janvier 2024 et 80 000 euros le 15 janvier 2025.
Le 31 janvier 2024, par jugement contradictoire, sur un recours dirigé contre les ordonnances des 19 et 21 juillet 2023, le tribunal de commerce de Nanterre a :
- ordonné la jonction des procédures enrôlées sous les références 2023 L 02118 et 2023 L 02120 ;
- in limine litis, s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes formées à titre subsidiaire par la société La Seine Roof Top ;
- rejeté l'irrecevabilité de la demande de revendication formée par la société La Seine Roof Top ;
- confirmé l'ordonnance du 19 juillet 2023 en toutes ses dispositions ;
- rejeté la demande de délais de paiement formée par la société La Seine Roof Top ;
- confirmé l'ordonnance du 21 juillet 2023 en toutes ses dispositions ;
- ordonné la restitution du fonds de commerce sans délai sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du présent jugement si aucun règlement de 240 000 euros n'est intervenu à cette date ;
- s'est réservé la liquidation de l'astreinte et l'a limitée à 3 mois ;
- condamné la société La Seine Roof Top à payer la somme de 3 000 euros à la société Reef Club au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que l'exécution provisoire est de droit ;
- condamné la société La Seine Roof Top aux dépens de l'instance.
Le 7 février 2024, la société La Seine Roof Top a interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'il a ordonné la jonction des procédures enrôlées sous les références 2023 L 02118 et 2023 L 02120.
Par ailleurs, le 8 février 2024, le tribunal a converti le redressement judiciaire en liquidation judiciaire. La société Roof Top a interjeté appel de ce jugement.
Par dernières conclusions du 6 mai 2024, elle demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel et y faisant droit,
A titre principal,
- juger que le tribunal de commerce de Nanterre a statué ultra petita aux termes de son jugement en date du 31 janvier 2024 ;
- juger que le jugement du 31 janvier 2024 est entaché d'une contradiction de motifs ;
En conséquence,
- prononcer la nullité du jugement du 31 janvier 2024 ;
Par conséquent,
- infirmer l'ordonnance du 19 juillet 2023 en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'elle a dit qu'elle doit payer immédiatement le prix de 240 000 euros pour mettre fin à la revendication et qu'à défaut elle a fait droit à la demande en revendication de la propriété du fonds de commerce qu'elle exploite actuellement formulée par la société Reef Club ;
Dès lors et statuant à nouveau :
A titre principal :
- juger que son fonds de commerce fait l'objet d'un contrat en cours au titre du contrat de cession assorti d'un crédit vendeur en cours, et qu'un bien mobilier objet d'un contrat en cours ne peut faire l'objet d'une revendication ;
En conséquence,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce faisant l'objet d'un contrat en cours ;
A titre subsidiaire :
- juger que la requête en revendication de la société Reef Club porte sur une demande de paiement ferme d'une somme globale de 240 000 euros englobant notamment des sommes non encore exigibles au titre de l'échéancier que lui a octroyé la société Reef Club par le crédit vendeur du contrat de cession du fonds de commerce du 9 janvier, modifié par avenant du 1er septembre 2022 ;
En conséquence,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce ;
A titre encore plus subsidiaire :
- prendre acte des délais de paiements que lui a expressément octroyés la société Reef Club pour le paiement du prix de cession du fonds de commerce au titre de l'avenant du 1er septembre 2022 ;
- dire et juger que l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Reef Club ne peut avoir pour effet d'entrainer la déchéance du terme des échéances du contrat du crédit vendeur du contrat de cession du fonds de commerce, et qu'en conséquence seule l'échéance de 80 000 euros du 15 janvier 2023 est exigible, et que le paiement des échéances du 15 janvier 2024 et du 14 janvier 2025 respectivement chacune de 80 000 euros ne peuvent être exigées par la société Reef Club avant leur terme ;
- prendre acte de sa demande de payer immédiatement la somme de 80 000 euros à la société Reef Club au titre d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de sa procédure collective, correspondant à la seule créance exigible du 15 janvier 2023 aux termes de l'avenant du 1er septembre 2022 du contrat de cession du fonds de commerce ;
En conséquence,
- l'autoriser à payer à la société Reef Club la somme de 80 000 euros au titre d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de sa procédure collective, correspondant à la seule créance exigible du 15 janvier 2023 aux termes de l'avenant du 1er septembre 2022 du contrat de cession du fonds de commerce ;
- et prononcer dès lors l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce, ou à défaut débouter la société Reef Club de sa demande de revendication du fonds de commerce ;
A titre infiniment subsidiaire :
- condamner la société Reef Club à lui payer la somme de 160 000 euros en restitution des acomptes qu'elle lui a payés au titre du prix de cession du fonds de commerce ;
- condamner à titre provisionnel la société Reef Club à lui payer la somme 633 430 euros HT au titre des aménagements qu'elle a payés et qui seront transférés à la société Reef Club dans le cadre de la restitution du fonds de commerce ;
- désigner tel expert judiciaire qu'il plaira au juge commissaire au frais exclusifs de la société Reef Club avec pour mission :
entendre les parties, ainsi que tous sachants ;
se rendre en tous lieux où il le jugera nécessaire ;
examiner sa situation financière ;
évaluer la valeur de son fonds de commerce, objet de la revendication, à la date à laquelle ledit expert judiciaire rendra son rapport, ou à la date de restitution du fonds si celle-ci est antérieure ;
évaluer le montant des aménagements du fonds de commerce, objet de la revendication, qu'elle a réalisés ;
Et d'une manière générale :
- mener contradictoirement ses opérations d'expertise et, dans la mesure où il l'estimerait nécessaire, faire connaître aux parties son avis, oralement ou par écrit, en vue de recueillir leurs dernières observations avant le dépôt de son rapport ;
- l'expert pourra :
se faire assister de tout sapiteur qu'il jugera utile pour mener à bien la mission qu'il lui est confiée ;
obtenir la communication de tous ses documents comptables et factures ainsi que ceux de la société Reef Club, et notamment les grands livres, et toutes pièces utiles à la réalisation de sa mission ;
obtenir toutes données commerciales relatives à l'exploitation du fonds de commerce, objet de la demande de revendication, par elle et par la société Reef Club ;
se faire communiquer par les parties ou les tiers toute pièce utile et plus particulièrement se faire remettre par toutes personnes, tous documents administratifs, comptables, fiscaux et sociaux relatifs aux parties, et les pièces justificatives utiles à l'exercice de sa mission ;
l'expert en référera au juge commis par le tribunal en cas de difficulté dans l'exercice de sa mission ;
- fixer la rémunération de l'expert aux frais exclusifs de la société Reef Club, demandeur à la présente instance ;
- réserver le montant des aménagements du fonds de commerce, objet de la demande de revendication, réalisés par elle, auquel la société Reef Club doit être condamnée à lui payer, et ce après dépôt du rapport de l'expert ;
- réserver le montant de l'accroissement de la valeur du fonds de commerce depuis le 9 janvier 2020, objet de la demande de revendication, réalisés par elle, auquel la société Reef Club doit être condamnée à lui payer, et ce après dépôt du rapport de l'expert ;
A titre subsidiaire :
- infirmer le jugement du 31 janvier 2024 en toutes ses dispositions ;
Par conséquent,
- infirmer l'ordonnance du 19 juillet 2023 en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'elle a dit qu'elle doit payer immédiatement le prix de 240 000 euros pour mettre fin à la revendication et qu'à défaut elle a fait droit à la demande en revendication de la propriété du fonds de commerce qu'elle exploite actuellement formulée par la société Reef Club ;
Dès lors et statuant à nouveau :
A titre principal :
- juger que son fonds de commerce fait l'objet d'un contrat en cours au titre du contrat de cession assorti d'un crédit vendeur en cours, et qu'un bien mobilier objet d'un contrat en cours ne peut faire l'objet d'une revendication ;
En conséquence,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce faisant l'objet d'un contrat en cours ;
A titre subsidiaire :
- juger que la requête en revendication de la société Reef Club porte sur une demande de paiement ferme d'une somme globale de 240 000 euros englobant notamment des sommes non encore exigibles au titre de l'échéancier que lui a octroyé la société Reef Club par le crédit vendeur du contrat de cession du fonds de commerce du 9 janvier, modifié par avenant du 1er septembre 2022 ;
En conséquence,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce ;
A titre encore plus subsidiaire :
- prendre acte des délais de paiements que lui a expressément octroyé la société Reef Club pour le paiement du prix de cession du fonds de commerce au titre de l'avenant du 1er septembre 2022 ;
- dire et juger que l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Reef Club ne peut avoir pour effet d'entraîner la déchéance du terme des échéances du contrat du crédit vendeur du contrat de cession du fonds de commerce, et qu'en conséquence seule l'échéance de 80 000 euros du 15 janvier 2023 est exigible, et que le paiement des échéances du 15 janvier 2024 et du 14 janvier 2025 respectivement chacune de 80 000 euros ne peuvent être exigées par la société Reef Club avant leur terme ;
- prendre acte de sa demande de payer immédiatement la somme de 80 000 euros à la société Reef Club au titre d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de sa procédure collective, correspondant à la seule créance exigible du 15 janvier 2023 aux termes de l'avenant du 1er septembre 2022 du contrat de cession du fonds de commerce ;
En conséquence,
- l'autoriser à payer à la société Reef Club la somme de 80 000 euros au titre d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de sa procédure collective, correspondant à la seule créance exigible du 15 janvier 2023 aux termes de l'avenant du 1er septembre 2022 du contrat de cession du fonds de commerce ;
- et prononcer dès lors l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce, ou à défaut débouter la société Reef Club de sa demande de revendication du fonds de commerce ;
A titre infiniment subsidiaire :
- condamner la société Reef Club à lui payer la somme de 160 000 euros en restitution des acomptes qu'elle a payés à la société Reef Club au titre du prix de cession du fonds de commerce ;
- condamner à titre provisionnel la société Reef Club lui payer la somme 633 430 euros HT au titre des aménagements qu'elle a payés et qui seront transférés à la société Reef Club dans le cadre de la restitution du fonds de commerce ;
- désigner tel expert judiciaire qu'il plaira au juge commissaire au frais exclusifs de la société Reef Club avec pour mission :
entendre les parties, ainsi que tous sachants ;
se rendre en tous lieux où il le jugera nécessaire ;
examiner sa situation financière ;
évaluer la valeur de son fonds de commerce, objet de la revendication, à la date à laquelle ledit expert judiciaire rendra son rapport, ou à la date de restitution du fonds si celle-ci est antérieure ;
évaluer le montant des aménagements du fonds de commerce, objet de la revendication, réalisés par elle ;
Et d'une manière générale :
- mener contradictoirement ses opérations d'expertise et, dans la mesure où il l'estimerait nécessaire, faire connaître aux parties son avis, oralement ou par écrit, en vue de recueillir leurs dernières observations avant le dépôt de son rapport ;
- l'expert pourra :
se faire assister de tout sapiteur qu'il jugera utile pour mener à bien la mission qu'il lui est confiée ;
obtenir la communication de tous ses documents comptables et factures ainsi que ceux de la société Reef Club, et notamment les grands livres, et toutes pièces utiles à la réalisation de sa mission ;
obtenir toutes données commerciales relatives à l'exploitation du fonds de commerce, objet de la demande de revendication, par elle et par la société Reef Club ;
se faire communiquer par les parties ou les tiers toute pièce utile et plus particulièrement se faire remettre par toutes personnes, tous documents administratifs, comptables, fiscaux et sociaux relatifs aux parties, et les pièces justificatives utiles à l'exercice de sa mission ;
- l'expert en référera au juge commis par le tribunal en cas de difficulté dans l'exercice de sa mission ;
- fixer la rémunération de l'expert aux frais exclusifs de la société Reef Club, demandeur à la présente instance ;
- réserver le montant des aménagements du fonds de commerce, objet de la demande de revendication, réalisés par elle, auquel la société Reef Club doit être condamnée à lui payer, et ce après dépôt du rapport de l'expert ;
- réserver le montant de l'accroissement de la valeur du fonds de commerce depuis le 09 janvier 2020, objet de la demande de revendication, réalisés par elle, auquel la société Reef Club doit être condamnée à lui payer, et ce après dépôt du rapport de l'expert ;
En tout état de cause :
- débouter toutes parties de tous moyens ou prétentions plus amples ou contraires au présent dispositif ;
- condamner la société Reef Club à lui payer 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Reef Clut aux entiers dépens de l'instance.
Par dernières conclusions du 25 juin 2024, les sociétés [R] [Y] et El Baze ' [K] demandent à la cour de :
- déclarer la société La Seine Roof Top mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter purement et simplement ;
En conséquence,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 31 janvier 2024, ayant fait droit à la demande de revendication formée par la société Reef Club et débouté la société La Seine Roof Top de sa demande de délai de paiement de la créance antérieure ;
En tout état de cause,
- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.
Par dernières conclusions du 25 juillet 2024, la société Reef Club demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 31 janvier 2024, notamment en ce qu'il a :
- in limine litis, déclaré incompétent le tribunal pour statuer sur les demandes formées à titre subsidiaire par la société la Seine Roof Top ;
- rejeté l'irrecevabilité de la demande de revendication formée par la société la Seine Roof Top ;
- confirmé l'ordonnance du juge-commissaire en date du 19 juillet 2023 en toutes ses dispositions ;
- rejeté la demande de délais de paiement formée par la société la Seine Roof Top ;
- confirmé l'ordonnance du 21 juillet 2023 en toutes ses dispositions ;
- ordonné la restitution du fonds de commerce sans délai sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du jugement si aucun règlement n'est intervenu à cette date ;
En tout état de cause,
- se déclarer incompétente pour statuer sur les demandes subsidiaires de la société la Seine Roof Top ;
- juger recevable et bien fondée la demande de revendication de la société la Seine Roof Top ;
- ordonner la restitution du fonds de commerce à son profit, au besoin sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du jugement du 31 janvier 2024 ;
- rejeter les fins de non-recevoir de la société la Seine Roof Top ;
- débouter la Seine Roof Top de l'ensemble de ses moyens, mal fondée fins et conclusions ;
- débouter la société La Seine Roof Top en toutes ses demandes ;
- condamner la société La Seine Roof Top aux entiers dépens de l'instance ;
- condamner la société La Seine Roof Top à lui verser la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 2 juillet 2024, la cour d'appel de Versailles a confirmé le jugement du 7 février 2024 en toutes ses dispositions.
Le 29 novembre 2024, le ministère public a émis un avis tendant à ce que la cour confirme le jugement du 31 janvier 2024.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 21 novembre 2024.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
MOTIFS
sur la nullité du jugement
La société Roof Top sollicite l'annulation du jugement, au motif d'abord que le tribunal a statué ultra petita, en substituant une demande de délais de paiement à celle sollicitant l'autorisation de paiement.
Elle soutient ensuite que le jugement doit être annulé compte tenu d'une contradiction de motifs, en considérant que le tribunal s'est à la fois déclaré incompétent sur la demande tendant à voir condamner à restituer la part du prix de cession qu'elle a reçue et le prix des aménagements opérés, en cas de restitution du fonds de commerce, et l'a condamnée à restituer le fonds de commerce sous astreinte.
En réponse, les sociétés [Y] et El Baze [K] contestent le moyen tiré d'une décision ultra petita, et soutiennent que la société Roof Top a demandé au juge-commissaire de l'autoriser au paiement de la créance antérieure en trois échéances pour faire échec à l'action en revendication, et qu'en formulant une telle prétention, elle a nécessairement formulé concomitamment à la demande de paiement de la créance antérieure une demande de délais de paiement, par application de l'article L. 624-16 du code de commerce.
Elles réfutent toute contradiction de motifs, et exposent que compte tenu des termes de l'article R. 624-13 du code de commerce, à défaut d'acquiescement, ordonner la restitution du fonds de commerce était une compétence attribuée par les règles de la procédure collective au tribunal de commerce de Nanterre consécutivement à la demande de revendication de la société Reef Club et l'appel formé par la société Roof Top ; que ce texte ne donne pas automatiquement compétence au juge-commissaire et au tribunal de la procédure collective pour juger d'autres demandes relatives au contrat de crédit-bail, de sorte que le tribunal pouvait sans se contredire s'estimer incompétent selon les motifs retenus.
La société Reef Club affirme que la société Roof Top a été autorisée à payer la fraction du prix de cession qui lui était due, à titre de créance antérieure, et qu'en ordonnant le paiement intégral du prix de cession, le tribunal a ipso facto rejeté l'application de l'échéancier contractuel, et cette demande d'autorisation à payer selon l'échéancier contractuel s'analyse nécessairement en une demande de délais de paiement déguisée au sens de l'article L. 624-16 du code de commerce.
Réponse de la cour
sur l'ultra petita
L'article 4 du code de procédure civile énonce que « L'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
Ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense. Toutefois l'objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. »
Selon l'article 5 du même code, « Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé. »
L'article L. 624.16 du code de commerce dispose que « (') peuvent également être revendiqués, s'ils se retrouvent en nature au moment de l'ouverture de la procédure, les biens vendus avec une clause de réserve de propriété. Cette clause doit avoir été convenue entre les parties dans un écrit au plus tard au moment de la livraison. Elle peut l'être dans un écrit régissant un ensemble d'opérations commerciales convenues entre les parties.
(')
Dans tous les cas, il n'y a pas lieu à revendication si, sur décision du juge-commissaire, le prix est payé immédiatement. Le juge-commissaire peut également, avec le consentement du créancier requérant, accorder un délai de règlement. Le paiement du prix est alors assimilé à celui des créances mentionnées au I de l'article L. 622-17. »
Devant le tribunal de commerce, la société Roof Top a, à titre principal, conclu à l'irrecevabilité de la demande en revendication par la société Reef Club, au premier motif que le fonds de commerce fait l'objet d'un contrat en cours, puis au second motif que la requête porte sur une demande en paiement ferme d'une somme comprenant des sommes non encore exigibles au titre de l'échéancier octroyé par la société Reef Club. Elle a ensuite sollicité à titre subsidiaire qu'il soit pris acte des délais de paiement octroyés par le créancier Reef Club, de sorte que seule l'échéance de 80 000 euros du 15 janvier 2023 est exigible, et que le paiement des deux échéances du 15 janvier 2024 et du 14 janvier 2025 ne peut être exigé avant leur terme.
En présentant au juge-commissaire une demande tendant à ce qu'il soit pris acte des délais de paiement octroyés par le créancier en trois échéances, pour éviter l'action en revendication initiée par la société Reef Club, la société Roof Top a, par effet de l'article L. 624-16 précité, implicitement mais nécessairement formulé concomitamment à la demande de paiement de la créance antérieure une demande de délais de paiement.
C'est donc à tort que la société La Seine Roof Top prétend que le tribunal de commerce a statué ultra petita alors que sa requête incluait un règlement en trois échéances de la créance antérieure.
sur la contradiction de motifs
L'article R. 624-13 prévoit que « La demande en revendication d'un bien est adressée dans le délai prévu à l'article L. 624-9 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'administrateur s'il en a été désigné ou, à défaut, au débiteur. Le demandeur en adresse une copie au mandataire judiciaire.
A défaut d'acquiescement dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge-commissaire au plus tard dans un délai d'un mois à compter de l'expiration du délai de réponse.
Avant de statuer, le juge-commissaire recueille les observations des parties intéressées.
La demande en revendication emporte de plein droit demande en restitution. »
L'article R. 662-3 du code de commerce dispose que « sans préjudice des pouvoirs attribués en premier ressort au juge-commissaire, le tribunal saisi d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire connaît de tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires, l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, la faillite personnelle ou l'interdiction prévue à l'article L. 653-8, à l'exception des actions en responsabilité civile exercées à l'encontre de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du commissaire à l'exécution du plan ou du liquidateur qui sont de la compétence du tribunal judiciaire. »
Au visa de cette disposition, le tribunal de commerce s'est à juste titre déclaré compétent pour ordonner la restitution du bien compte tenu de la clause de réserve de propriété stipulée au contrat.
Il s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes de la société Roof Top concernant le remboursement de la part du prix de vente déjà versée à la société Reef Club, l'indemnisation des aménagements et travaux effectués sur le fonds et le prétendu droit de rétention sur le fonds pour s'opposer à sa restitution. Ces prétentions, qui concernent l'exécution du contrat, n'entrent pas dans la compétence matérielle du tribunal de la procédure collective, comme l'a justement rappelé le tribunal, en ce qu'elles n'impliquent pas l'application des règles propres au livre VI du code de commerce.
Il ne peut être sérieusement prétendu qu'en se déclarant incompétent pour trancher les autres points en litige concernant l'exécution des obligations nées du contrat litigieux entre les parties, le tribunal se serait contredit dans ses motifs.
La demande d'annulation du jugement, motif pris d'une contradiction de motifs sera rejetée.
sur l'irrecevabilité de la demande de revendication
L'appelante fait valoir que le contrat de cession assorti d'un crédit-vendeur en cours, dont l'échéancier est en cours, doit s'analyser dans le cadre d'une procédure collective, comme un contrat en cours. Elle en déduit l'irrecevabilité de la demande de revendication formulée par la société Reef Club.
La société Reef Club répond que la demande a été présentée conformément aux dispositions des articles L. 624-9 et R. 624-13 du code de commerce, que le respect des modalités n'est pas contesté, et qu'en conséquence, la requête a été à juste titre déclarée recevable. Elle ajoute qu'il ne s'agit pas d'un contrat en cours, que l'acte de cession ne peut être assimilé à une vente à terme, le crédit-vendeur n'étant qu'une modalité de paiement du prix, sans différer le transfert de propriété, que seule la clause de réserve de propriété organise à titre de sûreté.
La société [Y], ès qualités, conclut également à la recevabilité de la demande.
Réponse de la cour
L'article L. 624-9 du code de commerce dispose que « la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure. »
Selon l'article R. 624-13 du même code, « la demande en revendication d'un bien est adressée dans le délai prévu à l'article L. 624-9 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'administrateur s'il en a été désigné ou, à défaut, au débiteur. Le demandeur en adresse une copie au mandataire judiciaire.
A défaut d'acquiescement dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge-commissaire au plus tard dans un délai d'un mois à compter de l'expiration du délai de réponse.
Avant de statuer, le juge-commissaire recueille les observations des parties intéressées.
La demande en revendication emporte de plein droit demande en restitution. »
Un contrat de vente de biens mobiliers dont la propriété est réservée et dont le prix n'est pas payé lors de l'ouverture de la procédure collective de l'acquéreur n'est pas un contrat en cours (Com. 5 mai 2004, n° 01-17.201 et 01-17.590).
Contrairement à ce que soutient la société appelante, c'est à raison que le tribunal de commerce a dit que le contrat litigieux n'était pas un contrat en cours. En effet, la vente du fonds de commerce est intervenue définitivement avant l'ouverture de la procédure collective, seul le transfert de propriété étant différé au paiement intégral du prix de cession, du fait d'une clause de réserve de propriété.
Il ne peut être raisonnablement soutenu qu'il s'agit d'un contrat à exécution successive du fait du paiement du prix échelonné.
La requête, dont il n'est pas discuté qu'elle a été présentée conformément aux dispositions précitées, a été jugée à juste titre recevable par le tribunal de commerce.
sur le bien-fondé de la demande de revendication
La société Roof Top affirme que le contrat de cession assorti d'un crédit vendeur en cours est un contrat en cours au jour de l'ouverture de la procédure collective, de sorte qu'en application de l'article L. 622-13 du code de commerce, il ne peut être résilié à la faveur de l'ouverture de la procédure collective ou en raison de l'existence de créances antérieures impayées.
La société Reef Club s'oppose à l'argument selon lequel il s'agirait d'un contrat en cours à la date du jugement d'ouverture. Elle rappelle les termes de l'ordonnance du juge-commissaire qui a notamment rappelé que seul le paiement du prix peut faire échec à la revendication et qu'il n'est pas établi que la société Reef Club avait donné son accord pour l'octroi de délais de paiement.
La société [Y] soutient également que la requête en revendication est bien fondée.
Réponse de la cour
L'article 2367 du code civil dispose que « La propriété d'un bien peut être retenue en garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété qui suspend l'effet translatif d'un contrat jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en constitue la contrepartie.
La propriété ainsi réservée est l'accessoire de la créance dont elle garantit le paiement. »
Comme il a été dit plus haut, le contrat querellé n'est pas un contrat en cours à la date d'ouverture de la procédure collective.
La propriété du fonds de commerce ne pouvait être transférée à la société appelante qu'au complet paiement du prix.
Conformément à l'article L. 624-16 précité du code de commerce, c'est seulement dans l'hypothèse où le créancier a donné son accord pour des délais de paiement, qu'il n'y a pas lieu à revendication. Or, comme l'a relevé le tribunal, un tel accord n'est pas établi, de sorte que l'action en revendication est fondée.
Le tribunal a justement jugé que l'action en revendication et en restitution de la propriété subséquente du fonds de commerce exploité par la société Roof Top est fondée.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Il sera également confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de délais de paiement présentée par la société Roof Top, laquelle avait sollicité du juge-commissaire qu'il autorise le paiement de la créance antérieure en trois échéances.
Par ailleurs, le jugement est confirmé en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes subsidiaires relatives à l'exécution des obligations contractuelles. Comme rappelé ci-dessus, ces prétentions, qui concernent l'exécution du contrat, n'entrent pas dans la compétence matérielle du tribunal de la procédure collective, comme l'a justement rappelé le tribunal, en ce qu'elles n'impliquent pas l'application des règles propres au livre VI du code de commerce.
Il sera rappelé de surcroît que le 2 juillet 2024, la cour d'appel de Versailles a confirmé le jugement du 7 février 2024 qui a ordonné la liquidation judiciaire de la société Roof Top.
Sur les demandes accessoires
Compte tenu de l'issue du litige, les dispositions du jugement statuant sur les dépens et la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile doivent être confirmées.
La société Roof Top sera condamnée à payer à la société Reef Club la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité de procédure.
Les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure.
Par ces motifs,
la cour, statuant par arrêt contradictoire,
Rejette la demande d'annulation du jugement entrepris,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société Roof Top à payer à la société Reef Club la somme de 2 000 euros à titre d'indemnité de procédure,
Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure,
Rejette le surplus des demandes.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
DE
VERSAILLES
Code nac : 4IF
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 18 MARS 2025
N° RG 24/00811 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WKVF
AFFAIRE :
SAS LA SEINE ROOF TOP
C/
SELARL [R] [Y]
LE PROCUREUR GENERAL
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Janvier 2024 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° chambre : 8
N° RG : 2023L02118
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU
Me Oriane DONTOT
Me Asma MZE
PG
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX HUIT MARS DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
APPELANT :
SAS LA SEINE ROOF TOP
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 - N° du dossier 005781 -
Plaidant : Me Nicolas MONTADIER de la SELARL MARIGNY AVOCATS & PARTNERS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0170
****************
INTIMES
LE PROCUREUR GENERAL
POLE ECOFI - COUR D'APPEL DE VERSAILLES
[Adresse 4]
[Adresse 4]
S.E.L.A.R.L. SELARL [R] [Y] prise en la personne de me [R] [Y], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société LA SEINE ROFF TOP, désigné à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce Nanterre le 8 février 2024
Ayant son siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20240292
Plaidant : Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0899 -
S.A.S. LE REEF CLUB
N° SIRET : 819 560 061 RCS NANTERRE
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Me Asma MZE de la SELARL LX PARIS- VERSAILLES- REIMS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 699 - N° du dossier 2473200
Plaidant : Me Jean-françois PUGET de la SELARL CORNET VINCENT SEGUREL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0098
S.E.L.A.R.L. EL BAZE - [K]
prise en la personne de Me [J] [K] en qualité d'administrateur judiciaire de la SAS LA SEINE ROOF TOP
Ayant son siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20240292
Plaidant : Me Olivier PECHENARD de la SELARL PBM AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0899 -
****************
Composition de la cour :
L'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Janvier 2025, Madame Gwenael COUGARD, conseillère ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,
Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
En la présence du Ministère Public, représenté par Madame Anne CHEVALIER, Avocat Général dont l'avis du 29 novembre 2024 a été transmis le 2 décembre 2024 au greffe par la voie électronique.
EXPOSE DU LITIGE
Depuis 2018, la société La Seine Roof Top est une société qui exploite un fonds de commerce de restauration, bar, et organisation d'évènements. Ce fonds de commerce a été acquis par acte, assorti d'une clause de réserve de propriété, le 9 janvier 2020 auprès de la société Reef Club pour un prix de 400 000 euros payable en cinq versements annuels de 80 000 euros du 9 janvier 2020 au 9 janvier 2024.
Le 1er septembre 2022, un avenant à l'acte de cession du 9 janvier 2020 a été signé, prévoyant un nouvel échéancier portant sur les 4 dernières échéances initiales :
15/09/2022 : 80 000 euros ;
15/01/2023 : 80 000 euros ;
15/01/2024 : 80 000 euros ;
15/01/2025 : 80 000 euros.
Le 7 février 2023, le tribunal de commerce de Nanterre a placé la société La Seine Roof Top en procédure de redressement judiciaire et a désigné la société El Baze ' [K], prise en la personne de Mme [K], en qualité d'administrateur judiciaire et la société C [Y], prise en la personne de M. [Y], en qualité de mandataire judiciaire.
Le 3 avril 2023, la société Reef Club a déclaré sa créance au titre du prix de cession du fonds de commerce entre les mains du mandataire judiciaire de la société La Seine Roof Top, comme suit : 80 000 euros échus, au titre de l'échéance non payée du 15 janvier 2023 ; 160 000 euros à échoir, au titre des échéances du 15 janvier 2024 et du 15 janvier 2025.
Le 3 avril 2023, la société Reef Club a ensuite revendiqué le fonds de commerce à la société La Seine Roof Top, au titre de la clause de réserve de propriété, sur le fondement de l'article L. 624-16 du code de commerce.
Le 19 juillet 2023, par ordonnance, le juge-commissaire a fait droit à la demande de revendication du fonds de commerce par la société Reef Club.
Le 21 juillet 2023, par ordonnance, le juge-commissaire a également rejeté la demande de la société Roof Top tendant à l'autoriser à payer immédiatement la somme de 80 000 euros exigible depuis le 15 janvier 2023 et 160 000 euros suivant l'échéancier convenu dans l'avenant du 1er septembre 2022, à savoir 80 000 euros le 15 janvier 2024 et 80 000 euros le 15 janvier 2025.
Le 31 janvier 2024, par jugement contradictoire, sur un recours dirigé contre les ordonnances des 19 et 21 juillet 2023, le tribunal de commerce de Nanterre a :
- ordonné la jonction des procédures enrôlées sous les références 2023 L 02118 et 2023 L 02120 ;
- in limine litis, s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes formées à titre subsidiaire par la société La Seine Roof Top ;
- rejeté l'irrecevabilité de la demande de revendication formée par la société La Seine Roof Top ;
- confirmé l'ordonnance du 19 juillet 2023 en toutes ses dispositions ;
- rejeté la demande de délais de paiement formée par la société La Seine Roof Top ;
- confirmé l'ordonnance du 21 juillet 2023 en toutes ses dispositions ;
- ordonné la restitution du fonds de commerce sans délai sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du présent jugement si aucun règlement de 240 000 euros n'est intervenu à cette date ;
- s'est réservé la liquidation de l'astreinte et l'a limitée à 3 mois ;
- condamné la société La Seine Roof Top à payer la somme de 3 000 euros à la société Reef Club au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit que l'exécution provisoire est de droit ;
- condamné la société La Seine Roof Top aux dépens de l'instance.
Le 7 février 2024, la société La Seine Roof Top a interjeté appel de ce jugement en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'il a ordonné la jonction des procédures enrôlées sous les références 2023 L 02118 et 2023 L 02120.
Par ailleurs, le 8 février 2024, le tribunal a converti le redressement judiciaire en liquidation judiciaire. La société Roof Top a interjeté appel de ce jugement.
Par dernières conclusions du 6 mai 2024, elle demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel et y faisant droit,
A titre principal,
- juger que le tribunal de commerce de Nanterre a statué ultra petita aux termes de son jugement en date du 31 janvier 2024 ;
- juger que le jugement du 31 janvier 2024 est entaché d'une contradiction de motifs ;
En conséquence,
- prononcer la nullité du jugement du 31 janvier 2024 ;
Par conséquent,
- infirmer l'ordonnance du 19 juillet 2023 en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'elle a dit qu'elle doit payer immédiatement le prix de 240 000 euros pour mettre fin à la revendication et qu'à défaut elle a fait droit à la demande en revendication de la propriété du fonds de commerce qu'elle exploite actuellement formulée par la société Reef Club ;
Dès lors et statuant à nouveau :
A titre principal :
- juger que son fonds de commerce fait l'objet d'un contrat en cours au titre du contrat de cession assorti d'un crédit vendeur en cours, et qu'un bien mobilier objet d'un contrat en cours ne peut faire l'objet d'une revendication ;
En conséquence,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce faisant l'objet d'un contrat en cours ;
A titre subsidiaire :
- juger que la requête en revendication de la société Reef Club porte sur une demande de paiement ferme d'une somme globale de 240 000 euros englobant notamment des sommes non encore exigibles au titre de l'échéancier que lui a octroyé la société Reef Club par le crédit vendeur du contrat de cession du fonds de commerce du 9 janvier, modifié par avenant du 1er septembre 2022 ;
En conséquence,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce ;
A titre encore plus subsidiaire :
- prendre acte des délais de paiements que lui a expressément octroyés la société Reef Club pour le paiement du prix de cession du fonds de commerce au titre de l'avenant du 1er septembre 2022 ;
- dire et juger que l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Reef Club ne peut avoir pour effet d'entrainer la déchéance du terme des échéances du contrat du crédit vendeur du contrat de cession du fonds de commerce, et qu'en conséquence seule l'échéance de 80 000 euros du 15 janvier 2023 est exigible, et que le paiement des échéances du 15 janvier 2024 et du 14 janvier 2025 respectivement chacune de 80 000 euros ne peuvent être exigées par la société Reef Club avant leur terme ;
- prendre acte de sa demande de payer immédiatement la somme de 80 000 euros à la société Reef Club au titre d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de sa procédure collective, correspondant à la seule créance exigible du 15 janvier 2023 aux termes de l'avenant du 1er septembre 2022 du contrat de cession du fonds de commerce ;
En conséquence,
- l'autoriser à payer à la société Reef Club la somme de 80 000 euros au titre d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de sa procédure collective, correspondant à la seule créance exigible du 15 janvier 2023 aux termes de l'avenant du 1er septembre 2022 du contrat de cession du fonds de commerce ;
- et prononcer dès lors l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce, ou à défaut débouter la société Reef Club de sa demande de revendication du fonds de commerce ;
A titre infiniment subsidiaire :
- condamner la société Reef Club à lui payer la somme de 160 000 euros en restitution des acomptes qu'elle lui a payés au titre du prix de cession du fonds de commerce ;
- condamner à titre provisionnel la société Reef Club à lui payer la somme 633 430 euros HT au titre des aménagements qu'elle a payés et qui seront transférés à la société Reef Club dans le cadre de la restitution du fonds de commerce ;
- désigner tel expert judiciaire qu'il plaira au juge commissaire au frais exclusifs de la société Reef Club avec pour mission :
entendre les parties, ainsi que tous sachants ;
se rendre en tous lieux où il le jugera nécessaire ;
examiner sa situation financière ;
évaluer la valeur de son fonds de commerce, objet de la revendication, à la date à laquelle ledit expert judiciaire rendra son rapport, ou à la date de restitution du fonds si celle-ci est antérieure ;
évaluer le montant des aménagements du fonds de commerce, objet de la revendication, qu'elle a réalisés ;
Et d'une manière générale :
- mener contradictoirement ses opérations d'expertise et, dans la mesure où il l'estimerait nécessaire, faire connaître aux parties son avis, oralement ou par écrit, en vue de recueillir leurs dernières observations avant le dépôt de son rapport ;
- l'expert pourra :
se faire assister de tout sapiteur qu'il jugera utile pour mener à bien la mission qu'il lui est confiée ;
obtenir la communication de tous ses documents comptables et factures ainsi que ceux de la société Reef Club, et notamment les grands livres, et toutes pièces utiles à la réalisation de sa mission ;
obtenir toutes données commerciales relatives à l'exploitation du fonds de commerce, objet de la demande de revendication, par elle et par la société Reef Club ;
se faire communiquer par les parties ou les tiers toute pièce utile et plus particulièrement se faire remettre par toutes personnes, tous documents administratifs, comptables, fiscaux et sociaux relatifs aux parties, et les pièces justificatives utiles à l'exercice de sa mission ;
l'expert en référera au juge commis par le tribunal en cas de difficulté dans l'exercice de sa mission ;
- fixer la rémunération de l'expert aux frais exclusifs de la société Reef Club, demandeur à la présente instance ;
- réserver le montant des aménagements du fonds de commerce, objet de la demande de revendication, réalisés par elle, auquel la société Reef Club doit être condamnée à lui payer, et ce après dépôt du rapport de l'expert ;
- réserver le montant de l'accroissement de la valeur du fonds de commerce depuis le 9 janvier 2020, objet de la demande de revendication, réalisés par elle, auquel la société Reef Club doit être condamnée à lui payer, et ce après dépôt du rapport de l'expert ;
A titre subsidiaire :
- infirmer le jugement du 31 janvier 2024 en toutes ses dispositions ;
Par conséquent,
- infirmer l'ordonnance du 19 juillet 2023 en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'elle a dit qu'elle doit payer immédiatement le prix de 240 000 euros pour mettre fin à la revendication et qu'à défaut elle a fait droit à la demande en revendication de la propriété du fonds de commerce qu'elle exploite actuellement formulée par la société Reef Club ;
Dès lors et statuant à nouveau :
A titre principal :
- juger que son fonds de commerce fait l'objet d'un contrat en cours au titre du contrat de cession assorti d'un crédit vendeur en cours, et qu'un bien mobilier objet d'un contrat en cours ne peut faire l'objet d'une revendication ;
En conséquence,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce faisant l'objet d'un contrat en cours ;
A titre subsidiaire :
- juger que la requête en revendication de la société Reef Club porte sur une demande de paiement ferme d'une somme globale de 240 000 euros englobant notamment des sommes non encore exigibles au titre de l'échéancier que lui a octroyé la société Reef Club par le crédit vendeur du contrat de cession du fonds de commerce du 9 janvier, modifié par avenant du 1er septembre 2022 ;
En conséquence,
- prononcer l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce ;
A titre encore plus subsidiaire :
- prendre acte des délais de paiements que lui a expressément octroyé la société Reef Club pour le paiement du prix de cession du fonds de commerce au titre de l'avenant du 1er septembre 2022 ;
- dire et juger que l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Reef Club ne peut avoir pour effet d'entraîner la déchéance du terme des échéances du contrat du crédit vendeur du contrat de cession du fonds de commerce, et qu'en conséquence seule l'échéance de 80 000 euros du 15 janvier 2023 est exigible, et que le paiement des échéances du 15 janvier 2024 et du 14 janvier 2025 respectivement chacune de 80 000 euros ne peuvent être exigées par la société Reef Club avant leur terme ;
- prendre acte de sa demande de payer immédiatement la somme de 80 000 euros à la société Reef Club au titre d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de sa procédure collective, correspondant à la seule créance exigible du 15 janvier 2023 aux termes de l'avenant du 1er septembre 2022 du contrat de cession du fonds de commerce ;
En conséquence,
- l'autoriser à payer à la société Reef Club la somme de 80 000 euros au titre d'une créance antérieure au jugement d'ouverture de sa procédure collective, correspondant à la seule créance exigible du 15 janvier 2023 aux termes de l'avenant du 1er septembre 2022 du contrat de cession du fonds de commerce ;
- et prononcer dès lors l'irrecevabilité de la demande de la société Reef Club en revendication de son fonds de commerce, ou à défaut débouter la société Reef Club de sa demande de revendication du fonds de commerce ;
A titre infiniment subsidiaire :
- condamner la société Reef Club à lui payer la somme de 160 000 euros en restitution des acomptes qu'elle a payés à la société Reef Club au titre du prix de cession du fonds de commerce ;
- condamner à titre provisionnel la société Reef Club lui payer la somme 633 430 euros HT au titre des aménagements qu'elle a payés et qui seront transférés à la société Reef Club dans le cadre de la restitution du fonds de commerce ;
- désigner tel expert judiciaire qu'il plaira au juge commissaire au frais exclusifs de la société Reef Club avec pour mission :
entendre les parties, ainsi que tous sachants ;
se rendre en tous lieux où il le jugera nécessaire ;
examiner sa situation financière ;
évaluer la valeur de son fonds de commerce, objet de la revendication, à la date à laquelle ledit expert judiciaire rendra son rapport, ou à la date de restitution du fonds si celle-ci est antérieure ;
évaluer le montant des aménagements du fonds de commerce, objet de la revendication, réalisés par elle ;
Et d'une manière générale :
- mener contradictoirement ses opérations d'expertise et, dans la mesure où il l'estimerait nécessaire, faire connaître aux parties son avis, oralement ou par écrit, en vue de recueillir leurs dernières observations avant le dépôt de son rapport ;
- l'expert pourra :
se faire assister de tout sapiteur qu'il jugera utile pour mener à bien la mission qu'il lui est confiée ;
obtenir la communication de tous ses documents comptables et factures ainsi que ceux de la société Reef Club, et notamment les grands livres, et toutes pièces utiles à la réalisation de sa mission ;
obtenir toutes données commerciales relatives à l'exploitation du fonds de commerce, objet de la demande de revendication, par elle et par la société Reef Club ;
se faire communiquer par les parties ou les tiers toute pièce utile et plus particulièrement se faire remettre par toutes personnes, tous documents administratifs, comptables, fiscaux et sociaux relatifs aux parties, et les pièces justificatives utiles à l'exercice de sa mission ;
- l'expert en référera au juge commis par le tribunal en cas de difficulté dans l'exercice de sa mission ;
- fixer la rémunération de l'expert aux frais exclusifs de la société Reef Club, demandeur à la présente instance ;
- réserver le montant des aménagements du fonds de commerce, objet de la demande de revendication, réalisés par elle, auquel la société Reef Club doit être condamnée à lui payer, et ce après dépôt du rapport de l'expert ;
- réserver le montant de l'accroissement de la valeur du fonds de commerce depuis le 09 janvier 2020, objet de la demande de revendication, réalisés par elle, auquel la société Reef Club doit être condamnée à lui payer, et ce après dépôt du rapport de l'expert ;
En tout état de cause :
- débouter toutes parties de tous moyens ou prétentions plus amples ou contraires au présent dispositif ;
- condamner la société Reef Club à lui payer 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la société Reef Clut aux entiers dépens de l'instance.
Par dernières conclusions du 25 juin 2024, les sociétés [R] [Y] et El Baze ' [K] demandent à la cour de :
- déclarer la société La Seine Roof Top mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter purement et simplement ;
En conséquence,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 31 janvier 2024, ayant fait droit à la demande de revendication formée par la société Reef Club et débouté la société La Seine Roof Top de sa demande de délai de paiement de la créance antérieure ;
En tout état de cause,
- dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.
Par dernières conclusions du 25 juillet 2024, la société Reef Club demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 31 janvier 2024, notamment en ce qu'il a :
- in limine litis, déclaré incompétent le tribunal pour statuer sur les demandes formées à titre subsidiaire par la société la Seine Roof Top ;
- rejeté l'irrecevabilité de la demande de revendication formée par la société la Seine Roof Top ;
- confirmé l'ordonnance du juge-commissaire en date du 19 juillet 2023 en toutes ses dispositions ;
- rejeté la demande de délais de paiement formée par la société la Seine Roof Top ;
- confirmé l'ordonnance du 21 juillet 2023 en toutes ses dispositions ;
- ordonné la restitution du fonds de commerce sans délai sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du jugement si aucun règlement n'est intervenu à cette date ;
En tout état de cause,
- se déclarer incompétente pour statuer sur les demandes subsidiaires de la société la Seine Roof Top ;
- juger recevable et bien fondée la demande de revendication de la société la Seine Roof Top ;
- ordonner la restitution du fonds de commerce à son profit, au besoin sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification du jugement du 31 janvier 2024 ;
- rejeter les fins de non-recevoir de la société la Seine Roof Top ;
- débouter la Seine Roof Top de l'ensemble de ses moyens, mal fondée fins et conclusions ;
- débouter la société La Seine Roof Top en toutes ses demandes ;
- condamner la société La Seine Roof Top aux entiers dépens de l'instance ;
- condamner la société La Seine Roof Top à lui verser la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 2 juillet 2024, la cour d'appel de Versailles a confirmé le jugement du 7 février 2024 en toutes ses dispositions.
Le 29 novembre 2024, le ministère public a émis un avis tendant à ce que la cour confirme le jugement du 31 janvier 2024.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 21 novembre 2024.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
MOTIFS
sur la nullité du jugement
La société Roof Top sollicite l'annulation du jugement, au motif d'abord que le tribunal a statué ultra petita, en substituant une demande de délais de paiement à celle sollicitant l'autorisation de paiement.
Elle soutient ensuite que le jugement doit être annulé compte tenu d'une contradiction de motifs, en considérant que le tribunal s'est à la fois déclaré incompétent sur la demande tendant à voir condamner à restituer la part du prix de cession qu'elle a reçue et le prix des aménagements opérés, en cas de restitution du fonds de commerce, et l'a condamnée à restituer le fonds de commerce sous astreinte.
En réponse, les sociétés [Y] et El Baze [K] contestent le moyen tiré d'une décision ultra petita, et soutiennent que la société Roof Top a demandé au juge-commissaire de l'autoriser au paiement de la créance antérieure en trois échéances pour faire échec à l'action en revendication, et qu'en formulant une telle prétention, elle a nécessairement formulé concomitamment à la demande de paiement de la créance antérieure une demande de délais de paiement, par application de l'article L. 624-16 du code de commerce.
Elles réfutent toute contradiction de motifs, et exposent que compte tenu des termes de l'article R. 624-13 du code de commerce, à défaut d'acquiescement, ordonner la restitution du fonds de commerce était une compétence attribuée par les règles de la procédure collective au tribunal de commerce de Nanterre consécutivement à la demande de revendication de la société Reef Club et l'appel formé par la société Roof Top ; que ce texte ne donne pas automatiquement compétence au juge-commissaire et au tribunal de la procédure collective pour juger d'autres demandes relatives au contrat de crédit-bail, de sorte que le tribunal pouvait sans se contredire s'estimer incompétent selon les motifs retenus.
La société Reef Club affirme que la société Roof Top a été autorisée à payer la fraction du prix de cession qui lui était due, à titre de créance antérieure, et qu'en ordonnant le paiement intégral du prix de cession, le tribunal a ipso facto rejeté l'application de l'échéancier contractuel, et cette demande d'autorisation à payer selon l'échéancier contractuel s'analyse nécessairement en une demande de délais de paiement déguisée au sens de l'article L. 624-16 du code de commerce.
Réponse de la cour
sur l'ultra petita
L'article 4 du code de procédure civile énonce que « L'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
Ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense. Toutefois l'objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. »
Selon l'article 5 du même code, « Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé. »
L'article L. 624.16 du code de commerce dispose que « (') peuvent également être revendiqués, s'ils se retrouvent en nature au moment de l'ouverture de la procédure, les biens vendus avec une clause de réserve de propriété. Cette clause doit avoir été convenue entre les parties dans un écrit au plus tard au moment de la livraison. Elle peut l'être dans un écrit régissant un ensemble d'opérations commerciales convenues entre les parties.
(')
Dans tous les cas, il n'y a pas lieu à revendication si, sur décision du juge-commissaire, le prix est payé immédiatement. Le juge-commissaire peut également, avec le consentement du créancier requérant, accorder un délai de règlement. Le paiement du prix est alors assimilé à celui des créances mentionnées au I de l'article L. 622-17. »
Devant le tribunal de commerce, la société Roof Top a, à titre principal, conclu à l'irrecevabilité de la demande en revendication par la société Reef Club, au premier motif que le fonds de commerce fait l'objet d'un contrat en cours, puis au second motif que la requête porte sur une demande en paiement ferme d'une somme comprenant des sommes non encore exigibles au titre de l'échéancier octroyé par la société Reef Club. Elle a ensuite sollicité à titre subsidiaire qu'il soit pris acte des délais de paiement octroyés par le créancier Reef Club, de sorte que seule l'échéance de 80 000 euros du 15 janvier 2023 est exigible, et que le paiement des deux échéances du 15 janvier 2024 et du 14 janvier 2025 ne peut être exigé avant leur terme.
En présentant au juge-commissaire une demande tendant à ce qu'il soit pris acte des délais de paiement octroyés par le créancier en trois échéances, pour éviter l'action en revendication initiée par la société Reef Club, la société Roof Top a, par effet de l'article L. 624-16 précité, implicitement mais nécessairement formulé concomitamment à la demande de paiement de la créance antérieure une demande de délais de paiement.
C'est donc à tort que la société La Seine Roof Top prétend que le tribunal de commerce a statué ultra petita alors que sa requête incluait un règlement en trois échéances de la créance antérieure.
sur la contradiction de motifs
L'article R. 624-13 prévoit que « La demande en revendication d'un bien est adressée dans le délai prévu à l'article L. 624-9 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'administrateur s'il en a été désigné ou, à défaut, au débiteur. Le demandeur en adresse une copie au mandataire judiciaire.
A défaut d'acquiescement dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge-commissaire au plus tard dans un délai d'un mois à compter de l'expiration du délai de réponse.
Avant de statuer, le juge-commissaire recueille les observations des parties intéressées.
La demande en revendication emporte de plein droit demande en restitution. »
L'article R. 662-3 du code de commerce dispose que « sans préjudice des pouvoirs attribués en premier ressort au juge-commissaire, le tribunal saisi d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire connaît de tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires, l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, la faillite personnelle ou l'interdiction prévue à l'article L. 653-8, à l'exception des actions en responsabilité civile exercées à l'encontre de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du commissaire à l'exécution du plan ou du liquidateur qui sont de la compétence du tribunal judiciaire. »
Au visa de cette disposition, le tribunal de commerce s'est à juste titre déclaré compétent pour ordonner la restitution du bien compte tenu de la clause de réserve de propriété stipulée au contrat.
Il s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes de la société Roof Top concernant le remboursement de la part du prix de vente déjà versée à la société Reef Club, l'indemnisation des aménagements et travaux effectués sur le fonds et le prétendu droit de rétention sur le fonds pour s'opposer à sa restitution. Ces prétentions, qui concernent l'exécution du contrat, n'entrent pas dans la compétence matérielle du tribunal de la procédure collective, comme l'a justement rappelé le tribunal, en ce qu'elles n'impliquent pas l'application des règles propres au livre VI du code de commerce.
Il ne peut être sérieusement prétendu qu'en se déclarant incompétent pour trancher les autres points en litige concernant l'exécution des obligations nées du contrat litigieux entre les parties, le tribunal se serait contredit dans ses motifs.
La demande d'annulation du jugement, motif pris d'une contradiction de motifs sera rejetée.
sur l'irrecevabilité de la demande de revendication
L'appelante fait valoir que le contrat de cession assorti d'un crédit-vendeur en cours, dont l'échéancier est en cours, doit s'analyser dans le cadre d'une procédure collective, comme un contrat en cours. Elle en déduit l'irrecevabilité de la demande de revendication formulée par la société Reef Club.
La société Reef Club répond que la demande a été présentée conformément aux dispositions des articles L. 624-9 et R. 624-13 du code de commerce, que le respect des modalités n'est pas contesté, et qu'en conséquence, la requête a été à juste titre déclarée recevable. Elle ajoute qu'il ne s'agit pas d'un contrat en cours, que l'acte de cession ne peut être assimilé à une vente à terme, le crédit-vendeur n'étant qu'une modalité de paiement du prix, sans différer le transfert de propriété, que seule la clause de réserve de propriété organise à titre de sûreté.
La société [Y], ès qualités, conclut également à la recevabilité de la demande.
Réponse de la cour
L'article L. 624-9 du code de commerce dispose que « la revendication des meubles ne peut être exercée que dans le délai de trois mois suivant la publication du jugement ouvrant la procédure. »
Selon l'article R. 624-13 du même code, « la demande en revendication d'un bien est adressée dans le délai prévu à l'article L. 624-9 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'administrateur s'il en a été désigné ou, à défaut, au débiteur. Le demandeur en adresse une copie au mandataire judiciaire.
A défaut d'acquiescement dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande, le demandeur doit, sous peine de forclusion, saisir le juge-commissaire au plus tard dans un délai d'un mois à compter de l'expiration du délai de réponse.
Avant de statuer, le juge-commissaire recueille les observations des parties intéressées.
La demande en revendication emporte de plein droit demande en restitution. »
Un contrat de vente de biens mobiliers dont la propriété est réservée et dont le prix n'est pas payé lors de l'ouverture de la procédure collective de l'acquéreur n'est pas un contrat en cours (Com. 5 mai 2004, n° 01-17.201 et 01-17.590).
Contrairement à ce que soutient la société appelante, c'est à raison que le tribunal de commerce a dit que le contrat litigieux n'était pas un contrat en cours. En effet, la vente du fonds de commerce est intervenue définitivement avant l'ouverture de la procédure collective, seul le transfert de propriété étant différé au paiement intégral du prix de cession, du fait d'une clause de réserve de propriété.
Il ne peut être raisonnablement soutenu qu'il s'agit d'un contrat à exécution successive du fait du paiement du prix échelonné.
La requête, dont il n'est pas discuté qu'elle a été présentée conformément aux dispositions précitées, a été jugée à juste titre recevable par le tribunal de commerce.
sur le bien-fondé de la demande de revendication
La société Roof Top affirme que le contrat de cession assorti d'un crédit vendeur en cours est un contrat en cours au jour de l'ouverture de la procédure collective, de sorte qu'en application de l'article L. 622-13 du code de commerce, il ne peut être résilié à la faveur de l'ouverture de la procédure collective ou en raison de l'existence de créances antérieures impayées.
La société Reef Club s'oppose à l'argument selon lequel il s'agirait d'un contrat en cours à la date du jugement d'ouverture. Elle rappelle les termes de l'ordonnance du juge-commissaire qui a notamment rappelé que seul le paiement du prix peut faire échec à la revendication et qu'il n'est pas établi que la société Reef Club avait donné son accord pour l'octroi de délais de paiement.
La société [Y] soutient également que la requête en revendication est bien fondée.
Réponse de la cour
L'article 2367 du code civil dispose que « La propriété d'un bien peut être retenue en garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété qui suspend l'effet translatif d'un contrat jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en constitue la contrepartie.
La propriété ainsi réservée est l'accessoire de la créance dont elle garantit le paiement. »
Comme il a été dit plus haut, le contrat querellé n'est pas un contrat en cours à la date d'ouverture de la procédure collective.
La propriété du fonds de commerce ne pouvait être transférée à la société appelante qu'au complet paiement du prix.
Conformément à l'article L. 624-16 précité du code de commerce, c'est seulement dans l'hypothèse où le créancier a donné son accord pour des délais de paiement, qu'il n'y a pas lieu à revendication. Or, comme l'a relevé le tribunal, un tel accord n'est pas établi, de sorte que l'action en revendication est fondée.
Le tribunal a justement jugé que l'action en revendication et en restitution de la propriété subséquente du fonds de commerce exploité par la société Roof Top est fondée.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Il sera également confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de délais de paiement présentée par la société Roof Top, laquelle avait sollicité du juge-commissaire qu'il autorise le paiement de la créance antérieure en trois échéances.
Par ailleurs, le jugement est confirmé en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes subsidiaires relatives à l'exécution des obligations contractuelles. Comme rappelé ci-dessus, ces prétentions, qui concernent l'exécution du contrat, n'entrent pas dans la compétence matérielle du tribunal de la procédure collective, comme l'a justement rappelé le tribunal, en ce qu'elles n'impliquent pas l'application des règles propres au livre VI du code de commerce.
Il sera rappelé de surcroît que le 2 juillet 2024, la cour d'appel de Versailles a confirmé le jugement du 7 février 2024 qui a ordonné la liquidation judiciaire de la société Roof Top.
Sur les demandes accessoires
Compte tenu de l'issue du litige, les dispositions du jugement statuant sur les dépens et la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile doivent être confirmées.
La société Roof Top sera condamnée à payer à la société Reef Club la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité de procédure.
Les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure.
Par ces motifs,
la cour, statuant par arrêt contradictoire,
Rejette la demande d'annulation du jugement entrepris,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société Roof Top à payer à la société Reef Club la somme de 2 000 euros à titre d'indemnité de procédure,
Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure,
Rejette le surplus des demandes.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT